Résolution du Parlement européen du 16 janvier 2020 sur le Burundi, notamment la liberté d’expression (2020/2502(RSP))
Le Parlement européen,
– vu ses résolutions antérieures sur le Burundi, en particulier celles du 9 juillet 2015(1), du 17 décembre 2015(2), du 19 janvier 2017(3), du 6 juillet 2017(4) et du 5 juillet 2018(5),
– vu la décision de la Commission du 30 octobre 2019 relative au financement du programme d’action annuel 2019 en faveur de la République du Burundi,
– vu la déclaration de la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR), relative à l’alignement de certains pays tiers sur la décision concernant des mesures restrictives en raison de la situation au Burundi, du 29 novembre 2019,
– vu les rapports du secrétaire général des Nations unies du 23 février 2017, du 25 janvier 2018 et du 24 octobre 2019 sur la situation au Burundi,
– vu le rapport de la commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme des Nations unies sur le Burundi, publié en septembre 2019,
– vu la lettre du 9 décembre 2019 signée par 39 députés européens demandant la libération des journalistes du média d’information burundais Iwacu,
– vu la déclaration du vice-président/haut représentant du 10 décembre 2019, au nom de l’Union européenne, sur la journée des droits de l’homme,
– vu les résolutions 2248 et 2303 du Conseil de sécurité des Nations unies sur la situation au Burundi en date des 12 novembre 2015 et 29 juillet 2016,
– vu le rapport de la commission d’enquête des Nations unies sur le Burundi présenté au Conseil des droits de l’homme des Nations unies le 15 juin 2017,
– vu la déclaration à la presse du Conseil de sécurité des Nations unies du 13 mars 2017 sur la situation au Burundi,
– vu le rapport de l’enquête indépendante des Nations unies sur le Burundi (EINUB), publié le 20 septembre 2016,
– vu l’accord d’Arusha du 28 août 2000 pour la paix et la réconciliation au Burundi,
– vu la déclaration sur le Burundi adoptée le 13 juin 2015 lors du sommet de l’Union africaine,
– vu la résolution 36/19 du Conseil de sécurité des Nations unies du 29 septembre 2017, qui proroge le mandat de la commission d’enquête sur le Burundi,
– vu le règlement (UE) 2015/1755 du Conseil du 1er octobre 2015(6), ainsi que les décisions (PESC) 2015/1763 du 1er octobre 2015(7), (PESC) 2016/1745 du 29 septembre 2016(8) et (PESC) 2019/1788 du 24 octobre 2019(9) du Conseil, concernant des mesures restrictives en raison de la situation au Burundi,
– vu la déclaration du 8 mai 2018 de la VP/HR au nom de l’Union européenne sur la situation au Burundi en amont du référendum constitutionnel,
– vu l’accord de partenariat entre les membres du groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part, signé à Cotonou le 23 juin 2000 (accord de Cotonou),
– vu la charte africaine des droits de l’homme et des peuples, adoptée le 27 juin 1981 et entrée en vigueur le 21 octobre 1986, que le Burundi a ratifiée,
– vu la décision (UE) 2016/394 du Conseil du 14 mars 2016 relative à la conclusion de la procédure de consultation avec la République du Burundi au titre de l’article 96 de l’accord de partenariat entre les membres du groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part(10),
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme,
– vu la section du Rapport mondial 2019 de Human Rights Watch concernant le Burundi,
– vu le classement mondial 2019 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières,
– vu l’article 144, paragraphe 5, et l’article 132, paragraphe 4, de son règlement intérieur,
A. considérant que les élections présidentielles de 2015 au Burundi ont débouché sur une situation insurrectionnelle qui, selon la mission d’observation électorale des Nations unies au Burundi, s’est caractérisée par une violation grave des conditions essentielles à l’exercice effectif du droit de vote, et qu’elles ont été boycottées par l’opposition;
B. considérant que certaines stations de radio indépendantes restent fermées, que des dizaines de journalistes ne peuvent toujours pas rentrer de l’exil qu’ils se sont imposé et que ceux qui sont restés ont des difficultés à travailler librement, souvent en raison du harcèlement des forces de sécurité, encouragé par le discours officiel qui associe les médias neutres aux ennemis de la nation;
C. considérant que la situation au Burundi reste préoccupante, de nombreux rapports faisant état de violations des droits civils fondamentaux et des libertés politiques fondamentales, tandis que la hausse des prix a une incidence négative sur les droits économiques et socioculturels, tels que le droit à un niveau de vie suffisant, le droit à l’éducation, le droit à une alimentation adéquate et le droit de ne pas souffrir de la faim, les droits des femmes, le droit au travail et les droits syndicaux;
D. considérant que l’impasse dans laquelle se trouve la recherche d’une solution politique par le dialogue inter-burundais menace sérieusement la tenue des élections prévues pour mai 2020; que ces élections pourraient encore aggraver le glissement du Burundi vers un système autoritaire en l’absence de dialogue politique constructif; que l’incertitude persiste quant à la participation de toutes les parties intéressées à ce processus, compte tenu du rétrécissement de l’espace politique et de l’absence d’un environnement propice à des élections pacifiques, transparentes et crédibles;
E. considérant que, dans son rapport du 4 septembre 2019, la commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme des Nations unies sur le Burundi (COIB) a souligné que, dans l’attente des élections présidentielles et législatives de 2020, les opposants au parti au pouvoir, le CNDD-FDDD, vivent dans la peur et subissent des intimidations, et que les autorités locales et les membres de la tristement célèbre section jeunesse du parti au pouvoir, l’Imbonerakure, continuent de se livrer à des violences à motivation politique et à de graves violations des droits de l’homme dans un contexte de tension sans cesse croissante à l’approche des élections de mai 2020; que le gouvernement burundais refuse de coopérer avec la COIB, malgré des demandes répétées de sa part;
F. considérant que le bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme au Burundi, qui coopérait avec le gouvernement burundais à la consolidation de la paix et à la réforme des secteurs de la sécurité et de la justice et qui contribuait à renforcer les capacités institutionnelles et de la société civile en matière de droits de l’homme, a été fermé en mars 2019 à l’instance du gouvernement burundais, et que ce dernier avait déjà suspendu toute forme de coopération avec ce bureau en octobre 2016;
G. considérant que la Banque mondiale a estimé la croissance économique du Burundi à 1,8 % en 2019, contre 1,7 % en 2018; que le budget général de l’État pour 2019-2020 présente un déficit de 189,3 milliards de BIF (14,26 %) et que, pour la même période en 2018-2019, le déficit s’élevait à 163,5 milliards de BIF; que, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), 369 517 réfugiés burundais se trouvaient dans des pays voisins au 30 septembre 2019; qu’au total, 78 000 réfugiés sont retournés volontairement au Burundi depuis septembre 2017; que 130 562 Burundais ont été déplacés à l’intérieur du pays depuis le 28 février 2019;
H. considérant que le Burundi se classe au 159e rang sur les 180 que compte le classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières dans son rapport 2019; que la liberté d’expression et la liberté de parole sont essentielles pour garantir la tenue d’élections libres et éclairées; que le journalisme libre, indépendant et impartial est une extension du droit fondamental à la liberté d’expression; que les médias traditionnels contrôlés par l’État, tels que la radio et la presse, restent des sources d’information dominantes; qu’une meilleure éducation aux médias et un meilleur accès à l’internet et aux médias sociaux sont nécessaires pour rendre l’information accessible et renforcer la stabilité et le dialogue social et politique, et garantir ainsi la tenue d’élections libres, éclairées et justes;
I. considérant que le Burundi est l’un des pays les plus pauvres de la planète, que 74,7 % de sa population vit dans la pauvreté, et qu’il se classe 185e sur 189 dans l’indice de développement humain; que plus de 50 % de la population du Burundi est confrontée à une insécurité alimentaire chronique, que près de la moitié de la population est âgée de moins de quinze ans et qu’au cours de la seule année 2019, plus de huit millions de personnes ont contracté la malaria, parmi lesquelles 3 000 personnes ont succombé à la maladie; que la pauvreté, la médiocrité des services sociaux, le taux élevé de chômage des jeunes et l’absence de possibilités restent source de violence dans le pays;
J. considérant que le 27 septembre 2018, le Conseil national de sécurité du Burundi a annoncé la suspension pendant trois mois d’organisations internationales non gouvernementales, ce qui a considérablement entravé les opérations de près de 130 ONG internationales, parmi lesquelles certaines fournissaient une aide vitale;
K. considérant que, le 18 juillet 2019, le gouvernement a adopté deux décrets portant création d’un comité interministériel de suivi et d’évaluation des ONG internationales opérant au Burundi;
L. considérant que le gouvernent a refusé de reconnaître toute violation des droits de l’homme depuis la fermeture, le 28 février 2019, du bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) au Burundi, et qu’il se refuse à tout engagement en faveur du maintien d’une coopération avec celui-ci, sous quelque forme que ce soit; que la COIB est actuellement le seul mécanisme international indépendant d’enquête sur les violations des droits de l’homme et les abus commis au Burundi;
M. considérant que les autorités du Burundi ont continué à rejeter, dans leur intégralité et de manière systématique, les travaux menés par la commission d’enquête des Nations unies sur le Burundi, et qu’elles lui ont interdit l’accès au pays, dénonçant son parti pris politique, sans toutefois avancer de preuves à l’appui de leurs accusations;
N. considérant qu’en octobre 2017, le Burundi s’est retiré du statut de Rome instituant la Cour pénale internationale; que, malgré les appels de la communauté internationale en faveur du lancement d’une nouvelle procédure d’adhésion au statut de Rome, aucune action n’a été entreprise par le gouvernement burundais;
O. considérant que la Tanzanie et le Burundi ont signé en 2019 un accord prévoyant le retour dans leur pays d’origine, volontaire ou forcé, des 180 000 réfugiés burundais en Tanzanie d’ici le 31 décembre 2019; qu’en août 2019, le HCDH a signalé que les conditions au Burundi n’étaient pas favorables à la promotion des rapatriements, étant donné que les personnes rapatriées figuraient parmi les principales cibles des violations des droits de l’homme;
P. considérant que, le 30 décembre 2019, le procureur général du Burundi a réclamé que soient condamnés à une peine d’emprisonnement de quinze ans quatre journalistes du groupe de presse Iwacu, Christine Kamikazi, Agnès Ndirubua, Térence Mpozenzi, Egide Harrimana, ainsi que leur chauffeur Adolphe Masabarakiza, lesquels ont été arrêtés le 22 octobre 2019 dans la commune de Musigati dans la province de Bubanza, alors qu’ils couvraient des affrontements entre des rebelles et des forces gouvernementales dans le nord-ouest du Burundi, et accusés de complicité d’atteinte à la sécurité intérieure de l’État;
Q. considérant que Jean Biirimana, journaliste du groupe Iwacu, est porté disparu depuis le 22 juillet 2016 et aurait été vu pour la dernière fois aux mains de membres du Service national de renseignement, le SNR, à Muramvya, située à 45 km à l’est de la capitale Bujumbura; que les autorités burundaises n’ont jamais évoqué sa disparition;
R. considérant que le 13 octobre 2015, le journaliste Christophe Nkezabahizi, sa femme et ses deux enfants ont été assassinés dans leur maison à Bujumbura; qu’aucun effort réel n’a été consenti par les autorités pour enquêter sur ce crime et attraire les auteurs en justice;
S. considérant que l’article 31 de la Constitution du Burundi garantit la liberté d’expression, y compris la liberté de la presse; que le Burundi est également partie à la charte africaine des droits de l’homme et des peuples, qui garantit à tous les Burundais le droit de recevoir et de diffuser des informations; qu’il incombe au gouvernement du Burundi de promouvoir et de protéger les droits à la liberté d’expression et d’association inscrits dans le pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel le Burundi est partie;
T. considérant que l’espace offert à la société civile et aux médias s’est considérablement réduit au cours des dernières années, et que de nombreux militants issus de la société civile et journalistes indépendants restent en exil; que nombre de ceux qui sont restés au Burundi font face à des intimidations, à des détentions ou à des procès fondés sur des allégations mensongères;
U. considérant que le gouvernement et les membres des Imbonerakure, mouvement de jeunesse affilié au parti au pouvoir, ont orchestré une campagne nationale destinée à recueillir les dons «volontaires» de la population en vue de contribuer au financement des élections de 2020; que le rapport de Human Rights Watch du 6 décembre 2019 a établi que des membres des Imbonerakure et des représentants locaux du gouvernement recouraient souvent, à cette fin, à la violence et à l’intimidation, entravaient les déplacements et l’accès aux services publics, et battaient ceux qui refusaient d’obtempérer;
V. considérant que Germain Rukuki, militant des droits de l’homme, membre de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT), a été condamné en avril 2019 à 32 ans d’emprisonnement pour rébellion et atteinte à la sûreté de l’État, participation à un mouvement insurrectionnel et attaques contre le chef d’État; qu’en août 2018, l’activiste Nestor Nibitanga, observateur au sein de l’Association burundaise pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH), a été condamné à cinq ans d’emprisonnement pour atteinte à la sûreté de l’État;
W. considérant que les diffusions de la BBC et de «Voice of America» (VOA) sont interdites au Burundi depuis que les licences de ces chaînes ont été suspendues en mai 2019, initialement pour une durée de six mois, comme l’avait alors déclaré le comité pour la protection des journalistes; que le 29 mars 2019, l’autorité de régulation des médias du Burundi, le conseil national de la communication burundais (CNC), a annoncé avoir retiré la licence d’exploitation de la BBC et reconduit la suspension de la VOA; que le CNC a également interdit à tout journaliste burundais «de fournir directement ou indirectement des informations pouvant être diffusées» par la BBC ou la VOA;
X. considérant que le 24 octobre 2019, le Conseil a reconduit jusqu’au 24 octobre 2020 les mesures de restriction de l’Union prises à l’encontre du Burundi;
Y. que ces mesures consistent en une interdiction de pénétrer sur le territoire de l’Union européenne et en un gel des avoirs qui concernent quatre personnes dont les activités ont été considérées comme compromettant la démocratie ou faisant obstacle à la recherche d’une solution politique à la crise burundaise;
Z. que les initiatives prises par la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) pour trouver une solution de médiation à la crise politique déclenchée par la décision du président de 2015 de briguer un troisième mandat piétinent; que le président, Pierre Nkurunziza, a affirmé à plusieurs reprises qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat, mais que le parti au pouvoir doit encore désigner son candidat aux prochaines élections présidentielles;
1. condamne fermement les restrictions actuelles à la liberté d’expression au Burundi, y compris les restrictions plus larges aux libertés publiques, ainsi que les violations des droits de l’homme à grande échelle, les intimidations et arrestations arbitraires de journalistes et les interdictions de diffusion qui ont accentué le climat de peur parmi les médias burundais, renforcé les entraves à l’information et empêché une couverture médiatique adéquate, notamment dans la perspective des élections de 2020;
2. demeure profondément préoccupé par la situation des droits de l’homme au Burundi, qui compromet toute initiative en faveur de la réconciliation, de la paix et de la justice, et en particulier par la persistance des arrestations arbitraires et des exécutions extrajudiciaires;
3. condamne vivement la détérioration continue de la situation des droits de l’homme dans le pays, notamment à l’égard des partisans réels ou supposés de l’opposition, et notamment des Burundais de retour de l’étranger; rappelle que le Burundi est lié par la clause relative aux droits de l’homme de l’accord de Cotonou; exhorte les autorités burundaises à renverser immédiatement la tendance actuelle qui conduit à des violations et à respecter les obligations du pays en matière de droits de l’homme, y compris celles consacrées par la charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le PIDCP et les autres instruments internationaux ratifiés par le gouvernement;
4. rappelle au gouvernement burundais que les conditions pour que des élections ouvertes à tous, crédibles, pacifiques et transparentes puissent avoir lieu résident dans le droit à la liberté d’expression, l’accès à l’information et l’existence d’un espace libre dans lequel les défenseurs des droits de l’homme puissent s’exprimer sans intimidation ni peur de représailles; exhorte par conséquent les autorités burundaises à lever les mesures qui limitent ou entravent le travail de la société civile et limitent l’accès aux médias indépendants et modernes ainsi que leur liberté;
5. invite les autorités burundaises à abandonner les charges retenues contre les journalistes d’Iwacu récemment emprisonnés et toutes les autres personnes arrêtées pour avoir exercé leurs droits fondamentaux ainsi qu’à procéder à leur libération immédiate et inconditionnelle;
6. souligne le rôle essentiel joué par la société civile et les journalistes dans une société démocratique, notamment dans le cadre des élections prochaines, et invite les autorités burundaises à mettre fin aux intimidations, au harcèlement et à l’arrestation arbitraire de journalistes, de militants des droits de l’homme et de membres de l’opposition; invite également les autorités à permettre aux militants des droits de l’homme et aux journalistes d’exercer en toute liberté leur mission légitime d’investigation et de signalement des violations des droits de l’homme;
7. relève avec une vive inquiétude le nombre de plus en plus important de personnes déplacées à l’intérieur du pays qui sont originaires du Burundi et des pays voisins; invite l’Union européenne à renforcer l'aide financière et les autres actions d'aide humanitaire en faveur des Burundais déplacés à l’intérieur du pays ou réfugiés;
8. invite les autorités burundaises à mettre fin aux exactions dont sont victimes les citoyens et à veiller à ce que personne ne soit empêché d'avoir accès aux biens et aux services publics tels que les soins de santé, l’alimentation, l’eau ou l’enseignement, ainsi qu’à permettre aux acteurs humanitaires d’intervenir en toute indépendance et d'apporter leur aide en vertu de l’obligation de répondre aux besoins les plus urgents;
9. souligne que pour que les élections soient crédibles, il est indispensable que la situation politique et en matière de droits de l’homme s'améliore considérablement, notamment en ce qui concerne les libertés fondamentales telles que la liberté d’expression, la liberté de la presse ou la liberté d'association et de réunion, et que des progrès aient lieu sur la voie de la réconciliation; demande au gouvernement burundais de veiller à ce que les violations de ces droits fassent l’objet d’enquêtes impartiales et que leurs auteurs soient poursuivis dans le cadre de procès conformes aux normes internationales;
10. demande instamment aux autorités de procéder à des enquêtes approfondies et transparentes en vue de traduire en justice, dans le cadre de procès justes et crédibles, tous les auteurs présumés de meurtres, de disparitions, d'exactions, de passages à tabac, d'arrestations arbitraires, de menaces, de harcèlement ou d'autres formes d'abus; se dit vivement préoccupé par l’impunité dont continuent de jouir les auteurs des violations des droits de l’homme commises par les Imbonerakure; prie instamment les autorités burundaises de lancer une enquête indépendante sur la disparition des journalistes Jean Bigirimana, porté disparu depuis le 22 juillet 2016, et Christophe Nkezabahizi, assassiné avec sa femme et ses deux enfants le 13 octobre 2015;
11. salue le rôle essentiel des acteurs de la région, à savoir la CAE et l’Union africaine, pour trouver une solution durable à la crise politique au Burundi et souligne qu’il faut une approche plus active et davantage d’efforts pour mettre fin à la crise et protéger la population burundaise de façon à éviter une nouvelle escalade régionale; invite l’Union africaine à déployer d’urgence ses observateurs des droits de l’homme au Burundi et à veiller à ce qu’ils puissent se déplacer sans entraves dans tout le pays afin de mener à bien leur mission;
12. déplore l’impasse dans laquelle se trouve l’application de l’accord d’Arusha et demande instamment à ses garants de s’efforcer de parvenir à la réconciliation; se dit déterminé à favoriser le dialogue inter-burundais; invite le VP/HR à soutenir la CAE en vue de faciliter le dialogue inter-burundais; prie instamment tous les participants au dialogue inter-burundais de coopérer de manière constructive et de permettre la libre participation de l’opposition, des défenseurs des droits de l’homme et des organisations de la société civile;
13. prie instamment le Burundi de revenir à l’ordre du jour des réunions de la communauté régionale et internationale pour s'accorder sur un compromis en vue de la mise en œuvre des décisions prises au niveau des Nations unies et de l’Union africaine, à savoir l’application de la résolution 2303, la signature du protocole d'accord avec les observateurs de l’Union africaine et la reprise de la coopération avec le HCDC;
14. déplore que le Burundi persiste à refuser de coopérer avec la commission d’enquête des Nations unies et de consentir à la reprise des activités du bureau local du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme;
15. invite les Nations unies à poursuivre les enquêtes impartiales sur toutes les violations présumées des droits de l’homme et du droit humanitaire, y compris celles commises par des agents de l’État et la ligue des jeunes Imbonerakure, ainsi qu’à engager les poursuites voulues à l’encontre de leurs auteurs; souligne que les criminels et les meurtriers doivent être traduits en justice, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent, et que les victimes et les survivants des graves violations des droits de l’homme au Burundi doivent bénéficier de voies de recours adéquates;
16. prie instamment les États membres de l’Union européenne d’apporter une aide financière directe et flexible aux organisations de la société civile et aux organisations de médias, y compris les organisations de femmes, qui travaillent toujours sur le terrain, mais aussi aux personnes en exil, et notamment à celles qui œuvrent à la promotion et à la protection des droits politiques, civils, économiques et sociaux et des droits des médias;
17. invite les diplomates de l’Union européenne et des États membres de l’Union européenne au Burundi à assurer l'application intégrale des orientations de l’UE concernant les défenseurs des droits de l’homme, notamment en assistant aux audiences, devant les tribunaux, de l’ensemble des journalistes, des prisonniers politiques et des défenseurs des droits de l’homme au Burundi, et en particulier des journalistes d’Iwacu, ainsi qu’en rendant visite aux défenseurs des droits de l’homme, aux activistes et aux journalistes qui se trouvent en prison;
18. demande l’élargissement des sanctions ciblées de l’Union européenne et prie instamment le Conseil de sécurité des Nations unies d’imposer ses propres sanctions ciblées, notamment l’interdiction de voyager et le gel des avoirs, à l’encontre des personnes responsables de la poursuite des graves violations des droits de l’homme au Burundi; invite le VP/HR à préparer d’urgence une liste élargie de noms de responsables de la planification, de l’organisation et de l’exécution des violations des droits de l’homme afin de l’ajouter à la liste des dirigeants burundais faisant déjà l’objet de sanctions de l’Union européenne;
19. regrette vivement que rien n’ait été fait par le Burundi pour accéder à nouveau au Statut de Rome; prie instamment le gouvernement burundais d’engager immédiatement cette procédure; invite l’Union européenne à soutenir toute action de la Cour pénale internationale visant à enquêter sur les crimes commis au Burundi et à traduire leurs auteurs en justice;
20. déplore que la crise des réfugiés au Burundi manque constamment de financement, ce qui a de graves répercussions sur la sécurité et le bien-être des réfugiés; invite la communauté internationale et les organismes humanitaires à accroître leur aide à toutes celles et tous ceux qui sont actuellement réfugiés ou déplacés du fait du conflit; demande instamment à l’Union européenne et à ses États membres, comme l'a recommandé la commission d’enquête des Nations unies sur le Burundi, d'accorder le statut de réfugié aux demandeurs d'asile originaires du Burundi et de suivre de près la situation dans le pays en vue des élections de 2020;
21. se dit vivement préoccupé par les pressions de plus en plus importantes qui seraient exercées sur les réfugiés burundais pour qu’ils rentrent au pays en vue des élections de 2020; invite les gouvernements de la région à veiller à ce que le retour des réfugiés ait lieu de manière volontaire, se fonde sur des décisions prises en connaissance de cause et s’effectue en toute sécurité et dans la dignité; rappelle que le HCR estime que les conditions d’un retour sûr, digne et volontaire ne sont pas réunies;
22. invite le gouvernement burundais à permettre aux opposants politiques en exil de rentrer au pays et de faire librement campagne sans être intimidés, arrêtés ou victimes de violences ainsi qu’à permettre aux observateurs étrangers d’observer la préparation du scrutin ainsi que le vote et le dépouillement;
23. rappelle qu’un dialogue politique ouvert à tous, dans le cadre d’une médiation internationale et dans le respect de l’accord d’Arusha et de la Constitution du Burundi, continue d’être le seul moyen d'assurer une paix durable au Burundi; invite par conséquent la CAE, principal artisan du dialogue inter-burundais, à prendre les mesures voulues pour engager résolument et sans délai le gouvernement burundais à participer à un dialogue ouvert en vue d’une solution pacifique durable à la crise actuelle;
24. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au président de la République du Burundi, au président du parlement burundais, à l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE ainsi qu’à l’Union africaine et à ses institutions.