Résolution du Parlement européen du 10 mai 2023 sur l’incidence sur le budget 2024 de l’UE de l’augmentation des coûts d’emprunt au titre de l’instrument de l’Union européenne pour la relance (2023/2037(BUI))
Le Parlement européen,
– vu l’article 314 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,
– vu l’article 106 bis du traité instituant la Communauté européenne de l’énergie atomique,
– vu les conclusions du Conseil du 14 mars 2023 sur les orientations budgétaires pour 2024,
– vu sa résolution du 15 décembre 2022 sur l’amélioration du cadre financier pluriannuel 2021-2027: un budget de l’Union résilient et adapté aux nouveaux défis(1),
– vu sa résolution du 22 novembre 2022 sur la mise en œuvre de la stratégie d’emprunt destinée à financer Next Generation EU, l’instrument de l’Union pour la relance(2),
– vu le règlement (UE, Euratom) 2020/2093 du Conseil du 17 décembre 2020 fixant le cadre financier pluriannuel pour les années 2021 à 2027(3) et les déclarations communes convenues entre le Parlement, le Conseil et la Commission dans ce contexte(4) ainsi que les déclarations unilatérales qui s’y rapportent(5),
– vu l’accord interinstitutionnel du 16 décembre 2020 entre le Parlement européen, le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne sur la discipline budgétaire, la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière, ainsi que sur de nouvelles ressources propres, comportant une feuille de route en vue de la mise en place de nouvelles ressources propres(6),
– vu la décision (UE, Euratom) 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020 relative au système des ressources propres de l’Union européenne et abrogeant la décision 2014/335/UE, Euratom («décision relative aux ressources propres»)(7),
– vu la proposition de décision du Conseil modifiant la décision (UE, Euratom) 2020/2053 relative au système des ressources propres de l’Union européenne, présentée par la Commission le 22 décembre 2021 (COM(2021)0570), et la position du Parlement du 23 novembre 2022 à ce sujet(8),
– vu le règlement (UE) 2020/2094 du Conseil du 14 décembre 2020 établissant un instrument de l’Union européenne pour la relance en vue de soutenir la reprise à la suite de la crise liée à la COVID-19(9),
– vu le budget général de l’Union européenne pour l’exercice 2023(10) et la déclaration commune du Parlement, du Conseil et de la Commission ainsi que la déclaration de la Commission qui y sont annexées,
– vu l’article 93 de son règlement intérieur,
– vu le rapport de la commission des budgets (A9-0163/2023),
A. considérant qu’en vertu de l’article 311 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’Union doit se doter des moyens nécessaires pour atteindre ses objectifs et pour mener à bien ses politiques;
B. considérant que le cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027 a programmé 12,9 milliards d’euros aux prix de 2018 (15 milliards d’euros aux prix courants) sur une période de sept ans afin de couvrir les coûts d’emprunt liés à l’instrument de l’Union européenne pour la relance (EURI); que ce chiffre reposait sur l’hypothèse d’une augmentation progressive des taux d’intérêt pour les emprunts, passant de 0,55 % en 2021 à 1,15 % en 2027;
C. considérant que, dans le cadre du CFP 2021-2027, le remboursement des coûts d’emprunt de l’EURI est soumis au plafond des dépenses de la rubrique 2b (résilience et valeurs), parallèlement aux programmes phares tels qu’Erasmus +, le programme «L’UE pour la santé», le programme «Citoyens, égalité, droits et valeurs» et le programme «Europe créative»;
D. considérant que la stratégie d’emprunt de l’EURI a été mise en œuvre de manière efficace; que la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, qui a débuté en février 2022, a accéléré l’inflation, entraînant une réaction contre-inflationniste de la Banque centrale européenne et une augmentation substantielle correspondante des taux d’intérêt, qui s’élèvent désormais à plus de 3 %, et donc un accroissement des coûts d’emprunt de l’EURI;
E. considérant qu’en l’absence de mesures rapides dans le cadre d’une révision du CFP, l’augmentation des coûts de remboursement de l’EURI est susceptible de dépasser les marges budgétaires disponibles; qu’il est urgent d’agir pour éviter une situation qui nécessiterait l’utilisation de la plupart, sinon de la totalité, des ressources disponibles au titre de l’instrument de flexibilité et du dispositif de marge unique en 2023 et 2024; que les emprunts de l’EURI sont concentrés en 2022 et 2023, avec des coûts de remboursement programmés beaucoup plus élevés au cours de la seconde moitié de la période couverte par le CFP, ce qui signifie que des taux d’intérêt plus élevés que prévu auront une incidence considérable sur les coûts absolus entre 2025 et 2027;
F. considérant qu’en adoptant l’accord sur le CFP, le Parlement, le Conseil et la Commission ont convenu que les dépenses couvrant les coûts de financement de l’EURI devaient viser à ne pas réduire les programmes et les fonds de l’Union;
G. considérant que, dans la feuille de route juridiquement contraignante en vue de l’introduction de nouvelles ressources propres, les trois institutions reconnaissent que le renforcement de la crédibilité et de la viabilité du plan de remboursement de l’EURI dépend de la mise en place de nouvelles ressources propres suffisantes; que la décision relative au premier panier de nouvelles ressources propres est toujours en suspens au Conseil; que le premier panier devra être complété par des propositions relatives à un deuxième lot de ressources propres afin de garantir un niveau global fiable et suffisant de recettes supplémentaires, y compris pour couvrir les coûts d’emprunt de l’EURI;
1. souligne que l’Union s’acquittera pleinement de son obligation juridique de rembourser les coûts d’emprunt liés à l’EURI, quoi qu’il arrive; rappelle que la décision d’augmenter le plafond des ressources propres de 0,6 % du revenu national brut signifie que le budget de l’Union est bien pourvu pour couvrir les coûts d’emprunt de l’EURI;
2. observe, avec une inquiétude croissante, que les montants programmés pour le remboursement des coûts d’emprunt de l’EURI risquent d’être insuffisants, en particulier en 2023 et 2024, et qu’en l’état actuel des choses, les marges non allouées dans le cadre de la plupart des plafonds de dépenses sont soit fortement limitées, soit totalement absentes;
3. insiste à nouveau sur le fait qu’il est nécessaire que la Commission fournisse en temps utile à l’autorité budgétaire des informations détaillées sur les calculs sous-tendant les coûts d’emprunt de l’EURI jusqu’en 2027, y compris les hypothèses et les paramètres utilisés; s’associe à l’appel du Conseil en faveur d’une transparence et d’une visibilité totales de l’EURI et demande à la Commission de fournir toutes les informations pertinentes, y compris des tableaux récapitulatifs sur les crédits budgétaires;
4. est profondément préoccupé par le fait que, si les mesures nécessaires ne sont pas prises, l’augmentation des coûts d’emprunt de l’EURI risque de limiter fortement la capacité du budget de l’Union à financer les priorités et les politiques de l’Union et à répondre aux besoins émergents; souligne que cette incidence vient s’ajouter à l’effet d’une inflation élevée, qui réduit la valeur réelle du budget de l’Union; souligne que l’incidence combinée signifie que le budget de l’Union est moins en mesure de répondre aux besoins des citoyens et de relever les défis auxquels l’Union est confrontée;
5. souligne la nécessité d’agir d’urgence dans le cadre d’une révision du CFP afin d’éviter une situation dans laquelle l’augmentation des coûts d’emprunt de l’EURI pourrait épuiser l’instrument de flexibilité et le dispositif de marge unique en 2023 et 2024; souligne que l’absence d’action non seulement réduirait la capacité de l’Union à répondre aux nouveaux besoins et crises, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Union, mais rendrait également impossible le financement de nouvelles initiatives importantes, telles que la proposition de règlement européen sur les semi-conducteurs, sans réduire les ressources de programmes ou fonds essentiels existants; souligne que cela constituerait de facto une violation de l’engagement pris par les trois institutions de ne pas restreindre les programmes ou les fonds de l’Union;
6. rappelle que la feuille de route en vue de l’introduction de nouvelles ressources propres prévoyait d’introduire le premier lot de ressources propres en janvier 2023, à la suite des délibérations du Conseil en juillet 2022 au plus tard; souligne que le non-respect de la feuille de route est inacceptable; invite dès lors le Conseil à adopter sans plus tarder les modifications nécessaires à la décision relative aux ressources propres; invite la Commission à présenter des propositions pour un deuxième panier de nouvelles ressources propres dès que possible et au plus tard au troisième trimestre de 2023;
7. souligne, en outre, que les coûts de remboursement de l’EURI sont soumis aux conditions du marché et influencés par des facteurs externes et sont donc intrinsèquement volatils; souligne que le remboursement de la dette est également de nature non discrétionnaire et que, par conséquent, le soumettre à un plafond au sein d’une rubrique du CFP va à l’encontre de la réalité de ces dépenses; rappelle, par conséquent, que le Parlement a demandé, lors des négociations sur le CFP, que les coûts de remboursement de l’EURI soient placés au-delà des plafonds afin de réduire la pression sur le CFP, de préserver le financement des programmes déjà approuvés et de garantir une marge de manœuvre suffisante dans le cadre des plafonds pour financer de nouvelles initiatives;
8. souligne que les ressources disponibles dans les marges dans le cadre des plafonds du CFP et via les instruments spéciaux sont déjà insuffisantes en raison des multiples crises et des nouvelles initiatives depuis le début du CFP actuel et que l’effet de l’augmentation des coûts d’emprunt de l’EURI amplifie ces lacunes;
9. réitère, par conséquent, son appel en faveur d’une révision urgente et ambitieuse du CFP; invite la Commission à inclure dans sa proposition de révision l’architecture et le financement nécessaires pour gérer efficacement les coûts de remboursement de l’EURI, tout en préservant les niveaux de financement nécessaires pour les programmes et les politiques et en veillant à ce que le budget soit doté de ressources suffisantes et soit suffisamment souple pour faire face aux besoins futurs et répondre aux crises;
10. souligne que, compte tenu en particulier de l’incidence des coûts de l’EURI sur le budget 2024, il importe de mettre en place avant le 1er janvier 2024 un CFP révisé, comprenant une solution structurelle pour l’EURI;
11. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et à la Cour des comptes.