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Procédure : 2023/2062(INI)
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A9-0442/2023

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PV 17/01/2024 - 8.15
CRE 17/01/2024 - 8.15

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P9_TA(2024)0029

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Mercredi 17 janvier 2024 - Strasbourg
Implications stratégiques du développement des mondes virtuels - aspects de droit civil, de droit des sociétés, de droit commercial et de droit de la propriété intellectuelle
P9_TA(2024)0029A9-0442/2023

Résolution du Parlement européen du 17 janvier 2024 sur les implications stratégiques du développement des mondes virtuels – aspects de droit civil, de droit des sociétés, de droit commercial et de droit de la propriété intellectuelle (2023/2062(INI))

Le Parlement européen,

–  vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment ses articles 4, 16, 26, 81, 114 et 118,

–  vu la convention de Berne de 1886 pour la protection des œuvres littéraires et artistiques,

–  vu l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, tel que modifié le 28 septembre 1979 et mis à jour dans sa douzième édition (12-2023),

–  vu le traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur le droit d’auteur de 1996 et le traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes de 1996,

–  vu la directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données(1),

–  vu la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) nº 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil («directive sur les pratiques commerciales déloyales»)(2),

–  vu le règlement (CE) nº 864/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles (Rome II)(3),

–  vu le règlement (CE) nº 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I)(4),

–  vu la directive 2009/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur(5),

–  vu le règlement (UE) nº 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (refonte)(6) (règlement Bruxelles I),

–  vu le règlement (UE) nº 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE(7),

–  vu la directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites(8),

–  vu le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE(9),

–  vu la directive (UE) 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d’enquêtes et de poursuites en la matière ou d’exécution de sanctions pénales, et à la libre circulation de ces données(10),

–  vu la directive (UE) 2016/2102 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2016 relative à l’accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public(11),

–  vu le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne(12),

–  vu le règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions, organes et organismes de l’Union et à la libre circulation de ces données, et abrogeant le règlement (CE) nº 45/2001 et la décision nº 1247/2002/CE(13),

–  vu le règlement (UE) 2018/1807 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 établissant un cadre applicable au libre flux des données à caractère non personnel dans l’Union européenne(14),

–  vu la directive (UE) 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE(15) (directive sur le droit d’auteur),

–  vu la directive (UE) 2019/882 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 relative aux exigences en matière d’accessibilité applicables aux produits et services(16),

–  vu la directive (UE) 2019/1024 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public(17),

–  vu le règlement (UE) 2019/1150 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 promouvant l’équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne(18),

–  vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles harmonisées concernant l’intelligence artificielle (législation sur l’intelligence artificielle) et modifiant certains actes législatifs de l’Union (COM(2021)0206),

–  vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 910/2014 en ce qui concerne l’établissement d’un cadre européen relatif à une identité numérique (COM(2021)0281),

–  vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant des règles harmonisées pour l’équité de l’accès aux données et de l’utilisation des données (règlement sur les données) (COM(2022)0068),

–  vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la responsabilité du fait des produits défectueux (COM(2022)0495),

–  vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l’adaptation des règles en matière de responsabilité civile extracontractuelle au domaine de l’intelligence artificielle (directive sur la responsabilité en matière d’IA) (COM(2022)0496),

–  vu le règlement (UE) 2022/868 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 portant sur la gouvernance européenne des données et modifiant le règlement (UE) 2018/1724 (règlement sur la gouvernance des données)(19),

–  vu le règlement (UE) 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828 (règlement sur les marchés numériques)(20),

–  vu le règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE (règlement sur les services numériques)(21),

–  vu le règlement (UE) 2023/988 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 relatif à la sécurité générale des produits, modifiant le règlement (UE) nº 1025/2012 du Parlement européen et du Conseil et la directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil, et abrogeant la directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 87/357/CEE du Conseil(22),

–  vu le règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant les règlements (UE) nº 1093/2010 et (UE) nº 1095/2010 et les directives 2013/36/UE et (UE) 2019/1937(23),

–  vu sa résolution du 20 octobre 2020 sur les droits de propriété intellectuelle pour le développement des technologies liées à l’intelligence artificielle (A9-0176/2020)(24),

–  vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Exploiter au mieux le potentiel d’innovation de l’Union européenne – Un plan d’action en faveur de la propriété intellectuelle afin de soutenir la reprise et la résilience dans l’Union européenne» (COM(2020)0760),

–  vu sa résolution du 11 novembre 2021 sur un plan d’action en faveur de la propriété intellectuelle afin de soutenir la reprise et la résilience dans l’Union européenne(25),

–  vu la communication de la Commission du 11 juillet 2023 intitulée «Une initiative de l’UE sur le web 4.0 et les mondes virtuels: prendre de l’avance pour la prochaine transition technologique»,

–  vu la communication de la Commission du 11 mai 2022 intitulée «Une décennie numérique pour les enfants et les jeunes: la nouvelle stratégie européenne pour un internet mieux adapté aux enfants» (COM(2022)0212),

–  vu l’article 54 de son règlement intérieur,

–  vu le rapport de la commission des affaires juridiques (A9-0442/2023),

A.  considérant que les mondes virtuels n’ont pas encore été largement adoptés, alors que leur déploiement dans un certain nombre de cas d’utilisation dans des secteurs divers a sensibilisé l’opinion publique et attiré l’attention des pouvoirs publics;

B.  considérant qu’il est essentiel de continuer à promouvoir et à développer les nouvelles technologies, et de reconnaître leur potentiel transformateur dans des domaines tels que l’éducation, la culture, les soins de santé, les jeux et bien d’autres, tout en s’attaquant aux risques que ces nouvelles technologies pourraient poser;

C.  considérant que les experts estiment que 10 à 15 années supplémentaires pourraient être nécessaires pour que les mondes virtuels atteignent leur plein potentiel et que leur développement pourrait avoir une incidence considérable sur le paysage numérique dans les années à venir, puisqu’il offrira des possibilités mais sera également associé à des risques dont il faut tenir compte;

D.  considérant que la souveraineté numérique est un moyen de promouvoir les notions de leadership européen et d’autonomie stratégique, et qu’elle est essentielle pour garantir la capacité de l’Union à concevoir et à appliquer la législation dans l’environnement numérique, en assurant des mondes virtuels éthiques, durables et centrés sur l’humain et en préservant les droits fondamentaux et les valeurs de l’Union;

Définitions

1.  constate que les concepts de «métavers» et de «monde virtuel» ne s’accompagnent pas, à l’heure actuelle, de définitions consolidées;

2.  se félicite, à cet égard, de la proposition qui figure dans la communication de la Commission portant sur une définition axée essentiellement sur les principales caractéristiques des mondes virtuels, et qui se présente comme suit: «les mondes virtuels sont des environnements persistants et immersifs, faisant appel à des technologies telles que la 3D et la réalité étendue, ce qui permet de fusionner en temps réel le monde physique et le monde numérique, à diverses fins telles que la conception, la réalisation de simulations, la collaboration, l’apprentissage, la socialisation, l’exécution de transactions ou le divertissement»; souligne que bon nombre des technologies qualifiées de «mondes virtuels» existent depuis des années; insiste sur le fait qu’une future stratégie européenne devrait s’appuyer sur la recherche, les preuves scientifiques et l’intérêt pour la société;

3.  souligne qu’il est essentiel de promouvoir la normalisation et l’interopérabilité pour le plein développement d’un écosystème de mondes virtuels interconnectés;

Un cadre éthique et juridique adéquat

4.  souligne que les mondes virtuels accessibles dans l’Union devraient respecter des valeurs éthiques, principes et droits fondamentaux consacrés par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne(26) et par la législation existante de l’Union, notamment en ce qui concerne la confidentialité des données, les normes en matière de sécurité et de sûreté, le partage de données, la modération des contenus, la lutte contre le harcèlement et les discours de haine, la cybersécurité, les droits des travailleurs, la protection des consommateurs et des enfants, les exigences en matière d’accessibilité, le respect des droits de propriété intellectuelle, la protection du savoir-faire et des secrets d’affaires, la prévention des abus et des fraudes en ligne, ainsi que les marchés contestables et équitables;

5.  rappelle que les mondes virtuels devraient être développés et déployés conformément au principe général selon lequel ce qui est illégal hors ligne devrait être illégal en ligne, en veillant à ce que les droits des personnes, en particulier des enfants, en tant qu’utilisateurs, consommateurs, travailleurs, investisseurs, titulaires de droits et créateurs soient pleinement respectés;

6.  souligne en particulier que les textes législatifs suivants s’appliquent déjà à différents aspects des mondes virtuels: la législation sur les services numériques, la législation sur les marchés numériques, le règlement sur la gouvernance des données, la règlement sur les données, la proposition de législation sur l’intelligence artificielle, le règlement général sur la protection des données(27) (RGPD), le règlement relatif à la sécurité générale des produits, la directive sur les pratiques commerciales déloyales, le règlement sur les marchés de crypto-actifs, l’identité numérique européenne, la directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique, le règlement sur la marque de l’Union européenne, la directive relative à la protection des secrets d’affaires, l’acte législatif européen sur l’accessibilité et la directive sur l’accessibilité du web;

7.  insiste sur l’importance qu’il y a à contrôler régulièrement la conformité et à garantir l’application effective des instruments juridiques applicables en vigueur; invite la Commission à élaborer, en coopération avec les différentes parties prenantes, y compris des représentants de la société civile et d’organisations de protection des consommateurs, ainsi que le monde universitaire, des lignes directrices et des bonnes pratiques qui clarifient les obligations et responsabilités juridiques de chaque partie prenante concernée par les mondes virtuels, telles que les opérateurs de plateformes, les fournisseurs de services, les développeurs et les utilisateurs, en vertu de la législation de l’Union en vigueur;

8.  met l’accent sur le fait qu’il est primordial que la Commission effectue régulièrement des bilans de qualité des instruments juridiques applicables en vigueur, notamment en ce qui concerne une éventuelle révision de la directive sur les pratiques commerciales déloyales, la directive sur les droits des consommateurs(28) et la directive sur les clauses abusives dans les contrats(29), et souligne que toute législation future sur les mondes virtuels devrait éviter les chevauchements ou les incohérences, tout en comblant les lacunes lorsque cela est nécessaire;

9.  relève que certaines questions réglementaires se posent néanmoins déjà dans les domaines du droit international privé, du droit civil et du droit de la propriété intellectuelle, comme précisé dans les sections ci-après;

10.  insiste sur le fait que des recherches récentes ont montré que les données issues de capteurs dans la réalité virtuelle peuvent être identifiées de façon unique, comme les empreintes digitales, et qu’elles peuvent être utilisées pour obtenir des informations détaillées sur la personnalité des utilisateurs et pour répertorier un large éventail d’attributs tels que l’âge, le sexe, le revenu, l’appartenance ethnique, le statut de personne handicapée, l’état d’esprit et les émotions; estime que cela soulève des préoccupations éthiques et juridiques importantes, notamment en ce qui concerne les publicités comportementales ciblées, qu’il convient d’aborder; souligne que pour répondre à ces préoccupations éthiques liées à la collecte de grandes quantités de données à caractère personnel, y compris de données sensibles des utilisateurs comme les données biométriques et comportementales, les réactions émotionnelles et les informations tactiles, il convient notamment de veiller à ce que les utilisateurs soient au courant que leurs données sont collectées et à ce que le consentement à la collecte de ces données ne soit pas obtenu uniquement au moment de l’entrée dans le monde virtuel, mais pour chaque cas d’utilisation, conformément aux principes énoncés par le RGPD, tels que les principes de prise en compte du respect de la vie privée dès la conception et de limitation de la finalité;

11.  souligne que, lorsque l’identification de l’utilisateur n’est pas requise par la légalisation de l’Union ou la législation nationale, en particulier aux fins d’établir les responsabilités, et dès lors que cela est techniquement possible et raisonnable, les mondes virtuels devraient autoriser l’anonymat pour l’utilisation de services comme moyen de protéger la vie privée et de prévenir efficacement la divulgation non autorisée de données, l’usurpation d’identité et d’autres formes d’utilisation abusive des données à caractère personnel collectées en ligne;

12.  constate, à cet égard, que les actions proposées par la Commission dans sa communication, destinées à sensibiliser, à améliorer les compétences et l’habileté numériques et à faciliter l’accès des utilisateurs aux technologies clés, notamment en facilitant l’accès à l’infrastructure internet à haut débit et à des équipements appropriés, sont essentielles pour éviter les fractures numériques et devraient être mises en œuvre dès que possible afin de promouvoir une société numérique inclusive et compétitive et faire en sorte que personne ne soit laissé de côté dans cette évolution technologique rapide;

Droit international privé

13.  souligne que certains principes territoriaux traditionnels en matière de droit applicable et de compétence pourraient s’avérer insuffisants pour ce qui est des mondes virtuels, dont la non-territorialité est rendue possible par l’utilisation de technologies décentralisées telles que les chaînes de blocs, et poser des problèmes lorsqu’il s’agit de garantir l’applicabilité du droit de l’Union et la protection des droits des consommateurs et des entreprises;

14.  observe plus particulièrement que, dans la mesure où les mondes virtuels sont accessibles à tous n’importe où dans le monde, le «critère de la mosaïque» établi par la Cour de justice de l’Union européenne qui prévoit que la partie lésée peut demander réparation devant les tribunaux des pays où le préjudice s’est produit, au moins partiellement, pourrait ne pas être retenu; rappelle, cependant, que la Cour a établi un critère supplémentaire selon lequel les parties lésées peuvent demander réparation devant les tribunaux du pays dans lequel elles ont leur intérêt principal et affirme que la codification de ce critère dans le règlement Bruxelles I pourrait être envisagée;

15.  constate que la définition du terme «consommateur» dans le règlement Bruxelles I repose actuellement sur une relation contractuelle directe, qui fait défaut, par exemple, entre l’émetteur d’un jeton non fongible (NFT) et l’acheteur lorsque le NFT est introduit sur un marché secondaire; fait remarquer, par conséquent, qu’en cas de litige avec l’émetteur, l’acheteur final sera privé du droit au traitement juridictionnel que le règlement Bruxelles I confère aux consommateurs;

16.  invite la Commission à tenir compte de ces situations et d’autres situations potentiellement problématiques et à évaluer la pertinence des dispositions existantes du droit international privé en vigueur dans l’Union, en proposant des modifications adaptées, le cas échéant, afin de garantir que les citoyens et les entreprises n’aient pas à engager systématiquement des poursuites devant des tribunaux étrangers ou en se fondant sur des législations étrangères pour faire valoir leurs droits, de manière à s’assurer que leurs droits au titre du cadre réglementaire de l’Union sont pleinement garantis, tout en gardant à l’esprit le risque de «course aux tribunaux», notamment de la part d’entreprises non européennes;

Droit civil

17.  fait remarquer que le nombre et la pertinence économique des transactions commerciales au sein des mondes virtuels devraient augmenter au cours de la prochaine décennie; souligne que, dans ce contexte, il est nécessaire de veiller à ce que les fournisseurs de biens et de services virtuels puissent être identifiés et tenus responsables des préjudices causés par leurs produits;

18.  attire l’attention sur les préoccupations que soulèvent les techniques publicitaires utilisées lors de la vente de biens immobiliers dits virtuels, tels qu’un bâtiment ou un terrain dans un monde virtuel, représentés par un NFT, car les utilisateurs pourraient être amenés à croire qu’ils acquièrent effectivement des droits de propriété alors que, dans la pratique, ils n’obtiennent qu’une licence d’utilisation de «terrains» virtuels; souligne qu’il est important de veiller à ce que les conditions générales applicables soient transparentes, claires, équitables et lisibles, notamment parce qu’il a été démontré qu’en raison de la nature dense et technique des conditions générales applicables, les utilisateurs omettent souvent de les lire;

19.  rappelle que les règles en matière de responsabilité devraient s’appliquer pleinement aux mondes virtuels et souligne qu’il importe de mettre en place des mesures efficaces pour prévenir et combattre toute forme de comportement préjudiciable et faire respecter la loi conformément aux droits fondamentaux dans les mondes virtuels, y compris, le cas échéant et sans préjudice du droit d’intenter une action en réparation, des mécanismes de signalement et de règlement des litiges;

20.  se déclare préoccupé par le fait que l’utilisation d’avatars et de systèmes décentralisés, tels que ceux fondés sur la technologie des chaînes de blocs, pourrait rendre extrêmement difficile la tâche qui consiste à demander aux auteurs de préjudices de rendre compte de leurs actes; estime que la mise en œuvre de systèmes de gestion des identités efficaces est essentielle pour permettre de les identifier correctement et en temps utile, et de lutter contre les fausses identités, en tenant également compte des spécificités liées à la gouvernance des organisations autonomes décentralisées et à la responsabilité collective; salue à cet égard l’intention de la Commission d’étudier la valeur ajoutée d’un éventuel cadre juridique pour les organisations autonomes décentralisées;

21.  rappelle que les avatars ne sont pas dotés de la personnalité juridique et que toute question concernant leur capacité juridique, leurs droits, obligations et responsabilités doit être appréhendée en se référant aux personnes physiques ou morales qui les utilisent; estime qu’à mesure que les mondes virtuels évoluent et deviennent plus complexes, il convient d’envisager l’opportunité d’accorder un statut juridique spécifique aux avatars; considère que l’avatar ou la personne qui se cache derrière l’avatar devrait être identifiable et que le principe de connaissance de la clientèle devrait s’appliquer;

Droit de la propriété intellectuelle

22.  attire l’attention sur le fait que le corpus législatif de l’Union sur la protection des droits de la propriété intellectuelle et industrielle, y compris les droits d’auteur, les marques, les brevets, les dessins et modèles, et les secrets d’affaires, s’applique pleinement aux mondes virtuels; souligne néanmoins que le développement des mondes virtuels pose de nouveaux défis en matière de respect des droits de propriété intellectuelle et d’identification des contrevenants et en ce qui concerne les questions relatives aux règles de conflit de lois concernant le droit applicable et la compétence;

23.  rappelle que les opérateurs de plateforme, les fournisseurs de services et les utilisateurs dans les mondes virtuels sont tenus de respecter les droits exclusifs des titulaires de droits et leur droit à une rémunération équitable; met l’accent sur le fait que l’utilisation de contenus protégés par des droits de propriété intellectuelle (DPI), y compris sous forme numérique sur un support électronique, comme un NFT, nécessite l’obtention d’une autorisation par voie de licence ou de cession, à moins que ceux-ci ne relèvent d’une exception ou d’une limitation de la protection des DPI (par exemple la copie privée, l’éducation, la recherche, les citations, les critiques, les parodies ou les pastiches); rappelle à cet égard qu’il importe que les fournisseurs garantissent la transparence en ce qui concerne la portée des licences, y compris des licences territoriales, afin de s’assurer que les utilisateurs sont en mesure de déterminer les utilisations des contenus protégés par les DPI dans les mondes virtuels couvertes par les licences qu’ils détiennent et que les créateurs et les titulaires de droits peuvent recevoir des rapports précis et adéquats sur l’utilisation réelle des œuvres protégées;

24.  se félicite de la mise à jour effectuée dans la douzième édition de la «classification de Nice», qui permet que les marques soient enregistrées dans des classes couvrant leur utilisation dans les mondes virtuels; réclame un suivi attentif de l’application concrète de cette classification; se déclare toutefois préoccupé par l’utilisation de NFT référençant des marques sans l’autorisation de leurs propriétaires et demande que des mesures efficaces soient mises en œuvre pour remédier à ces cas de violations, ainsi qu’à d’autres violations; salue, à cet égard, la proposition de la Commission d’élaborer une boîte à outils pour lutter contre la contrefaçon;

25.  reconnaît l’applicabilité des règles en matière de responsabilité énoncées dans le règlement sur les services numériques et du régime spécial établi à l’article 17 de la directive sur le droit d’auteur pour couvrir le téléversement de contenus générés par les utilisateurs; estime toutefois qu’il est nécessaire de clarifier davantage la manière dont les règles existantes devraient s’appliquer aux services de partage de contenus en ligne qui mettent des contenus à disposition dans les mondes virtuels et la manière dont il convient de les faire respecter;

26.  souligne que les NFT n’accordent pas de DPI en tant que tels sur les actifs numériques et indique qu’il est nécessaire d’instaurer une clarté et une transparence accrues afin d’éviter les fraudes et la confusion fréquente entre le droit au jeton lui-même et le droit au contenu sous-jacent protégé;

27.  note que les NFT et autres offres fondées sur les chaînes de blocs facilitent la revente permanente d’actifs basés sur des œuvres protégées par le droit d’auteur au moyen de transactions en ligne, et estime qu’une rémunération appropriée et proportionnée des auteurs doit être assurée pour chaque revente de ces actifs;

28.  rappelle que, selon les règles actuelles, les résultats générés de manière autonome par les systèmes d’IA pourraient ne pas bénéficier de la protection du droit d’auteur, étant donné que le principe d’originalité est associé aux personnes physiques et que le concept de «création intellectuelle» suppose l’expression de la personnalité de l’auteur; rappelle en outre la différence entre les créations humaines assistées par l’IA et les résultats générés de manière autonome par l’IA; rappelle que, si le cadre actuel en matière de propriété intellectuelle reste applicable aux créations assistées par l’IA, les résultats générés de manière autonome par l’IA créent de nouvelles difficultés réglementaires en matière de protection des droits de propriété intellectuelle, par exemple en ce qui concerne les aspects de propriété, de qualité d’auteur et de qualité d’inventeur ainsi que de rémunération appropriée et les problèmes liés à une possible concentration du marché; salue l’engagement pris dans le plan d’action en matière de propriété intellectuelle selon lequel la Commission entamera des discussions avec les parties prenantes sur la manière de relever les défis posés par les inventions et les créations assistées par l’IA; invite la Commission à envisager d’élargir le champ d’application de ce dialogue afin de couvrir en grande partie les questions liées à l’IA, y compris l’IA générative;

Accessibilité et compétences numériques

29.  insiste sur le fait que les mondes virtuels peuvent ouvrir la voie à la fourniture de services publics d’intérêt général, pour le plus grand bénéfice des citoyens; met l’accent, cependant, sur le fait qu’il est indispensable de garantir l’inclusion et l’accessibilité de tous les utilisateurs de l’Union tant en termes de coûts et d’utilisation du matériel que de compréhension des logiciels; constate que l’accessibilité est particulièrement importante afin de garantir que les groupes vulnérables de la population, comme les personnes âgées, les personnes handicapées, les enfants et les personnes vivant dans des zones rurales ou éloignées, acquièrent les compétences numériques essentielles pour participer aux mondes virtuels, et qu’elle devrait tenir compte d’aspects tels que la situation géographique, le sexe, le niveau d’études atteint et le milieu socioéconomique;

30.  ajoute, dans ce contexte, que les compétences numériques revêtent une importance cruciale pour garantir une adoption sûre et bénéfique sur le plan social ainsi qu’une utilisation éclairée et responsable des mondes virtuels, pour éviter la dépendance de l’utilisateur, les préjugés et les pratiques discriminatoires, pour lutter contre la désinformation, la manipulation et les abus dans l’environnement virtuel et pour promouvoir le contrôle démocratique;

31.  souligne la nécessité de mettre en place des mesures éducatives efficaces pour assurer une connaissance approfondie du monde virtuel chez les citoyens et de renforcer les compétences des professionnels dans différents domaines, notamment les enseignants, ainsi que d’encourager et de promouvoir le développement de technologies et de talents européens, tout en attirant davantage de personnes, y compris davantage de femmes, dans le domaine des sciences, des technologies, de l’ingénierie et des mathématiques;

32.  recommande que la «boîte à outils des mondes virtuels» destinée au grand public, telle que décrite dans la communication de la Commission, soit développée plus avant, conformément aux recommandations du panel de citoyens, afin d’aider les citoyens à mieux comprendre comment gérer leur identité virtuelle, leurs créations virtuelles, leurs actifs virtuels et leurs données, et de contribuer à une stratégie globale de l’Union pour les mondes virtuels qui soit à la fois durable et centrée sur l’humain;

33.  salue, comme l’a relevé la Commission, la contribution positive des concepteurs de logiciels indépendants de l’Union au développement des principales caractéristiques des mondes virtuels, notamment en ce qui concerne l’utilisation de la technologie des registres distribués et d’autres technologies nécessaires à l’authenticité, à la gestion et à la sécurité des identités et des objets virtuels;

o
o   o

34.  charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.

(1) JO L 77 du 27.3.1996, p. 20.
(2) JO L 149 du 11.6.2005, p. 22.
(3) JO L 199 du 31.7.2007, p. 40.
(4) JO L 177 du 4.7.2008, p. 6.
(5) JO L 111 du 5.5.2009, p. 16.
(6) JO L 351 du 20.12.2012, p. 1.
(7) JO L 257 du 28.8.2014, p. 73.
(8) JO L 157 du 15.6.2016, p. 1.
(9) JO L 119 du 4.5.2016, p. 1.
(10) JO L 119 du 4.5.2016, p. 89.
(11) JO L 327 du 2.12.2016, p. 1.
(12) JO L 154 du 16.6.2017, p. 1.
(13) JO L 295 du 21.11.2018, p. 39.
(14) JO L 303 du 28.11.2018, p. 59.
(15) JO L 130 du 17.5.2019, p. 92.
(16) JO L 151 du 7.6.2019, p. 70.
(17) JO L 172 du 26.6.2019, p. 56.
(18) JO L 186 du 11.7.2019, p. 57.
(19) JO L 152 du 3.6.2022, p. 1.
(20) JO L 265 du 12.10.2022, p. 1.
(21) JO L 277 du 27.10.2022, p. 1.
(22) JO L 135 du 23.5.2023, p. 1.
(23) JO L 150 du 9.6.2023, p. 40.
(24) JO C 404 du 6.10.2021, p. 129.
(25) JO C 205 du 20.5.2022, p. 26.
(26) JO C 303 du 14.12.2007, p. 1.
(27) Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE, JO L 119 du 4.5.2016, p. 1.
(28) Directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JO L 304 du 22.11.2011, p. 64.
(29) Directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, JO L 95 du 21.4.1993, p. 29.

Dernière mise à jour: 20 juin 2024Avis juridique - Politique de confidentialité