Résolution du Parlement européen du 17 décembre 2020 sur le cadre financier pluriannuel 2021-2027, l’accord interinstitutionnel, l’instrument de l’Union européenne pour la relance et le règlement relatif à l’état de droit (2020/2923(RSP)
Le Parlement européen,
– vu les articles 2, 14, 15, 16 et 17 du traité sur l’Union européenne (traité UE) et les articles 295, 310, 311, 312 et 322 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE),
– vu l’accord politique intervenu le 5 novembre 2020 sur le règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union (ci-après le «règlement relatif à l’état de droit»),
– vu les accords politiques, y compris les déclarations communes et unilatérales, conclus le 10 novembre 2020 sur le cadre financier pluriannuel 2021-2027 (ci-après le «CFP»), l’accord interinstitutionnel entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission sur la discipline budgétaire, la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière, ainsi que sur de nouvelles ressources propres, comportant une feuille de route en vue de la mise en place de nouvelles ressources propres (ci-après l’«accord interinstitutionnel») et l’instrument de l’Union européenne pour la relance (ci-après l’«instrument de relance»),
– vu les conclusions du Conseil européen adoptées le 21 juillet 2020,
– vu sa résolution du 23 juillet 2020,
– vu la lettre du 26 août 2020 du Parlement européen sur l’état de droit adressée par les chefs de groupe à Mme Angela Merkel, chancelière de la République fédérale d’Allemagne et présidente du Conseil de l’Union européenne, et à Mme Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne,
– vu la déclaration du Parlement européen du 18 novembre 2020 sur le budget à long terme de l’Union et l’état de droit,
– vu les conclusions du Conseil européen adoptées le 11 décembre 2020,
– vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,
A. considérant que l’Union européenne est une union de valeurs, consacrées à l’article 2 du traité UE;
B. considérant que l’épidémie de COVID-19 a coûté la vie à des milliers de personnes en Europe et qu’elle a déclenché une crise sans précédent, qui a eu des conséquences désastreuses pour les individus, les travailleurs et les entreprises, et qui exige dès lors une réponse inédite, en particulier après la deuxième vague de COVID-19 et jusqu’à ce que la pandémie soit effectivement éradiquée;
C. considérant que le débat politique au sein du Conseil européen a retardé l’ensemble du processus, et donc les négociations, l’adoption et la mise en œuvre du CFP, de l’accord interinstitutionnel, de l’instrument de relance et du règlement relatif à l’état de droit;
D. considérant qu’un règlement efficace relatif à l’état de droit et l’introduction de nouvelles ressources propres étaient une condition préalable à l’approbation par le Parlement européen du paquet législatif relatif au CFP;
E. considérant que les colégislateurs de l’Union ont pu conclure des accords sans précédent en 2020;
1. salue les accords politiques, y compris les déclarations communes et unilatérales, conclus par les colégislateurs le 5 novembre 2020, sur le règlement relatif à l’état de droit, et le 10 novembre 2020, sur le CFP, l’accord interinstitutionnel et l’instrument de relance; souligne que ces accords politiques historiques comprennent, entre autres, les dispositions suivantes:
–
une enveloppe inédite de 1 800 milliards d’euros, comprenant le CFP 2021-2027 (1 074 milliards d’euros dans un premier temps puis, progressivement, jusqu’à 1 085 milliards d’euros) et l’instrument de relance (750 milliards d’euros);
–
un complément de 16 milliards d’euros au CFP 2021-2027 pour les programmes phares de l’UE identifiés par le Parlement européen (programme «L’UE pour la santé», Horizon Europe, Erasmus+, Fonds pour la gestion intégrée des frontières, Frontex, InvestEU, Droits & Valeurs, Europe créative, aide humanitaire et IVDCI) et le renforcement de la réponse budgétaire aux imprévus;
–
une feuille de route juridiquement contraignante pour l’introduction de nouvelles ressources propres au cours du prochain CFP, qui devrait être au moins suffisante pour couvrir les futurs coûts de remboursement (principal et intérêts) de l’instrument de relance;
–
une part minimale juridiquement contraignante d’au moins 30 % du CFP et de l’instrument de relance pour les dépenses liées au climat et de 7,5 % (en 2024) et 10 % (à partir de 2026) du CFP pour les dépenses liées à la biodiversité;
–
des éléments permettant de contrôler les dépenses consacrées à l’égalité des sexes et l’intégration de la dimension de genre;
–
un renforcement du rôle du Parlement européen en tant qu’autorité budgétaire dans la gestion de l’instrument de relance et des recettes affectées externes, ainsi que dans l’établissement de futurs instruments d’urgence fondés sur l’article 122 du traité FUE;
–
une conditionnalité fonctionnelle liée à l’état de droit;
2. rappelle l’importance historique du paquet et son potentiel pour assurer un redressement rapide après la pandémie de COVID-19, surmonter ses effets socio-économiques et répondre aux enjeux auxquels l’Union sera confrontée au cours des sept prochaines années, notamment ceux liés au pacte vert, à la transition numérique et à la protection de ses valeurs et de l’argent des contribuables européens;
3. se félicite des résultats du Conseil européen des 10 et 11 décembre 2020 approuvant les accords politiques susmentionnés; se réjouit que les chefs d’État et de gouvernement soient parvenus à un accord permettant l’entrée en vigueur du CFP, de l’accord interinstitutionnel, de l’instrument de relance et du règlement relatif à l’état de droit le 1er janvier 2021; se félicite que les textes juridiques restent inchangés;
4. regrette vivement, cependant, qu’en raison de la règle de l’unanimité au Conseil, l’adoption de l’ensemble du paquet, y compris des nouveaux programmes de l’UE pour la période 2021-2027, entraîne des retards injustifiés dans tout le processus; rappelle que le contenu des conclusions du Conseil européen sur le règlement relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union est superflu; rappelle que l’applicabilité, l’objet et le champ d’application du règlement relatif à l’état de droit sont clairement définis dans le texte légal dudit règlement;
5. rappelle que, conformément à l’article 15, paragraphe 1, du traité UE, le Conseil européen n’exerce pas de fonctions législatives; estime, par conséquent, qu’aucune déclaration politique du Conseil européen ne peut être considérée comme une interprétation de la législation, cette dernière étant du ressort de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE);
6. rappelle que la Commission et son président sont élus par le Parlement européen; rappelle que, conformément à l’article 17, paragraphe 1, du traité UE, la Commission veille à l’application des traités ainsi que des mesures adoptées par les institutions en vertu de ceux-ci; affirme par conséquent que la Commission doit, à tout moment et en toutes circonstances, respecter la loi, dura lex sed lex;
7. rappelle que, conformément à l’article 17, paragraphe 3, du traité UE, la Commission exerce ses responsabilités en pleine indépendance;
8. rappelle que, conformément à l’article 17, paragraphe 8, du traité UE, la Commission est responsable devant le Parlement européen; rappelle que le Parlement dispose d’un certain nombre de moyens juridiques pour veiller à ce que la Commission remplisse les obligations qui lui incombent en vertu du traité, y compris la procédure de décharge, afin d’évaluer la bonne gestion des fonds de l’Union; souligne, en outre, que le Parlement dispose de plusieurs moyens juridiques et politiques pour veiller à ce que la loi soit appliquée par tous et avant tout par les institutions de l’Union; souligne que les conclusions du Conseil européen ne peuvent lier la Commission lors de l’application des actes juridiques;
9. souligne que les colégislateurs sont convenus que le règlement relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union s’appliquera à partir du 1er janvier 2021 à tous les engagements et paiements; rappelle que l’applicabilité de ce règlement ne peut être subordonnée à l’adoption de lignes directrices, étant donné que le texte convenu est suffisamment clair et qu’aucun instrument d’exécution n’est prévu; attend de la Commission, en tant que gardienne des traités, qu’elle garantisse la pleine application du règlement à partir de la date convenue par les colégislateurs, et rappelle que seule la CJUE peut annuler le règlement ou une partie de celui-ci; affirme que si un État membre introduit un recours en annulation du règlement ou de parties de celui-ci, le Parlement en défendra la validité devant la Cour et attend de la Commission qu’elle intervienne pour soutenir la position du Parlement; souligne que, dans un tel cas, le Parlement demandera à la Cour de statuer selon une procédure accélérée; rappelle l’article 265 du traité FUE et se déclare prêt à en faire usage;
10. estime que la pleine participation du Parlement au fonctionnement de Next Generation EU doit devenir une réalité; souligne que le trilogue en cours doit aboutir à un résultat satisfaisant sur ce point;
11. considère que la prochaine conférence sur l’avenir de l’Europe devrait, entre autres, se pencher sur la façon de surmonter les obstacles posés par l’exigence de l’unanimité au Conseil pour l’adoption du CFP et de la décision relative aux ressources propres;
12. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, au Conseil européen et à la Commission.