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Procédure : 2020/2221(INI)
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Cycle relatif au document : A9-0330/2021

Textes déposés :

A9-0330/2021

Débats :

PV 13/12/2021 - 20
CRE 13/12/2021 - 20

Votes :

PV 15/12/2021 - 17

Textes adoptés :

P9_TA(2021)0501

Textes adoptés
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Mercredi 15 décembre 2021 - Strasbourg
L'incidence de la criminalité organisée sur les ressources propres de l'UE et sur le détournement des fonds européens
P9_TA(2021)0501A9-0330/2021

Résolution du Parlement européen du 15 décembre 2021 sur l’incidence de la criminalité organisée sur les ressources propres de l’UE et sur le détournement des fonds européens, en particulier dans le domaine de la gestion partagée, dans une perspective d’audit et de contrôle (2020/2221(INI))

Le Parlement européen,

–  vu les articles 310, 317 et 325 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

–  vu la directive (UE) 2017/1371 du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2017 relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal (directive PIF)(1),

–  vu la directive (UE) 2018/843 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive (UE) 2015/849 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme ainsi que les directives 2009/138/CE et 2013/36/UE(2),

–  vu le règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil du 18 juillet 2018 relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) nº 1296/2013, (UE) nº 1301/2013, (UE) nº 1303/2013, (UE) nº 1304/2013, (UE) nº 1309/2013, (UE) nº 1316/2013, (UE) nº 223/2014, (UE) nº 283/2014 et la décision nº 541/2014/UE, et abrogeant le règlement (UE, Euratom) nº 966/2012(3) (règlement financier),

–  vu les rapports 2019 et 2020 de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et les rapports d’activité du comité de surveillance de l’OLAF pour 2019 et 2020,

–  vu le rapport spécial nº 01/2019 de la Cour des comptes européenne intitulé «Dépenses financées par l’UE: des mesures s’imposent pour lutter contre la fraude»,

–  vu le rapport spécial nº 06/2019 de la Cour des comptes européenne intitulé «La lutte contre la fraude au détriment des dépenses de cohésion de l’UE: les autorités de gestion doivent renforcer la détection, la réaction et la coordination»,

–   vu le rapport spécial nº 13/2021 de la Cour des comptes européenne intitulé «L’UE et la lutte contre le blanchiment de capitaux dans le secteur bancaire: des efforts fragmentés et une mise en œuvre insuffisante»,

–  vu la communication de la Commission du 28 avril 2019 intitulée «Stratégie antifraude de la Commission: action renforcée pour protéger le budget de l’Union européenne» (COM(2019)0196) et le document de travail des services de la Commission qui l’accompagne, intitulé «Fraud risk assessment» (Évaluation des risques de fraude) (SWD(2019)0171),

–  vu le rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil du 3 septembre 2020 intitulé «31e rapport annuel sur la protection des intérêts financiers de l’Union européenne – Lutte contre la fraude – 2019» (rapport PIF) (COM(2020)0363), et les documents de travail des services de la Commission qui l’accompagnent (SWD(2020)0156, SWD(2020)0157, SWD(2020)0158, SWD(2020)0159 et SWD(2020)0160),

–  vu le règlement (UE) 2021/785 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2021 établissant le programme de l’Union en matière de lutte contre la fraude et abrogeant le règlement (UE) nº 250/2014(4),

–  vu le règlement (UE) 2017/1939 du Conseil du 12 octobre 2017 mettant en œuvre une coopération renforcée concernant la création du Parquet européen(5),

–  vu la décision (UE) 2019/1798 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 portant nomination du chef du Parquet européen(6),

–  vu l’article 5, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne et le protocole (nº 2) sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité,

–  vu le rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) intitulé «Fraud and corruption in European Structural and Investment Funds – a spotlight on common schemes and preventive actions» (Fraude et corruption dans les Fonds structurels et d’investissement européens – coup de projecteur sur les systèmes les plus courants et sur les mesures de prévention à prendre), paru en 2019(7),

–  vu les lignes directrices concernant les stratégies nationales antifraude, élaborées par un groupe de travail d’experts des États membres, dirigé et coordonné par l’unité de prévention de la fraude, de reporting et d’analyse de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF)(8), publiées le 13 décembre 2016,

–  vu la communication de la Commission du 14 avril 2021 relative à la stratégie de l’Union visant à lutter contre la criminalité organisée (2021-2025) (COM(2021)0170),

–  vu l’étude intitulée «The Impact of Organised Crime on the EU’s Financial Interests» (L’incidence de la criminalité organisée sur les intérêts financiers de l’Union), publiée le 7 juillet 2021 par la direction générale des politiques internes de l’Union du Parlement européen,

–   vu le paquet de quatre propositions législatives de la Commission visant à harmoniser les règles de l’Union en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT), publié le 20 juillet 2021,

–  vu sa résolution du 7 juillet 2021 sur la protection des intérêts financiers de l’Union européenne – Lutte contre la fraude – Rapport annuel 2019(9),

–  vu l’article 54 de son règlement intérieur,

–  vu les avis de la commission de l’agriculture et du développement rural et de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures,

–  vu le rapport de la commission du contrôle budgétaire (A9-0330/2021),

A.  considérant que la criminalité économique et financière implique le recours à la corruption, à la fraude, à la contrainte, à la violence, à la collusion, à l’obstruction et à l’intimidation pour réaliser des gains illicites, des fonds d’origine illégale étant dissimulés par le biais du blanchiment et, éventuellement, utilisés à d’autres fins illicites, dont le financement du terrorisme;

B.  considérant que, selon la Cour des comptes européenne, la prévention de la fraude n’a pas fait l’objet d’une attention suffisante et la Commission ne dispose pas d’informations exhaustives sur l’ampleur, la nature et les causes des fraudes;

C.  considérant que de plus en plus d’organisations criminelles exercent des activités dans l’Union, avec bien souvent une dimension transfrontière; que ce phénomène se complexifie avec l’apparition de nouveaux marchés criminels et de nouvelles formes d’activité que font naître la mondialisation et les nouvelles technologies; que les organisations de type mafieux sont particulièrement actives pour ce qui est des tentatives d’intercepter les fonds de l’Union dans les divers États membres;

D.  considérant que les technologies offrent de nouvelles possibilités en matière de détection et de surveillance, ce qui permet de rendre le travail des enquêteurs plus efficace et de concevoir des mesures répressives plus intelligentes;

Fonds de l’Union atteints par la criminalité organisée

1.  souligne qu’il a été démontré que la criminalité organisée s’était largement infiltrée au sein des structures sociales, politiques, économiques, financières, entrepreneuriales et administratives des États membres, et qu’elle était en mesure de blanchir les énormes revenus qu’elle tire de ses activités criminelles dans l’économie légale, y compris des actes commis contre les intérêts financiers de l’Union, raison pour laquelle elle représente une menace sérieuse pour les libertés des citoyens européens; souligne, dans ce contexte, que la criminalité organisée met gravement en péril la démocratie et l’état de droit, et que la lutte contre la corruption et l’infiltration de l’économie légale par la criminalité organisée est essentielle pour garantir l’égalité de traitement devant la loi, protéger les droits et le bien-être des citoyens, prévenir les abus et veiller à ce que les titulaires de fonctions publiques rendent des comptes; souligne qu’une action commune et coordonnée de l’Union et de ses États membres est nécessaire;

2.  constate que la fraude aux recettes, et notamment la fraude douanière, est un domaine dans lequel la criminalité organisée est particulièrement nuisible; souligne que la fraude douanière est une composante majeure de la fraude aux recettes; relève que ce type de fraude est souvent commise en falsifiant les déclarations d’importation, en utilisant des faux pour les déclarations de marchandises et en recourant à de fausses déclarations de l’origine des marchandises afin de contourner les droits antidumping de l’Union; fait observer que la Cour des comptes a récemment mis en évidence des lacunes dans la législation relative aux contrôles douaniers et son application, lesquelles rendent insuffisants l’harmonisation, l’évaluation des risques et les échanges d’informations dans l’Union et entre les États membres; redoute que la criminalité organisée n’en profite pour exploiter les failles du système actuel et frauder l’Union et ses États membres en détournant leurs recettes; relève que la fraude douanière prend aussi souvent la forme de sous-déclaration de la valeur des marchandises importées dans l’Union, ce qui permet aux fraudeurs de payer moins de droits à l’importation; observe que les combines de sous‑évaluation examinées par l’OLAF ces dernières années concernent principalement des marchandises importées de Chine; se félicite du travail d’enquête accompli par l’OLAF dans ces affaires, qui a permis de réduire les pertes budgétaires de l’Union estimées à plus de 1 milliard d’euros en 2017 à 180 millions d’euros en 2020(10); souligne qu’en dépit de ces évolutions positives, les efforts de lutte contre la fraude par sous-évaluation doivent se poursuivre, étant donné que les systèmes de fraude évoluent vers de nouveaux modèles, en particulier dans le domaine du commerce électronique;

3.  constate que la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) constitue également une part importante de la fraude aux recettes; relève que la fraude à la TVA est définie comme le fait d’éviter le paiement de la TVA ou de réclamer frauduleusement le remboursement de la TVA aux autorités nationales à la suite d’une chaîne illicite d’opérations; prend acte que les formes les plus courantes de fraude à la TVA sont la fraude intracommunautaire à l’opérateur défaillant, la fraude dans le commerce électronique et la fraude au régime douanier 42; ajoute que parmi les secteurs les plus exposés au risque de fraude à la TVA figure celui des carburants, au sein duquel les réseaux criminels abusent des règles en matière d’exonération de TVA et des différences de tarification entre les différents types de carburants, entraînant des pertes importantes de recettes fiscales; relève avec inquiétude qu’il est avéré que des organisations criminelles échangent des connaissances, des informations et des renseignements en matière de fraude à la TVA, en recourant largement aux nouvelles technologies, en utilisant des cryptomonnaies parallèles et en exploitant les lacunes des structures commerciales légales afin de consolider et de dissimuler leurs activités criminelles, ce qui leur permet de générer des profits de plusieurs milliards d’euros grâce à la fraude à la TVA; souligne que, selon l’évaluation 2021 de la menace que représente la grande criminalité organisée (rapport SOCTA UE 2021) d’Europol, la fraude à la TVA est commise par des personnes ayant une bonne connaissance du système, de la législation et des procédures fiscales liés à la TVA; déplore les faiblesses systémiques du système actuel de TVA intracommunautaire et le manque d’échange d’informations entre les États membres;

4.  regrette de voir les subventions touchées par la fraude dans le volet des dépenses du budget de l’Union; constate avec une profonde inquiétude que, selon les rapports d’Europol, le nombre de fraudes de ce type n’a cessé d’augmenter au fil des ans; relève que la fraude aux subventions sévit dans de nombreux domaines de dépenses de l’Union, tels que la politique agricole, la politique de cohésion, la politique de la recherche et du développement et celle de l’environnement; observe avec inquiétude que les demandes frauduleuses de subventions de l’Union et les fraudes dans les marchés publics reposent généralement sur des falsifications de déclarations, de rapports d’état d’avancement et de factures; signale que bon nombre de ces activités frauduleuses sont commises par des bandes organisées, y compris de type mafieux;

5.  observe que, outre les menaces évidentes à l’ordre public et à la sécurité de la société que représentent les manifestations de violence typiques des organisations criminelles, la criminalité organisée peut engendrer des situations d’urgence tout aussi graves, à savoir la pénétration de l’économie légale et la corruption des fonctionnaires qui l’accompagne et permet à son tour d’infiltrer les institutions et l’administration publique; demande de nouveau que l’Union devienne sans délai un membre à part entière du Groupe d’États contre la corruption (GRECO); insiste sur la nécessité de doter le système judiciaire de ressources suffisantes et d’utiliser tous les outils disponibles de manière cohérente dans tous les États membres pour détecter et combattre la fraude ainsi que la criminalité financière et économique;

6.  souligne que la politique agricole commune (PAC) constitue le poste le plus important du budget de l’Union, représentant 31 % du total des dépenses budgétaires pour la période 2021-2027; souligne qu’il est impératif que les systèmes de contrôle de la PAC aux niveaux européen et national fonctionnent correctement pour assurer une protection efficace des intérêts financiers de l’Union et de ses citoyens contre tout détournement des fonds de l’Union; prend acte de l’incidence toute particulière de la criminalité organisée dans les détournements de fonds de la PAC; redit son inquiétude devant le fait que le dispositif actuel des subventions de la PAC encourage l’accaparement des terres par des structures criminelles et oligarchiques; souligne que les structures oligarchiques portent tout autant, voire davantage, atteinte à la PAC sur le plan financier que les groupes criminels organisés, et qu’il est essentiel d’identifier ces structures pour protéger les véritables agriculteurs; souligne que les agriculteurs doivent être protégés contre les intimidations des groupes criminels qui cherchent à réclamer des subventions pour leurs terres; souligne que le manque de transparence allié à la corruption permet aux organisations criminelles de dissimuler leurs activités et d’empêcher les fonds de l’Union de parvenir aux bénéficiaires prévus; réaffirme que la mise au point d’instruments juridiques appropriés à l’échelon de l’Union contre l’accaparement des terres et l’échange efficace des informations sont déterminants à cet égard; réaffirme avec force la nécessité d’une meilleure coopération entre la Commission et les États membres;

7.  souligne que la constitution d’une base de données centralisée et interopérable, alimentée de données normalisées et de qualité, répertoriant les bénéficiaires directs et finaux des subventions de l’Union est essentielle pour détecter les fraudeurs, les réseaux criminels et les structures oligarchiques, et pour empêcher ceux-ci de détourner des fonds de l’Union; insiste sur le fait qu’une telle base de données renforcerait considérablement la capacité des services répressifs à recouvrer les fonds détournés; souligne que, pour créer une telle base de données, il convient d’améliorer l’interopérabilité entre les bases de données nationales et européennes existantes; engage la Commission et les États membres à coopérer aux fins de la création d’une telle base de données centralisée, dans le respect des arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne; insiste sur le fait que les informations doivent être de qualité suffisante et disponibles dans un format normalisé, de sorte qu’elles puissent être échangées et compilées de manière automatisée; souligne que les bénéficiaires doivent disposer d’un identifiant unique qui garantisse leur traçabilité entre les États membres et les fonds, indépendamment de la méthode de gestion; met en avant que l’utilisation de nouvelles technologies, telles que des registres fonciers numériques complets, est essentielle pour améliorer la transparence, collecter efficacement les données et atténuer les risques, et réduire en fin de compte les possibilités pour les fraudeurs; salue les efforts déployés par la Commission pour étendre l’utilisation de ces technologies et engage tous les États membres à accélérer la mise en œuvre de ces solutions; souligne qu’il est nécessaire que la Commission et les agences compétentes renforcent leurs contrôles, y compris dans le domaine de l’élevage, particulièrement en ce qui concerne les fonds alloués en fonction du nombre de têtes de bétail, dont il convient de vérifier l’existence réelle;

8.  signale que la concentration de l’aide au revenu agricole est principalement due aux paiements directs à la surface; met en avant la nécessité d’un soutien plus ciblé et d’un meilleur équilibre entre les grands et les petits bénéficiaires au niveau des États membres; regrette que le plafonnement reste facultatif dans la nouvelle PAC; encourage les États membres à utiliser les différents instruments redistributifs de la nouvelle PAC contre le détournement des fonds agricoles et pour une répartition plus équitable de ces derniers; critique le fait que, lors du Conseil européen extraordinaire de juillet 2020, les États membres aient décidé unilatéralement de ne pas introduire de montants maximaux pour les personnes physiques relevant du premier ou du deuxième pilier, anticipant ainsi une décision qui devait être prise dans le cadre des négociations en trilogue sur la réforme de la PAC;

9.  précise que les États membres sont responsables des fonds agricoles de l’Union en gestion partagée avec la Commission; estime que le nouveau modèle de mise en œuvre et les nouveaux plans stratégiques nationaux offrent l’occasion de renforcer les contrôles par les États membres et la Commission en ce qui concerne la distribution et la gestion des fonds, à condition que les États membres disposent de systèmes de gestion et de contrôle efficaces, et de sensibiliser les autorités chargées de l’attribution des subventions aux possibilités de fraude; souligne que le principe d’audit unique devrait contribuer à limiter la pression sur les exploitants agricoles et que les contrôles ne devraient pas entraîner une charge administrative inutile ou supplémentaire pour les petits et moyens agriculteurs; met l’accent, à cet égard, sur l’importance des échanges entre les services répressifs européens et les autorités chargées de la mise à disposition des fonds afin d’assurer la meilleure sensibilisation possible aux fraudes éventuelles;

10.  demande à la Commission de sensibiliser les États membres au phénomène des organisations criminelles impliquées dans l’évasion fiscale, la corruption et des pratiques illicites (telles que les «contrats de poche») dans le contexte des transactions foncières et de les soutenir dans la lutte contre ce phénomène;

11.  estime qu’il convient de ne ménager aucun effort pour faire en sorte que le nouveau modèle de mise en œuvre de la PAC n’entraîne pas une réduction du niveau d’absorption des fonds de la PAC par les bénéficiaires finaux en raison d’erreurs involontaires, d’un manque de transparence des règles ou d’un manque d’informations adéquates, en particulier pendant la période initiale de sa mise en œuvre;

12.  insiste sur la nécessité de disposer d’un système de prévention de la fraude spécifiquement adapté pour prévenir tout détournement des fonds agricoles de l’Union; ajoute que si le nombre de cas de fraude a considérablement diminué ces dernières années, les mesures de lutte contre la fraude devraient tout de même rester une priorité de premier rang pour l’Union et les États membres; souligne que les fonds de l’Union doivent être recouvrés au plus vite et se félicite des dispositions prévues par le règlement horizontal de la PAC concernant les sanctions proportionnées, qui constituent des moyens de dissuasion efficaces;

13.  relève que l’OLAF est chargé de lutter contre la fraude dans les paiements de la PAC, et que les dossiers ouverts reposent sur des informations émanant des États membres ou des dénonciations de citoyens concernés qui peuvent alors s’exposer à des représailles; souligne en outre que les dossiers de l’OLAF sont hautement confidentiels et ne font pas l’objet d’une large publicité au moment de leur clôture; demande, dès lors, que la protection des lanceurs d’alerte soit assurée, et encourage les autorités chargées d’enquêter sur les affaires de fraude à partager leurs bonnes pratiques dans ce domaine;

14.  insiste sur la nécessité de contrôler les organismes payeurs agricoles dans les États membres, de s’assurer de leur indépendance tant formelle qu’informelle et de mettre leurs travaux en conformité avec les règles de l’Union, en procédant, entre autres, à des inspections sur place, qui pourraient permettre d’améliorer le système de contrôle;

15.  met l’accent sur le fait que le règlement financier de l’Union, et notamment son article 61, doit être respecté et mis en œuvre dans tous les États membres et appliqué à tous les versements de fonds de l’Union, y compris les paiements directs au secteur agricole;

16.  exhorte la Commission à proposer la création d’un mécanisme de plainte centralisé au niveau de l’Union visant à soutenir les personnes qui sont confrontées à des pratiques abusives d’accaparement des terres ou à des intimidations de la part d’organisations criminelles, afin de leur donner la possibilité de déposer rapidement plainte devant la Commission;

17.  invite les États membres à mettre en œuvre rapidement la directive (UE) 2019/1937 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union(11) (directive sur les lanceurs d’alerte) et à inclure, dans le cadre de cette mise en œuvre, des garanties juridiques pour les personnes et les organismes indépendants qui dénoncent la corruption, notamment les journalistes, les lanceurs d’alerte, les médias indépendants et les ONG de lutte contre la corruption; engage tous les États membres à se doter de dispositifs complets de protection des lanceurs d’alerte; rappelle l’urgence d’une telle demande compte tenu des informations faisant état d’une augmentation des agressions physiques à l’encontre des journalistes, de la multiplication des poursuites-bâillons et du recours à des lois de sécurité accélérées dans certains États membres qui criminalisent la diffusion d’images ou de données concernant les agents des forces de l’ordre, et entravent ainsi le travail journalistique et limitent la responsabilité des autorités nationales;

18.  constate avec inquiétude que la Commission et l’OLAF voient dans la fraude aux appels d’offres et aux marchés publics une tendance majeure chez les fraudeurs; constate que la collusion entre particuliers et organisations, l’utilisation de fausses factures, la création de fausses entreprises et de faux justificatifs ainsi que le détournement des fonds de leur objectif initial sont des moyens courants de saper les procédures de passation de marchés publics; relève que les montages frauduleux présentent souvent un caractère transnational et peuvent s’étendre sur plusieurs pays (de l’Union ou non), ce qui les rend difficilement décelables et annihilables; regrette que, dans de nombreux États membres, il n’existe pas de législation spécifique contre la criminalité organisée; souligne qu’une coopération en temps opportun entre les autorités répressives nationales fait partie intégrante d’une réponse efficace à la criminalité transnationale; invite les autorités nationales et de l’Union compétentes à améliorer l’interopérabilité de leurs systèmes, en facilitant l’échange d’informations en temps utile et en renforçant la coopération et les opérations conjointes pour lutter contre la criminalité organisée transnationale; demande, par conséquent, de renforcer le caractère transnational de la lutte contre la fraude et l’harmonisation des législations pénales dans les États membres afin de lutter contre la criminalité organisée, objectif qui revêt une importance cruciale; encourage la Commission à élaborer un cadre réglementaire commun qui permettrait aux États membres de transférer des procédures pénales à un autre État membre afin d’éviter des enquêtes parallèles;

19.  constate que la pandémie de COVID-19 a ouvert de nouvelles possibilités aux fraudeurs et à la criminalité organisée; relève avec inquiétude qu’Europol a observé une hausse des activités criminelles en lien avec le coronavirus, ce sous la forme de cybercriminalité, de fraude et de contrefaçon, y compris de matériel sanitaire et d’équipements de protection individuelle; rappelle les escroqueries et les fausses offres de vaccins que des États membres de l’Union ont détectées, notamment, entre autres exemples déplorables, celle où des fraudeurs ont tenté de vendre plus de 1,1 milliard de doses de vaccin pour un prix total de plus de 15,4 milliards d’euros; souligne que le péril que constitue la vente illicite de faux certificats COVID-19 numériques croît rapidement, de nombreux cas ayant été recensés dans plusieurs États membres;

20.  dit son inquiétude devant le bilan dressé dans le rapport PIF, qui constate que sept États membres ont décelé des fraudes frappant des infrastructures de santé en 2019 et que les infrastructures sanitaires sont particulièrement affectées par les violations des règles de passation des marchés publics; souligne que le recours à des procédures d’urgence pour la passation des marchés face à la crise de la COVID-19 a pu aggraver ces problèmes; souligne que les procédures d’urgence doivent respecter les mêmes normes de transparence et de responsabilité que les procédures ordinaires; invite la Commission et les autorités des États membres à mener à bien ces procédures au moyen d’outils d’atténuation des risques, en mettant l’accent sur la prévention, ainsi que d’une surveillance et de contrôles ex post approfondis;

21.  relève avec vive inquiétude la prévision d’Europol selon laquelle la récession consécutive à la pandémie créera de nouvelles possibilités pour la criminalité organisée; attire l’attention sur le fait que, l’argent attirant la criminalité organisée, la hausse sans précédent des dépenses de l’Union prévue dans le cadre du plan de relance NextGenerationEU présente des risques considérables de détournement de fonds par les organisations criminelles; souligne que cette hausse sans précédent des dépenses doit aller de pair avec l’affectation de ressources appropriées aux institutions qui forment les cadres nationaux et de l’Union de lutte contre la corruption, la fraude et la criminalité organisée; rappelle à cet égard que l’utilisation de nouvelles technologies, telles que la base de données Arachne et le système de détection rapide et d’exclusion (EDES), devrait devenir un élément obligatoire de l’exécution du budget de l’Union; demande une nouvelle fois au Conseil de convenir d’attribuer 40 postes supplémentaires d’auditeurs à la Cour des comptes européenne et exhorte de nouveau l’OLAF et le Parquet européen à affecter des ressources suffisantes à la détection des activités criminelles visant NextGenerationEU et aux poursuites en la matière;

22.  souligne qu’il est notoire que la criminalité organisée, en particulier celle de type mafieux, a déjà par le passé orienté son activité vers les énergies renouvelables; met en garde contre le fait que, étant déjà actives dans ce secteur, les organisations criminelles peuvent facilement intercepter les fonds consacrés à la transition écologique, lesquels représentent une part substantielle de NextGenerationEU;

23.  prend acte avec inquiétude des moyens dont se sert la criminalité organisée, notamment le blanchiment de capitaux, la cybercriminalité, la fraude documentaire, la corruption, les fausses immatriculations et le recours à des sociétés écrans; souligne que ces pratiques retentissent sur la capacité des autorités à vérifier efficacement si les deniers de l’Union sont employés comme prévu;

Estimation de l’incidence financière de la criminalité organisée

24.  constate avec préoccupation qu’à diverses reprises il a été jugé extrêmement difficile, voire impossible, d’estimer l’ampleur et la gravité des incidences de la criminalité organisée sur le budget de l’Union, en raison, entre autres, de la diversité des définitions de la criminalité organisée dans tous les États membres et de l’absence d’estimations fiables en vue d’évaluer la situation, ce qui complique les efforts de coordination des mesures, les enquêtes et les poursuites; regrette que la Commission et les autorités nationales manquent de connaissances sur l’ampleur, la nature et les causes de la fraude et n’aient pas encore à ce jour réalisé d’évaluation rigoureuse des fraudes non détectées; souligne que le manque d’estimations fiables empêche une appréciation précise de la situation, ce qui entrave la lutte contre la criminalité organisée; engage les autorités nationales compétentes à améliorer la collecte des données et à accroître la fiabilité des données communiquées à la Commission; invite la Commission à se coordonner et à collaborer avec les autorités des États membres afin de procéder à une évaluation complète, à l’échelle de l’Union, de l’ampleur réelle, de la nature et des causes de la fraude, en associant les agences de l’Union concernées et en coopérant avec les partenaires des pays voisins de l’Union;

25.  relève que le rapport PIF de 2019 a dénombré 514 irrégularités frauduleuses dans le volet des dépenses pour un montant de 381,4 millions d’euros, ainsi que 425 autres du côté des recettes, pour un total de 79,7 millions d’euros; souligne que ces chiffres ne rendent pas compte de l’ampleur véritable de la fraude, laquelle est vraisemblablement bien plus grande; attire également l’attention sur le fait que les bandes organisées ne sont pas responsables à elles seules de toutes les fraudes, notamment dans le domaine des recettes, où lesdites fraudes sont souvent commises par des particuliers ou des entreprises, voire par des hauts fonctionnaires ou agents des services publics;

26.  relève que, selon des études récentes, l’infiltration de la criminalité organisée dans la passation des marchés publics de l’Union touche entre 2,7 % et 3,6 % du total des dépenses; regrette que, d’après ces chiffres, la criminalité organisée ait peut-être détourné entre 1,9 et 2,6 milliards d’euros de fonds de cohésion de l’Union sur la période 2014-2020; fait observer que, si le caractère limité des données disponibles amène à relativiser la fiabilité de ces estimations, celles-ci n’en donnent pas moins une idée de la gravité du problème;

27.  souligne avec préoccupation que la corruption fait partie intégrante de quasiment toutes les activités des organisations criminelles et qu’elle représente une grande menace pour les intérêts financiers de l’Union, avec des pertes de PIB estimées à entre 170 et 990 milliards d’euros et un coût pour l’Union de plus de 5 milliards d’euros par an uniquement pour la part du budget consacrée aux marchés publics(12);

28.  constate avec regret que, selon les estimations d’Europol, ce sont entre 40 et 60 milliards d’euros qui tombent chaque année dans l’escarcelle des organisations criminelles par le biais d’une forme particulière de fraude à la TVA, à savoir la fraude intracommunautaire à l’opérateur défaillant (MTIC); souligne que ce sont les États membres qui subissent la majeure partie des pertes de TVA, 0,3 % seulement de la TVA perçue étant versée au budget de l’Union; met l’accent sur le fait que les ressources propres fondées sur la TVA n’en constituaient pas moins 11,97 % des recettes totales du budget de l’Union en 2019, ce qui illustre la gravité des répercussions que les pertes de TVA dues aux organisations criminelles ont sur les recettes de l’Union;

Actions d’audit et de contrôle dirigées contre la criminalité organisée

29.  regrette que la Commission ait constaté des carences dans ses opérations de recueil et d’analyse des données relevant de la lutte contre la fraude, dans l’utilisation faite des systèmes de déclaration (tels qu’EDES et Arachne) par les États membres et dans la circulation des informations; constate que la législation de l’Union sur les échanges d’informations relatives à la criminalité transfrontière n’a été mise à jour que récemment et ne s’étend pas à la totalité des autorités compétentes, ce qui obère l’efficacité des échanges d’informations entre les organes de l’Union et entre les États membres;

30.  voit dans la directive PIF un levier utile de protection du budget de l’Union, car elle contient une définition commune des infractions pénales et du détournement de fonds et harmonise les sanctions prises face aux infractions dirigées contre les intérêts financiers de l’Union; se félicite que la directive établisse des procédures claires de déclaration et d’enquête, définisse le suivi du cadre de gestion des risques de fraude et favorise l’utilisation des informations et des bases de données ainsi que le recours à l’analyse des données par les États membres; se félicite de la récente évaluation par la Commission de la mise en œuvre de la directive PIF et du fait que tous les États membres aient notifié leur transposition complète de cette directive(13); s’inquiète toutefois du degré de transposition de la directive en droit national; rappelle que la Commission a recensé des problèmes de conformité dans plusieurs États membres; relève que ces problèmes concernent, entre autres, la définition des infractions pénales («fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union», «blanchiment de capitaux», «corruption», «détournement»), la responsabilité et les sanctions à l’égard des personnes physiques et morales, ainsi que l’obligation faite aux États membres de communiquer chaque année des données statistiques à la Commission; invite instamment les États membres à aligner pleinement leur législation nationale sur les exigences de la directive PIF et la Commission à surveiller de près leur respect par les États membres, une transposition correcte étant d’une importance vitale pour permettre au Parquet européen de mener des enquêtes et des poursuites efficaces; demande instamment à la Commission de prendre toutes les mesures nécessaires aux fins d’une transposition correcte et intégrale, y compris la possibilité d’engager des procédures d’infraction;

31.  salue la création du Parquet européen qui, chargé de rechercher, de poursuivre et de renvoyer en jugement les auteurs d’infractions portant atteinte au budget de l’Union, constitue un levier important de la lutte contre la fraude et la criminalité organisée dans l’Union; préconise de doter le Parquet européen d’un budget opérant et de ressources humaines appropriées; considère que le rôle du Parquet européen est particulièrement prometteur dans la lutte contre la criminalité transfrontière liée au budget de l’Union, étant donné que les autorités nationales sont limitées par leurs frontières dans leurs poursuites et que d’autres organes de l’Union (tels qu’Eurojust, Europol et l’OLAF) ne possèdent pas les pouvoirs d’enquête et de poursuites requis; relève que le mandat du Parquet européen est défini dans la directive PIF et comprend la lutte contre la fraude sur les dépenses et les recettes de l’Union, la fraude à la TVA, le blanchiment de capitaux, la corruption et la participation à des organisations criminelles; souligne que ces éléments sont essentiels dans la lutte contre la criminalité organisée et est convaincu que le Parquet européen constituera dès lors un outil efficace de lutte contre les organisations criminelles qui ont une incidence sur le budget de l’Union; regrette que cinq États membres n’aient pas encore rejoint le Parquet européen et les invite à prendre les mesures nécessaires pour y adhérer; engage la Commission à exercer une surveillance plus stricte de ces États membres et regrette l’absence de nominations de procureurs européens délégués, notamment par la Slovénie, ainsi que les retards considérables de nombreux autres États membres; souligne que cette situation affaiblit gravement l’efficacité et l’efficience de la lutte paneuropéenne contre la criminalité transfrontière;

32.  insiste sur la nécessité de mieux lutter contre les délits environnementaux de dimension transfrontière qui dégradent la biodiversité et les ressources naturelles, tels que le commerce illégal de végétaux et d’animaux, l’exploitation illégale des forêts et le trafic de bois, ainsi que le trafic de déchets; demande à la Commission d’engager l’extension du mandat du Parquet européen aux délits environnementaux transfrontières;

33.  regrette que la Commission ait établi pour le Parquet européen un plan de recrutement qui ne lui permette pas de s’acquitter efficacement de son mandat; souligne que le Parquet européen doit disposer d’effectifs appropriés pour pouvoir accomplir sa mission principale, à savoir la lutte contre la criminalité transfrontière ayant une incidence sur le budget de l’Union; regrette que le Parquet européen soit actuellement doté d’un nombre insuffisant d’analystes de dossiers et d’enquêteurs financiers pour soutenir les activités de poursuite des procureurs européens délégués; déplore que le personnel opérationnel du Parquet européen se concentre actuellement principalement sur l’enregistrement des affaires et non sur les poursuites; regrette que le Parquet européen ait dû réclamer d’urgence davantage d’experts qualifiés dans les domaines juridique et informatique ainsi que de personnel administratif pour assurer son bon fonctionnement; souligne qu’en plus de sa charge annuelle de 2 000 affaires, le Parquet européen doit faire face à un arriéré de plus de 3 000 affaires; est préoccupé par le fait que la charge de travail du Parquet européen augmentera encore dans les années à venir, compte tenu des montants sans précédent mobilisés par la facilité pour la reprise et la résilience (FRR) et de l’accélération des procédures de passation de marchés pendant la crise de la COVID-19; souligne que le plan de recrutement de la Commission pour le Parquet européen pour 2022 est insuffisant pour remédier aux lacunes recensées par le Parquet européen; met en avant que, lorsque le Parquet européen sera pleinement opérationnel, les bénéfices produits par son travail de protection du budget de l’Union dépasseront les coûts engendrés; invite instamment la Commission à augmenter le budget et le personnel qualifié mis à la disposition du Parquet européen afin que celui-ci puisse réaliser pleinement son potentiel de lutte contre la criminalité;

34.  salue la communication relative à la stratégie de l’Union visant à lutter contre la criminalité organisée (2021-2025) qu’a présentée la Commission et dans laquelle elle met l’accent sur l’importance de favoriser les échanges d’informations efficaces et diligents entre les organes de l’Union et entre les États membres, notamment grâce à une meilleure interopérabilité des systèmes d’information de l’Union et à la connexion des bases de données pertinentes entre tous les États membres; salue l’engagement de la Commission de rationaliser la coopération en matière répressive et d’exploiter pleinement le potentiel des outils existants, tels que la plateforme pluridisciplinaire européenne contre les menaces criminelles (EMPACT); se félicite que la Commission ait pour ambition d’améliorer les échanges d’informations et la coopération entre Europol, Eurojust et les pays tiers;

35.  se félicite que la Commission ait pour souci d’empêcher l’infiltration de la criminalité organisée dans l’économie légale, ce par exemple en révisant le cadre de l’Union en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et les règles de l’Union en vigueur visant à lutter contre la corruption; se réjouit que la Commission soit déterminée à adapter les services répressifs à l’ère numérique;

36.  relève que le blanchiment de capitaux permet aux criminels de dissimuler leurs profits et que l’offre de services de blanchiment de capitaux est en soi devenue une activité rentable pour les organisations criminelles; souligne que cela a des répercussions considérables sur les intérêts financiers de l’Union et des États membres, étant donné qu’un pourcentage désastreux de 98 % des produits estimés du crime n’est pas confisqué et reste aux mains des malfaiteurs; estime que la lutte contre le blanchiment de capitaux est essentielle pour empêcher les organisations criminelles de détourner des fonds; est profondément préoccupé par les conclusions de la Cour des comptes européenne(14) selon lesquelles les actions de l’Union visant à prévenir le blanchiment de capitaux sont fragmentées et mal coordonnées et le cadre juridique existant est incohérent et pas encore intégralement transposé dans tous les États membres, les malfaiteurs pouvant ainsi tirer parti de ces lacunes; félicite la Commission pour le nouveau train de mesures législatives visant à réviser le cadre de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, un ensemble unique de règles qui représente une avancée majeure dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et permettra une application uniforme de la législation en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme;

37.  se félicite en particulier de la proposition de création d’une nouvelle agence de l’Union européenne, l’Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (ALBC), et souligne que l’ALBC doit, pour être pleinement opérationnelle, pouvoir compter sur des ressources humaines et financières suffisantes; regrette que la mise en place de l’ALBC ne soit pas prévue avant 2023 et qu’elle ne sera pas pleinement opérationnelle avant 2026; souligne que les problèmes existants en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme sont de nature urgente et qu’il n’y a plus de temps à perdre; exhorte la Commission à présenter des mesures concrètes pour résoudre les problèmes existants jusqu’à ce que l’ALBC devienne pleinement opérationnelle;

38.  salue, en outre, les nouvelles propositions de la Commission sur les crypto-actifs, secteur largement non réglementé et copieusement exploité par la criminalité organisée, qui transfère en toute impunité d’importants flux d’argent illicite sur le marché des cryptomonnaies; rappelle que l’anonymat entourant certaines cryptomonnaies entraîne une recrudescence de leur utilisation pour des activités illégitimes; invite les États membres à encourager les entreprises de cryptomonnaies à utiliser des outils d’analyse pour évaluer les éventuelles activités criminelles liées aux adresses des destinataires et de destination et à veiller à ce qu’elles appliquent pleinement la législation en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux lorsque les utilisateurs convertissent les cryptomonnaies en monnaies réelles; souligne que les cryptomonnaies doivent être soumises aux mêmes organes de surveillance que les monnaies traditionnelles;

39.  souligne que les cellules de renseignement financier (CRF) jouent un rôle majeur dans la détection des cas de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme transfrontières; relève qu’au sein de l’Union, les CRF opèrent au niveau national et que la Commission a estimé que la coordination et l’échange d’informations entre les CRF nationales étaient insuffisants(15); regrette qu’il existe des différences en ce qui concerne la quantité et le type de données échangées entre les CRF; souligne que cette situation entrave la coopération entre les CRF, ce qui nuit à leur capacité de dépister et de poursuivre la criminalité transfrontière en temps utile;

40.  regrette que la façon d’aborder la lutte contre la criminalité organisée varie considérablement d’un État membre à l’autre sur les plans de la législation, de la stratégie ou de la capacité opérationnelle; observe que cette situation est en partie imputable à l’hétérogénéité des degrés d’adoption et de mise en œuvre de la législation de l’Union; est préoccupé par le fait que les services de coordination antifraude (AFCOS) ont dans les États membres des rôles et des capacités différents, peut-être parce que la législation de l’Union ne définit pas leur mandat avec suffisamment de précision, ce qui complique la coordination aux niveaux national et de l’Union; se déclare préoccupé par le fait que les efforts visant à lutter contre la fraude impliquant des fonds de l’Union ne bénéficient généralement pas de la même priorité que la fraude impliquant des dépenses nationales; souligne que cette réalité est mise en évidence par le fait que plus de la moitié des enquêtes de l’OLAF ne font pas l’objet d’un suivi par les États membres, et qu’elles sont moins nombreuses encore à déboucher sur des poursuites; regrette vivement que certains États membres choisissent en permanence de ne pas mettre en œuvre les recommandations de l’OLAF à la suite de la clôture d’une enquête et n’engagent pas d’actions judiciaires visant à recouvrer les fonds de l’Union détournés; invite la Commission à faire usage de ses prérogatives et à prendre les mesures nécessaires pour veiller à la mise en œuvre correcte et en temps utile de la législation de l’Union;

41.  regrette qu’il ressorte d’études récentes que certains États membres n’accordent pas à la fraude impliquant des fonds de l’Union la même priorité qu’à la fraude touchant les dépenses nationales; constate que, si la Commission a encouragé les États membres à se doter de stratégies nationales de lutte contre la fraude, seuls 13 États membres l’ont fait et aucun d’entre eux n’a utilisé le modèle fourni par la Commission; relève avec inquiétude que ces différences observées entre les États membres sont autant d’obstacles à leur bonne coopération; demande par conséquent à la Commission d’agir plus fermement en vue de contraindre les États membres à instaurer des règles destinées à prévenir les fraudes contre l’Union européenne;

Conclusions

42.  invite la Commission à mettre au point une démarche commune pour évaluer l’incidence de la criminalité organisée sur les fonds de l’Union et analyser l’efficacité des mesures prises contre ce problème dans les États membres; estime qu’il est capital d’instaurer un échange complet, efficace et rapide d’informations et réaffirme donc l’importance d’harmoniser les définitions afin d’obtenir des données comparables entre organes de l’Union et États membres afin de pouvoir évaluer l’incidence des activités de la criminalité organisée sur les finances de l’Union et de prendre rapidement des mesures pour la combattre;

43.  constate avec inquiétude que la disparité actuelle des stratégies nationales empêche de lutter efficacement contre le problème selon une démarche transfrontière, ce qui permet aux malfaiteurs de continuer impunément leurs activités; invite les États membres à collaborer étroitement avec les organes de l’Union et les uns avec les autres, et à utiliser les outils et services de l’Union pour lutter contre la criminalité organisée, afin d’optimiser l’échange de données et de faciliter les opérations transfrontières ciblant les activités de criminalité organisée qui s’attaquent au budget de l’Union;

44.  invite les États membres et la Commission à envisager d’utiliser de manière plus cohérente l’ensemble des outils qui sont à leur disposition pour détecter et réprimer les fraudes, dont la plateforme informatique Arachne et le système EDES; souligne que l’interopérabilité d’Arachne, d’EDES et des bases de données des institutions et des États membres est indispensable pour permettre un échange efficace d’informations visant à prévenir et à déceler les fraudes au budget de l’Union; regrette qu’Arachne et EDES soient actuellement limités dans leur champ d’application, et insuffisamment connus et exploités par les États membres; souligne à cet égard que le système EDES couvre les fonds gérés directement et indirectement, mais pas les fonds en gestion partagée, bien que ces derniers représentent environ 80 % des dépenses de l’Union; engage la Commission à élargir l’application d’EDES aux fonds en gestion partagée; demande de nouveau à la Commission et, en particulier, aux États membres au sein du Conseil, de rendre obligatoire l’utilisation d’Arachne; invite la Commission à réévaluer le cadre d’échange de données entre les institutions de l’Union et avec les États membres afin d’optimiser l’efficacité des échanges d’informations tout en respectant les exigences en matière de protection des données;

45.  invite la Commission à soutenir les États membres en dispensant des formations aux autorités nationales afin de les doter des connaissances suffisantes pour leur permettre d’utiliser le plus efficacement possible des outils tels qu’EDES ou Arachne conformément aux normes de l’Union en matière de remontée d’informations; invite la Commission, en coopération avec les États membres, à analyser les difficultés rencontrées par les autorités nationales lorsqu’elles utilisent EDES et Arachne, à formuler des recommandations spécifiques et à améliorer les lignes directrices générales existantes ainsi que la convivialité de ces outils; regrette que certains États membres s’opposent à l’utilisation de ces outils par crainte d’une charge bureaucratique accrue; souligne que, lorsqu’ils sont correctement intégrés, ces outils peuvent en fait réduire la bureaucratie; invite les États membres à revoir leur position sur cette question et la Commission à s’engager davantage dans la promotion des avantages d’EDES et d’Arachne auprès des États membres; réclame la mise en place de programmes de formation à la lutte contre le blanchiment de capitaux permettant aux autorités de détecter le risque de fraude potentielle avant que les fonds ne soient décaissés, en particulier dans le domaine de la «connaissance clientèle» et de la participation non révélée des personnes politiquement exposées aux subventions et projets de la PAC;

46.  considère que le règlement portant dispositions communes(16), qui établit des règles communes applicables aux Fonds structurels et d’investissement européens, au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen Plus et au Fonds de cohésion, est une autre pièce majeure de la prévention du détournement de fonds de l’Union par la criminalité organisée;

47.  souligne qu’un moyen important de lutter contre la criminalité organisée consiste à la rendre moins lucrative; rappelle à cet égard l’action menée par l’OLAF, dont les enquêtes sont un instrument essentiel de la lutte contre la fraude; déplore que le taux de mise en examen à la suite des recommandations de l’OLAF aux États membres soit faible et suive une tendance à la baisse, étant passé de 53 % lors de la période 2007‑2014 à 37 % sur la période 2016-2020; relève également que la proportion des montants effectivement recouvrés par rapport à l’ensemble de ceux recommandés n’a pas été évaluée ces dernières années et que l’évaluation la plus récente, qui porte sur la période 2002 à 2016, montre un taux de recouvrement de 30 %; demande à l’OLAF et à la Commission de rechercher les causes profondes de cette situation et aux États membres de remplir leur obligation juridique de recouvrer les fonds ainsi que de coopérer étroitement avec les organes de l’Union afin que les fonds détournés par la criminalité organisée soient effectivement recouvrés, étant donné qu’un pourcentage désastreux de 98 % des produits estimés du crime n’est pas confisqué et reste aux mains des malfaiteurs; invite l’OLAF à recueillir des informations sur le taux de recouvrement à la suite de ses recommandations financières et à faire figurer ces informations dans ses rapports annuels; estime qu’une action déterminée en vue du recouvrement des fonds, y compris par des saisies préventives ou fondées sur la valeur, est de nature à dissuader les organisations criminelles de commettre des fraudes à l’encontre de l’Union et à protéger ainsi ses intérêts financiers; invite les États membres à augmenter le taux de confiscation des fonds liés à la fraude en mettant davantage l’accent sur les mesures préventives; engage la Commission à évaluer la possibilité de compléter la stratégie fragmentée actuelle en matière de recouvrement des avoirs par un organe européen chargé d’assurer le recouvrement effectif et en temps utile des fonds de l’Union;

48.  estime que la prévention de la fraude et la lutte contre la fraude des organisations criminelles doivent être une priorité pour les autorités de gestion, de certification et d’audit, et faire l’objet d’enquêtes financières spécialisées; considère qu’il faut aussi renforcer les règles et les mesures de gel et de confiscation des avoirs pour lutter contre les organisations criminelles, en prévoyant notamment, le cas échéant, la possibilité d’une saisie temporaire et égale au produit du crime afin d’empêcher le transfert ou l’aliénation du produit du crime avant la conclusion de la procédure pénale; souligne qu’il est absolument capital de tout mettre en œuvre pour recouvrer les fonds de l’Union détournés de manière frauduleuse; préconise vivement que des enquêtes plus efficaces soient menées afin de démanteler les structures de la criminalité organisée et souligne que les autorités répressives doivent avoir une longueur d’avance sur les criminels qui utilisent de plus en plus les nouvelles technologies et saisissent toute occasion d’étendre leurs activités illégales, en ligne ou hors ligne;

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49.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.

(1) JO L 198 du 28.7.2017, p. 29.
(2) JO L 156 du 19.6.2018, p. 43.
(3) JO L 193 du 30.7.2018, p. 1.
(4) JO L 172 du 17.5.2021, p. 110.
(5) JO L 283 du 31.10.2017, p. 1.
(6) JO L 274 du 28.10.2019, p. 1.
(7) https://www.oecd.org/gov/ethics/prevention-fraud-corruption-european-funds.pdf
(8) https://ec.europa.eu/sfc/sites/default/files/FR-TRA-General%20Guidelines%20on%20National%20Anti-Fraud%20Strategies.pdf
(9) Textes adoptés de cette date, P9_TA(2021)0337.
(10) Rapport 2020 de l’OLAF.
(11) JO L 305 du 26.11.2019, p. 17.
(12) Rand Europe, 2016, The Cost of Non-Europe in the area of Organised Crime and Corruption – Annex II – Corruption.
(13) Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur la mise en œuvre de la directive (UE) 2017/1371 du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2017 relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal (COM(2021)0536).
(14) Rapport spécial nº 13/2021 de la Cour des comptes européenne intitulé « L’UE et la lutte contre le blanchiment de capitaux dans le secteur bancaire: des efforts fragmentés et une mise en œuvre insuffisante ».
(15) Document de travail des services de la Commission SWD(2021)0190 – «Impact assessment accompanying the Anti-money laundering package», 20.7.2021.
(16) Règlement (UE) 2021/1060 du Parlement européen et du Conseil du 24 juin 2021 portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen plus, au Fonds de cohésion, au Fonds pour une transition juste et au Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture, et établissant les règles financières applicables à ces Fonds et au Fonds «Asile, migration et intégration», au Fonds pour la sécurité intérieure et à l’instrument de soutien financier à la gestion des frontières et à la politique des visas (JO L 231 du 30.6.2021, p. 159).

Dernière mise à jour: 23 mars 2022Avis juridique - Politique de confidentialité