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Procédure : 2018/0902R(NLE)
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Cycle relatif au document : A9-0217/2022

Textes déposés :

A9-0217/2022

Débats :

PV 14/09/2022 - 11
CRE 14/09/2022 - 11

Votes :

PV 15/09/2022 - 11.5
Explications de votes

Textes adoptés :

P9_TA(2022)0324

Textes adoptés
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Jeudi 15 septembre 2022 - Strasbourg
Existence d’un risque clair de violation grave par la Hongrie des valeurs sur lesquelles l’Union est fondée
P9_TA(2022)0324A9-0217/2022

Résolution du Parlement européen du 15 septembre 2022 sur la proposition de décision du Conseil constatant, conformément à l’article 7, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne, l’existence d’un risque clair de violation grave, par la Hongrie, des valeurs sur lesquelles l’Union est fondée (2018/0902R(NLE))

Le Parlement européen,

–  vu le traité sur l’Union européenne (traité UE), et notamment son article 2, son article 4, paragraphe 3, et son article 7, paragraphe 1,

–  vu la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (la «charte»),

–  vu la convention européenne des droits de l’homme et ses protocoles,

–  vu la Déclaration universelle des droits de l’homme,

–  vu les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme des Nations unies et du Conseil de l’Europe,

–  vu la liste des critères de l’état de droit adoptée par la Commission de Venise lors de sa 106e session plénière à Venise les 11 et 12 mars 2016,

–  vu la communication de la Commission du 11 mars 2014 intitulée «Un nouveau cadre de l’UE pour renforcer l’état de droit» (COM(2014)0158),

–  vu sa résolution du 12 septembre 2018 relative à une proposition invitant le Conseil à constater, conformément à l’article 7, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne, l’existence d’un risque clair de violation grave par la Hongrie des valeurs sur lesquelles l’Union est fondée(1),

–  vu ses résolutions du 16 janvier 2020(2) et du 5 mai 2022(3) sur les auditions en cours au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE en ce qui concerne la Pologne et la Hongrie,

–  vu sa résolution du 8 juillet 2021 sur les violations du droit de l’UE et des droits des citoyens LGBTIQ en Hongrie par suite de l’adoption de modifications de la législation au Parlement hongrois(4),

–  vu les chapitres consacrés à la situation en Hongrie dans les rapports annuels de la Commission sur l’état de droit,

–  vu l’article 105, paragraphe 5, de son règlement intérieur,

–  vu l’avis de la commission des affaires constitutionnelles,

–  vu le rapport intérimaire de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (A9-0217/2022),

A.  considérant que l’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’état de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités, telles que définies à l’article 2 du traité UE et telles que reflétées dans la charte et inscrites dans les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, et que ces valeurs, qui sont communes aux États membres, constituent la base des droits dont jouissent les personnes qui vivent dans l’Union;

B.  considérant qu’il ressort de l’article 49 du traité UE, qui prévoit la possibilité pour tout État européen de demander à devenir membre de l’Union européenne, que l’Union européenne regroupe des États qui ont librement et volontairement adhéré aux valeurs communes visées à l’article 2 du traité UE, qui respectent ces valeurs et qui s’engagent à les promouvoir, le droit de l’Union reposant sur la prémisse fondamentale selon laquelle chaque État membre partage avec tous les autres États membres, et reconnaît que ceux-ci partagent avec lui, lesdites valeurs(5);

C.  considérant que cette prémisse suppose et justifie l’existence de la confiance mutuelle entre les États membres dans la reconnaissance de ces valeurs et, donc, dans le respect du droit de l’Union qui les met en œuvre(6);

D.  considérant que le respect par un État membre des valeurs visées à l’article 2 du traité UE est une condition de la jouissance de l’ensemble des droits découlant de l’application des traités à cet État membre; que toute violation des valeurs fondamentales de l’Union par le gouvernement d’un État membre suppose inévitablement une atteinte à la liberté individuelle des citoyens, à leurs droits politiques et sociaux, ainsi qu’à leur prospérité et à leur bien-être; que la Hongrie elle-même a adhéré aux valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE;

E.  considérant que le principe de coopération loyale visé à l’article 4, paragraphe 3, du traité UE oblige l’Union et les États membres à se respecter et à s’assister mutuellement dans l’accomplissement des obligations découlant des traités et oblige les États membres à prendre toute mesure générale ou particulière propre à assurer l’exécution des obligations découlant des traités ou résultant des actes des institutions de l’Union;

F.  considérant que l’article 19 du traité UE concrétise la valeur de l’état de droit affirmée à son article 2, et confie la charge d’assurer la pleine application du droit de l’Union dans tous les États membres et la protection juridictionnelle des droits des individus découlant de ce droit aux juridictions nationales et à la Cour de justice(7);

G.  considérant qu’un risque clair de violation grave par un État membre des valeurs visées à l’article 2 du traité UE ne concerne pas uniquement l’État membre dans lequel le risque se réalise, mais qu’il a une incidence sur les autres États membres, sur la confiance mutuelle entre eux, sur la nature même de l’Union et sur les droits fondamentaux de ses citoyens au titre du droit de l’Union;

H.  considérant que le champ d’application de l’article 7 du traité UE ne se limite pas aux obligations découlant des traités, comme dans l’article 258 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE), et que l’Union peut apprécier l’existence d’un risque clair de violation grave des valeurs communes dans des domaines relevant des compétences des États membres;

I.  considérant que la question de la situation en Hongrie n’a pas été suffisamment abordée depuis plusieurs années alors que de nombreuses préoccupations subsistent et que, dans l’intervalle, de nouveaux problèmes sont apparus en grand nombre, ce qui nuit à l’image de l’Union, ainsi qu’à son efficacité et à sa crédibilité dans les domaines de la défense des droits fondamentaux, des droits de l’homme et de la démocratie au niveau mondial, et met en évidence la nécessité d’y répondre par une action concertée de l’Union;

J.  considérant qu’au lendemain de la visite de la délégation ad hoc de sa commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures à Budapest (Hongrie), du 29 septembre au 1er octobre 2021, la majorité des membres de la délégation demeurent très préoccupés par la démocratie, l’état de droit et les droits fondamentaux dans le pays; que la délégation a conclu que la situation ne s’est pas améliorée depuis 2018, mais s’est au contraire détériorée;

K.  considérant que le gouvernement hongrois ne tient pas compte du principe de primauté du droit de l’Union tel que consacré par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, mais fait appel à cette même Cour de justice lorsqu’il s’agit d’introduire des recours contre des lois en vigueur dans l’Union;

L.  considérant que le Parlement hongrois a adopté, le 19 juillet 2022, une résolution demandant que les pouvoirs du Parlement européen soient limités et que les députés européens soient nommés plutôt qu’élus;

M.  considérant que la coexistence pacifique de différents groupes ethniques a des effets positifs sur la richesse culturelle et la prospérité de la nation;

N.  considérant que le blocage des mesures prises à l’encontre de la Russie au Conseil porte atteinte aux efforts de l’Union pour protéger, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Union, les valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE et constitue pour elle un véritable problème de sécurité;

Fonctionnement du système constitutionnel et électoral

O.  considérant que, le 13 juillet 2022, la Commission a indiqué dans le chapitre consacré à la Hongrie du rapport 2022 sur l’état de droit que la transparence et la qualité du processus législatif demeuraient une source de préoccupation, et que le gouvernement hongrois faisait largement usage de ses pouvoirs d’urgence, y compris dans des domaines non liés à la pandémie de COVID-19, contrairement à ce qui était affirmé initialement; que l’inefficacité de la mise en œuvre par les organes étatiques des arrêts rendus par les juridictions européennes et nationales est une source de préoccupation; que les fiducies d’intérêt public qui reçoivent un financement public important et sont gérées par des membres du conseil d’administration proches du gouvernement actuel sont devenues opérationnelles;

P.  considérant que dans sa résolution du 17 avril 2020 sur une action coordonnée de l’Union pour combattre la pandémie de COVID-19 et ses conséquences(8), le Parlement juge complètement incompatible avec les valeurs européennes la décision du gouvernement hongrois de prolonger indéfiniment l’état d’urgence, de s’autoriser à légiférer par décret sans limitation de ce pouvoir dans le temps et d’affaiblir le contrôle exercé par le Parlement hongrois; que dans sa recommandation du 20 juillet 2020 concernant le programme national de réforme de la Hongrie pour 2020 et portant avis du Conseil sur le programme de convergence de la Hongrie pour 2020(9), le Conseil a recommandé de veiller à ce que toute mesure d’urgence soit strictement proportionnée, limitée dans le temps et conforme aux normes européennes et internationales, et qu’elle n’interfère pas avec les activités des entreprises et la stabilité de l’environnement réglementaire, ainsi que la participation effective des partenaires sociaux et des parties prenantes au processus d’élaboration des politiques;

Q.  considérant que dans son deuxième rapport de conformité intérimaire adopté le 25 septembre 2020, le Groupe d’États contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe s’est félicité des modifications apportées à la loi sur l’Assemblée nationale afin de rendre plus opérationnelles les dispositions interdisant ou limitant l’engagement des parlementaires dans certaines activités en prévoyant des conséquences plus claires au cas où ces questions ne seraient pas résolues par le parlementaire en question; que le rapport a toutefois conclu également que des mesures plus déterminées devaient être prises afin d’améliorer le cadre d’intégrité actuel du Parlement hongrois, en particulier afin de renforcer le degré de transparence et de concertation dans le processus législatif (y compris avec l’introduction de règles sur les interactions avec les lobbyistes), d’adopter un code de conduite à l’attention des parlementaires (couvrant en particulier diverses situations susceptibles de déboucher sur un conflit d’intérêts), de développer davantage les règles obligeant les députés à divulguer de manière ad hoc les conflits potentiels entre leur travail parlementaire et leurs intérêts privés, d’adopter un modèle type pour les déclarations de patrimoine, de réviser le périmètre élargi de l’immunité dont bénéficient les parlementaires et d’assurer un contrôle et une application efficaces des règles de conduite et des règles régissant les conflits d’intérêts et les déclarations de patrimoine;

R.  considérant que, dans une déclaration du 20 novembre 2020, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a exhorté le Parlement hongrois à reporter le vote sur les projets de loi, craignant que plusieurs propositions contenues dans le dispositif législatif complexe, soumises sans consultation préalable et portant sur des questions telles que le fonctionnement de l’appareil judiciaire, le droit électoral, les structures nationales de défense des droits de l’homme, le contrôle de l’utilisation des fonds publics et les droits fondamentaux des personnes LGBTI, ne servent à porter atteinte à la démocratie, à l’état de droit et aux droits de l’homme en Hongrie; que, dans son avis du 2 juillet 2021 sur les révisions constitutionnelles adoptées par le Parlement hongrois en décembre 2020, la Commission de Venise a noté avec inquiétude que les amendements ont été adoptés pendant l’état d’urgence, sans aucune consultation publique, et que l’exposé des motifs ne comporte que trois pages; que la Commission de Venise a également indiqué que les articles 6, 9, et 11 du neuvième amendement modifiant la Loi fondamentale de la Hongrie, relatifs aux déclarations de guerre, au contrôle des forces de défense hongroises et à l’«ordre juridique spécial» qui se rapporte à l’état de guerre, à l’état d’urgence et à l’état de danger, laissent principalement la spécification de la plupart des détails aux lois cardinales, ce qui pourrait éventuellement soulever de sérieuses questions concernant l’étendue des pouvoirs de l’État pendant les états d’exception; qu’en ce qui concerne la suppression du Conseil de défense nationale et le transfert de ses pouvoirs au gouvernement, la Commission de Venise a indiqué que, si elle n’est pas contraire en tant que telle aux normes européennes, elle conduit à une concentration des pouvoirs d’urgence entre les mains de l’exécutif qui ne peut être considérée comme un signe encourageant, notamment en l’absence de toute clarification dans l’exposé des motifs du ratio ou de la nécessité d’une telle modification;

S.  considérant que, le 12 février 2021, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe a relevé une situation globalement négative en matière d’autonomie locale et régionale en Hongrie, due à un non-respect généralisé de la Charte européenne de l’autonomie locale, et a exprimé des préoccupations quant à la nette tendance à la recentralisation, à l’absence de consultation effective et à l’ingérence significative de l’État dans les fonctions municipales; que le Congrès a également mis en évidence certaines lacunes concernant l’autonomie locale du pays, telles que le manque de ressources financières à la disposition des autorités locales et leur incapacité à recruter du personnel hautement qualifié;

T.  considérant que les changements apportés à la loi électorale au fil des ans avec la réorganisation des circonscriptions et la prime majoritaire désavantagent les partis d’opposition; que, dans leur avis conjoint du 18 octobre 2021 sur les amendements de 2020 à la législation électorale en Hongrie, la Commission de Venise et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’OSCE ont souligné qu’une adoption rapide et l’absence de consultations publiques significatives sont particulièrement inquiétantes lorsqu’elles concernent la législation électorale, qui ne doit pas être considérée comme un instrument politique; que la Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH ont également fait la recommandation principale de modifier l’article 3 et l’article 68 de la loi CLXVII de 2020 sur l’amendement de certaines lois relatives aux élections, en réduisant de manière significative le nombre de circonscriptions uninominales et le nombre de districts dans lesquels chaque parti doit désigner des candidats simultanément afin de pouvoir présenter une liste nationale de candidats, ainsi qu’un certain nombre de recommandations supplémentaires;

U.  considérant que des élections démocratiques organisées dans des conditions équitables sont de la plus haute importance pour la nature démocratique de nos sociétés; qu’en réponse aux inquiétudes concernant le déroulement équitable des élections et aux appels de la société civile, l’OSCE a décidé d’envoyer une mission internationale d’observation électorale à part entière pour les élections législatives et le référendum du 3 avril 2022, ce qui est rare dans les États membres de l’Union; que, dans la déclaration qui a suivi, publiée le 4 avril 2022 et relative à ses constatations et conclusions préliminaires, la mission internationale d’observation électorale de l’OSCE a constaté que les élections législatives et le référendum avaient été bien organisés et gérés de manière professionnelle, mais qu’ils avaient été entachés par l’absence de conditions de concurrence équitables; que les candidats ont pu, dans une large mesure, faire campagne librement, mais que cette dernière, bien que pluraliste, s’est déroulée dans un climat très négatif et a été marquée par un chevauchement systématique entre la coalition au pouvoir et le gouvernement, et que le manque de transparence et le contrôle insuffisant du financement de la campagne ont davantage profité à la coalition au pouvoir; que la manière dont de nombreux litiges électoraux ont été traités par les commissions électorales et les tribunaux n’a pas permis d’offrir des voies de recours efficaces; que, dans son rapport final publié le 29 juillet 2022, la mission internationale d’observation électorale de l’OSCE a indiqué que de nombreuses recommandations antérieures du BIDDH n’avaient pas été suivies, notamment en ce qui concerne les droits de vote, la prévention de l’utilisation abusive des ressources administratives et le brouillage des frontières entre les fonctions de l’État et l’activité des partis, la liberté des médias, le financement des campagnes et l’observation par les citoyens; que, contrairement aux bonnes pratiques internationales, la législation hongroise permet que l’écart entre le nombre d’électeurs d’une circonscription unique et le nombre moyen d’électeurs des différentes circonscriptions atteigne 20 % et que, après les élections de 2018, contrairement à la législation nationale, le Parlement hongrois n’a pas revu les frontières des circonscriptions qui dépassaient l’écart limite établi; que la répartition inégale des électeurs entre les circonscriptions – dans certains cas, l’écart par rapport à la moyenne va jusqu’à 33 % – remet en cause le principe d’égalité des voix;

V.  considérant que, le 24 mai 2022, le Parlement hongrois a adopté le 10e amendement à la Loi fondamentale afin de permettre au gouvernement de pouvoir décréter l’état de danger en cas de conflit armé, de guerre ou de catastrophe humanitaire dans un pays voisin; qu’il a également modifié la loi sur la gestion des catastrophes, permettant ainsi au gouvernement de passer outre les lois du Parlement au moyen d’ordonnances d’urgence dans n’importe quelle zone pendant un état de danger décrété en raison d’un conflit armé, d’une guerre ou d’une catastrophe humanitaire dans un pays voisin, avec la possibilité de suspendre ou de restreindre l’exercice des droits fondamentaux au-delà de ce qui est autorisé dans des circonstances normales; que, le 8 juin 2022, le Parlement hongrois a adopté la loi VI de 2022 sur la neutralisation des conséquences sur la Hongrie d’un conflit armé et d’une catastrophe humanitaire dans un pays voisin, qui est entrée en vigueur le même jour; que cette loi autorise le gouvernement à prolonger les effets des décrets gouvernementaux d’urgence jusqu’à ce que le gouvernement mette fin à l’état de danger;

W.  considérant que la Loi fondamentale a été modifiée à dix reprises depuis son adoption; que les lois organiques couvrent 35 domaines et représentent désormais plus de 300 actes législatifs adoptés depuis 2011, souvent sans consultation publique, même lorsque des droits fondamentaux ont été affectés;

X.  considérant que, dans une déclaration commune émise en 2013, les présidents des cours constitutionnelles hongroise et roumaine ont mis l’accent sur la responsabilité particulière des cours constitutionnelles dans les pays soumis à la majorité des deux tiers; que le quatrième amendement à la Loi fondamentale dispose que les décisions de la Cour constitutionnelle rendues avant l’entrée en vigueur de la Loi fondamentale doivent être abrogées; que la Cour constitutionnelle s’appuie de plus en plus sur la notion d’identité constitutionnelle dans ses décisions; que, dans la jurisprudence, la notion d’identité constitutionnelle est déterminée au cas par cas, tout en primant sur la Loi fondamentale; que le gouvernement hongrois saisit de plus en plus souvent la Cour constitutionnelle pour éviter de devoir exécuter des arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE); que, le 18 mai 2022, la Cour constitutionnelle a bloqué les référendums sur les projets du gouvernement visant à construire un campus à Budapest pour l’université Fudan et à étendre les allocations chômage à une période de neuf mois maximum par rapport à la période actuelle de trois mois;

Y.  considérant que les spécialistes s’accordent de plus en plus à dire que la Hongrie ne peut plus être considérée comme une démocratie; qu’à en juger par l’indice de démocratie V-Dem (Varieties of Democracy) de l’université de Göteborg pour 2019, la Hongrie est devenue le tout premier État autoritaire membre de l’Union; que la Hongrie a été qualifiée de «régime hybride» ayant perdu son statut de «démocratie semi-consolidée» dans le rapport «Nations in Transit» de Freedom House pour 2020; que la Hongrie est considérée comme une «démocratie imparfaite» au titre de l’indice de démocratie de The Economist Intelligence Unit pour 2022 et se classe en 56e position sur 167 pays, en recul d’une place par rapport à 2020; que, d’après l’indice de démocratie V-Dem pour 2022, et parmi les États membres de l’Union, la Hongrie figure au nombre des principales nations mondiales à propension autocratique de la dernière décennie;

Indépendance de la justice ainsi que des autres institutions et droits des juges

Z.  considérant que, le 13 juillet 2022, la Commission a indiqué dans le chapitre consacré à la Hongrie du rapport 2022 sur l’état de droit qu’en ce qui concerne l’indépendance de la justice, les préoccupations exprimées dans le cadre de la procédure engagée par le Parlement européen au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE, ainsi que dans les rapports précédents sur l’état de droit, n’ont toujours pas été prises en compte, comme ce fut le cas pour la recommandation analogue formulée dans le cadre du Semestre européen; que ces préoccupations concernent notamment les difficultés rencontrées par le Conseil national indépendant de la magistrature pour contrebalancer les pouvoirs du président de l’Office national de la justice, les règles relatives à l’élection du président de la Cour suprême (Kúria), et la possibilité de décisions discrétionnaires en ce qui concerne les nominations et promotions judiciaires, l’attribution des affaires et les primes aux juges et aux cadres de justice; qu’en ce qui concerne l’efficacité et la qualité, le système judiciaire obtient de bons résultats pour ce qui est de la durée des procédures et affiche un niveau global élevé de numérisation, et que les salaires des juges et des procureurs continuent d’augmenter progressivement; que, le 26 août 2022, plusieurs organisations de la société civile ont demandé à la ministre de la justice de s’attaquer aux problèmes du système judiciaire hongrois après avoir mené de vastes consultations avec le grand public et des experts, y compris des organes autonomes et représentatifs du pouvoir judiciaire et de la Commission de Venise;

AA.  considérant que, dans son arrêt du 23 novembre 2021 dans l’affaire C-564/19IS (Illégalité de l’ordonnance de renvoi), la CJUE a statué que l’article 267 du traité FUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que la juridiction suprême d’un État membre constate l’illégalité d’une demande de décision préjudicielle au motif que les questions posées ne sont pas pertinentes et nécessaires pour la solution du litige au principal; que le principe de primauté du droit de l’Union impose à la juridiction inférieure de ne pas tenir compte d’une telle décision de la Cour suprême nationale; que l’article 267 du traité FUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’une procédure disciplinaire soit engagée à l’encontre d’un juge national au motif qu’il a introduit une demande de décision préjudicielle auprès de la CJUE en vertu de cette disposition;

AB.  considérant que, dans une déclaration du 14 décembre 2018, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a appelé le président de la Hongrie à soumettre de nouveau au Parlement hongrois le dispositif législatif concernant les tribunaux administratifs; que, dans son avis du 19 mars 2019 sur la loi relative aux juridictions administratives et la loi relative à l’entrée en vigueur de la loi sur les juridictions administratives et certaines règles transitoires, la Commission de Venise indique que l’inconvénient majeur du modèle organisationnel et administratif adopté pour les tribunaux administratifs est que des pouvoirs très importants soient concentrés dans les mains de quelques intervenants, en l’absence de contre-pouvoirs et de moyens de contrôle effectifs pour équilibrer ces pouvoirs;

AC.  considérant que, dans son rapport du 21 mai 2019 faisant suite à sa visite en Hongrie du 4 au 8 février 2019, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe note que la série de réformes de la justice menées en Hongrie pendant les années 2010 ont suscité des préoccupations quant à leurs effets sur l’indépendance du pouvoir judiciaire, et que, dans le système des juridictions ordinaires, des interrogations sur l’effectivité du contrôle exercé par le Conseil national de la magistrature sur le président de l’Office national de la justice ont été soulevées à la suite des récentes anomalies constatées dans les relations entre ces institutions judiciaires en ce qui concerne les procédures de nomination; que, même si elle salue les récentes modifications apportées à la législation initiale sur les juridictions administratives en réponse à l’avis de la Commission de Venise, la commissaire n’est pas persuadée que ces modifications sont suffisantes pour répondre aux graves préoccupations soulevées par la Commission de Venise;

AD.  considérant qu’en 2019, le Parlement hongrois a décidé de reporter l’entrée en vigueur du dispositif législatif concernant les tribunaux administratifs, et que le gouvernement a déclaré avoir abandonné l’idée de mettre en place des tribunaux administratifs séparés; que plusieurs éléments importants du dispositif ont été introduits au moyen d’une série d’amendements législatifs adoptés entre 2019 et 2021;

AE.  considérant que, dans une déclaration du 28 novembre 2019, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a exhorté le Parlement hongrois à modifier un projet de loi menaçant l’indépendance de la justice; que la commissaire a estimé que les dispositions prévoyant la possibilité pour les autorités administratives d’introduire des recours constitutionnels à la suite de jugements défavorables des juridictions ordinaires soulevaient des préoccupations quant au respect des garanties d’un procès équitable pour les plaignants individuels, et qu’associées aux modifications proposées concernant les qualifications et la nomination des juges et l’uniformité de la jurisprudence, les mesures législatives présentaient également le risque de réduire l’indépendance de chaque juge dans l’exercice de ses fonctions essentielles et de hiérarchiser à l’excès le système judiciaire;

AF.  considérant que, dans son avis du 16 octobre 2021 sur les modifications de la loi sur l’organisation et l’administration des tribunaux et de la loi sur le statut juridique et la rémunération des juges adoptées par le Parlement hongrois en décembre 2020, la Commission de Venise réitère les recommandations exprimées dans son avis de 2012 concernant le rôle du président de l’Office national de la justice, qui n’ont pas été prises en compte; que la Commission de Venise recommande également d’établir des conditions claires, transparentes et prévisibles pour que les juges détachés puissent être affectés à un poste plus élevé après la période de détachement; qu’elle formule plusieurs recommandations relatives à l’attribution des affaires, au pouvoir du président de la Kúria d’augmenter le nombre de membres des chambres de jugement, aux décisions d’uniformité et à la composition des chambres dans le cadre de la procédure de plainte en matière d’uniformité; que la Commission de Venise observe également que le régime de nomination du président de la Kúria introduit par les amendements de 2019 peut présenter de sérieux risques de politisation et avoir des conséquences importantes pour l’indépendance du pouvoir judiciaire, ou la perception de celle-ci par le public, compte tenu du rôle crucial de ce poste dans le système judiciaire;

AG.  considérant que, dans son deuxième rapport de conformité intérimaire adopté le 25 septembre 2020, le GRECO a noté qu’en ce qui concerne les juges et les trois recommandations à leur sujet toujours non mises en œuvre, aucun progrès supplémentaire n’avait été signalé, et que ses conclusions sur les pouvoirs du président de l’Office national de la justice (tant s’agissant du processus de nomination ou de promotion des candidats aux postes judiciaires que s’agissant du processus de réaffectation des juges) demeuraient d’une importance particulière; qu’en ce qui concerne les procureurs, le GRECO a salué l’entrée en vigueur des modifications législatives prévoyant la participation obligatoire d’un commissaire chargé des questions disciplinaires dans les procédures disciplinaires, sans toutefois pouvoir confirmer que sa recommandation XVII (procédures disciplinaires à l’encontre des procureurs) avait été satisfaite; qu’aucun progrès n’avait été accompli en ce qui concerne la prolongation du mandat du procureur général, le périmètre élargi de l’immunité dont jouissent les procureurs et l’élaboration de critères régissant le dessaisissement des procureurs de rang inférieur;

AH.  considérant que, dans sa communication du 15 avril 2021 au gouvernement hongrois, le rapporteur spécial des Nations unies sur l’indépendance des juges et des avocats estime que la nomination du président de la Kúria peut être considérée comme une attaque contre l’indépendance du pouvoir judiciaire et une tentative de soumettre ce dernier à la volonté du pouvoir législatif, en violation du principe de séparation des pouvoirs; que le rapporteur spécial met également l’accent sur le fait particulièrement préoccupant que le président de la Kúria a été élu en dépit de l’objection manifeste du Conseil national de la magistrature, et souligne que la décision d’ignorer l’avis négatif exprimé par le Conseil national de la magistrature peut être interprétée comme une déclaration politique de la majorité au pouvoir; que, selon le rapporteur spécial, le principal effet – voire le principal objectif – des réformes du système judiciaire est d’entraver le principe de l’indépendance de la justice consacré par la constitution et de permettre aux pouvoirs législatif et exécutif d’intervenir dans l’administration de la justice;

AI.  considérant que, dans sa décision du 2 décembre 2021 concernant la surveillance soutenue en cours de l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) dans les affaires Groupe Gazsó c. Hongrie, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe rappelle que ce groupe d’affaires concerne le problème structurel de la durée excessive des procédures civiles, pénales et administratives et l’absence de recours internes effectifs; que le Comité des ministres note avec satisfaction l’adoption du projet de loi introduisant un recours en compensation pour les procédures civiles excessivement longues, mais appelle fermement les autorités à veiller à ce qu’il soit conforme à la convention européenne des droits de l’homme; que, compte tenu de l’importance de la question, de sa nature technique et de l’expiration du délai fixé au 16 octobre 2016 par la CEDH dans son arrêt pilote, le Comité des ministres encourage vivement les autorités à explorer toutes les possibilités d’accélérer leur planification;

AJ.  considérant que, le 9 mars 2022, dans sa résolution intérimaire concernant la surveillance soutenue en cours de l’exécution de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Baka c. Hongrie, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe demande instamment aux autorités d’intensifier leurs efforts pour trouver les moyens, en étroite coopération avec le Secrétariat du Comité des ministres, d’introduire les mesures requises pour garantir qu’une décision du Parlement de destituer le Président de la Kúria sera soumise au contrôle effectif d’un organe judiciaire indépendant, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne; que le Comité des ministres rappelle, à nouveau, l’engagement des autorités d’évaluer la législation nationale sur le statut des juges et l’administration des tribunaux, et les invite instamment à présenter les conclusions de leur évaluation, y compris des garanties et des sauvegardes protégeant les juges contre des ingérences indues pour permettre au Comité de faire une évaluation complète quant à savoir si les préoccupations sont dissipées au sujet de l’«effet dissuasif» sur la liberté d’expression des juges causé par les violations dans ces affaires;

AK.  considérant que le World Justice Project classe la Hongrie en 69e position (sur 139 pays) dans son indice sur l’état de droit de 2021 (en recul de deux places par rapport à l’année précédente) et qu’elle figure à la dernière place (31e sur 31) dans la région de l’Union, de l’Association européenne de libre-échange (AELE) et de l’Amérique du Nord;

Corruption et conflits d’intérêts

AL.  considérant que, le 13 juillet 2022, la Commission a indiqué dans le chapitre consacré à la Hongrie du rapport 2022 sur l’état de droit que la mise en œuvre de la plupart des mesures au titre de la stratégie de lutte contre la corruption 2020-2022 avait été reportée et qu’aucune nouvelle stratégie n’avait été annoncée, et que des lacunes persistaient en ce qui concerne le lobbying et le phénomène consistant à effectuer des allers-retours entre le secteur public et le secteur privé («pantouflage») ainsi que le financement des partis politiques et des campagnes; que les mécanismes de contrôle indépendants restent insuffisants pour détecter la corruption, et que des inquiétudes subsistent quant à l’absence de contrôles systématiques et à la surveillance insuffisante des déclarations de patrimoine et d’intérêts ainsi qu’à l’absence de règles en matière de conflits d’intérêts pour les fiducies d’intérêt public; que l’absence de résultats probants en matière d’enquêtes sur les allégations de corruption concernant des hauts fonctionnaires et leur entourage immédiat demeure une source de préoccupation majeure, bien que de nouvelles affaires de corruption de haut niveau aient été ouvertes; que l’absence de contrôle juridictionnel des décisions de ne pas enquêter sur des affaires de corruption et de ne pas engager de poursuites reste préoccupante, en particulier dans un environnement où les risques de clientélisme, de favoritisme et de népotisme dans l’administration publique de haut niveau restent sans réponse;

AM.  considérant que, dans des réponses aux questions écrites posées au commissaire Hahn à l’occasion de l’audition du 11 novembre 2019 sur la décharge 2018 accordée à la Commission, la Commission a indiqué que, pour la période 2014-2020, des corrections financières forfaitaires avaient été acceptées et appliquées en Hongrie à la suite d’un audit horizontal des marchés publics, qui a permis de repérer de graves défaillances dans le fonctionnement du système de gestion et de contrôle en ce qui concerne le contrôle des procédures de passation des marchés publics;

AN.  considérant que, dans sa recommandation du 12 juillet 2022 concernant le programme national de réforme de la Hongrie pour 2022 et portant avis du Conseil sur le programme de convergence de la Hongrie pour 2022, le Conseil a recommandé que la Hongrie s’attache à consolider le cadre de lutte contre la corruption, notamment en renforçant les poursuites et l’accès aux informations publiques, et à défendre l’indépendance de la justice, ainsi qu’à améliorer la qualité et la transparence du processus décisionnel, par l’intermédiaire d’un dialogue social efficace et d’une coopération fructueuse avec d’autres parties intéressées, ainsi que par la réalisation d’analyses d’impact à intervalles réguliers, et à intensifier la concurrence dans le domaine des marchés publics;

AO.  considérant que, le 10 juin 2021, l’Office européen de lutte antifraude a indiqué dans son rapport d’activité 2020 qu’il avait recommandé à la Commission de recouvrer 2,2 % des paiements effectués au titre des Fonds structurels et d’investissement européens et du Fonds européen agricole pour le développement rural pour la période 2016-2020; qu’il s’agit du pourcentage le plus élevé de paiements à recouvrer parmi tous les États membres et qu’il est nettement supérieur à la moyenne de 0,29 %; que des fraudes ont été commises au détriment des fonds de développement de l’Union alloués à la Hongrie; qu’un haut niveau de corruption associé à une augmentation massive des inégalités sociales et de la pauvreté a été observé et crée non seulement davantage d’insécurité au sein de la population, mais constitue également une violation des droits fondamentaux;

AP.  considérant qu’en novembre 2021, la Commission a envoyé une lettre à la Hongrie soulignant les problèmes d’indépendance du pouvoir judiciaire, l’inefficacité des poursuites contre les actes de corruption et les lacunes au sein des marchés publics qui pourraient poser un risque pour les intérêts financiers de l’Union; que, dans sa lettre, la Commission décrit les problèmes systémiques et une absence de responsabilité en matière de corruption, et pose 16 questions spécifiques aux autorités hongroises sur des sujets tels que les conflits d’intérêts, les bénéficiaires des financements de l’Union et la manière dont est garantie la mise en œuvre d’un contrôle juridictionnel par des tribunaux indépendants; qu’en dépit de ces inquiétudes, la Commission a reporté l’application du règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit(10) à avril 2022;

AQ.  considérant que, le 5 avril 2022, la présidente de la Commission a annoncé que le commissaire chargé du budget et de l’administration, Johannes Hahn, avait informé les autorités hongroises de l’intention de la Commission de passer à l’étape suivante et de déclencher officiellement le règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit, principalement en raison de préoccupations liées à la corruption; que la Commission a enfin engagé la procédure formelle contre la Hongrie au titre du règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit en émettant une notification écrite le 27 avril 2022; que, le 20 juillet 2022, la Commission a décidé d’informer la Hongrie de son intention de présenter une proposition de décision d’exécution du Conseil et de lui donner la possibilité de présenter ses observations;

AR.  considérant que, le 6 avril 2022, la Commission a décidé d’envoyer à la Hongrie un avis de mise en demeure supplémentaire pour assurer une transposition appropriée de la directive 2014/24/UE sur la passation des marchés publics(11), de la directive 2014/23/UE sur l’attribution de contrats de concession(12) et de la directive 2014/25/UE relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux(13); que, selon la Commission, la législation hongroise permet une application plus vaste des exceptions liées à des raisons de sécurité et aux marchés subventionnés au moyen d’avantages fiscaux, et que ces exceptions conduisent à exclure davantage de marchés des obligations prévues par le droit de l’Union; qu’en outre, la Commission estime que les modifications apportées à la législation minière hongroise, qui prévoient la possibilité d’attribuer des concessions minières sans procédure d’appel d’offres transparente, sont contraires au principe de transparence;

AS.  considérant que, le 19 mai 2022, la Commission a décidé d’adresser à la Hongrie une lettre de mise en demeure concernant la transposition incorrecte de la directive (UE) 2017/1371 relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal(14);

AT.  considérant que, dans son deuxième rapport de conformité intérimaire adopté le 25 septembre 2020, le GRECO a noté que la Hongrie n’avait encore mis en œuvre ou traité de manière satisfaisante que 5 des 18 recommandations figurant dans le rapport d’évaluation du quatrième cycle et a conclu que, dans l’ensemble, le faible niveau de conformité avec les recommandations demeurait «globalement insatisfaisant»;

AU.  considérant que la Hongrie a décidé de ne pas prendre part à la coopération renforcée en vue de la création du Parquet européen ni au renforcement de la coopération entre les procureurs de l’Union;

AV.  considérant que, dans son examen technique du rapport sur l’état de conservation de la partie hongroise du site transfrontalier du patrimoine mondial «Paysage culturel de Fertö / Neusiedlersee», établi en mai 2021, le Conseil international des monuments et des sites de l’Unesco a conclu que le projet Sopron Fertö Lake Resort, dans son ampleur et sa forme présentées, nuirait à l’authenticité et à l’intégrité de ce site transfrontalier du patrimoine mondial;

AW.  considérant que Transparency International classe la Hongrie en 73e position (sur 180 pays et territoires) dans son indice de perception de la corruption pour 2021 (en recul d’une place par rapport à l’année précédente) et que son classement n’a cessé de baisser depuis 2012;

Protection des données et de la vie privée

AX.  considérant que, dans le rapport de mission faisant suite à la visite de la délégation ad hoc de sa commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures à Budapest, du 29 septembre au 1er octobre 2021, des inquiétudes ont été exprimées quant à l’absence de garanties en matière de surveillance dans la législation actuelle, qui ne prévoit pas de véritable système d’équilibre des pouvoirs ni de voies de recours effectives; que des inquiétudes ont également été exprimées quant à l’utilisation présumée du logiciel espion Pegasus de l’entreprise NSO Group et à la surveillance accrue des militants, des journalistes, des avocats et des responsables politiques par l’État;

AY.  considérant qu’en juillet 2021, au moyen d’informations obtenues grâce à la divulgation d’une base de données, le portail d’enquête Direkt36 a révélé que quelque 300 citoyens hongrois, parmi lesquels des journalistes indépendants, des propriétaires de médias, des avocats, des responsables politiques, des hommes d’affaires critiques à l’égard du gouvernement et d’anciens fonctionnaires de l’État, ont été visés par le logiciel espionnage Pegasus à leur insu entre 2018 et 2021; que, dans ses observations préliminaires du 15 février 2022 sur les logiciels espions modernes, le Contrôleur européen de la protection des données conclut que l’utilisation généralisée de logiciels espions très avancés tels que Pegasus est susceptible d’entraîner des risques et des dommages sans précédent non seulement pour les libertés et les droits fondamentaux, mais également pour la démocratie et l’état de droit, expose une série d’actions et de mesures permettant de se prémunir contre l’usage illicite de logiciels espions et indique qu’une interdiction du développement et du déploiement de logiciels espions ayant les mêmes capacités que Pegasus dans l’Union serait la solution la plus efficace pour protéger les libertés et les droits fondamentaux; que les médias pro-gouvernementaux en Hongrie n’ont consacré presque aucune couverture médiatique à Pegasus;

AZ.  considérant que, dans sa décision du 9 mars 2022 concernant la surveillance soutenue en cours de l’exécution de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Szabó et Vissy c. Hongrie, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe rappelle que cette affaire concerne la violation du droit des requérants au respect de leur vie privée et familiale et de leur correspondance en raison de la législation hongroise sur les mesures de surveillance secrète liées à la sécurité nationale, qui ne prévoyait pas de garanties suffisamment précises, effectives et complètes en ce qui concerne la prise de décision en la matière, l’exécution et la réparation éventuelle de telles mesures; que le Comité des ministres souligne en outre que la surveillance secrète doit être considérée comme un acte hautement intrusif qui interfère potentiellement avec les droits à la liberté d’expression et à la vie privée et menace les fondements d’une société démocratique, rappelant qu’en réponse à l’arrêt de la Cour, les autorités ont annoncé en 2017 la nécessité d’une réforme législative; que le Comité des ministres note avec vive préoccupation que, malgré les engagements du gouvernement, le processus législatif est toujours à un stade préliminaire et que les autorités n’ont présenté aucun autre développement pertinent, et par conséquent, en appelle vivement aux autorités pour qu’elles adoptent d’urgence les mesures nécessaires pour mettre la législation nationale en pleine conformité avec les exigences de la Convention, pour qu’elles établissent un calendrier pour le processus législatif et pour qu’elles présentent au Comité un projet de proposition législative;

Liberté d’expression, et notamment pluralisme des médias

BA.  considérant que, le 13 juillet 2022, la Commission a indiqué dans le chapitre consacré à la Hongrie du rapport 2022 sur l’état de droit que l’indépendance fonctionnelle et l’efficacité de l’autorité des médias devaient être renforcées, et que l’octroi continu d’importants volumes de publicités d’État à des médias pro-gouvernementaux créait des conditions de concurrence inégales dans le paysage médiatique; que les médias de service public opèrent dans un système institutionnel complexe, dans un contexte de préoccupations quant à leur indépendance éditoriale et financière, et que les professionnels des médias continuent d’être confrontés à des difficultés dans l’exercice de leurs activités, notamment en raison de la surveillance des journalistes d’investigation; que l’accès aux informations publiques continue d’être entravé dans le cadre d’un état de danger;

BB.  considérant que, le 15 juillet 2022, la Commission a décidé de saisir la Cour de justice d’un recours contre la Hongrie pour violation des règles de l’Union en matière de télécommunications, en raison de la décision du Conseil des médias hongrois de rejeter, pour des motifs très discutables, la demande de Klubrádió concernant l’utilisation du spectre radioélectrique; que la Commission a conclu que le refus du Conseil des médias hongrois de renouveler les droits de Klubrádió était opaque et disproportionné et que la loi hongroise sur les médias nationaux était appliquée de façon discriminatoire dans ce cas particulier, contrevenant ainsi à la directive (UE) 2018/1972 établissant le code des communications électroniques européen(15) et à la liberté d’expression;

BC.  considérant que la Fondation de la presse et des médias d’Europe centrale (KESMA) a été créée le 11 septembre 2018; que le regroupement de plus de 470 médias sous l’égide de la KESMA a eu pour conséquences de réduire l’espace disponible pour les médias indépendants et d’opposition et de limiter l’accès à l’information pour les citoyens hongrois; que les fonds consacrés aux médias publics et à la KESMA sont utilisés à des fins de propagande gouvernementale ainsi que pour discréditer l’opposition et les organisations non gouvernementales (ONG); que l’environnement médiatique peut être biaisé en faveur du gouvernement au moyen de la manipulation de la propriété des médias, de la captation par l’État des organismes de régulation et des médias autrefois indépendants, des recettes publicitaires publiques et de l’octroi de licences – méthodes qui sont reproduites dans d’autres régions d’Europe;

BD.  considérant que, dans son arrêt du 8 octobre 2019 dans l’affaire Szurovecz c. Hongrie, la CEDH a conclu à une violation de la liberté d’expression en ce qui concerne le manque d’accès des médias à des centres d’accueil de demandeurs d’asile; que la surveillance de l’exécution de cet arrêt est toujours en cours;

BE.  considérant que, dans ses arrêts du 3 décembre 2019 dans l’affaire Scheiring et Szabó c. Hongrie et du 2 décembre 2021 dans l’affaire Szél et autres c. Hongrie, la CEDH a conclu à une violation de la liberté d’expression relative au déploiement de banderoles au cours de sessions au Parlement hongrois; que la surveillance de l’exécution de ces arrêts est toujours en cours;

BF.  considérant que, dans son arrêt du 20 janvier 2020 dans l’affaire Magyar Kétfarkú Kutya Párt c. Hongrie, la CEDH a conclu à une violation de la liberté d’expression relative aux sanctions infligées à un parti politique ayant mis à la disposition des électeurs une application mobile leur permettant de photographier, de mettre en ligne anonymement et de commenter des bulletins de votes nuls utilisés lors d’un référendum sur l’immigration en 2016; que la surveillance de l’exécution de cet arrêt est toujours en cours;

BG.  considérant que, dans une déclaration du 23 mars 2020, le représentant de l’OSCE pour la liberté des médias s’est dit inquiet des dispositions du projet de loi hongrois relatif à la réaction au coronavirus, qui pourraient avoir des conséquences négatives sur la couverture médiatique de la pandémie;

BH.  considérant que, dans son arrêt du 26 mai 2020 dans l’affaire Mándli et autres c. Hongrie, la CEDH a conclu à une violation de la liberté d’expression relative à la suspension de l’accréditation en tant que journalistes des requérants et de leur accès au bâtiment du Parlement hongrois; que la surveillance de l’exécution de ce jugement est toujours en cours;

BI.  considérant que, le 24 juillet 2020, le limogeage du rédacteur en chef du principal portail d’informations indépendant hongrois, Index.hu, a entraîné la démission collective de plus de 70 journalistes qui ont dénoncé une ingérence manifeste ainsi que l’exercice de pressions gouvernementales sur leur média;

BJ.  considérant que, selon la première étude «Mapping Media Freedom Snapshot» financée par la Commission et publiée en juillet 2020, la crise de la COVID-19 a sans doute eu le plus grand effet sur la liberté des médias en Hongrie, par rapport à l’ensemble des autres pays européens, étant donné que les difficultés existantes ont été exacerbées et que de nouveaux problèmes sont apparus; que la nouvelle législation adoptée pendant l’état d’urgence en Hongrie pour combattre la diffusion d’informations «fausses» ou «déformées» a engendré une incertitude et une autocensure chez les médias et les acteurs du monde des médias;

BK.  considérant que, dans son mémorandum sur la liberté d’expression et la liberté des médias en Hongrie, publié le 30 mars 2021, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe indique que le pluralisme des médias et la liberté d’expression ne cessent de s’éroder en Hongrie, sous les effets combinés d’une autorité de régulation des médias qui n’échappe pas à un contrôle politique et d’une intervention soutenue et partiale de l’État dans le marché des médias; que la commissaire a également conclu que le libre débat politique et le libre échange d’opinions diverses, conditions préalables à l’épanouissement des sociétés démocratiques, sont aujourd’hui fortement restreints, tout particulièrement hors de la capitale;

BL.  considérant que, dans une déclaration faisant suite à un déplacement en Hongrie du 15 au 22 novembre 2021, la rapporteuse spéciale des Nations unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression a souligné que l’ingérence de la Hongrie dans le secteur des médias au cours des dix dernières années était susceptible d’engendrer des risques pour les droits de l’homme lors des prochaines élections; que la rapporteuse spéciale des Nations unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression a en outre indiqué qu’en exerçant une influence sur les organismes de réglementation des médias, en aidant les médias proches du gouvernement au moyen de fonds publics considérables, en facilitant la création et l’expansion de tout média avec une ligne éditoriale favorable au gouvernement et en ostracisant les organes médiatiques et les journalistes plus critiques à l’égard de celui-ci, les autorités ont délibérément remanié le paysage médiatique et, sous couvert de leurs efforts visant à parvenir à un «équilibre», ont fragilisé la diversité, le pluralisme et l’indépendance des médias;

BM.  considérant que, le 4 avril 2022, dans la déclaration d’observations et de conclusions préliminaires suivant les élections législatives et le référendum, la mission internationale d’observation électorale de l’OSCE a déclaré que la partialité et le manque d’équilibre de la couverture médiatique évaluée et l’absence de débats entre les principaux candidats ont considérablement limité les possibilités, pour les électeurs, de parvenir à un choix éclairé; que, le 29 juillet 2022, dans son rapport final, la mission internationale d’observation électorale de l’OSCE a souligné que de vastes campagnes publicitaires gouvernementales et une couverture médiatique partiale dans les médias publics et nombre de médias privés offraient une plateforme de campagne omniprésente pour le parti au pouvoir;

BN.  considérant que, le 8 avril 2022, le bureau électoral hongrois a déclaré illégale la campagne nationale menée par des ONG pour encourager les citoyens à exprimer un vote nul à l’occasion du référendum concernant l’accès des enfants à des informations relatives à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre et a infligé des amendes à 16 ONG hongroises différentes ayant participé à la campagne contre ce référendum;

BO.  considérant que Reporters sans frontières place la Hongrie en 85e position (sur 180 pays et territoires) dans son classement mondial de la liberté de la presse pour 2022 et que la Hongrie est citée dans l’analyse concernant la région Europe-Asie centrale comme l’un des pays ayant multiplié les lois liberticides à l’encontre des journalistes;

Liberté académique

BP.  considérant que, dans son arrêt du 6 octobre 2020 dans l’affaire C-66/18 - Commission/Hongrie (Enseignement supérieur), la CJUE a estimé qu’en adoptant les mesures prévues à l’article 76, paragraphe 1, points a) et b), de la loi nº CCIV de 2011 relative à l’enseignement supérieur national, telle que modifiée, la Hongrie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 13, de l’article 14, paragraphe 3, et de l’article 16 de la charte, de l’article 49 du traité FUE et de l’article 16 de la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur(16), ainsi que de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce; que l’université d’Europe centrale a dû quitter Budapest;

BQ.  considérant qu’en octobre 2018, le gouvernement hongrois a décidé de supprimer les études de genre de la liste des programmes de master éligibles à l’accréditation et au financement public;

BR.  considérant que, le 2 juillet 2019, le Parlement hongrois a adopté des amendements à un certain nombre de lois sur le système institutionnel et le financement de la recherche, du développement et de l’innovation, privant ainsi l’Académie des sciences de son autonomie; que, le 31 août 2020, la direction de l’université hongroise d’art dramatique et cinématographique (SZFE) a démissionné pour protester contre l’instauration d’un conseil d’administration nommé par le gouvernement; que le ministère de la technologie et de l’innovation a nommé cinq des membres de ce nouveau conseil d’administration, en rejetant les candidatures proposées par le conseil de l’université; que les deux tiers des 33 fondations pour la gestion d’actifs d’intérêt public exerçant des fonctions publiques créées avant la fin de l’année 2021 s’occuperont de gérer des établissements d’enseignement supérieur qui relevaient auparavant de la responsabilité de l’État;

BS.  considérant que, dans son avis du 2 juillet 2021 sur les amendements constitutionnels adoptés par le Parlement de la Hongrie en décembre 2020, la Commission de Venise a souligné qu’il était nécessaire de reconsidérer l’article 7 du neuvième amendement portant sur l’article 38 de la Constitution et établissant des «fondations de gestion d’actifs d’intérêt public exerçant des fonctions publiques» dans le cadre de la Loi fondamentale; que la Commission de Venise a suggéré que ces fondations soient régies par une loi statutaire énonçant clairement toutes les obligations pertinentes de transparence et de responsabilité pour la gestion de leurs fonds (publics et privés), ainsi que des garanties d’indépendance appropriées pour la composition et le fonctionnement du conseil d’administration; que la Commission de Venise a également indiqué que ces lois devraient tenir compte du rôle important des universités en tant que lieux de libre pensée et d’argumentation, en prévoyant toutes les mesures nécessaires pour garantir la sauvegarde appropriée de l’indépendance académique et de l’autonomie institutionnelle;

BT.  considérant que, dans une déclaration faisant suite à un déplacement en Hongrie du 15 au 22 novembre 2021, la rapporteuse spéciale des Nations unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression a instamment demandé aux autorités hongroises de protéger de manière effective la liberté académique et de respecter les droits des professeurs comme des étudiants, compte tenu des risques de la privatisation des universités publiques pour l’autonomie des spécialistes universitaires;

Liberté de religion

BU.  considérant que, le 21 décembre 2018, la Hongrie a promulgué une modification générale de la loi sur l’Église de 2011; que d’après le gouvernement hongrois, cette modification prévoyait des voies légales d’accès permettant aux communautés religieuses de demander au tribunal métropolitain de Budapest le statut d’association religieuse, d’église enregistrée ou d’église incorporée; que la surveillance de l’exécution de l’arrêt de la CEDH dans l’affaire Magyar Keresztény Mennonita Egyház et autres c. Hongrie, qui a conclu à une violation du droit à la liberté d’association lu à la lumière du droit à la liberté de religion en raison de la suppression de l’enregistrement d’Églises, est toujours en cours;

BV.  considérant que, dans son avis du 2 juillet 2021 sur les amendements constitutionnels adoptés par le Parlement de la Hongrie en décembre 2020, la Commission de Venise a souligné que le système scolaire public doit offrir un programme objectif et pluraliste, en évitant l’endoctrinement et la discrimination pour tous les motifs et en respectant les convictions des parents et leur liberté de choisir entre des cours religieux et non religieux;

BW.  considérant que, le 13 juillet 2022, dans le chapitre de son rapport 2022 sur l’état de droit consacré à la Hongrie, la Commission a indiqué que la pression exercée sur les organisations de la société civile ne faiblit pas; que, le 27 juillet 2022, plusieurs organisations de la société civile ont indiqué que le projet de loi présenté par le gouvernement visant à modifier les règles relatives à la consultation publique «dans le but de parvenir à un accord avec la Commission européenne» ne proposait que de prétendues solutions; que la Commission a également souligné que le renforcement de la participation du public au processus législatif est un objectif important, mais que cela suppose avant tout une réelle volonté gouvernementale, une mise en œuvre effective des lois existantes et des garanties beaucoup plus efficaces que celles prévues dans le projet de loi;

Liberté d’association

BX.  considérant que, dans son arrêt du 18 juin 2020 dans l’affaire C-78/18, Commission/Hongrie (transparence des associations), la CJUE a conclu qu’en adoptant les dispositions(17) de la loi nº LXXVI de 2017 sur la transparence des organisations recevant de l’aide de l’étranger, la Hongrie a introduit des restrictions discriminatoires, injustifiées et non nécessaires à l’égard des dons étrangers accordés aux organisations de la société civile, en violation des obligations qui lui incombent au titre de l’article 63 TFUE ainsi que des articles 7, 8 et 12 de la charte; que, le 18 février 2021, jugeant que les autorités hongroises n’avaient pas pris les mesures nécessaires pour se conformer à cet arrêt, la Commission a décidé d’adresser une lettre de mise en demeure à celles-ci; que, le 20 juillet 2021, dans le chapitre de son rapport 2021 sur l’état de droit consacré à la Hongrie, la Commission a indiqué que le Parlement hongrois avait abrogé la loi en vigueur et introduit de nouvelles mesures relatives au contrôle de la légalité pour la société civile, et continuait d’exercer des pressions contre les organisations de la société civile critiques à l’égard du gouvernement; que la déconstruction méthodique de l’état de droit, de la démocratie et des droits fondamentaux a restreint l’espace dévolu aux partis d’opposition et à la société civile, aux syndicats et aux groupes d’intérêt, ne laissant aucune place au dialogue social et à la consultation;

BY.  considérant que l’adoption de cette nouvelle loi n’a fait l’objet d’aucune consultation publique préalable et que les ONG n’ont pas non plus été consultées directement, ce qui est contraire à la recommandation de l’avis du 20 juin 2017 de Commission de Venise selon laquelle toute consultation publique devrait, dans la mesure du possible, concerner chacune des organisations de la société civile dont le statut, le financement ou les domaines d’activité sont susceptibles de subir les effets de l’entrée en vigueur de cette législation; que, aux termes de la nouvelle loi, ces organisations peuvent désormais faire l’objet d’inspections financières régulières de la part de la Cour des comptes nationale; que les organisations de la société civile craignent que la Cour des comptes, qui joue principalement un rôle de contrôle de l’utilisation des fonds publics (et non des dons privés) soit sollicitée pour exercer sur elles davantage de pression; que les organisations de la société civile ont prévenu qu’en vertu de cette nouvelle loi relative aux ONG, l’État s’ingérera dans l’autonomie d’association des organisations dont la création relève du droit d’association et de la vie privée des citoyens qui défendent l’intérêt public, au détriment de l’exercice de la liberté d’expression et de l’ensemble de la société démocratique; que la Cour des comptes a commencé à contrôler des dizaines d’ONG le 17 mai 2022, en leur demandant des informations relatives à leurs pratiques comptables et de gestion de la trésorerie;

BZ.  considérant que, le 23 juillet 2021, il a été annoncé qu’aucun accord n’avait pu être trouvé par les pays donateurs des subventions de l’Espace économique européen et de la Norvège, à savoir l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège, concernant la nomination d’un gestionnaire de fonds chargé d’administrer le financement de la société civile en Hongrie; que, par conséquent, aucun programme ne sera mis en place au cours de la période de financement actuelle, annulant les 214,6 millions d’euros de financement qui avaient été prévus pour la Hongrie;

CA.  considérant que dans leur avis conjoint du 17 décembre 2018 concernant l’article 253 de la loi XLI du 20 juillet 2018 modifiant certaines lois fiscales et autres lois connexes et relative à la taxe spéciale sur l’immigration, la Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH ont déclaré que la taxe de 25 % sur toute aide financière à une activité de soutien de l’immigration menée en Hongrie ou toute aide financière aux opérations d’une organisation ayant un siège en Hongrie et menant des activités de soutien de l’immigration ne satisfait pas à la condition de légalité et constitue une ingérence injustifiée dans le droit à la liberté d’expression et d’association des ONG concernées;

CB.  considérant que dans son rapport du 21 mai 2019 faisant suite à sa visite en Hongrie du 4 au 8 février 2019, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a souligné que les mesures législatives ont stigmatisé et rendu passibles de sanctions pénales des activités de la société civile qui devraient pourtant être considérées comme parfaitement légitimes dans une société démocratique et qu’elles exercent un effet dissuasif continu sur les ONG, tout en relevant que certaines dispositions juridiques sont particulièrement vagues et arbitraires et ne sont pas appliquées dans la pratique;

CC.  considérant que dans son rapport du 11 mai 2020 faisant suite à sa visite en Hongrie du 10 au 17 juillet 2019, le rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l’homme des migrants a souligné que les organisations de la société civile œuvrant au respect des droits des migrants en Hongrie ont rencontré de nombreux obstacles en essayant de mener à bien leur travail aussi légitime qu’important, ces obstacles découlant de modifications législatives, de restrictions financières et d’autres mesures, tant opérationnelles que pratiques, prises par les autorités concernées; que le rapporteur spécial des Nations unies a également constaté que plusieurs organisations de la société civile ont en outre été victimes de campagnes de diffamation, assorties dans certains cas d’enquêtes administratives ou pénales;

Le droit à l’égalité de traitement, y compris les droits des personnes LGBTIQ

CD.  considérant que, le 13 juillet 2022, dans le chapitre de son rapport 2022 sur l’état de droit consacré à la Hongrie, la Commission a indiqué que le commissaire hongrois aux droits fondamentaux a acquis davantage de compétences, mais que son niveau d’accréditation a été revu à la baisse à la suite de doutes émis sur son indépendance; que dans le rapport et les recommandations de sa session virtuelle qui s’est tenue du 14 au 25 mars 2022, le sous-comité d’accréditation de l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme a recommandé de rétrograder au statut B le commissaire aux droits fondamentaux, le sous-comité n’ayant pas reçu les preuves écrites nécessaires pour établir que le commissaire s’acquittait efficacement de son mandat en ce qui concerne les groupes vulnérables tels que les minorités ethniques, les personnes LGBTIQ, les défenseurs des droits de l’homme, les réfugiés et les migrants, ou en ce qui concerne d’importants droits de l’homme, tels que le pluralisme des médias, l’espace civique et l’indépendance judiciaire; que le sous-comité était d’avis que le commissaire avait agi d’une manière qui compromettait sérieusement sa conformité aux principes de Paris concernant les critères des normes s’appliquant aux institutions nationales de défense des droits de l’homme; que le sous-comité a également fait part de ses préoccupations concernant le processus de sélection et de nomination du commissaire, ses relations de travail et sa coopération avec les organisations de la société civile et les défenseurs des droits de l’homme;

CE.  considérant que, le 15 juin 2021, le Parlement hongrois a adopté une loi qui devait à l’origine permettre de lutter contre la pédophilie, mais qui, après plusieurs propositions d’amendements déposées par des députés du parti majoritaire, le Fidesz, contient aujourd’hui des clauses interdisant la représentation de l’homosexualité et de la réassignation sexuelle auprès des mineurs; que la loi interdit que les cours d’éducation à la sexualité abordent l’homosexualité et la réassignation sexuelle et dispose que ces cours ne peuvent désormais être dispensés que par des organismes enregistrés; que, conformément aux modifications apportées à la loi sur la publicité commerciale et à la loi sur les médias, les publicités et autres contenus représentant des personnes LGBTI doivent être classés en catégorie V (et sont donc déconseillés aux mineurs); que le fait d’associer l’orientation sexuelle et l’identité de genre à des actes criminels tels que la pédophilie est inacceptable et entraîne encore davantage de discrimination et de stigmatisation envers les minorités sexuelles; qu’en conséquence des règles nationales interdisant ou limitant l’accès des personnes de moins de 18 ans à tout contenu représentant une «divergence par rapport à l’identité propre correspondant au sexe à la naissance, un changement de sexe ou l’homosexualité», le gouvernement hongrois a promulgué un décret ordonnant aux marchands de livres pour enfants de conditionner les livres et autres supports représentant l’homosexualité dans des «emballages fermés» et interdisant la vente des livres ou autres supports représentant des relations homosexuelles ou des changements de sexe à moins de 200 mètres de toute école ou église; que cela s’applique au livre de contes pour enfants «Fairyland is for everyone», publié par l’association Labrisz;

CF.  considérant que, le 2 décembre 2021, la Commission a décidé d’adresser un avis motivé aux autorités hongroises pour indiquer à celles-ci qu’en imposant une obligation d’information sur toute divergence par rapport aux «rôles traditionnellement attribués aux hommes et aux femmes», la Hongrie porte atteinte à la liberté d’expression des auteurs et des éditeurs de livres (article 11 de la charte), opère une discrimination injustifiée fondée sur l’orientation sexuelle (article 21 de la charte) et n’applique pas correctement les règles de l’Union en matière de pratiques commerciales déloyales au titre de la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur(18);

CG.  considérant que, le 15 juillet 2022, la Commission a décidé de saisir la CJUE d’un recours contre la Hongrie à propos de ses règles nationales visant à interdire ou à limiter l’accès des personnes de moins de 18 ans à tout contenu représentant une «divergence par rapport à l’identité propre correspondant au sexe à la naissance, un changement de sexe ou l’homosexualité»; que la Commission a conclu que lesdites règles nationales, en particulier, vont à l’encontre de la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels(19), de la directive 2000/31/CE relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur(20), ainsi que du respect de la dignité humaine et de la vie privée et familiale, de la liberté d’expression et d’information et du droit à la non-discrimination tels qu’inscrits respectivement aux articles 1, 7, 11 et 21 de la charte; que la Commission a également indiqué que, compte tenu de la gravité de ces violations, les dispositions contestées enfreignent également les valeurs communes établies à l’article 2 du traité UE; que, le 22 juin 2021, 18 États membres de l’Union ont cosigné, en marge du Conseil des affaires générales, une déclaration indiquant leur opposition à l’adoption de la loi hongroise;

CH.  considérant que dans son rapport du 21 mai 2019 faisant suite à sa visite en Hongrie du 4 au 8 février 2019, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a décrit la régression de l’égalité de genre et des droits des femmes qu’elle a observée en Hongrie, ainsi que la représentation particulièrement faible des femmes en politique, mais aussi que, dans la politique gouvernementale, les problématiques concernant les femmes sont étroitement associées aux affaires familiales et que les autorités ont cessé d’appliquer une stratégie spécifique en matière d’égalité entre les hommes et les femmes;

CI.  considérant que, dans sa déclaration du 29 avril 2020, l’expert indépendant des Nations unies chargé de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre a demandé instamment à la Hongrie d’abandonner le projet de loi qui nierait le droit à la reconnaissance juridique et à l’autodétermination des personnes transgenres et de genre variant;

CJ.  considérant que dans ses observations finales du 3 mars 2020 concernant le sixième rapport périodique de la Hongrie, le Comité des droits de l’enfant des Nations unies a invité le gouvernement hongrois à agir, à adopter une stratégie, à communiquer des informations et à aider les enfants en situation de vulnérabilité, y compris à l’aide de mesures visant expressément les filles, les enfants roms, les enfants demandeurs d’asile et migrants et les enfants homosexuels, bisexuels, transgenres et intersexes; que le Comité s’est dit par ailleurs gravement préoccupé par le fait que des enfants handicapés soient privés de leur famille et vivent dans des institutions, par l’insuffisance des mesures prises par les autorités hongroises pour mettre un terme à leur placement en institution et promouvoir leur accès à des services de santé et de réadaptation, ainsi qu’à d’autres activités d’inclusion, par les abus sexuels et les mauvais traitements dont sont victimes les enfants handicapés placés en institution, par le manque d’informations sur la situation des enfants roms handicapés ainsi que par la persistance de la stigmatisation des enfants handicapés;

CK.  considérant que, le 5 mai 2020, le Parlement hongrois a adopté une résolution s’opposant à la ratification de la convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (convention d’Istanbul);

CL.  considérant que, dans son arrêt rendu le 16 juillet 2020 dans l’affaire Rana c. Hongrie, la CEDH a conclu à une violation du droit au respect de la vie privée dans le cas d’un homme transsexuel iranien qui avait obtenu l’asile en Hongrie, mais n’avait pas pu légalement changer de genre et de nom dans ce pays; que, dans sa décision du 10 juin 2022 concernant la surveillance soutenue en cours de l’exécution, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a noté avec inquiétude que les autorités hongroises n’ont pris aucune mesure pour créer une solution appropriée pour les ressortissants de pays tiers légalement installés, qui demandent une reconnaissance juridique du genre; qu’en outre, en mai 2020, le Parlement hongrois a adopté une législation qui a rendu impossible la reconnaissance juridique du genre pour les personnes transgenres hongroises;

CM.  considérant que, dans sa déclaration du 14 juin 2021, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a demandé instamment aux députés hongrois de s’opposer à tout projet d’amendement interdisant les débats relatifs à l’identité et à la diversité sexuelles et de genre; que, dans son avis du 13 décembre 2021 sur la compatibilité avec les normes internationales en matière de droits de l’homme de la loi LXXIX de 2021 modifiant certains actes pour la protection des enfants, la Commission de Venise a conclu que les amendements peuvent difficilement être considérés comme compatibles avec la CEDH et les normes internationales en matière de droits de l’homme et a demandé instamment aux autorités hongroises d’abroger plusieurs de ces dispositions;

CN.  considérant que dans son avis du 2 juillet 2021 sur les amendements constitutionnels adoptés par le Parlement hongrois en décembre 2020, la Commission de Venise a recommandé de ne pas utiliser l’amendement constitutionnel établissant le mariage comme l’union d’un homme et d’une femme et l’ajout du passage «La mère est une femme, le père est un homme» à celui-ci comme une opportunité pour retirer les lois existantes sur la protection des individus qui ne sont pas hétérosexuels, ou pour modifier ces lois à leur désavantage; que la Commission de Venise a également recommandé que l’interprétation et l’application des amendements constitutionnels, notamment lors de la rédaction de la législation d’application, soient effectuées de manière à ce que le principe de non-discrimination pour tous les motifs, y compris sur la base de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre, soit pleinement mis en œuvre; qu’elle a en outre souligné que l’amendement «La Hongrie protège le droit des enfants à une identité propre correspondant à leur sexe à la naissance» devrait être abrogé ou modifié afin de garantir qu’il n’ait pas pour effet de nier les droits des personnes transgenres à la reconnaissance juridique de leur identité de genre acquise;

CO.  considérant que, dans son avis du 18 octobre 2021 sur les amendements à la loi sur l’égalité de traitement et la promotion de l’égalité des chances et à la loi sur le commissaire aux droits fondamentaux telles qu’adoptés par le Parlement hongrois en décembre 2020, la Commission de Venise a indiqué que la fusion des organismes de promotion de l’égalité avec les institutions nationales des droits de l’homme comportait des risques, y compris, mais sans s’y limiter, les différentes traditions, procédures juridiques et stratégies que les institutions peuvent avoir mises en place, et observé que la collision des compétences dont jouissait déjà le commissaire en vertu de la loi CXI et de celles qu’il avait acquises en sa qualité de successeur de l’Autorité hongroise pour l’égalité de traitement était une démonstration claire d’un risque susceptible de compromettre l’efficacité du travail dans le domaine de la promotion de l’égalité et de la lutte contre la discrimination;

CP.  considérant que, dans sa déclaration du 13 janvier 2022, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a affirmé que la décision du gouvernement hongrois d’organiser un référendum national concernant l’accès des enfants à des informations relatives à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre le même jour que les élections législatives est profondément regrettable, car elle contribue à instrumentaliser les droits de l’homme des personnes LGBTIQ; que, le 29 juillet 2022, dans son rapport final, la mission internationale d’observation électorale de l’OSCE a souligné que le cadre juridique du référendum est dans une large mesure inadapté, ne prévoit pas de conditions de concurrence équitables pour les campagnes référendaires et ne répond pas aux principales recommandations formulées dans le cadre des bonnes pratiques internationales, et qu’en vertu d’un amendement de 2018, le gouvernement dispose de tous les droits en matière de campagne lorsqu’il est à l’origine d’un référendum, contrairement aux bonnes pratiques internationales, et que les autorités ne sont pas tenues de fournir aux électeurs des informations objectives sur les questions soumises au référendum ou sur les positions des partisans et des opposants, ce qui compromet la capacité des électeurs à faire un choix éclairé; que le référendum contre les personnes LGBTQ organisé en Hongrie le 3 avril 2022 a été invalidé, étant donné qu’aucune des deux réponses («Oui» ou «Non») n’a recueilli 50 % des voix; que le référendum a été largement critiqué, ses opposants affirmant qu’il viole le principe de non-discrimination;

CQ.  considérant que, le 29 juillet 2022, dans son rapport final, la mission internationale d’observation électorale de l’OSCE a souligné que moins de 20 % de l’ensemble des candidats étaient des femmes, ce qui limite considérablement les possibilités de remédier à la faible représentation des femmes dans la vie politique nationale en Hongrie; que la proportion de femmes élues au Parlement hongrois en 2022 s’établit à 14 %;

CR.  considérant que dans ses observations finales du 25 mars 2022 concernant le rapport de la Hongrie valant deuxième et troisième rapports, le Comité des droits des personnes handicapées des Nations unies s’est dit préoccupé par le fait que les personnes handicapées ne disposent d’aucun mécanisme de prise de décision autonome et a recommandé à la Hongrie de modifier sa législation de manière à s’assurer que toute aide à la prise de décision respecte bien la dignité, l’autonomie, la volonté et les préférences des personnes handicapées appelées à exercer leur capacité juridique; que le Comité a également recommandé à la Hongrie de remanier ses mesures et de réallouer ses budgets à des services d’aide de proximité, tels que l’assistance personnelle, afin de garantir l’indépendance et l’égalité de traitement des personnes handicapées au niveau local;

Les droits des personnes appartenant à des minorités, y compris les Roms et les Juifs, et la protection de ces minorités contre les déclarations haineuses

CS.  considérant que, le 9 juin 2021, la Commission a décidé d’adresser une lettre de mise en demeure à la Hongrie, au motif que la législation nationale de ce pays ne respecte pas pleinement les règles de l’Union interdisant la discrimination au titre de la directive 2000/43/CE relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique(21) et de la directive 2000/78/CE portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail(22), qui imposent aux États membres de prévoir des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives en cas de discrimination; qu’un changement fondamental à l’origine de cette situation est intervenu en juillet 2020, quand la Hongrie a modifié son régime national de sanctions en obligeant les tribunaux à accorder la réparation morale uniquement sous la forme de services de formation ou d’enseignement, et non sous celle d’un paiement unique, en cas de discrimination dans le domaine de l’éducation et de la formation professionnelle; que le Parlement européen a demandé à plusieurs reprises aux États membres de lutter contre l’antitsiganisme par des mesures juridiques et politiques efficaces;

CT.  considérant que, le 2 décembre 2021, la Commission a adressé une lettre de mise en demeure à la Hongrie relative à la transposition de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal(23), au motif que le cadre juridique hongrois ne criminalise pas l’apologie, la négation ou la banalisation grossière publiques des crimes internationaux et ne garantit pas qu’une motivation raciste et xénophobe est considérée comme une circonstance aggravante ou qu’une telle motivation est prise en considération par la justice nationale pour toute infraction commise;

CU.  considérant que, dans ses observations finales du 6 juin 2019 concernant le rapport de la Hongrie valant dix-huitième à vingt-cinquième rapports périodiques, le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale s’est dit vivement alarmé par le nombre élevé de discours de haine raciale qui sont prononcés à l’encontre des Roms, des migrants, des réfugiés, des demandeurs d’asile et des autres minorités et qui attisent la haine et l’intolérance et incitent parfois à la violence contre ces groupes, en particulier de la part de personnalités politiques et dans les médias, notamment sur l’internet; qu’en particulier, le Comité a éprouvé une profonde inquiétude en ce qui concerne les informations selon lesquelles des personnalités publiques hongroises, y compris au plus haut niveau, ont fait des déclarations susceptibles de promouvoir la haine raciale, notamment dans le cadre de la campagne anti-immigrés et anti-réfugiés lancée par le gouvernement en 2015, et en ce qui concerne la présence d’organisations qui encouragent la haine raciale et les activités qu’elles mènent à cette fin; que, s’il prend note des informations qui lui ont été communiquées sur les mesures adoptées pour améliorer la situation des Roms, notamment dans les domaines de la santé et de l’éducation ainsi que dans le cadre de la stratégie nationale d’inclusion sociale de 2011, le Comité demeure vivement préoccupé par la discrimination, la ségrégation et l’extrême pauvreté que continuent de subir les Roms;

CV.  considérant que dans son cinquième avis sur la Hongrie adopté le 26 mai 2020, le Comité consultatif de la convention-cadre pour la protection des minorités nationales du Conseil de l’Europe a indiqué que si la Hongrie avait poursuivi sa politique de soutien aux minorités nationales en s’appuyant sur un cadre législatif solide, il restait nécessaire de remédier aux difficultés structurelles des Roms dans toutes les sphères de la vie publique et privée, et notamment l’éducation, l’emploi, le logement et l’accès aux soins de santé; que le Comité a souligné que des mesures devaient être prises d’urgence pour remédier à la situation des Roms, pour lutter contre l’abandon prématuré de la scolarité et pour promouvoir un enseignement inclusif et de qualité, y compris dans les zones marginalisées; qu’il a également fait observer que, dans les régions défavorisées, une complémentarité accrue entre les politiques nationales et locales s’imposait pour proposer des solutions à long terme aux problèmes d’emploi et de logement, tandis que l’accès aux soins de santé et aux services sociaux restait en butte à de sérieux obstacles pratiques, principalement au détriment des femmes et des enfants roms;

CW.  considérant que, dans sa décision du 10 juin 2022 concernant la surveillance soutenue en instance de l’exécution de l’arrêt de la CEDH dans l’affaire Horváth et Kiss c. Hongrie, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a rappelé que l’affaire en question concerne les pratiques discriminatoires que sont les erreurs de placement et la surreprésentation des enfants roms dans des écoles spécialisées pour enfants handicapés mentaux et que l’État a l’obligation positive d’éviter la pérennisation des pratiques discriminatoires; que le Comité a de nouveau invité, avec force, les autorités à fournir des exemples démontrant l’effectivité des recours administratifs et judiciaires contre les conclusions des comités d’experts et à compléter les données statistiques fournies à cet égard, a invité instamment les autorités à compléter les informations statistiques par des données ventilées par ethnie indiquant le nombre de recours introduits dans les cas d’enfants roms, et a de nouveau invité, avec la plus grande fermeté, les autorités à fournir des informations supplémentaires sur toute procédure pertinente devant le commissaire aux droits fondamentaux;

CX.  considérant que la surveillance de l’exécution de l’arrêt rendu par la CEDH dans l’affaire Balázs c. Hongrie, concernant des violations de l’interdiction de discrimination à rapprocher de l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants en raison de l’absence d’enquête effective de la part des autorités sur la question d’un éventuel motif raciste à l’origine de l’agression du requérant d’origine rom par un agent public, est toujours en instance;

CY.  considérant que, le 29 juillet 2022, des présidents des groupes politiques du Parlement ont adopté une déclaration condamnant les propos ouvertement racistes du Premier ministre Viktor Orbán dans lesquels il exprimait son refus de voir le peuple hongrois devenir une «race mixte» et ont souligné que ces propos enfreignaient nos valeurs, qui sont également inscrites dans les traités de l’Union;

Les droits fondamentaux des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés

CZ.  considérant que, dans son arrêt du 19 mars 2020 dans l’affaire C-564/18, Bevándorlási és Menekültügyi Hivatal (Tompa), la CJUE a estimé que la directive 2013/32/UE relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale(24) s’oppose a une réglementation nationale permettant de rejeter comme étant irrecevable une demande de protection internationale au motif que le demandeur est arrivé sur le territoire de l’État membre concerné par un État dans lequel il n’est pas exposé à des persécutions ou à un risque d’atteintes graves, ou dans lequel un degré de protection adéquat est assuré; que la CJUE a conclu que la directive s’oppose également à une réglementation nationale impartissant à la juridiction saisie d’un recours contre une décision de rejet d’une demande de protection internationale comme étant irrecevable un délai de huit jours pour statuer, dès lors que cette juridiction n’est pas en mesure d’assurer dans un tel délai l’effectivité des règles de fond et des garanties procédurales reconnues au demandeur par le droit de l’Union;

DA.  considérant que dans son arrêt du 2 avril 2020 rendu dans les affaires jointes C-715/17, C-718/17 et C‑719/17, notamment Commission/Hongrie (Mécanisme temporaire de relocalisation de demandeurs de protection internationale), la CJUE a estimé qu’en n’ayant pas indiqué à intervalles réguliers, et au moins tous les trois mois, un nombre approprié de demandeurs de protection internationale pouvant faire rapidement l’objet d’une relocalisation sur son territoire, la Hongrie avait, depuis le 25 décembre 2015, manqué aux obligations lui incombant en vertu de l’article 5, paragraphe 2, de la décision (UE) 2015/1601 du Conseil(25) ainsi que, par voie de conséquence, aux obligations ultérieures de relocalisation lui incombant en vertu de l’article 5, paragraphes 4 à 11, de cette décision;

DB.  considérant que dans son arrêt rendu le 14 mai 2020 dans les affaires jointes C‑924/19 PPU et C‑925/19 PPU Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság Dél-alföldi Regionális Igazgatóság et Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság, la CJUE a estimé que la directive 2008/115/CE relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier(26) et la directive 2013/33/UE établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale(27) devaient être interprétées en ce sens que l’obligation faite à un ressortissant d’un pays tiers de demeurer en permanence dans une zone de transit dont le périmètre est restreint et clos, à l’intérieur de laquelle les mouvements de ce ressortissant sont limités et surveillés, et que ce dernier ne peut légalement quitter volontairement, en quelque direction que ce soit, apparaît comme une privation de liberté, caractéristique d’une «rétention» au sens desdites directives; que la CJUE a précisé que le droit de l’Union s’oppose à un certain nombre de dispositions issues de la législation hongroise;

DC.  considérant que dans son arrêt du 17 décembre 2020 dans l’affaire C‑808/18, Commission/Hongrie (Accueil des demandeurs de protection internationale), la CJUE a estimé que la Hongrie avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des directives 2008/115/CE, 2013/32/UE et 2013/33/UE en: i) prévoyant que les demandes de protection internationale émanant de ressortissants de pays tiers ou d’apatrides ne peuvent être présentées que dans les zones de transit de Röszke et de Tompa, tout en limitant drastiquement le nombre de demandeurs autorisés à pénétrer quotidiennement dans ces zones de transit; ii) instaurant un système de rétention généralisée des demandeurs de protection internationale, dans les zones de transit de Röszke et de Tompa; iii) permettant l’éloignement de tous les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire national, sans respecter les procédures et garanties prévues dans l’acquis; et iv) subordonnant à des conditions contraires au droit de l’Union l’exercice, par les demandeurs de protection internationale, de leur droit de rester sur son territoire; que, le 27 janvier 2021, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) a annoncé la suspension de ses activités en Hongrie à la suite de l’arrêt de la CJUE; que, le 12 novembre 2021, la Commission a décidé de renvoyer la Hongrie devant la CJUE, celle-ci ne s’étant pas conformée à l’arrêt, et a demandé à la CJUE de lui imposer le versement de sanctions financières (affaire C-123/22);

DD.  considérant que, le 9 juin 2021, la Commission a décidé d’adresser une lettre de mise en demeure et un avis motivé aux autorités hongroises pour transposition incomplète de la directive 2013/32/UE concernant les dispositions relatives à l’entretien personnel, à l’examen médical, aux garanties pour les enfants et les adolescents non accompagnés et à la procédure d’examen des demandes d’asile;

DE.  considérant que, le 15 juillet 2021, la Commission a décidé de saisir la CJUE d’un recours contre la Hongrie, car elle juge la nouvelle procédure de demande d’asile de celle-ci incompatible avec l’article 6 de la directive 2013/32/UE, interprété à la lumière de l’article 18 de la charte (affaire C‑823/21, Commission/Hongrie);

DF.  considérant que, dans son arrêt rendu le 16 novembre 2021 dans l’affaire C-821/19, Commission/Hongrie (Incrimination de l’aide aux demandeurs d’asile), la CJUE a estimé que la Hongrie avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu: i) de l’article 33, paragraphe 2, de la directive 2013/32/UE, en permettant de rejeter comme étant irrecevable une demande de protection internationale au motif que le demandeur est arrivé sur son territoire par un État dans lequel il n’est pas exposé à des persécutions ou à un risque d’atteintes graves, ou dans lequel un degré de protection adéquat est assuré; ii) de l’article 8, paragraphe 2, et de l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2013/32/UE ainsi que de l’article 10, paragraphe 4, de la directive 2013/33/UE, en réprimant pénalement dans son droit interne le comportement de toute personne qui, dans le cadre d’une activité d’organisation, fournit une aide à la présentation ou à l’introduction d’une demande d’asile sur son territoire, lorsqu’il peut être prouvé, au-delà de tout doute raisonnable, que cette personne avait conscience du fait que cette demande ne pouvait être accueillie, en vertu de ce droit; et iii) de l’article 8, paragraphe 2, de l’article 12, paragraphe 1, point c), et de l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2013/32/UE ainsi que de l’article 10, paragraphe 4, de la directive 2013/33/UE, en privant du droit de s’approcher de ses frontières extérieures toute personne suspectée d’avoir commis une telle infraction;

DG.  considérant que, dans son rapport du 21 mai 2019 faisant suite à sa visite en Hongrie du 4 au 8 février 2019, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a constaté que depuis 2015, la prise de position du gouvernement hongrois contre l’immigration et les demandeurs d’asile s’est traduite par un cadre législatif qui compromet l’accueil des demandeurs d’asile et l’intégration des personnes dont le statut de réfugié a été reconnu, comme le prévoient les obligations internationales relatives aux droits de l’homme;

DH.  considérant que dans son rapport du 17 mars 2020 faisant suite à une visite effectuée en Hongrie en 2018, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants a souligné que, depuis sa visite ad hoc en 2017, rien n’avait été fait pour mettre en place des garanties effectives pour prévenir les mauvais traitements infligés aux personnes renvoyées par la police hongroise de l’autre côté de la frontière clôturée vers la Serbie et qu’il était également évident qu’il n’existait toujours pas de recours juridique offrant à ces personnes une véritable protection contre les renvois forcés et/ou les refoulements, y compris les refoulements en chaîne;

DI.  considérant que, dans ses observations finales du 6 juin 2019 concernant le rapport de la Hongrie valant dix-huitième à vingt-cinquième rapports périodiques, le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale s’est dit profondément préoccupé par la situation alarmante des demandeurs d’asile, des réfugiés et des migrants en Hongrie et par les informations selon lesquelles le principe de non‑refoulement n’est pas pleinement respecté, en droit et dans la pratique; que le Comité s’est également déclaré vivement alarmé par les informations selon lesquelles des agents des forces de l’ordre auraient fait un usage excessif de la force et de la violence contre des ressortissants de pays tiers sur tout le territoire hongrois et auraient «repoussé» en Serbie ceux qui se trouvaient près de la frontière, faisant des blessés parmi eux;

DJ.  considérant que, dans son arrêt rendu le 2 mars 2021 dans l’affaire R.R. et autres c. Hongrie, la CEDH a conclu que la privation de nourriture dont a fait l’objet le premier requérant (R.R.) et les conditions de séjour des autres requérants (une femme enceinte et des enfants) ont emporté violation de l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants; que la CEDH a également estimé que le séjour des requérants dans la zone de transit s’analyse en une privation de liberté de fait et que l’absence de toute décision formelle des autorités ainsi que de toute procédure dans le cadre de laquelle il aurait pu être statué à bref délai par un tribunal sur la légalité de leur détention a conduit à des violations du droit à la liberté et à la sûreté; que la CEDH est parvenue à des conclusions similaires dans ses arrêts rendus le 24 février 2022 dans l’affaire M.B.K. et autres c. Hongrie et le 2 juin 2022 dans l’affaire H.M. et autres c. Hongrie; que la surveillance soutenue de l’exécution de ces arrêts est toujours en cours;

DK.  considérant que dans son rapport du 11 mai 2020 faisant suite à une visite effectuée en Hongrie en 2019, le rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l’homme des migrants a invité de nouveau le gouvernement hongrois à réévaluer de façon concrète la situation actuelle et ses politiques migratoires et a indiqué que la Hongrie devrait mettre un terme à la «situation de crise», qui ne correspond pas à la réalité et entraîne d’importantes répercussions négatives sur les droits de l’homme des migrants et des demandeurs d’asile, sur la liberté des organisations de la société civile et sur le pouvoir judiciaire, mais aussi lever toutes les autres mesures restrictives présentant des caractéristiques et des conséquences similaires;

DL.  considérant que dans son arrêt rendu le 8 juillet 2021 dans l’affaire Shahzad c. Hongrie, la CEDH a conclu que le requérant avait été victime d’une expulsion «collective», étant donné que sa situation individuelle n’avait pas été examinée par les autorités, qui ne lui avaient pas fourni de moyens légaux et effectifs pour entrer en Hongrie, et que l’expulsion du requérant ne résultait pas de son comportement et qu’il n’avait pas disposé d’un recours juridique effectif; que la surveillance soutenue de l’exécution de cet arrêt est toujours en cours;

DM.  considérant que dans sa décision du 2 décembre 2021 concernant la surveillance soutenue en instance de l’exécution de l’arrêt rendu par la CEDH dans l’affaire Ilias et Ahmed c. Hongrie, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a rappelé que l’affaire en question concerne une violation de l’obligation procédurale prévue par l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme d’évaluer les risques de mauvais traitements avant d’expulser les demandeurs d’asile vers la Serbie en se fondant sur une présomption générale de «pays tiers sûr», a noté avec profond regret qu’aucune mesure n’a été prise en vue de procéder au réexamen nécessaire de la présomption législative de «pays tiers sûr» en ce qui concerne la Serbie et a réitéré fermement son invitation à procéder à ce réexamen sans plus tarder et conformément aux exigences de la jurisprudence de la Cour et à en présenter les motifs et le résultat; que le Comité a également noté avec grave préoccupation que malgré les préoccupations exprimées dans sa décision précédente, la pratique des retours forcés sans procédure ordonnée s’est poursuivie et a réitéré avec force son appel aux autorités à se conformer pleinement aux exigences découlant de l’arrêt de la CEDH et à veiller à ce que les retours forcés soient encadrés par des procédures ordonnées et des garanties concernant le droit de toute personne de demander l’asile, tel qu’établi par le droit international;

DN.  considérant que la supervision de l’exécution des jugements de la CEDH dans l’affaire Nabil et autres c. Hongrie, concernant des violations du droit des requérants, demandeurs d’asile, à la liberté et à la sûreté compte tenu de leur détention dans l’attente de l’examen du bien-fondé de leurs demandes d’asile, est toujours en instance;

DO.  considérant que, dans sa communication du 12 août 2022 adressée au Comité des ministres du Conseil de l’Europe, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a indiqué que l’accès à la procédure d’asile et à une évaluation de fond et individuelle des risques est devenu pratiquement impossible en Hongrie en raison des mesures consécutives et redondantes prises par le gouvernement depuis 2015; que les demandeurs d’asile potentiels se voient refuser l’entrée légale sur le territoire ou, à quelques exceptions près, sont obligés de quitter la Hongrie et faire l’objet d’un filtrage préalable via une ambassade avant de pouvoir introduire une demande de protection internationale; que ce démantèlement progressif du régime d’asile s’est constamment accompagné d’un discours résolument anti-migrants adopté par le gouvernement hongrois et a été systématiquement alimenté par cette rhétorique, ce qui nuit encore davantage à l’accueil et à la protection des réfugiés et des demandeurs d’asile dans le pays;

Droits économiques et sociaux

DP.  considérant que dans sa recommandation du 12 juillet 2022 concernant le programme national de réforme de la Hongrie pour 2022 et portant avis sur le programme de convergence de la Hongrie pour 2022, le Conseil a recommandé que la Hongrie s’attache à poursuivre l’intégration des groupes les plus vulnérables sur le marché du travail, notamment par le renforcement des compétences, à allonger la durée des allocations de chômage, à améliorer l’adéquation de l’aide sociale et à garantir l’accès aux services essentiels et à un logement adéquat pour tous; qu’il a en outre recommandé à la Hongrie d’améliorer les résultats dans le domaine de l’éducation, d’augmenter la participation des groupes défavorisés, les Roms en particulier, à un enseignement général de qualité et d’améliorer l’accès à des services de soins de santé préventifs et primaires de qualité;

DQ.  considérant que, dans ses observations finales du 3 mars 2020 concernant le sixième rapport de la Hongrie, le Comité des droits de l’enfant des Nations unies a recommandé à la Hongrie de continuer à investir dans des mesures visant à mettre fin à la pauvreté, en accordant une attention particulière aux enfants roms et aux enfants qui vivent dans des zones socialement et économiquement défavorisées et s’est dit vivement préoccupé par le nombre d’élèves, la plupart issus de milieux défavorisés, qui abandonnent l’école prématurément, l’attribution d’écoles publiques à des communautés religieuses, ce qui peut favoriser la ségrégation fondée sur la religion ou les convictions, la persistance de la ségrégation des enfants roms dans l’enseignement, l’écart entre les enfants roms et les autres enfants en matière d’éducation, le manque de données officielles concernant la situation des enfants roms dans le système éducatif, le harcèlement, les mauvais traitements et l’exclusion dont des enfants, en particulier les enfants LGBTI, sont victimes à l’école et l’application, dans les écoles, de méthodes de discipline qui ne protègent pas les enfants de la violence physique et mentale;

DR.  considérant que, le 11 février 2022, le gouvernement hongrois a promulgué un décret, dans le cadre de l’état d’urgence, qui définit les «services minimaux nécessaires» devant être fournis en cas de grève en vertu de la loi sur la grève et qui donne une interprétation si large de la grève qu’elle la rend impossible; que le décret a restreint les droits des enseignants qui avaient annoncé leur intention d’entamer une grève le 16 mars 2022;

DS.  considérant que, depuis l’adoption de l’interdiction de résidence habituelle dans un espace public, plusieurs juridictions de droit commun ont demandé à la Cour constitutionnelle d’abroger la législation en invoquant l’inconstitutionnalité de la loi pour de nombreux motifs; que la Cour constitutionnelle a rejeté avec un retard important toutes les requêtes soumises par les juridictions de droit commun pour l’ensemble des motifs, et a refusé de tenir compte des propositions qui n’étayaient pas le raisonnement du gouvernement; qu’en ce qui concerne le sans-abrisme, le système de sécurité sociale se concentre avant tout sur la déclaration selon laquelle il est illégal pour les personnes sans domicile fixe de séjourner dans les espaces publics et sur des mesures punitives, plutôt que sur l’inclusion sociale;

1.  rappelle que ses préoccupations portent sur les éléments suivants quant à la situation en Hongrie:

   le fonctionnement du système constitutionnel et électoral,
   l’indépendance de la justice ainsi que des autres institutions et les droits des juges,
   la corruption et les conflits d’intérêts,
   la protection des données et de la vie privée,
   la liberté d’expression, et notamment le pluralisme des médias,
   la liberté académique,
   la liberté de religion,
   la liberté d’association,
   le droit à l’égalité de traitement, y compris les droits des personnes LGBTIQ,
   les droits des personnes appartenant à des minorités, y compris les Roms et les Juifs, et la protection de ces minorités contre les déclarations haineuses,
   les droits fondamentaux des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés,
   les droits économiques et sociaux;

2.  estime que, pris dans leur ensemble, les faits et les tendances évoqués dans les résolutions du Parlement représentent une menace systémique pour les valeurs de l’article 2 du traité UE et constituent un risque clair de violation grave de ces valeurs; se dit vivement préoccupé par les tentatives systématiques et délibérées du gouvernement hongrois de saper les valeurs fondatrices de l’Union consacrées à l’article 2 du traité UE et condamne ces tentatives; souligne que ces tendances se sont aggravées de manière considérable depuis le déclenchement de la procédure prévue à l’article 7, paragraphe 1, du traité UE; souligne que le gouvernement hongrois est responsable de la remise en conformité avec la législation de l’Union et les valeurs consacrées à l’article 2 du traité UE et regrette profondément que l’absence d’action décisive de la part de l’Union ait contribué au délitement de la démocratie, de l’état de droit et des droits fondamentaux en Hongrie, faisant du pays un régime hybride d’autocratie électorale, comme le montrent les indicateurs les plus pertinents;

3.  déplore que le Conseil ne soit pas en mesure d’obtenir de véritables avancées dans le cadre de la procédure en cours engagée au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE; demande instamment au Conseil de veiller à ce que des auditions aient lieu au moins une fois par présidence pendant toute la durée des procédures en cours au titre de l’article 7 du traité UE et qu’elles portent également sur toute nouvelle évolution affectant l’état de droit, la démocratie et les droits fondamentaux; invite le Conseil à publier un procès‑verbal exhaustif après chaque audition; souligne qu’il n’est nécessaire d’obtenir l’unanimité au Conseil ni pour constater qu’il existe un risque clair de violation grave des valeurs de l’Union, conformément à l’article 7, paragraphe 1, du traité UE, ni pour adresser des recommandations concrètes aux États membres concernés et fixer des échéances pour la mise en œuvre de ces recommandations; réitère son invitation au Conseil à agir en ce sens, soulignant que tout retard supplémentaire apporté à cette action constituerait une violation du principe de l’état de droit par le Conseil lui-même; souligne que les États membres sont tenus d’agir de concert et de mettre un terme aux attaques contre les valeurs consacrées à l’article 2 du traité UE; invite le Conseil à adresser à la Hongrie, dans les plus brefs délais, des recommandations visant à remédier aux problèmes évoqués dans sa résolution du 12 septembre 2018 et dans la présente résolution, lui demandant de mettre en œuvre l’ensemble des arrêts et des recommandations mentionnés, y compris ceux qui concernent les élections législatives du 3 avril 2022; insiste sur le fait que dans toutes les procédures liées à l’article 7 du traité UE, le Parlement devrait pouvoir présenter sa proposition motivée au Conseil, être présent lors des auditions au titre de l’article 7 du traité UE et être tenu rapidement et pleinement informé à chaque étape de la procédure;

4.  invite le Conseil et la Commission à accorder davantage d’attention au démantèlement systémique de l’état de droit, ainsi qu’à l’interdépendance entre les différentes violations des valeurs recensées dans ses résolutions; souligne que le fait de ne pas agir face à des violations de l’état de droit affaiblit les institutions démocratiques et finit par porter atteinte aux droits de l’homme et à la vie de tous les citoyens du pays où ces violations sont commises; souligne que l’Union devrait défendre avec la même détermination toutes les valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE;

5.  demande à la Commission d’utiliser pleinement les outils disponibles pour faire face à un risque clair de violation grave, par la Hongrie, des valeurs sur lesquelles l’Union est fondée, en particulier les procédures d’infraction accélérées, les demandes en référé devant la Cour de justice et les recours pour non-application des arrêts de la Cour; rappelle l’importance du règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit et se félicite de la décision de le déclencher dans le cas de la Hongrie, quoique avec beaucoup de retard et une portée limitée; invite la Commission à prendre des mesures immédiates au titre de ce règlement en ce qui concerne d’autres violations de l’état de droit, notamment touchant à l’indépendance du système judiciaire et à d’autres motifs abordés dans la lettre envoyée à la Hongrie par la Commission le 19 novembre 2021; insiste sur le fait que l’application du règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit est un outil qui vient compléter la procédure prévue à l’article 7, que ce règlement est directement applicable dans tous les États membres et qu’il est exécutoire depuis janvier 2021, et invite la Commission à prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à qu’il soit réellement appliqué; relève le risque de mauvaise utilisation des fonds au titre de la facilité pour la reprise et la résilience et demande à nouveau à la Commission de s’abstenir d’approuver le plan de la Hongrie tant qu’elle ne se sera pas conformée pleinement à toutes les recommandations du Semestre européen en matière d’état de droit qui la concernent et tant qu’elle n’aura pas appliqué tous les arrêts de la CJUE et de la CEDH pertinents à cet égard; attend de la Commission qu’elle écarte tout risque de voir des programmes relevant de la politique de cohésion contribuer à l’utilisation abusive des fonds de l’Union ou à des violations de l’état de droit avant d’approuver les accords de partenariat et les programmes de la politique de cohésion; invite la Commission à appliquer le règlement portant dispositions communes(28) et le règlement financier(29) de manière plus rigoureuse afin de lutter contre toute utilisation abusive de fonds de l’Union à des fins politiques; estime qu’en cette période où les valeurs consacrées à l’article 2 du traité UE sont menacées par la guerre que mène la Russie contre l’Ukraine et par les mesures qu’elle prend à l’encontre de l’Union, l’application de ces instruments pour protéger lesdites valeurs n’en est que plus impérieuse;

6.  demande une nouvelle fois à la Commission de veiller à ce que les destinataires finaux ou les bénéficiaires des fonds de l’Union ne soient pas privés de ces fonds en cas d’application de sanctions au titre du mécanisme de conditionnalité liée à l’état de droit, comme prévu à l’article 5, paragraphes 4 et 5, du règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit; invite la Commission à trouver des moyens de distribuer les fonds de l’Union par l’intermédiaire des collectivités locales et des ONG si le gouvernement concerné ne coopère pas au sujet des lacunes dans le respect de l’état de droit;

7.  invite la Commission à aider la société civile indépendante en Hongrie, qui cherche à préserver les valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE, en s’appuyant notamment sur le programme «Citoyens, égalité, droits et valeurs»; demande de nouveau à la Commission d’adopter une stratégie complète pour préserver et faire évoluer l’espace dévolu à la société civile au sein de l’Union, en y intégrant tous les outils existants, et de présenter un ensemble de mesures concrètes pour protéger et renforcer cet espace;

8.  invite une nouvelle fois la Commission et le Conseil à entamer sans délai des négociations avec le Parlement sur un mécanisme de l’Union pour la démocratie, l’état de droit et les droits fondamentaux sous la forme d’un accord interinstitutionnel comprenant un cycle politique permanent au sein des institutions de l’Union;

9.  se félicite des conclusions de la conférence sur l’avenir de l’Europe, en particulier de celles contenues dans la proposition nº 25 sur l’état de droit, les valeurs démocratiques et l’identité européenne et rappelle la nécessité de renforcer la procédure de protection des valeurs sur lesquelles se fonde l’Union et de préciser les critères permettant de constater des violations des valeurs fondamentales et les conséquences de ces violations;

10.  charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au Conseil de l’Europe, à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et aux Nations unies.

(1) JO C 433 du 23.12.2019, p. 66.
(2) JO C 270 du 7.7.2021, p. 91.
(3) Textes adoptés de cette date, P9_TA(2022)0204.
(4) JO C 99 du 1.3.2022, p. 218.
(5) Arrêt du 24 juin 2019, Commission européenne contre République de Pologne, C-619/18, ECLI:EU:C:2019:531, point 42.
(6) Avis de la Cour du 18 décembre 2014, rendu en vertu de l’article 218, paragraphe 11, du traité FUE, 2/13, ECLI:EU:C:2014:2454, point 168.
(7) Arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses contre Tribunal de Contas, C-64/16, ECLI EU:C:2018:117, point 32.
(8) JO C 316 du 6.8.2021, p. 2.
(9) JO C 282 du 26.8.2020, p. 107.
(10) Règlement (UE, Euratom) 2020/2092 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union (JO L 433 I du 22.12.2020, p. 1).
(11) JO L 94 du 28.3.2014, p. 65.
(12) JO L 94 du 28.3.2014, p. 1.
(13) JO L 94 du 28.3.2014, p. 243.
(14) JO L 198 du 28.7.2017, p. 29.
(15) JO L 321 du 17.12.2018, p. 36.
(16) JO L 376 du 27.12.2006, p. 36.
(17) Dispositions qui imposent des obligations d’enregistrement, de déclaration et de publication à certaines catégories d’organisations de la société civile bénéficiant directement ou indirectement d’un soutien de l’étranger dépassant un certain seuil et qui prévoient la possibilité d’appliquer des sanctions aux organisations qui ne respectent pas ces obligations.
(18) JO L 149 du 11.6.2005, p. 22.
(19) JO L 95 du 15.4.2010, p. 1.
(20) JO L 178 du 17.7.2000, p. 1.
(21) JO L 180 du 19.7.2000, p. 22.
(22) JO L 303 du 2.12.2000, p. 16.
(23) JO L 328 du 6.12.2008, p. 55.
(24) JO L 180 du 29.6.2013, p. 60.
(25) Décision (UE) 2015/1601 du Conseil du 22 septembre 2015 instituant des mesures provisoires en matière de protection internationale au profit de l’Italie et de la Grèce (JO L 248 du 24.9.2015, p. 80).
(26) JO L 348 du 24.12.2008, p. 98.
(27) JO L 180 du 29.6.2013, p. 96.
(28) JO L 231 du 30.6.2021, p. 159.
(29) JO L 193 du 30.7.2018, p. 1.

Dernière mise à jour: 15 février 2023Avis juridique - Politique de confidentialité