Résolution du Parlement européen du 11 mars 2021 sur le conflit syrien, dix ans après le soulèvement (2021/2576(RSP))
Le Parlement européen,
– vu ses résolutions antérieures sur la Syrie, en particulier celles du 15 mars 2018 sur la situation en Syrie(1), du 18 mai 2017 sur la stratégie de l’Union européenne à l’égard de la Syrie(2), du 4 juillet 2017 intitulée «Appréhender les violations des droits de l’homme dans le contexte des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, dont le génocide»(3), du 24 octobre 2019 sur les opérations militaires de la Turquie dans le nord-est de la Syrie et leurs répercussions(4), du 26 novembre 2019 sur les droits de l’enfant, à l’occasion du 30e anniversaire de la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant(5) et du 17 novembre 2011 sur le soutien de l’Union européenne à la Cour pénale internationale (CPI)(6),
– vu la déclaration du Conseil Affaires étrangères du 6 mars 2020 et les dernières conclusions du Conseil européen sur la Syrie du 14 octobre 2019, du 16 avril 2018 et du 3 avril 2017,
– vu les précédentes déclarations sur la Syrie de la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, notamment celle du 26 septembre 2019 sur la Syrie et celle du 9 octobre 2019 sur les développements récents intervenus dans le nord-est de la Syrie, et les déclarations du vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité du 13 janvier 2020 sur la Syrie et du 20 février 2020 sur l’accès humanitaire à Idlib,
– vu la décision d’exécution (PESC) 2021/30 du Conseil du 15 janvier 2021 mettant en œuvre la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie(7), qui a ajouté le nouveau ministre syrien des affaires étrangères à la liste des sanctions de l’Union européenne contre les responsables de la répression violente en Syrie,
– vu la stratégie de l’Union européenne à l’égard de la Syrie adoptée le 3 avril 2017 et les conclusions du Conseil relatives à la stratégie régionale de l’Union pour la Syrie et l’Iraq, ainsi que pour la menace que constitue l’EIIL/Daech, adoptées le 16 mars 2015,
– vu la déclaration conjointe du 30 juin 2020 des Nations unies et de l’Union européenne, en tant que coprésidents de la quatrième conférence de Bruxelles sur l’aide à apporter pour l’avenir de la Syrie et des pays de la région,
– vu les précédentes déclarations du Secrétaire général des Nations unies au sujet de la Syrie, notamment celles de son porte-parole des 1er et 18 février 2020,
– vu la dernière déclaration de l’envoyé spécial des Nations unies en Syrie, Geir O. Pedersen, adressée au Conseil de sécurité des Nations unies le 22 janvier 2021,
– vu les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies sur la Syrie depuis 2011, en particulier la résolution 2254(2015), qui se prononce en faveur d’une feuille de route pour le processus de paix en Syrie, la résolution 2249(2015) sur l’État islamique en Iraq et en Syrie et la résolution 2533(2020), qui renouvelle le point de passage frontalier de Bab el-Haoua pour l’aide humanitaire jusqu’au 10 juillet 2021,
– vu les derniers rapports de la commission d’enquête internationale indépendante sur la Syrie, soumis au Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés le 1er mars 2021,
– vu la résolution 71/248 de l’Assemblée générale des Nations unies du 21 décembre 2016 instaurant un mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables,
– vu la déclaration de l’Unicef du 28 février 2021 sur la réintégration et le rapatriement en toute sécurité de tous les enfants dans le camp d’Al-Hol et dans le nord-est de la Syrie, ainsi que le rapport 2020 de l’Unicef sur la situation humanitaire dans l’ensemble de la Syrie du 2 février 2021,
– vu la création, en 2011, du secrétariat du réseau européen consacré aux enquêtes et aux poursuites pénales relatives aux génocides, aux crimes contre l’humanité et aux crimes de guerre (réseau Génocide), hébergé par Eurojust,
– vu la position commune 2003/444/PESC du Conseil du 16 juin 2003 concernant la Cour pénale internationale(8), son plan d’action de 2004 à l’égard de la CPI en vue d’une ratification et d’une application universelles, et le plan d’action révisé de l’Union européenne de 2011,
– vu le statut de Rome de la CPI,
– vu la charte des Nations unies et les conventions des Nations unies auxquels la Syrie est partie, y compris la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,
– vu les communiqués de Genève de 2012 et de 2014, soutenus par les Nations unies,
– vu les conventions de Genève de 1949 et leurs protocoles additionnels,
– vu la Convention des Nations unies sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction,
– vu la convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948,
– vu l’article 132, paragraphes 2 et 4, de son règlement,
A. considérant que fin février 2011, des enfants syriens ont été arrêtés, placés en détention et torturés à Deraa par le régime syrien pour avoir critiqué le président Bachar Al-Assad dans des graffitis sur les murs de la ville; que le 15 mars 2011, des milliers de Syriens à Deraa et à Damas sont descendus dans la rue en nombre record pour exiger des réformes démocratiques, la libération de prisonniers politiques, la fin de la torture, le respect des droits de l’homme et de l’état de droit, l’organisation d’élections libres et régulières et la fin de la corruption; que ces manifestations populaires s’étendent à tout le pays depuis plusieurs années, de grandes villes comme Homs, Hama, Idlib et les quartiers populaires d’Alep et de Damas à des villes de moindre taille comme Hassaké dans le nord-est et Kafranbel, dans le nord-ouest;
B. considérant que le soulèvement syrien de 2011 a constitué une manifestation de la diversité ethnique et religieuse de la Syrie, qui a réuni des dirigeants de tous les groupes ethniques et religieux et de toutes les provinces du pays;
C. considérant que le régime syrien a répondu aux aspirations démocratiques légitimes de son peuple par la brutalité des forces de sécurité syriennes et des milices alliées placées sous son commandement; que plus de 500 000 personnes ont perdu la vie et que plus d’un million ont été blessées; que, selon le Réseau syrien des droits de l’homme, depuis mars 2011, plus de 230 000 civils ont été tués, dont 88 % par le régime syrien, 3 % par les forces russes, 2 % par Daech et 2 % par des groupes d’opposition armés; que plus de 15 000 civils ont été torturés à mort, dont 99 % dans des prisons du régime; que plus de 150 000 civils ont depuis lors été victimes de disparition forcée et sont toujours détenus, dont 88 % aux mains du régime syrien, 6 % de Daech et 3 % de groupes d’opposition armés; que plus de 3 400 soignants ont depuis lors été victimes de disparition forcée ou placés en détention, dont 98 % par le régime syrien;
D. considérant que les parties au conflit, y compris les forces gouvernementales et leurs alliés, les groupes armés antigouvernementaux et les organisations terroristes inscrites sur la liste des Nations unies, telles que Daech, ont commis des violations flagrantes et plus ou moins graves des droits de l’homme, dont des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité; considérant que les tactiques déployées tant par le régime brutal que par les djihadistes visaient à anéantir les forces modérées et pro-démocratiques; que tous ceux qui se sont rendus coupables de ces crimes devront en répondre;
E. considérant que le régime syrien a utilisé des armes chimiques, des missiles Scud, des pièces d’artillerie conventionnelles et des bombes aériennes, ainsi que des bombes barils, des armes à sous-munitions et des bombes incendiaires, dans des zones civiles densément peuplées comme les villes d’Homs et Hama et le quartier d’Alep-Est; que des manifestants pacifiques blessés par des tirs à balles réelles des forces de sécurité syriennes ont été privés de soins et torturés à mort dans des hôpitaux militaires et des centres de détention dans tout le pays, comme en témoigne le rapport Caesar présenté par la France au Conseil de sécurité des Nations unies en mai 2014; que des familles ont été régulièrement empêchées d’enterrer leurs morts dans les cimetières; considérant que des villes entières ont été assiégées et délibérément affamées; considérant que des sanctions collectives, des exécutions extrajudiciaires et de nombreux massacres de centaines d’hommes, de femmes et d’enfants dans des villes rurales, comme celui de mai 2012 à Houla, se sont produits; que la commission d’enquête des Nations unies sur la Syrie a fait état du recours systématique au viol et à d’autres formes de violences sexuelles comme arme de guerre par les forces du régime syrien et leurs milices;
F. considérant que les Nations unies ont mis en place plusieurs initiatives dans le cadre du mandat de leurs envoyés spéciaux en vue de parvenir à un cessez-le-feu entre toutes les parties, de libérer les détenus, de garantir l’accès humanitaire à toutes les parties du pays, de protéger les journalistes et les ONG et d’engager un dialogue sans exclusive en vue d’une solution politique au conflit qui a éclaté après 2011; que ce processus et le comité constitutionnel syrien (CCS) placé sous l’égide des Nations unies restent au point mort;
G. considérant que le CCS a été créé en octobre 2019 avec pour mandat de trouver une solution politique au conflit syrien, sous les auspices de l’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie et conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité des Nations unies; qu’en dépit de ses carences structurelles et de l’obstruction persistante de Bachar Al-Assad à une coopération constructive au sein du CCS, celui-ci demeure un instrument essentiel pour parvenir à un règlement politique pacifique du conflit;
H. considérant que la Russie, soutenue par la Chine, a opposé son veto à 16 résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies depuis 2011, notamment sur le renvoi de la Syrie devant la Cour pénale internationale (CPI) et sur le renforcement de l’accès de l’aide humanitaire; que l’Iran et le Hezbollah ont directement contribué à soutenir la répression exercée par le régime syrien à l’encontre de civils; que la Russie consacre depuis 2015 des ressources logistiques, diplomatiques et financières à une intervention militaire de grande envergure de l’armée de l’air russe en faveur du régime syrien;
I. considérant que la Turquie intervient directement en Syrie depuis 2016 afin d’occuper les parties septentrionales du pays, principalement constituées d’enclaves kurdes syriennes, en violation du droit international, notamment en envahissant en octobre 2019 des territoires contrôlés par les Forces démocratiques syriennes; qu’en réponse à ces actions de la Turquie, plusieurs États membres de l’Union européenne ont suspendu officiellement les ventes d’armes à la Turquie;
J. considérant que, selon les pays coprésidents du groupe de Minsk de l’OSCE, la Turquie a transféré des mercenaires syriens vers le Haut-Karabakh;
K. considérant que la coalition internationale poursuit ses efforts en Iraq, en Syrie et dans le monde pour contrer les ambitions de Daech et les activités de ses branches et de ses réseaux;
L. considérant que l’Union et ses États membres ont suspendu leurs relations diplomatiques avec le régime syrien en 2012; que l’Union a fermé sa délégation à Damas en décembre 2012, à la suite de la fermeture des ambassades des États membres début 2012;
M. considérant que le Conseil a adopté en 2011 des sanctions à l’encontre des personnes et entités impliquées dans la répression des civils, qu’il les a étendues depuis lors, afin qu’une solution politique négociée puisse être trouvée; que ces sanctions sont assorties d’exemptions humanitaires;
N. considérant que la réaction du régime syrien au soulèvement a entraîné la destruction du tissu économique et social syrien; que l’effondrement de la livre syrienne a été amplifié par l’effondrement de l’économie libanaise à partir de 2019 et par les répercussions économiques mondiales liées à la pandémie de COVID-19 en mars 2020; que le coût des produits de base a augmenté de plus de 100 % depuis 2019;
O. considérant que la Syrie, soumise à une pression internationale intense, a signé et ratifié la convention sur les armes chimiques en octobre 2013 après avoir commis à ce jour ses plus grandes attaques chimiques dans une zone civile à l’est de Damas, dans la Ghouta orientale; que l’équipe d’enquête et d’identification de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) a conclu que le régime syrien était depuis responsable de l’utilisation d’armes chimiques sur des civils à de multiples reprises; qu’en juillet 2020, le Conseil exécutif de l’OIAC a de nouveau demandé officiellement que le régime syrien déclare ses installations d’armes chimiques;
P. considérant qu’à cause du conflit, près de 7 millions de personnes sont des réfugiés, plus de 13 millions dépendent de l’aide humanitaire en Syrie, dont 6 millions de femmes et d’enfants, 6,8 millions sont déplacées à l’intérieur du pays et 3 millions vivent dans des zones assiégées difficiles d’accès; considérant que les besoins humanitaires ont augmenté d’un cinquième au cours de la seule année qui vient de s’écouler; que 4,5 millions de Syriens de plus vivent désormais dans l’insécurité alimentaire, et que 90 % d’entre eux se trouvent en dessous du seuil de pauvreté; que l’accès de l’aide humanitaire à toutes les populations dans le besoin reste vital et que 40 % de la population syrienne réside dans des zones non contrôlées par le gouvernement; que la pandémie de COVID-19 a montré, au-delà des soins de santé généraux dispensés à la population, combien l’accès à la Syrie par les frontières du nord-ouest et du nord-est reste crucial; que l’hiver et les inondations qui ont suivi, qui ont touché quelque 121 000 personnes réparties sur 304 sites de personnes déplacées à l’intérieur du pays dans le nord-ouest de la Syrie, ont aggravé la détresse d’une population déjà extrêmement vulnérable; considérant que le gouvernement syrien a continué d’imposer de sévères restrictions à l’acheminement de l’aide humanitaire dans les zones contrôlées par le gouvernement et ailleurs dans le pays;
Q. considérant que quelque 12 000 ressortissants étrangers, pour la plupart soupçonnés d’avoir des liens directs ou indirects avec l’EIIL/Daech, sont emprisonnés dans sept prisons gérées par les Forces démocratiques de Syrie dans le nord-est du pays; que 9 000 d’entre eux sont détenus dans le camp d’Al-Hol, le plus grand de Syrie, qui accueille au total 64 000 personnes, principalement des familles liées à l’EIIL/Daech, dont 94 % sont des femmes et des enfants, y compris des citoyens de l’Union; que les conditions actuelles sont très alarmantes, en particulier après les derniers assassinats enregistrés depuis le début de cette année;
R. considérant que le conflit a une incidence particulièrement grave sur la vie et les droits humains des enfants en Syrie; que plus de 29 500 enfants ont été tués, dont 78 % par le régime syrien et les milices iraniennes, 7 % par les forces russes et 3 % par l’EIIL/Daech, selon le réseau syrien pour les droits de l’homme; que plus de 2,6 millions de filles et de garçons ont été déplacés à l’intérieur de leur pays et que la santé mentale de nombreux enfants syriens a été et restera profondément affectée par la brutalité du conflit; que l’impossibilité pour les enfants syriens d’obtenir un extrait de naissance et des documents d’identité les expose au risque d’être apatrides; que des millions d’enfants ont manqué des années d’études, et que 2,8 millions d’entre eux ne sont pas scolarisés à l’heure actuelle en Syrie;
S. considérant que les attaques incessantes contre les établissements de santé ont décimé le système de santé syrien et que les Syriens ont désormais du mal à faire face aux difficultés causées par la crise de la COVID-19; que ce sont moins de 64 % des hôpitaux et 52 % des centres de soins de santé primaires qui sont opérationnels en Syrie; que, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 70 % du personnel de santé a fui le pays;
T. considérant que le conflit syrien est régulièrement marqué depuis le début par des attaques contre les établissements de santé, en violation flagrante du droit humanitaire international, et que celles-ci ont persisté en 2020 pendant la pandémie; que depuis ces dix dernières années, si la communauté internationale reconnaît de plus en plus le caractère systématique des attaques contre les établissements de soins de santé en Syrie, elle ne peut toutefois pas en établir clairement la responsabilité, en dépit des résolutions 2139 (2014) et 2286 (2016) du Conseil de sécurité de l’ONU; que le secrétaire général des Nations unies a créé une commission d’enquête interne des Nations unies qui a examiné un nombre limité d’incidents dans le nord-ouest de la Syrie entre septembre 2019 et avril 2020;
U. considérant que les défenseurs des droits de l’homme et les professionnels de l’aide humanitaire continuent d’exprimer des inquiétudes quant à la sécurité et à la protection des rapatriés et des personnes déplacées compte tenu de la situation dans de nombreuses régions du pays et des questions que suscite l’approche du gouvernement syrien en matière de réconciliation politique;
V. considérant que depuis 2011, l’Union européenne et ses États membres ont mobilisé 20 milliards d’euros en faveur de l’aide humanitaire et de l’aide à la stabilisation et à la résilience aux Syriens à l’intérieur de leur pays et dans les pays voisins; que l’Union européenne a été le moteur des conférences des donateurs pour la Syrie qui se sont tenues à Bruxelles pendant quatre années consécutives, de 2017 à 2020, et qu’elle organisera la cinquième conférence de Bruxelles, prévue les 29 et 30 mars 2021;
W. que la résolution 2533 (2020) du Conseil de sécurité de l’ONU du 11 juillet 2020 sur l’aide transfrontalière ne reconduit que le point de passage frontalier de Bab el-Haoua pour une période d’un an, jusqu’au 10 juillet 2021, et clôt ainsi les points de passage frontaliers de Bab el-Salam, de Yaaroubiyé et de Ramta;
X. considérant que depuis 2011, des millions de Syriens ont été privés de leurs droits de propriété par de nouvelles lois syriennes contre ceux qui se soustraient au service militaire ou fuient le pays sans autorisation préalable;
Y. considérant que le plateau du Golan est un territoire syrien et qu’il est occupé par l’État d’Israël depuis 1967;
Z. considérant qu’un certain nombre d’attaques contre le patrimoine culturel ont été perpétrées par différentes parties tout au long du conflit, y compris la destruction et le pillage de sites archéologiques par l’EIIL/Daech, ainsi que la démolition, le pillage et la destruction de sites archéologiques et de sanctuaires et tombes yézidis par l’armée nationale syrienne à Afrin;
AA. considérant que le statut de Rome de la CPI, signé et ratifié par l’ensemble des États membres de l’Union européenne, affirme que les crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale, notamment le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, ne sauraient rester impunis;
AB. considérant que depuis 2009, tous les États membres ont ratifié le Statut de Rome de la CPI; qu’en 2011, le Conseil a créé le secrétariat du réseau européen consacré aux enquêtes et aux poursuites pénales relatives aux génocides, aux crimes contre l’humanité et aux crimes de guerre (réseau Génocide), hébergé par Eurojust; que la stratégie de l’Union à l’égard de la Syrie invite l’Union à promouvoir l’obligation de rendre des comptes pour les crimes de guerre commis en Syrie, en vue de faciliter un processus de réconciliation nationale et une justice transitionnelle;
AC. considérant qu’en 2018 et pour la première fois, une équipe commune d’enquête (ECE) dirigée par les autorités répressives et judiciaires en France et en Allemagne a été créée pour faciliter l’arrestation et la poursuite des criminels de guerre syriens à la suite de la publication du rapport Caesar sur la famine systématique et la torture de dizaines de milliers de femmes et d’hommes dans les centres de détention syriens depuis 2011;
1. exprime son soutien aux aspirations démocratiques du peuple syrien qui, il y a dix ans, le 15 mars 2011, a manifesté pacifiquement à Deraa, à Damas et dans le reste du pays pour obtenir des réformes démocratiques; rend hommage aux 500 000 victimes de la répression et du conflit en Syrie depuis le début du soulèvement populaire; estime que l’avenir de la Syrie doit reposer entre les mains des Syriens; exprime son soutien à l’unité, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’État syrien et de son peuple;
2. exprime sa profonde préoccupation face à l’impasse politique persistante et salue les efforts déployés par l’envoyé spécial des Nations unies, Geir O. Pedersen, pour trouver une solution politique au conflit; partage les préoccupations de l’envoyé spécial quant à l’absence de progrès; réaffirme qu’il ne saurait y avoir de solution durable au conflit syrien par des moyens militaires; est également préoccupé par l’effondrement économique et par la crise humanitaire désastreuse qui frappent la Syrie;
3. exprime son soutien à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité des Nations unies établissant un processus de réforme constitutionnelle conduit par les Syriens; regrette profondément le manque de détermination du régime syrien malgré l’engagement répété des représentants de l’opposition syrienne et leur volonté réaffirmée de négocier avec le régime l’élaboration d’une nouvelle constitution pour la Syrie; souligne à cet égard la nécessité d’un mécanisme de contrôle, de vérification et de rapports du cessez-le-feu, placé sous l’égide des Nations unies;
4. s’oppose à toute normalisation des relations diplomatiques avec le régime syrien tant qu’il n’y aura pas de progrès fondamentaux sur le terrain en Syrie, assorti d’un engagement clair, soutenu et crédible en faveur d’un processus politique sans exclusive; considère que la prochaine élection présidentielle syrienne en 2021 manque de quelque crédibilité que ce soit aux yeux de la communauté internationale dans le contexte actuel; condamne fermement les visites de députés européens au régime syrien, et souligne que ces députés ne représentent pas le Parlement européen;
5. regrette que certains responsables aient accentué les divisions au sein d’une opposition syrienne déjà fragmentée, entravant le processus de Genève;
6. condamne fermement toutes les atrocités et violations des droits de l’homme et du droit humanitaire international, perpétrées en particulier par le régime de Bachar Al-Assad, mais aussi par des acteurs russes, iraniens et turcs; demande à la Russie, à l’Iran et au Hezbollah de retirer toutes les forces, y compris supplétives, placées sous leur commandement, à l’exception de celles qui participent aux opérations internationales de maintien de la paix ou de stabilisation sous le mandat du Conseil de sécurité des Nations unies; déplore que la Russie et l’Iran soutiennent le régime syrien dans la répression totale de sa population civile et que ces deux pays prennent le contrôle du processus politique et des ressources économiques de la Syrie;
7. demande à la Turquie de retirer ses troupes du nord de la Syrie qu’elle occupe illégalement en dehors de tout mandat des Nations unies; condamne les transferts illégaux de Syriens kurdes organisés par la Turquie depuis le nord de la Syrie occupée vers la Turquie afin qu’ils y soient détenus et poursuivis, en violation des obligations internationales de la Turquie au titre des conventions de Genève; demande instamment que tous les détenus syriens qui ont été transférés en Turquie soient immédiatement rapatriés vers les territoires occupés en Syrie; s’inquiète de ce que ces déplacements à l’initiative de la Turquie puissent donner lieu à un nettoyage ethnique à l’encontre la population kurde syrienne; souligne que l’invasion et l’occupation illégales menées par la Turquie ont mis en péril la paix en Syrie, au Proche-Orient et en Méditerranée orientale; condamne fermement l’utilisation par la Turquie de mercenaires syriens dans les conflits en Libye et dans le Haut-Karabakh, en violation du droit international;
8. croit fermement en la diversité religieuse et ethnique de la Syrie; déplore la discrimination exercée de longue date par le régime syrien à l’encontre des Syriens kurdes; condamne les attaques ciblées du régime syrien contre les voix critiques, telles que le lauréat du prix Sakharov du Parlement européen Ali Ferzat pour ses critiques à l’encontre du président Assad, ainsi que les attaques du régime syrien contre 124 églises chrétiennes, documentées par le réseau syrien pour les droits de l’homme; condamne fermement les assassinats de membres de minorités religieuses par l’EIIL/Daech, en particulier les crimes de génocide contre le peuple yézidi, des musulmans chiites et des personnes de confessions chrétiennes entre 2014 et 2018; déplore vivement la persécution des minorités appartenant à des groupes armés d’opposition;
9. rappelle à la communauté internationale la gravité et l’ampleur des violations des droits de l’homme perpétrées en Syrie par différentes parties au conflit; souligne la lourde responsabilité du régime syrien dans sa décision de répondre aux protestations pacifiques par une répression totale et par des moyens inqualifiables; souligne l’importance du rapport César et rappelle que les photos des 11 000 prisonniers identifiés qui ont été affamés et torturés à mort dans les centres de détention et les hôpitaux militaires autour de Damas entre 2011 et 2013, présentées par la France au Conseil de sécurité des Nations unies en 2014, sont parfaitement fiables; prie instamment l’Union et ses États membres de soutenir la recommandation de la commission d’enquête des Nations unies de mars 2021 visant à faciliter la création d’un mécanisme indépendant doté d’un mandat international et d’une approche axée sur les victimes pour localiser les disparus ou leurs dépouilles, y compris celles retrouvées dans des fosses communes;
10. condamne fermement le meurtre de 550 journalistes internationaux et syriens par le régime syrien et de dizaines de personnes par l’EIIL/Daech et d’autres groupes armés; demande au régime syrien de libérer immédiatement les 400 journalistes qu’il a emprisonnés, selon le réseau syrien pour les droits de l’homme;
11. condamne avec la plus grande fermeté le viol comme arme de guerre contre les femmes, que ce soit par le régime syrien et ses milices – comme l’a démontré la commission internationale indépendante des Nations unies – ou par l’EIIL/Daech sur les femmes yézidies et chiites; rappelle le rôle joué par les femmes dans le soulèvement de 2011 et l’importance fondamentale d’inclure les femmes à tous les niveaux des structures du pouvoir politique, économique et judiciaire de la Syrie, y compris dans le système judiciaire de transition; rappelle qu’il importe d’associer les femmes et les jeunes au processus de règlement des conflits;
12. réitère dans les termes les plus forts sa condamnation des frappes aériennes russes qui ont tué au total plus de 6 900 civils, dont 2 000 enfants, au moyen de bombes à fragmentation, de bombes à vide et de missiles à longue portée, qui ont pris pour cible des centres de presse indépendants, des hôpitaux, des infrastructures humanitaires, dont plus de 207 installations médicales, selon le réseau syrien pour les droits de l’homme, et des unités de défense civile syriennes dont des membres de l’organisation humanitaire des Casques blancs; dénonce les tentatives de la Russie de ternir l’image des Casques blancs dans les médias occidentaux dans une campagne de désinformation agressive et soutenue sur les réseaux sociaux; condamne avec la plus grande fermeté l’implication d’avions de guerre russes dans les attaques chimiques du régime syrien, comme dans le massacre chimique de Khan Cheikhoun en avril 2017, après lequel des avions de guerre russes ont immédiatement bombardé le seul hôpital où les victimes étaient soignées;
13. prie instamment le régime syrien de libérer immédiatement les 130 000 prisonniers politiques injustement détenus, dont des femmes, des hommes et des enfants victimes de disparitions forcées imputables aux forces de sécurité syriennes; condamne fermement le recours systématique à la torture, aux traitements inhumains et aux violences sexuelles dans les conditions horribles dans lesquelles ces prisonniers sont détenus, privés d’accès à un tribunal civil, d’avocat, de soins médicaux ou de leurs familles; souligne qu’ils sont privés de leurs droits fondamentaux à un procès équitable, à savoir qu’aucune information sur leur arrestation n’est divulguée et de faux aveux leur sont soutirés sous la torture; demande instamment aux autorités syriennes d’accorder sans exception un accès immédiat et sans entrave aux centres de détention aux ONG humanitaires internationales reconnues et aux organisations de contrôle sans notification préalable;
14. souligne que l’EIIL/Daech est toujours actif dans la région et n’a pas été vaincu; exprime son inquiétude quant aux difficultés rencontrées pour préserver les preuves des crimes perpétrés par l’EIIL/Daech et y accéder, et pour découvrir le sort des personnes enlevées; invite l’Union et ses États membres à soutenir les efforts déployés sur le terrain pour recueillir et préserver les preuves de ces crimes; se félicite des poursuites engagées contre les ressortissants de l’Union et de pays tiers qui ont rejoint l’EIIL/Daech;
15. se déclare préoccupé par la résurgence de l’EIIL/Daech dans le nord-est de la Syrie; salue les initiatives de la coalition internationale pour lutter contre l’EIIL/Daech; souligne à quel point il est important que les États-Unis maintiennent leur engagement à long terme au sein de la coalition; réaffirme son soutien aux efforts de la coalition internationale de lutte contre l’EIIL/Daech et souligne la contribution considérable apportée par les forces démocratiques de Syrie en tant qu’allié dans la lutte contre ce groupe;
16. exprime son inquiétude face à la montée des tensions au Kurdistan iraquien, qui a joui ces dernières années d’une plus grande stabilité que la Syrie et a accueilli des réfugiés syriens;
17. réaffirme que les personnes responsables de graves crimes internationaux doivent être dûment poursuivies, y compris par les États membres de l’Union en l’absence d’autres procédures de justice transitionnelle internationales ou nationales; souligne qu’il est essentiel de résoudre les questions de la détention et de la disparition de personnes imputables à toutes les parties au conflit, en tant qu’éléments fondamentaux de tout processus de transition visant à instaurer la paix;
18. rappelle que la Cour pénale internationale (CPI) doit rester la juridiction principale de la justice internationale pour les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et les crimes d’agression; considère que cette impunité constitue un terrain propice à d’autres atrocités et aggrave la souffrance des victimes; insiste donc sur la nécessité de traduire tous les auteurs de ces crimes en justice, notamment par l’application du principe de compétence universelle, et d’indemniser les victimes; souligne que l’introduction de mesures de justice réparatrice ne peut attendre la fin du conflit et invite instamment l’Union et ses États membres à renforcer leur soutien aux processus menés par des groupes représentatifs de Syriens; condamne fermement les 16 vetos que la Russie, avec le soutien de la Chine, a opposés au Conseil de sécurité des Nations unies au défèrement de la Syrie devant la CPI;
19. se félicite de la toute première condamnation d’un agent de sécurité du régime syrien pour complicité de crimes contre l’humanité, prononcée le 24 février 2021 par le tribunal de Coblence en Allemagne;
20. salue les efforts déployés par les États membres de l’Union depuis 2019 pour obtenir un large soutien international afin de garantir le financement à long terme, dans le cadre du budget général des Nations unies, du mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables;
21. se félicite de la création de l’équipe commune d’enquête franco-allemande pour contribuer à la poursuite des crimes contre l’humanité dont fait état le rapport Caesar; se félicite des mandats d’arrêt internationaux émis par les deux pays en 2018 pour arrêter trois hauts responsables de la sécurité; salue le rôle joué par les ONG syriennes locales dans la vérification, la documentation, la collecte et la protection des preuves de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, ainsi que le rôle complémentaire joué par des ONG telles que la commission de la responsabilité internationale et de la justice pour aider les autorités répressives et judiciaires européennes à poursuivre efficacement les criminels de guerre présents sur le territoire des États membres de l’Union; invite l’Union européenne à proposer davantage de formations juridiques aux Syriens afin de leur permettre de jouer un rôle dans la lutte contre l’impunité;
22. invite la Commission européenne à présenter un plan d’action de l’Union européenne sur l’impunité, comportant un chapitre spécifique sur la Syrie; souligne que ce plan d’action devrait viser à mieux coordonner et harmoniser les ressources et les efforts des États membres pour poursuivre les criminels de guerre dans l’Union; est d’avis que la justice transitionnelle joue un rôle fondamental pour assurer la paix à long terme; invite l’Union à créer un fonds européen pour les victimes de crimes contre l’humanité en Syrie;
23. soutient les initiatives des États membres pour améliorer la coordination des ressources judiciaires, policières et d’immigration grâce à la création de groupements de juridictions, afin de mutualiser leurs compétences judiciaires et de faciliter les poursuites; souligne que les États membres mieux équipés devraient mettre en commun leurs experts et leurs interprètes afin de faciliter et rationaliser les enquêtes, tandis que chaque État membre devrait s’efforcer de nommer un procureur spécialement chargé de ces crimes afin de renforcer les mesures de coordination judiciaire;
24. invite les États membres à échanger de manière automatique, au niveau de l’Union, des informations sur les personnes soupçonnées de crimes de guerre en vertu de l’article 1 F de la convention de Genève; est d’avis qu’il est également nécessaire de renforcer la coopération entre les autorités chargées de l’immigration et les procureurs chargés, au niveau national, des personnes soupçonnées de crimes de guerre;
25. invite instamment tous les États membres de l’Union, sans exception, à coopérer pleinement dans la lutte contre l’impunité; se déclare profondément préoccupé par le manque de coopération de certains États membres dans la poursuite des criminels de guerre syriens;
26. soutient pleinement les initiatives européennes conduites par les Pays-Bas depuis septembre 2020 afin d’engager une procédure judiciaire contre la Syrie devant la Cour internationale de justice (CIJ) pour violation de la convention des Nations unies contre la torture;
27. invite les États membres à demander, lors de la prochaine conférence de l’OIAC du printemps 2021, la suspension de l’adhésion de la Syrie à l’OIAC pour falsification des preuves de l’utilisation d’armes chimiques; exprime à nouveau sa stupeur face aux 336 attaques chimiques documentées du régime syrien, qui a répandu du chlore gazeux, du sarin et de l’ypérite sur des civils, et condamne ces attaques;
28. condamne fermement les attaques perpétrées contre les travailleurs humanitaires par toutes les parties, en particulier par le régime syrien et l’EIIL/Daech; souligne que le régime syrien porte une responsabilité particulière dans les assassinats ciblés de travailleurs humanitaires depuis 2011; souligne la lourde responsabilité de la Russie dans les attaques contre des travailleurs humanitaires, notamment dans le bombardement de 21 hôpitaux de campagne de Médecins sans frontières (MSF) en octobre 2015;
29. se déclare profondément préoccupé par les souffrances que le peuple syrien endure encore, dix ans après le début du conflit; juge particulièrement préoccupant que les besoins humanitaires en Syrie aient augmenté d’un cinquième au cours de la seule année dernière et que 4,5 millions de Syriens de plus vivent désormais dans l’insécurité alimentaire, et que 90 % d’entre eux se trouvent en dessous du seuil de pauvreté; considère que l’accès humanitaire doit rester une priorité centrale pour l’Union en Syrie, et que les besoins supplémentaires requièrent une réponse financière et politique plus forte de la part de l’Union; note que la résolution 2533 du Conseil de sécurité des Nations unies sur le passage du poste frontière de Bab el-Haoua doit être renouvelée en juillet 2021; déplore que la Russie et la Chine se soient abstenues lors du dernier vote au lieu de se prononcer en faveur de la résolution; estime qu’il n’est pas possible de miser sur l’acheminement transfrontière de l’aide humanitaire destinée aux personnes qui en dépendent actuellement; rappelle que la survie de 2,4 millions de Syriens dépend de ce poste frontière et que la non-prolongation du passage à ce poste frontière pour une durée minimale de 12 mois aurait des conséquences graves, voire mortelles; condamne les actions des membres du Conseil de sécurité des Nations unies qui ont cherché à limiter l’accès humanitaire à des fins politiques; demande instamment à tous les membres du Conseil de sécurité des Nations unies d’appuyer le renouvellement de la résolution sur le passage au poste frontière de Bab el-Haoua afin d’éviter une aggravation de la crise humanitaire et de garantir la multiplication et la consolidation des interventions transfrontières menées conformément aux principes humanitaires; souligne qu’il importe de veiller à réautoriser immédiatement le passage aux postes frontières de Bab al-Salam et de Yaaroubiyé, conformément à la résolution 74/169 de l’Assemblée générale des Nations unies, afin de garantir que l’aide parvient aux populations qui en ont besoin, tant dans le nord-ouest que dans le nord-est, par les itinéraires les plus directs; souligne qu’il importe de veiller à ce que l’aide humanitaire soit exclusivement acheminée aux personnes qui en ont le plus besoin;
30. invite la communauté internationale à répondre d’urgence aux besoins humanitaires sans précédent du peuple syrien à l’intérieur et à l’extérieur de la Syrie; encourage l’Union européenne, en tant qu’organisatrice de la cinquième conférence des donateurs pour la Syrie qui se tiendra à Bruxelles, à convaincre d’autres donateurs internationaux en vue d’accroître l’aide au secteur de la santé dans le cadre du plan d’intervention humanitaire en Syrie grâce à un financement renforcé, modulable et pluriannuel qui couvre les besoins de la population à long terme; invite les donateurs internationaux à investir en particulier dans des programmes de réparation, de restauration et de consolidation des installations sanitaires endommagées ou détruites, en plus des autres infrastructures civiles qui ont subi des dommages;
31. invite instamment le Conseil de sécurité des Nations unies à faire figurer des demandes explicites de protection des travailleurs de la santé dans les prochaines résolutions et discussions officielles des Nations unies; invite à cet égard les États membres de l’Union à apporter une aide politique et opérationnelle aux initiatives et aux enquêtes menées par les Nations unies pour déterminer les responsabilités et faire respecter le droit humanitaire international;
32. souligne, dans la perspective de la cinquième conférence des donateurs qui se tiendra à Bruxelles les 29 et 30 mars 2021, qu’il importe non seulement de confirmer mais aussi d’étoffer les promesses d’aide humanitaire à apporter aux Syriens, aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays et aux réfugiés, ainsi qu’aux populations touchées par la crise dans la région; souligne que l’Union et ses États membres ont été les principaux donateurs pour faire face à la crise humanitaire en Syrie, les dons ayant atteint 20 milliards d’euros depuis 2011; est vivement préoccupé par les intentions présumées du gouvernement britannique de réduire sensiblement ses contributions en matière d’aide, de 67 % pour la Syrie et de 88 % pour le Liban;
33. salue le rôle joué par les États voisins dans la solidarité envers les réfugiés syriens au Liban, en Jordanie, en Turquie et en Iraq et dans l’aide qui leur est apportée; prie instamment les États membres de l’Union de continuer à financer des programmes d’aide humanitaire dans les pays d’accueil des réfugiés ainsi que pour les personnes déplacées à l’intérieur de la Syrie; invite instamment les États membres de l’Union à apporter tous les fonds et soutiens nécessaires pour que tous les enfants syriens réfugiés dans les pays d’accueil aient accès non seulement à l’enseignement primaire, mais aussi à l’enseignement secondaire; exhorte tous les pays d’accueil à adopter toutes les mesures nécessaires et à supprimer tout obstacle administratif ou législatif à cette fin; encourage les pays d’accueil à privilégier l’accès à l’emploi, aux services de santé, à l’éducation et à des documents d’identité, ce qui renforcera la capacité des réfugiés à travailler en vue de gagner leur autonomie;
34. prend acte de l’expiration fin 2021 du fonds fiduciaire Madad en réponse à la crise syrienne; invite la Commission à garantir les moyens financiers affectés à la réponse humanitaire de l’Union à la crise syrienne dans le cadre de l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale, et à veiller à la bonne exécution de ses projets;
35. invite tous les États membres à soutenir le principe de l’aide humanitaire, sans normaliser leurs relations avec le régime syrien; déconseille d’investir des actifs financiers de l’Union, directement ou indirectement, dans la reconstruction générale de la Syrie si le régime syrien ne met pas en œuvre de processus politique crédible; invite le VP/HR, dans le cadre de la planification à long terme de la réponse à apporter en Syrie, à élaborer une politique solide de vigilance en matière de droits de l’homme pour les futures interventions de reconstruction, en étroite coopération avec la société civile syrienne, y compris un cadre de suivi doté d’indicateurs spécifiques pour les normes en matière de droits de l’homme; déplore les projets commerciaux russes, iraniens, chinois et turcs visant à tirer profit de la destruction de la Syrie;
36. demande aux États membres de maintenir les sanctions à l’encontre des personnes et des entités impliquées dans la répression en Syrie; souligne l’importance d’éviter toute conséquence négative non intentionnelle des sanctions par la voie d’exemptions humanitaires pour les actions humanitaires fondées sur des principes, et de régler les problèmes de surconformité bancaire conjointement avec les États-Unis;
37. demande instamment à l’Union et à ses États membres de renouveler et de compléter la liste des personnes faisant l’objet de sanctions ciblées au titre du régime mondial de sanctions de l’Union en matière de droits de l’homme, en y ajoutant les commandants civils et militaires syriens, russes et iraniens qui de toute évidence sont impliqués dans des crimes de guerre;
38. prend l’engagement d’adopter une législation efficace de l’Union sur le devoir de vigilance des entreprises qui imposera aux entreprises de l’Union et aux entreprises présentes sur le marché unique des obligations de vigilance en matière de droits de l’homme;
39. rappelle à tous les États membres que la Syrie n’est pas un pays sûr dans lequel on peut retourner; estime que tout retour doit se faire de manière sûre, volontaire, digne et informée, conformément à la position exprimée par l’Union; invite tous les États membres de l’Union à ne pas modifier leurs politiques nationales dans le but de priver certaines catégories de Syriens de leur statut protégé, et à annuler de telles mesures s’ils les ont déjà appliquées; demande instamment au Liban, à la Turquie et à tous les pays de la région de suspendre les expulsions de Syriens vers la Syrie contre leur volonté;
40. condamne les dommages irréparables que les tactiques de la terre brûlée de Bachar Al-Assad ont infligés aux sites culturels, ainsi que le pillage et la contrebande d’artéfacts par les djihadistes, qui s’en servent pour financer leur participation au conflit;
41. est extrêmement préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire, sanitaire et sécuritaire dans les camps du nord-est de la Syrie, notamment dans les camps d’Al-Hol et de Roj, qui restent des foyers de radicalisation; estime que les ressortissants de l’Union soupçonnés d’appartenir à des organisations terroristes et détenus dans ces camps doivent être jugés devant un tribunal; exprime sa stupeur face à l’assassinat, le 24 février 2021, d’un employé de MSF travaillant dans le camp d’Al-Hol, ce qui prouve une fois de plus que la violence et l’insécurité dans le camp ont un coût humain;
42. invite les États membres à protéger leurs ressortissants mineurs qui peuvent être détenus pour des infractions en rapport avec la sécurité ou pour leurs liens avec des groupes armés;
43. invite les États membres à rapatrier tous les enfants européens, en tenant compte de leur situation familiale propre et de l’intérêt supérieur de l’enfant en premier lieu, et de leur fournir le soutien nécessaire à leur réadaptation et à leur réintégration, dans le plein respect du droit international;
44. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au Service européen pour l’action extérieure, au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au gouvernement et au Conseil des représentants de la République d’Iraq, au gouvernement régional du Kurdistan, et au gouvernement et au parlement de la Fédération de Russie.