Résolution du Parlement européen du 17 décembre 2020 sur la gouvernance d’entreprise durable (2020/2137(INI))
Le Parlement européen,
– vu les principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies de 2011(1),
– vu les objectifs de développement durable des Nations unies(2),
– vu les principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à l’intention des entreprises multinationales(3),
– vu le guide de l’OCDE sur le devoir de diligence pour une conduite responsable des entreprises(4) et à l’intention des investisseurs institutionnels(5),
– vu la déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale de l’Organisation internationale du travail (OIT)(6),
– vu l’accord de Paris, adopté le 12 décembre 2015(7),
– vu le rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) intitulé «Réchauffement planétaire de 1,5º C»(8),
– vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant le règlement (UE) 2018/1999 (loi européenne sur le climat) du 4 mars 2020 (COM(2020)0080 final),
– vu le règlement (UE) nº 517/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux gaz à effet de serre fluorés et abrogeant le règlement (CE) nº 842/2006(9),
– vu le plan d’action de l’Union: financer la croissance durable (COM(2018)0097),
– vu le programme de travail remanié de la Commission pour 2020 (COM(2020)0440),
– vu la directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines formes d’entreprises, modifiant la directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE(10) du Conseil (la «directive comptable»),
– vu la directive 2014/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 modifiant la directive 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations non financières et d’informations relatives à la diversité par certaines grandes sociétés et certains groupes(11) («la directive sur la publication d’informations non financières»),
– vu la directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites(12),
– vu la directive (UE) 2017/828 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l’engagement(13) à long terme des actionnaires («la directive sur les droits des actionnaires»),
– vu la directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union(14),
– vu le règlement (UE) 2019/2088 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers(15) («le règlement sur la publication d’informations»),
– vu le règlement (UE) 2020/852 du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables, et modifiant le règlement (UE) 2019/2088(16) («le règlement établissant une taxinomie»),
– vu les lignes directrices de la Commission sur la publication d’informations non financières (méthodologie pour la publication d’informations non financières)(17) et les lignes directrices de la Commission sur la publication d’informations non financières: supplément relatif à la communication d’informations relatives au climat(18),
– vu le rapport final du forum de haut niveau de la Commission européenne sur l’union des marchés des capitaux intitulé «A New Vision for Europe’s Capital Markets»(19) (Une nouvelle vision des marchés de capitaux européens),
– vu l’étude préparée pour la Commission européenne, intitulée «Directors’ duties and sustainable corporate governance» («Devoirs des dirigeants et gouvernance durable de l’entreprise»),
– vu le cadre de référence des Nations unies pour les entreprises et les droits de l’homme intitulé «protéger, respecter et réparer» de 2008(20),
– vu l’étude de mai 2020 préparée pour la Commission européenne intitulée «Improving financial security in the context of the Environmental Liability Directive»(21) (Améliorer la sécurité financière dans le contexte de la directive sur la responsabilité environnementale),
– vu les principes d’Oslo sur les obligations globales concernant le changement climatique(22);
– vu les recommandations de la task force sur le climat de juin 2017 relatives à la publication d’informations financières liées au climat,
– vu l’article 54 de son règlement intérieur,
– vu les avis de la commission du commerce international et de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire,
– vu le rapport de la commission des affaires juridiques (A9-0240/2020),
A. considérant que l’Union européenne est fondée sur les valeurs énoncées à l’article 2 du traité sur l’Union européenne et que sa politique environnementale se fonde sur le respect du principe de précaution tel qu’énoncé à l’article 191, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne;
B. considérant que lorsqu’il s’agit des entreprises, une approche fondée sur la durabilité implique que les entreprises tiennent dûment compte des préoccupations sociétales et environnementales, telles que les droits de leurs salariés et le respect des limites de la planète afin de faire face aux risques les plus urgents que représentent leurs activités à ces égards;
C. considérant que les multiples initiatives internationales en faveur d’une gouvernance d’entreprise durable restent des instruments juridiques non contraignants, fondés sur le principe du volontariat, et ont largement prouvé leur inefficacité lorsqu’il s’agit d’influer sur le comportement des entreprises en matière de durabilité; que l’étude élaborée pour la Commission sur les devoirs des dirigeants et la gouvernance durable de l’entreprise conformément au plan d’action sur la finance durable souligne l’intérêt de clarifier les obligation des dirigeants en ce qui concerne la durabilité et les considérations à long terme; que cette même étude souligne les problèmes qu’engendre une vision à court terme et rappelle la nécessité pour les entreprises d’intégrer des intérêts à long terme afin de maintenir l’Union sur la trajectoire qui lui permettra de respecter ses propres engagements en matière de durabilité; que cette étude souligne clairement la nécessité de voir l’Union adopter une législation de l’Union à cet égard;
D. considérant qu’au cours de la dernière législature, l’Union européenne a entrepris un certain nombre d’initiatives visant à favoriser la transparence et la vision à long terme des activités financières et économiques, telles que la directive sur les droits des actionnaires, le plan d’action pour le financement de la croissance durable, le règlement sur la publication d’informations et le règlement établissant une taxinomie; que cette tendance a commencé, entre autres, par l’adoption de la directive sur la publication d’informations non financières; que la publication d’informations non financières est nécessaire pour mesurer, suivre et gérer les performances des entreprises et leur incidence à long terme sur la société et l’environnement;
E. considérant que la directive sur la publication d’informations non financières est étroitement liée à la gouvernance durable des entreprises et constitue une avancée significative dans la promotion de la publication d’informations non financières dans l’Union; qu’elle présente néanmoins de graves lacunes qu’il convient de combler afin d’améliorer son utilité aux yeux des investisseurs et des parties prenantes;
F. considérant que selon le pacte vert pour l’Europe, les entreprises et institutions financières doivent divulguer davantage de données concernant le climat et l’environnement afin que les investisseurs soient pleinement informés de la durabilité de leurs investissements; que la Commission s’est engagée à réviser la directive sur la publication d’informations non financières à cette fin; considérant que, conformément au remaniement de son programme de travail pour 2020, la Commission a l’intention de présenter une proposition de révision de la directive sur la publication d’informations non financières dans le courant du premier trimestre de 2021;
G. considérant que les parties prenantes ont souvent exprimé l’avis que les informations non financières fournies par les entreprises en vertu de la directive sur la publication d’informations non financières sont insuffisantes, peu fiables et non comparables; que les personnes chargées de préparer ces informations ont fait part de leur confusion devant la multitude des cadres de publication volontaire d’informations et ont appelé à une clarification et une normalisation juridiques; que la publication d’informations plus exhaustives et plus fiables est nécessaire pour réduire toute éventuelle incidence négative sur le climat, l’environnement et la société; que les améliorations apportées à la publication d’informations non financières pourraient accroître la responsabilité des entreprises et augmenter la confiance à leur égard; que ces aménagements ne doivent pas créer de déséquilibres concurrentiels inéquitables; que les obligations de divulgation devraient dès lors tenir compte des coûts administratifs, être proportionnées à la taille de l’entreprise et cohérentes avec d’autres dispositions législatives applicables aux activités commerciales, comme le respect des secrets d’affaires et la protection des lanceurs d’alerte;
H. considérant que l’étude commandée par la Commission sur les devoirs des dirigeants et la gouvernance durable de l’entreprise démontre la tendance croissante des sociétés cotées en bourse dans l’Union à se concentrer sur les intérêts à court terme de leurs actionnaires; que l’étude propose plusieurs options législatives au niveau de l’Union qui amélioreraient sensiblement la viabilité des entreprises; qu’il convient d’adopter un cadre législatif pour les entreprises européennes, dans le plein respect du principe de proportionnalité et en évitant d’imposer une charge administrative excessive aux entreprises européennes; que ce cadre doit garantir et améliorer la sécurité juridique dans le marché intérieur et ne doit pas créer de désavantages concurrentiels;
I. considérant qu’une approche durable de la gouvernance d’entreprise comprend à la fois les droits de l’homme et la protection de l’environnement; que la gouvernance d’entreprise durable, qui comprend l’obligation de divulgation d’informations concernant les questions environnementales, sociales et relatives aux salariés, les droits de l’homme et la corruption, fait partie de la «responsabilité incombant aux entreprises de respecter les droits de l’homme», telle que définie dans les principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme;
J. considérant que l’accord de Paris a pour objectif de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation de la température à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels;
K. considérant que la concurrence mondiale croissante pour l’accès aux ressources naturelles se traduit souvent par une exploitation non durable de l’environnement naturel et humain par les entreprises;
L. considérant que la gouvernance d’entreprise joue un rôle clef dans le respect des engagements de l’Union à mettre en œuvre les objectifs de développement durable des Nations unies et l’accord de Paris;
M. considérant que le changement climatique présente de graves risques pour la sécurité alimentaire, et plus précisément pour la disponibilité, l’accessibilité et l’utilisation de la nourriture, ainsi que la stabilité des systèmes alimentaires; que les agricultrices participent actuellement à hauteur de 45-80 % de l’ensemble de la production alimentaire dans les pays en voie de développement, qui sont touchés de manière disproportionnée par le changement climatique et la dégradation de l’environnement;
N. considérant que la convention d’Aarhus établit un certain nombre de droits environnementaux à l’intention du public et des associations, y compris le droit d’accéder à l’information, de participer aux processus décisionnels et d’accéder à la justice en matière d’environnement;
O. considérant qu’en 2017, le Comité d’examen du respect des dispositions de la convention d’Aarhus a constaté que l’Union enfreignait ladite convention en n’autorisant pas des membres du public à remettre en cause les décisions des institutions de l’Union en les portant devant les tribunaux de l’Union;
P. considérant que la Commission a, pour la période 2019-2024, revu ses ambitions à la hausse en établissant le programme du pacte vert pour l’Europe et en affirmant que «l’Europe doit conduire la transition vers une planète saine»;
Q. considérant que les dirigeants des entreprises ont l’obligation légale et statutaire d’agir dans l’intérêt de l’entreprise; que cette obligation a fait l’objet d’interprétations différentes selon les juridictions et que l’intérêt de l’entreprise a souvent été assimilé aux intérêts financiers de l’actionnaire; que ce qui est considéré comme l’intérêt de l’entreprise devrait également intégrer les intérêts des parties prenantes concernées, notamment les employés, ainsi que les intérêts de la société au sens large; et qu’une interprétation limitée de cette obligation, assortie d’une attention excessive accordée à la maximisation des profits à court terme, a une incidence négative sur les performances et la viabilité à long terme des entreprises, et peut donc être préjudiciable aux intérêts à long terme des actionnaires;
R. considérant que la cohérence de la législation de l’Union sur la gouvernance d’entreprise durable devrait être assurée par la mise en place d’obligations concrètes et d’incitation à agir, et non seulement à communiquer des informations; qu’il est donc nécessaire de disposer d’un cadre supplémentaire définissant les obligations des conseils d’administration en matière de durabilité;
S. considérant que, pour rendre la gouvernance d’entreprise dans l’Union plus durable, plus transparente et plus responsable, la Commission devrait, en plus des propositions de révision de la directive sur la publication d’informations non financières, présenter de nouveaux actes législatifs sur le devoir de diligence et les devoirs des dirigeants; que si le devoir de diligence et les devoirs des dirigeants sont traités dans un seul instrument législatif, ils devraient être clairement séparés en deux parties distinctes; que ces devoirs respectifs sont complémentaires, sans pour autant être interchangeables ni subordonnés;
Obligations de déclaration non financière
1. invite la Commission à s’employer, lorsqu’elle propose de nouvelles actions dans le domaine du droit des sociétés et de la gouvernance d’entreprise, de parvenir à un équilibre entre, la nécessité de réduire la pression à court terme sur les dirigeants des entreprises et de les encourager à tenir compte de la durabilité lors de la prise de décisions, d’une part, et la nécessité de disposer d’une flexibilité suffisante tout en garantissant l’harmonisation, d’autre part; souligne qu’il importe de renforcer le rôle des dirigeants pour la poursuite des intérêts à long terme des entreprises dans l’action future au niveau de l’Union et d’instaurer, au sein des organes de direction des entreprises, une culture qui intègre et applique la gouvernance d’entreprise durable;
2. se félicite de l’engagement pris par la Commission de réexaminer la directive sur la publication d’informations non financières; souligne que cette révision devrait être pleinement compatible avec les exigences imposées par le règlement sur la publication d’informations et le règlement établissant une taxinomie; invite la Commission à prendre en compte les recommandations établies dans la présente résolution;
3. réitère son appel en faveur d’un élargissement du champ d’application de la directive sur la publication d’informations non financières afin de couvrir toutes les grandes entreprises cotées et non cotées établies sur le territoire de l’Union, tel qu’il figure à l’article 3, paragraphe 4, de la directive comptable; souligne qu’afin de parvenir à des conditions de concurrence équitables, les obligations de déclaration non financière devraient également s’appliquer à toutes les entreprises de pays tiers qui opèrent sur le marché intérieur; invite la Commission à recenser les secteurs d’activité économique à haut risque ayant une incidence significative sur les questions de durabilité qui pourraient justifier l’inclusion des petites et moyennes entreprises (PME) dans ces secteurs, dans le champ d’application de la directive sur la publication d’informations non financières; estime, à cette fin, que la Commission devrait s’appuyer sur une expertise externe indépendante pour fournir une liste indicative, non exhaustive et régulièrement mise à jour des zones de conflit et à haut risque, ainsi que des orientations spécifiques à l’intention des PME; estime en particulier que les investissements et les secteurs fréquemment liés à des activités commerciales illégales, notamment à la criminalité environnementale, au trafic d’espèces sauvages, à la corruption ou à la criminalité financière, devraient être spécifiquement ciblés; souligne qu’il convient également de réviser la directive sur la publication d’informations non financières afin que les acteurs du marché financier puissent accéder aux données pertinentes en vue de s’acquitter des obligations du règlement sur la publication d’informations;
4. souligne que la gouvernance d’entreprise durable constitue un pilier important, qui permet à l’Union de mettre en place une économie à la fois résiliente et durable, de renforcer l’égalité des conditions de concurrence afin de préserver et d’améliorer la compétitivité internationale des entreprises de l’Union et de protéger les travailleurs et les entreprises de l’Union contre la concurrence déloyale des pays tiers, et qu’elle peut dès lors être bénéfique pour la politique de l’Union en matière de commerce et d’investissement si elle est mesurée de manière appropriée et proportionnée;
5. observe que la pandémie de COVID-19 a mis en lumière les vulnérabilités des chaînes d’approvisionnement mondiales et a montré que les règles appliquées sur la base du volontariat ne sont pas suffisantes à elles seules, comme en témoigne par exemple le secteur de la confection, dans lequel la production a été interrompue pendant la crise, ce qui a entraîné des effets négatifs tout au long de la chaîne d’approvisionnement; constate que les entreprises qui adoptent des pratiques environnementales, sociales et de gouvernance mieux définies et qui appliquent des processus d’atténuation des risques supportent mieux la crise; relève que l’OCDE a déclaré(23) que les entreprises qui, par anticipation, prennent des mesures de gestion des risques liés à la crise de la COVID-19 en s’efforçant d’en atténuer les impacts négatifs sur les travailleurs et les chaînes d’approvisionnement vont probablement, sur la durée, produire davantage de valeur, accroître leur résilience et améliorer leur viabilité à court terme mais aussi leurs perspectives de reprise à moyen et long terme;
6. observe que le règlement relatif à la taxinomie établit une liste d’objectifs environnementaux, afférents notamment au changement climatique, à l’utilisation et à la protection des ressources hydriques et marines, à la transition vers une économie circulaire, à la prévention et au contrôle de la pollution, ainsi qu’à la biodiversité et aux écosystèmes; estime que la notion de questions environnementales dans la directive devrait être interprétée conformément au règlement établissant une taxinomie et recouvrir l’ensemble des formes de pollution; invite la Commission à tenir compte des recommandations du groupe de travail sur les informations financières liées au climat et à promouvoir le développement de techniques comptables innovantes qui reflètent la valeur des écosystèmes; juge tout aussi important de définir avec précision les autres questions de durabilité auxquelles la directive sur la publication d’informations non financières fait référence, comme les notions de questions sociales et de personnel, le respect des droits de l’homme et de lutte contre la corruption; estime que les questions relatives aux travailleurs pourraient englober la divulgation des politiques salariales des entreprises, notamment en révélant les salaires par décile et les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes;
7. estime qu’une gouvernance d’entreprise durable est essentielle à l’objectif à long terme des entreprises d’aligner leurs activités sur la réalisation des objectifs environnementaux généraux de l’Union tels qu’ils figurent dans le pacte vert pour l’Europe, ainsi que de l’engagement de l’Union de réduire ses émissions de gaz à effet de serre pour atteindre l’objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050; insiste sur le fait que tous les secteurs contribuent à la réalisation de cet objectif;
8. estime que la définition de l’importance relative devrait inclure toute incidence pertinente en matière d’environnement, de droits de l’homme et de gouvernance sur la société dans son ensemble, au-delà de la création de valeur et de la performance purement financière des entreprises; appelle de ses vœux une révision de cette définition, conformément au principe de double importance relative introduit par la directive sur la publication d’informations non financières, en plus de son explication plus en détail dans les lignes directrices de la Commission sur la communication d’informations relatives au climat; estime que l’importance relative devrait être appréciée dans le cadre d’un processus associant les parties prenantes concernées;
9. observe que la directive sur la publication d’informations non financières accorde aux entreprises relevant de son champ d’application une marge de manœuvre importante pour divulguer les informations pertinentes de la manière qu’elles jugent la plus utile; observe que les entreprises peuvent actuellement s’appuyer, à leur discrétion, sur un certain nombre de cadres différents; note qu’elles sont encore incertaines quant à la façon de respecter au mieux leurs obligations d’information; juge nécessaire de mettre en place un cadre européen global fondé sur principe de proportionnalité, qui couvre l’ensemble des questions de durabilité pertinentes pour une information non financière complète; souligne, à cet égard, que le cadre législatif de l’Union devrait garantir que les informations communiquées soient claires, équilibrées, compréhensibles, comparables entre les entreprises d’un secteur, vérifiables et objectives, et qu’elles contiennent des objectifs de durabilité assortis d’un calendrier; souligne que ce cadre devrait également inclure des normes générales et sectorielles obligatoires; souligne, à cet égard, l’engagement pris par la Commission de soutenir un processus visant à élaborer des normes de l’Union en matière d’information non financière; souligne que des obligations et normes spécifiques d’information obligatoire devraient être fixées lors du réexamen de la directive sur la publication d’informations non financières, avec l’association dans la mesure appropriée des parties prenantes concernées, telles que la société civile, les organisations environnementales et les partenaires sociaux;
10. estime que les déclarations non financières devraient figurer dans le rapport annuel de gestion afin d’éviter des charges supplémentaires pour les entreprises; se félicite de l’engagement pris par la Commission dans le plan d’action sur une union des marchés des capitaux (COM(2020)0590) de présenter une proposition législative pour le troisième trimestre de 2021 concernant une plateforme numérique accessible au public à l’échelle européenne qui fournisse un accès gratuit aux informations financières et non financières publiées par les entreprises; estime que cette plateforme doit permettre aux utilisateurs de comparer en ligne les données divulguées par les entreprises, y compris en incluant des catégories telles que le thème, le secteur, le pays, le chiffre d’affaires et le nombre d’employés;
11. constate que la directive sur la publication d’informations non financières exclut les déclarations non financières de l’exigence d’assurance du contenu à laquelle les états financiers des entreprises sont par ailleurs soumis; estime que les déclarations non financières devraient faire l’objet d’un audit obligatoire, en fonction de la taille et du domaine d’activité de l’entreprise concernée; juge que le prestataire de services d’assurance, sous réserve des exigences d’objectivité et d’indépendance, devrait procéder à son audit conformément au futur cadre de l’Union; souligne, à la lumière de ce qui précède, la nécessité de s’attaquer aux mauvaises incitations inhérentes au contrôle légal des comptes au moyen d’un réexamen de la directive sur le contrôle légal des comptes(24); relève qu’il s’agirait également d’une occasion de s’attaquer au quasi-monopole des «Big Four», quatre entreprises comptables qui contrôlent les plus grandes sociétés cotées en bourse;
12. souligne que les représentants des travailleurs devraient être associés à la définition du processus de publication d’informations non financières et à la vérification des informations, notamment s’agissant des objectifs en matière de durabilité sociale et des questions liées à la chaîne d’approvisionnement et de production, y compris l’externalisation et la sous-traitance;
13. souligne l’importance d’introduire une obligation imposant à certaines entreprises de l’Union de produire, annuellement, une déclaration par pays pour chaque juridiction nationale dans laquelle elles exercent leurs activités; invite instamment le Conseil à adopter dès que possible son approche générale afin d’engager les négociations avec le Parlement sur la proposition de directive de la Commission modifiant la directive 2013/34/UE en ce qui concerne la communication, par certaines entreprises et succursales, d’informations relatives à l’impôt sur les bénéfices (COM(2016)0198);
14. estime que l’Union devrait s’efforcer, lors de la négociation d’accords de libre-échange, d’y insérer des clauses imposant aux États partenaires de créer des obligations comparables pour leurs entreprises, afin d’éviter d’introduire une nouvelle source de distorsion de concurrence.
Devoir de sollicitude des dirigeants et mesures supplémentaires visant à axer davantage la gouvernance d’entreprise sur la durabilité
15. souligne l’importance de la diversité et de l’inclusion dans les entreprises, source de performance accrue pour les entreprises; invite le Conseil à adopter dès que possible son orientation générale afin d’entamer des négociations avec le Parlement sur la proposition relative aux femmes dans les conseils des sociétés(25), qui vise à mettre fin au déséquilibre omniprésent entre les femmes et les hommes aux plus hauts niveaux de prise de décision des entreprises; invite la Commission à examiner des propositions supplémentaires visant à améliorer l’équilibre hommes-femmes au sein de l’encadrement supérieur et aux postes influents dans les entreprises;
16. souligne qu’il convient d’associer davantage les travailleurs aux processus décisionnels de l’entreprise de sorte à mieux y intégrer les objectifs et les incidences sociales et environnementales à long terme; invite la Commission à examiner la possibilité de réviser la directive sur le comité d’entreprise européen(26) et d’établir un nouveau cadre pour l’information, la consultation et la participation des travailleurs dans les entreprises européennes;
17. souligne que la transition écologique et la numérisation croissante auront de profondes répercussions sur la main d’œuvre; considère, par conséquent, que toute gouvernance d’entreprise durable devrait reconnaître et assurer efficacement le droit des travailleurs à bénéficier de manière continue de la formation professionnelle et de l’éducation tout au long de la vie sur leur temps de travail;
18. observe que les entreprises ne constituent pas des entités abstraites déconnectées des défis environnementaux et sociaux actuels; estime que les entreprises devraient contribuer plus activement à la durabilité, étant donné que leurs performances, leur résilience et même leur survie à long terme pourraient dépendre de leur réponse adéquate aux questions environnementales et sociales; souligne, à cet égard, que le devoir de diligence des dirigeants à l’égard de l’entreprise doit être défini non seulement par rapport à la maximisation des bénéfices à court terme des actions, mais également par rapport aux préoccupations en matière de durabilité; prend acte du rôle majeur des administrateurs délégués dans la définition de la stratégie d’une entreprise et dans la supervision de ses activités; estime que les administrateurs exécutifs devraient entendre l’obligation d’agir dans l’intérêt de l’entreprise comme le fait d’être tenus de prendre en compte les intérêts et les risques associés à la durabilité, les incidences, les débouchés et les dépendances à long terme dans la stratégie globale de l’entreprise; souligne que ce devoir de hiérarchisation pourrait impliquer une réorientation vers des investissements durables plutôt que des investissements non durables;
19. invite la Commission à présenter une proposition législative visant à garantir que les obligations des dirigeants ne peuvent être interprétées, à tort, comme équivalant à la maximisation à court terme de la valeur actionnariale, mais qu’elles incluent au contraire l’intérêt à long terme de l’entreprise et de la société dans son ensemble, ainsi que celui des travailleurs et des autres parties prenantes; estime, en outre, que cette proposition devrait garantir que les membres des organes d’administration, de direction et de surveillance des sociétés à responsabilité limitée, agissant dans les limites des compétences qui leur sont conférées par le droit national, sont tenus à l’obligation légale de définir, de publier et de suivre une stratégie de viabilité des entreprises;
20. souligne que, concernant la révision en cours de la directive relative à la responsabilité environnementale(27), les entreprises devraient disposer de garanties financières de responsabilité environnementale pour les dommages environnementaux infligés aux individus et aux écosystèmes;
21. estime que les stratégies en matière de durabilité des entreprises devraient recenser et traiter, conformément à leurs obligations de diligence, les questions matérielles conformément aux exigences en matière de publication d’informations non financières, d’une part, et les incidences importantes que ces entreprises pourraient avoir sur les enjeux environnementaux, climatiques, sociaux et relatifs aux travailleurs, de même que les implications de leurs modèles commerciaux, de leurs opérations et de leurs chaînes d’approvisionnement dans les domaines des droits de l’homme et de la corruption, notamment hors de l’Union, d’autre part; estime que le devoir de diligence que les administrateurs doivent à l’entreprise recouvre aussi le devoir de ne pas nuire aux écosystèmes et de protéger les intérêts des parties prenantes concernées, employés inclus, susceptibles d’être affectées de manière défavorable par les activités de l’entreprise;
22. estime que le champ d’application du futur acte législatif devrait comprendre toutes les grandes entreprises cotées et non cotées établies sur le territoire de l’Union, tel qu’il est défini à l’article 3, paragraphe 4, de la directive comptable; souligne qu’afin de parvenir à des conditions de concurrence équitables, cet acte législatif devrait également s’appliquer à toutes les entreprises de pays tiers qui opèrent sur le marché intérieur; invite la Commission à recenser les secteurs d’activité économique à haut risque ayant une incidence significative sur les questions de durabilité qui pourraient justifier l’inclusion des petites et moyennes entreprises (PME) dans ces secteurs; juge par ailleurs que, à la suite de l’analyse d’impact que la Commission effectue actuellement, la stratégie de durabilité devrait inclure des objectifs mesurables, spécifiques, assortis d’échéances et fondés sur des données scientifiques ainsi que sur des plans de transition conformes aux engagements pris par l’Union au niveau international en matière d’environnement et de changement climatique, en particulier l’accord de Paris, la convention sur la diversité biologique et les accords internationaux visant à lutter contre la déforestation; est convaincu que ces stratégies pourraient également inclure une politique interne pour un salaire équitable fondé sur le salaire décent par pays, une politique d’égalité entre les hommes et les femmes et une politique garantissant une meilleure intégration des droits des travailleurs dans les activités des entreprises; souligne que le contenu de ces politiques internes devrait être déterminé par les entreprises elles-mêmes, en tenant dûment compte de leurs employés et en concertation avec eux; estime que ces politiques devraient tenir compte des questions sectorielles et/ou géographiques et des droits des personnes appartenant à des groupes ou communautés particulièrement vulnérables; juge que lier la partie variable de la rémunération des administrateurs exécutifs à la réalisation des objectifs mesurables fixés dans la stratégie permettrait d’aligner les intérêts des administrateurs sur les intérêts à long terme de leurs entreprises; invite la Commission à promouvoir davantage ces systèmes de rémunération pour les postes d’encadrement supérieur;
23. observe que certains États membres ont introduit la notion d’«actions de fidélité» dans leur législation, en vertu de laquelle la participation à long terme est récompensée par des droits de vote et des avantages fiscaux; invite la Commission à envisager la mise en place de nouveaux mécanismes de promotion des retours durables et des performances à long terme des entreprises; souligne que les bénéfices non distribués peuvent contribuer à la création de réserves adéquates;
24. estime que la directive sur les droits des actionnaires devrait également être modifiée afin d’encourager un comportement «patient» des actionnaires, notamment en récompensant la détention d’actions à long terme par des droits de vote et des avantages fiscaux;
25. s’inquiète du fait que certains accords d’investissement internationaux, tels que le traité sur la Charte de l’énergie, placent les intérêts financiers des multinationales au-dessus des priorités en matière d’environnement et de climat; prie instamment la Commission de prendre rapidement des mesures pour garantir l’alignement des accords d’investissement existants et futurs sur les objectifs de l’Union en matière d’environnement et de climat, et de présenter des propositions visant à contrecarrer l’accaparement des terres et la déforestation par les entreprises dans le cadre de la révision imminente de la directive sur la publication d’informations non financières;
26. estime que, au cours du processus de définition et de suivi de leurs stratégies de durabilité, les entreprises devraient être tenues d’informer et de consulter toutes les parties prenantes concernées; juge que la notion de partie prenante devrait être interprétée au sens large et inclure toutes les personnes dont les droits et intérêts peuvent être affectés par les décisions de l’entreprise, notamment les employés, les syndicats, les communautés locales, les peuples autochtones, les associations de citoyens, les actionnaires, la société civile et les organisations environnementales; estime par ailleurs qu’il est indispensable de consulter les autorités publiques nationales et locales chargées de la viabilité des activités économiques, en particulier celles chargées des politiques publiques en matière d’emploi et d’environnement;
27. estime que cet engagement devrait se faire, en fonction de la taille et du domaine d’activité de l’entreprise concernée, et en accordant une dérogation aux petites et moyennes entreprises (PME) qui n’exercent pas d’activités dans des secteurs à haut risque, lesquels devraient être définis par la Commission, au moyen de comités consultatifs auxquels participeraient des représentants des parties prenantes ou des porte-parole, y compris des employés et des experts indépendants, dans le but de prodiguer des conseils sur le contenu et la mise en œuvre de la stratégie de durabilité de l’entreprise; estime que ces comités consultatifs devraient avoir le droit, si une large majorité l’approuve, de demander un audit indépendant en cas de préoccupations raisonnables quant à la bonne mise en œuvre de la stratégie de durabilité;
28. estime que les entreprises qui reçoivent des aides d’État, des financements de l’Union ou d’autres fonds publics ou des entreprises qui mettent en œuvre des plans de licenciement devraient avoir pour objectif de préserver les de leurs travailleurs et de leur offrir une protection, d’adapter la rémunération de leurs administrateurs en conséquence, de payer leur juste part d’impôts, de mettre en œuvre leur stratégie de durabilité conformément à l’objectif de réduction de leur empreinte carbone et de s’abstenir de verser des dividendes ou de proposer des régimes de rachat d’actions visant à rémunérer les actionnaires;
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29. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.
Proposition de directive du Parlement et du Conseil du 14 novembre 2012 relative à un meilleur équilibre hommes-femmes parmi les administrateurs non exécutifs des sociétés cotées en bourse et à des mesures connexes, (COM(2012) 0614)