Asie du Sud-Est
L’Asie du Sud-Est, qui fait partie de la région indo-pacifique au sens large, revêt une importance géostratégique vitale pour l’Union européenne. Elle est confrontée à d’importantes difficultés qui menacent l’ordre international fondé sur des règles. La région indo-pacifique connaît des mutations rapides. Étant donné qu’elle abrite plus de 50 % de la population mondiale, elle devient une région incontournable sur le plan géostratégique. Deux tiers des échanges commerciaux internationaux par conteneurs transitent par la région indo-pacifique, et ses voies maritimes constituent d’importantes routes commerciales et d’approvisionnement énergétique. La stratégie de l’Union pour la coopération dans la région indo-pacifique a été adoptée en septembre 2021 afin d’accroître le rôle de l’Union dans la région et d’établir des partenariats face aux grands enjeux mondiaux. L’Union adapte ses instruments actuels afin de renforcer son autonomie stratégique. Sa boussole stratégique pour la sécurité et la défense, officiellement approuvée par le Conseil en mars 2022, promeut une architecture de sécurité régionale ouverte et fondée sur des règles. Elle prévoit la sécurisation des routes maritimes, le renforcement des capacités et une plus grande présence navale dans la région indo-pacifique.
L’Union européenne resserre ses liens avec les pays d’Asie du Sud-Est et promeut l’intégration régionale au sein de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), troisième partenaire commercial de l’Union en dehors de l’Europe, après la Chine et les États-Unis. Cette région est source de préoccupations d’ordre géostratégique, telles que le différend en mer de Chine méridionale ou la question de Taïwan, et de préoccupations liées à l’environnement, notamment dans la sous-région du Mékong. L’Union est un acteur économique de poids en Asie du Sud-Est et un important bailleur de fonds d’aide au développement, œuvrant au renforcement des institutions, de la démocratie, de la bonne gouvernance et des Droits de l’homme.
La présente fiche thématique décrit la région d’Asie du Sud-Est. Voir également les fiches thématiques consacrées à l’Asie du Sud (5.6.7) et à l’Asie orientale (5.6.8).
Base juridique
- Titre V (action extérieure de l’Union) du traité sur l’Union européenne;
- Articles 206 et 207 (commerce) et articles 216 à 219 (accords internationaux) du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne;
- Accords de partenariat et de coopération (relations bilatérales).
A. Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN)
Le premier sommet de l’ASEAN, qui s’est tenu en février 1976 à Bali, a réuni l’Indonésie, la Malaisie, les Philippines, Singapour et la Thaïlande. Depuis, le Brunei, le Viêt Nam, le Laos, le Cambodge et le Myanmar/la Birmanie ont adhéré à l’ASEAN. Cette association applique une politique stricte de non-ingérence dans les affaires intérieures de ses membres.
Dans un contexte géopolitique difficile, l’Union et l’ASEAN sont des partenaires qui partagent les mêmes valeurs et sont convaincus de la nécessité d’un multilatéralisme fondé sur des règles. Les deux organisations ont noué des relations solides, principalement dans les domaines du commerce et de l’économie, et sont aujourd’hui des partenaires stratégiques. L’ASEAN effectue 10,2 % de ses échanges avec l’Union européenne, qui est ainsi son troisième partenaire commercial. L’ASEAN est, après les États-Unis et la Chine, le troisième partenaire non européen de l’Union. L’objectif à long terme reste l’établissement d’un accord de libre-échange interrégional entre l’Union et l’ASEAN.
En février 2024, la 24 a permis de stimuler le commerce, en se concentrant sur l’environnement, la transition numérique et la mise en place de chaînes d’approvisionnement sûres, mais aussi de réexaminer l’évolution de la situation sécuritaire dans la région et dans le monde et de faire le point sur la stratégie «Global Gateway», compte tenu de la stratégie de l’Union visant à relier l’Europe à l’Asie et du schéma directeur pour la connectivité de l’ASEAN 2025.
La 30 s’est tenue en février 2023 à Jakarta. Le comité a examiné des questions bilatérales, multilatérales et mondiales et a passé en revue la mise en œuvre du plan d’action UE-ASEAN 2018-2022, dont 89 % des lignes d’action ont été menées à bien, et ont salué le plan d’action visant à mettre en place le partenariat stratégique ASEAN-UE (2023-2027).
Le dialogue UE-ASEAN sur l’énergie a été lancé en décembre 2022 à l’occasion du sommet commémoratif UE-ASEAN. Ce dialogue s’est tenu pour la première fois en juin 2023, à Jakarta. Les principaux thèmes abordés étaient les marchés régionaux de l’énergie, le développement du potentiel des énergies renouvelables et la sécurité énergétique.
Dans le cadre du partenariat stratégique ASEAN-UE, l’Union européenne entend continuer à promouvoir la dimension parlementaire des relations, notamment en soutenant des échanges plus structurels et en agissant en faveur d’une assemblée parlementaire paritaire entre le Parlement européen et l’Assemblée interparlementaire de l’ASEAN (AIPA), afin d’assurer la responsabilité démocratique et de mettre en place une enceinte d’échanges multilatéraux au sein de laquelle les questions d’importance mondiale pourraient être abordées. Le troisième dialogue parlementaire interrégional entre le Parlement européen et l’AIPA, en novembre 2023, a représenté une nouvelle étape dans le développement du dialogue autour de sujets d’intérêt commun pour la coopération économique, commerciale et en matière d’investissements, ainsi qu’autour des questions de sécurité régionale et mondiale.
Le partenariat économique global régional (RCEP), signé en novembre 2020, est entré en vigueur en janvier 2022. Il s’agit du plus grand accord de libre-échange au monde, regroupant les dix États membres de l’ASEAN et cinq partenaires du bloc Asie-Pacifique. Ce partenariat couvre plus de la moitié des exportations de la planète et près d’un tiers du PIB mondial. Il concerne la plupart des secteurs économiques, environ 90 % des biens devant être échangés en franchise de droits. La majorité de ces biens bénéficient déjà d’un tel avantage, en raison des différents accords entre les pays parties au RCEP. Il pourrait falloir jusqu’à vingt ans pour mettre en place les réductions de droits de douane restantes. Les secteurs sensibles, comme l’agriculture, sont quant à eux généralement exclus des réductions de droits de douane. Les parties au RCEP devraient bénéficier de règles d’origine communes, de la suppression des contingents à l’exportation, de procédures douanières simplifiées et d’un accès transfrontalier facilité aux zones franches. Les matières premières, les machines, les véhicules à moteur et les produits de consommation sont parmi les principaux secteurs en croissance.
B. Dialogue Asie-Europe (ASEM) et partenariat parlementaire Asie-Europe (ASEP)
L’ASEM vise à renforcer la coopération économique, à favoriser le dialogue politique et à promouvoir le rapprochement entre les peuples de l’Union et d’Asie. L’ASEM, qui rassemble 53 partenaires européens et asiatiques, est la principale plateforme multilatérale entre l’Europe et l’Asie. Les pays qui en font partie cumulent environ 65 % du PIB, 60 % de la population, 75 % du tourisme et 68 % des échanges commerciaux de la planète, ce qui donne à l’ASEM un grand poids sur la scène mondiale. Ces pays soulignent la nécessité d’adopter des mesures rapides et efficaces pour la coopération en matière de sécurité, les échanges commerciaux et les Droits de l’homme ainsi que contre le changement climatique.
En novembre 2021, le Cambodge a accueilli le 13e sommet de l’ASEM et la 11e réunion de l’ASEP. Le 13e sommet de l’ASEM avait pour objectif de renforcer le multilatéralisme afin de redistribuer la croissance, en mettant l’accent sur les grands enjeux mondiaux tels que le changement climatique, le développement durable et le terrorisme, et d’améliorer le système commercial multilatéral.
C. Indonésie
Membre du G20, l’Indonésie est la troisième démocratie la plus peuplée de la planète et le plus grand pays à majorité musulmane du monde. C’est un partenaire de plus en plus important pour l’Union européenne. La coopération entre l’Union européenne et l’Indonésie est fondée sur un accord de partenariat et de coopération datant de 2014. La dernière réunion du comité mixte UE-Indonésie a eu lieu en septembre 2023. Il a été question des efforts communs visant à améliorer la coopération bilatérale, que ce soit au sein des groupes de travail et des enceintes de dialogue existants entre l’Union et l’Indonésie, ou dans le cadre d’activités communes en faveur de la paix, de la stabilité et de la prospérité dans la région et au-delà. Le sixième dialogue sur la politique de sécurité s’est tenu en mai 2023, tandis que le septième dialogue politique s’est tenu en septembre 2023. L’Indonésie a manifesté son souhait de faciliter la mobilité et l’entrée sur le territoire de l’Union, grâce à une libéralisation du régime des visas Schengen pour les séjours touristiques et d’affaires depuis l’Indonésie.
L’Indonésie et l’Union ont réaffirmé leur attachement à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine et ont déploré l’agression menée par la Russie. Elles ont convenu de poursuivre leur partenariat profitable aux deux parties dans les domaines de la sécurité, y compris maritime, des opérations de maintien de la paix, de la cybersécurité et de la lutte contre le terrorisme. L’Indonésie a encouragé la poursuite des échanges de connaissances et des consultations sur la coopération en matière de sécurité et de défense, grâce aux programmes suivants de l’Union: «Renforcer la coopération en matière de sécurité en Asie et avec l’Asie» et «Routes maritimes critiques dans l’océan Indien».
L’Union et l’Indonésie souhaitent accélérer les travaux sur un futur accord de partenariat économique global UE-Indonésie et espèrent conclure les négociations en 2024. L’Union est le cinquième partenaire commercial de l’Indonésie, avec un volume d’échanges de biens de 32,6 milliards d’euros en 2022 et un excédent de 14,5 milliards d’euros en faveur de l’Indonésie.
En juin 2021, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a publié un document concernant le différend entre l’Union et l’Indonésie relatif aux biocarburants à base d’huile de palme. En décembre 2019, l’Indonésie a engagé une action devant l’OMC contre l’Union européenne en raison de certaines mesures relatives à l’huile de palme et aux biocarburants à base d’huile de palme. L’Indonésie soutient que les restrictions imposées par l’Union sur ces biocarburants sont injustes et discriminatoires, et souhaite des consultations sur ce différend dans le cadre de l’OMC. Néanmoins, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a causé une pénurie mondiale d’huile alimentaire, qui pourrait aider l’Indonésie à regagner des parts sur le marché de l’huile de palme dans l’Union. Quelle que soit la décision de l’OMC, l’Union souhaite soigner sa réputation et conclure de nouveaux accords, notamment en raison de la crise énergétique provoquée par la guerre que la Russie mène en Ukraine. Les prochaines années pourraient en effet voir une forte hausse des importations d’huile de palme dans l’Union. En février 2024, l’Indonésie a demandé des consultations dans le cadre de l’OMC sur son différend avec l’Union, qui a imposé des droits antidumping définitifs sur les importations d’acides gras en provenance d’Indonésie.
En mars 2024, l’Indonésie a élu son président, son Vice-président, ses conseils régionaux et ses parlements locaux. Prabowo Subianto et Gibran Rakabuming Raka ont été élus président et Vice-président avec 58 % des voix.
L’Indonésie a assuré la présidence du G20 en 2022. Les divisions entre les pays du G20 sur le droit de la Russie à un siège au sein de cette instance ont fortement attiré l’attention. La Russie et l’Ukraine ont été invitées au sommet de Bali en novembre 2022. Toutefois, Vladimir Poutine n’y a pas assisté, tandis que Volodymyr Zelensky a participé à distance. L’Indonésie a essayé de limiter les critiques des dirigeants du G7 à l’égard de la Russie, en soutenant que le G20 est avant tout un forum économique et qu’il convient d’éviter tout autre sujet polémique.
En 2023, l’Indonésie a présidé l’ASEAN et son AIPA. Le 42 s’est tenu à Labuan Bajo (Indonésie) en mai 2023. Il y a été question de la vision pour l’après-2025, de l’adhésion du Timor-Oriental, de la crise au Myanmar/en Birmanie, de la lutte contre la traite des êtres humains, les travailleurs migrants, les pêcheurs, le secteur de la santé, les véhicules électriques, le renforcement des capacités de l’ASEAN et les paiements transfrontaliers. Le Timor-Oriental a participé à ce sommet pour la première fois, comme observateur. L’Indonésie a également accueilli l’Assemblée générale de l’AIPA à Jakarta en août 2023. Le thème était «Un Parlement responsable pour une ASEAN stable et prospère». La délégation du Parlement européen pour les relations avec les pays de l’Asie du Sud-Est et l’ASEAN y a pris part en qualité d’observateur.
En octobre 2019, le Parlement a adopté une résolution sur le nouveau code pénal proposé en Indonésie. Il y fait part de ses inquiétudes face aux dispositions sur le blasphème et l’adultère, ainsi que face au risque que ce nouveau code pénal soit utilisé contre les minorités et autorise la discrimination fondée sur le sexe, la religion et l’orientation sexuelle. À la suite de manifestations de milliers de personnes dans le pays, le président Widodo a décidé de retarder l’adoption du code pénal, décision que le Parlement européen a saluée.
D. Myanmar/Birmanie
L’Union européenne a joué un rôle actif dans le processus de transition démocratique au Myanmar/en Birmanie et a pris la tête de la communauté internationale pour reprendre le dialogue en 2015, lorsque ce pays a commencé à rétablir la démocratie et à s’ouvrir au monde. Il n’existe pas d’accord-cadre formel, en raison de décennies d’isolement et de sanctions internationales.
La constitution du Myanmar/de la Birmanie, rédigée par un gouvernement militaire et adoptée par référendum en 2008, réduit le champ d’action du gouvernement civil et accorde un pouvoir exceptionnel à l’armée, qui se voit accorder 25 % des sièges du Parlement ainsi que le contrôle des principaux ministères responsables de la sécurité et de l’administration territoriale. Le Myanmar/la Birmanie est toujours le théâtre d’une guerre civile qui dure depuis 1948. Un cessez-le-feu a été conclu en octobre 2015, mais un certain nombre de groupes ethniques insurgés ont refusé de le signer. Les réformes démocratiques ont avancé après les élections de 2015, à la suite desquelles Aung San Suu Kyi a occupé les fonctions de conseillère d’État, de ministre des affaires étrangères et de ministre du cabinet de la présidence. Lors des dernières élections législatives, en novembre 2020, la Ligue nationale pour la démocratie (LND) d’Aung San Suu Kyi, parti au pouvoir, a remporté suffisamment de sièges au Parlement pour former un gouvernement.
Toutefois, en février 2021, l’armée a pris le pouvoir lors d’un coup d’État et a placé en détention Aung San Suu Kyi, le président U Win Myint et d’autres personnalités importantes de la LND, arguant d’une prétendue fraude électorale. Le général Min Aung Hlaing, commandant en chef de l’armée, a été nommé à la tête de la junte militaire. Des poursuites ont été engagées contre Aung San Suu Kyi et d’autres hauts dirigeants de la LND. Ces événements ont déclenché des manifestations en faveur de la démocratie et des affrontements avec l’armée, qui ont fait des morts et des blessés graves. En avril 2024, Aung San Suu Kyi a quitté sa prison pour être assignée à résidence.
L’Union européenne, de même que d’autres acteurs internationaux, a fait de nombreuses déclarations sur le Myanmar/la Birmanie et imposé des sanctions à la junte et aux organismes détenus par l’armée. En février 2021, le Conseil a adopté des conclusions condamnant le coup d’État militaire et appelant à la cessation de l’état d’urgence, au rétablissement du gouvernement légitime et à la libération immédiate de toutes les personnes qui ont été arrêtées et placées en détention au moment du coup d’État. En avril 2021, le Vice-président de la Commission et Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR) a publié une déclaration relative au consensus en cinq points obtenu lors de la réunion des dirigeants de l’ASEAN en Indonésie, qui soutient l’envoyé spécial de l’ASEAN. Cependant, le Myanmar/la Birmanie a publié un communiqué de presse rejetant la demande de rencontre avec Aung San Suu Kyi de l’envoyé spécial de l’ASEAN. En mars, avril et juin 2021, le Conseil a imposé des sanctions aux individus responsables du coup d’État militaire et a élargi les sanctions aux entreprises et organismes contrôlés par l’armée. En juillet 2023, l’Union européenne a adopté son septième train de sanctions à l’encontre des personnes et des entreprises associées à la junte militaire.
Faisant partie des pays les moins avancés, le Myanmar/la Birmanie bénéficie de l’initiative commerciale «Tout sauf les armes» dans le cadre du système de préférences généralisées. Malgré le coup d’État militaire, la Commission s’est jusqu’à présent montrée réticente à l’introduction de restrictions commerciales, que la population subirait plus durement que l’armée. En 2024, la Commission a alloué plus de 19 millions d’euros d’aide humanitaire pour faire face aux besoins les plus pressants de la population, sachant que le conflit se poursuit dans la majeure partie du pays. Le programme indicatif pluriannuel 2021-2027 de l’Union s’appuie sur des priorités spécifiques pour le Myanmar/la Birmanie: la gouvernance, l’état de droit, la croissance durable, l’aide aux personnes déplacées, le pacte vert pour l’Europe et la stratégie numérique.
Le Myanmar/la Birmanie est par ailleurs en proie à une escalade des tensions intercommunautaires. En août 2020, la quatrième réunion de la conférence de paix de l’Union, dite «conférence de Panglong du XXIe siècle», a repris. Cette conférence visait à résoudre les affrontements entre les groupes militaires et les groupes ethniques insurgés. L’armée a perdu le contrôle de vastes territoires et les groupes rebelles armés dominent de nombreuses villes situées aux frontières. En outre, des désertions massives ont fortement réduit la force numérique de l’armée. Une loi sur la conscription obligatoire est entrée en vigueur, de sorte que tous les hommes entre 18 et 35 ans et toutes les femmes entre 18 et 27 ans risquent de devoir rejoindre l’armée pendant une durée pouvant aller jusqu’à deux ans; mais de nombreux jeunes fuient vers les pays voisins.
La situation humanitaire et l’insécurité alimentaire se sont aggravées et l’économie s’est fortement contractée. L’ONU estime qu’un tiers de la population pourrait avoir besoin d’aide humanitaire. Le Myanmar/la Birmanie compte actuellement environ 2,6 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays. Les secteurs de la santé et de l’éducation se sont effondrés en parallèle de l’augmentation du pourcentage du PIB consacré aux dépenses militaires, qui a atteint 4,9 % en 2023.
Le rapport 2024 de Freedom House sur la liberté dans le monde qualifie le Myanmar/la Birmanie de pays «non libre», avec un score global de 8 sur 100.Les violations des Droits de l’homme constituent une préoccupation majeure, notamment les persécutions dont sont victimes les Rohingyas dans l’État de Rakhine. Depuis août 2017, plus de 800 000 Rohingyas ont fui le Myanmar/la Birmanie et ses persécutions pour trouver refuge au Bangladesh. En août 2019, des milliers de réfugiés se sont opposés aux tentatives du Bangladesh, du Myanmar/de la Birmanie et des Nations unies de les rapatrier pour des raisons de sécurité. Le Parlement européen a condamné les violations des Droits de l’homme commises contre les Rohingyas dans sa résolution de septembre 2019. En février 2021, le Parlement a adopté une résolution condamnant fermement le coup d’État militaire et les violations des Droits de l’homme, et demandant à la junte de rétablir le gouvernement civil et de libérer immédiatement toutes les personnes détenues.
En octobre 2021, le Parlement a adopté une résolution condamnant les violations des Droits de l’homme, les discriminations actuelles envers les minorités ethniques, l’usage de la violence par la junte contre ses citoyens et l’attaque menée par l’armée contre les professionnels de santé et les infrastructures médicales. Le Parlement a également exhorté le Myanmar/la Birmanie à coopérer avec l’envoyé spécial de l’ASEAN et a demandé au Conseil de maintenir les sanctions ciblées contre les personnes responsables du coup d’État militaire de février 2021. En mars 2022, le Parlement a adopté une résolution sur le Myanmar/la Birmanie, un an après le coup d’État, dans laquelle il réaffirme sa position sur ce pays. En mai 2023, il a adopté une résolution sur le Myanmar/la Birmanie, notamment la dissolution de partis politiques démocratiques, dans laquelle il demande la reconstitution immédiate de ces partis et la libération de tous les prisonniers politiques.
E. Philippines
L’Union européenne et les Philippines ont signé un accord de partenariat et de coopération (APC) en 2011, qui est entré en vigueur en mars 2018. Le premier comité mixte s’est réuni à Bruxelles le 28 janvier 2020 et a créé des sous-comités spécialisés en vue de renforcer les relations bilatérales. Par ailleurs, en août 2021, les Philippines se sont vu attribuer le rôle de coordinateur de l’ASEAN pour les relations avec l’Union européenne jusqu’en 2024.
La deuxième réunion du comité mixte s’est tenue en avril 2022 et a dressé le bilan de la coopération bilatérale en cours dans le cadre de l’APC. Sur les sujets relatifs à la sécurité régionale, par exemple le différend en mer de Chine méridionale, les deux parties se sont accordées sur la nécessité de solutions pacifiques et inclusives aux conflits, dans le respect des principes du droit international et de la charte des Nations unies. Les deux délégations ont discuté de l’adoption des résolutions portant sur ces questions lors de la session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale des Nations unies sur l’Ukraine ainsi qu’au sein du Conseil des Droits de l’homme, qui a condamné l’agression russe contre l’Ukraine. La troisième réunion du comité mixte s’est tenue en juin 2023 à Bruxelles et a dressé le bilan de la coopération bilatérale, régionale et multilatérale en cours. L’Union est un important bailleur de fonds pour les Philippines, avec un apport de 325 millions d’euros pour la période 2014-2020. Elle concentre ses efforts sur l’état de droit et la croissance inclusive. Le programme indicatif pluriannuel 2021-2027 de l’Union pour les Philippines poursuit la politique de coopération globale menée par l’Union.
Les échanges bilatéraux de biens entre l’Union et les Philippines se sont élevés à 18,4 milliards d’euros en 2022, faisant de l’Union le quatrième partenaire commercial des Philippines, puisqu’elle représentait 7,9 % de l’ensemble des échanges de ce pays. Les négociations en vue d’un accord de libre-échange entre l’Union et les Philippines ont démarré en décembre 2015 et un premier cycle s’est tenu en mai 2016. En mars 2024, les deux parties ont convenu de reprendre les négociations sur un accord de libre-échange, en se concentrant sur les aspects commerciaux des marchés publics, de la propriété intellectuelle, de la concurrence et du développement durable.
En mai 2016, Rodrigo Duterte a remporté l’élection présidentielle. Il a adopté des mesures controversées contre le trafic de drogue, assorties de l’ordre de «tirer pour tuer», qui ont conduit à de graves violations des Droits de l’homme. Duterte a réorienté la politique étrangère des Philippines en nouant une nouvelle alliance avec la Chine et la Russie, malgré des désaccords concernant la mer de Chine méridionale, les Philippines étant au nombre des États de l’ASEAN opposés à la Chine dans ce litige.
Les élections présidentielles de mai 2022 ont vu la victoire de Ferdinand «Bongbong» Marcos au poste de président et de Sara Duterte, fille du président sortant, au poste de Vice-présidente. Contrairement à Rodrigo Duterte, Ferdinand Marcos Jr a l’intention de mener une politique diplomatique plus équilibrée entre Pékin et Washington.
En février 2022, le Parlement a adopté une résolution qui condamne fermement les milliers d’exécutions extrajudiciaires et autres violations graves des Droits de l’homme liées à la «guerre contre la drogue» menée par le président Rodrigo Duterte. Le même mois, les parlementaires de l’ASEAN en faveur des Droits de l’homme ont réclamé la libération immédiate et inconditionnelle de la sénatrice philippine Leila De Lima, une des plus farouches opposantes de Rodrigo Duterte.
F. Viêt Nam
Les relations entre l’Union européenne et le Viêt Nam reposent sur un accord de partenariat et de coopération adopté en 2016. Les sommes allouées pour la période 2014-2020 s’élèvent à 400 millions d’euros, principalement en faveur de la bonne gouvernance, de l’énergie et de la lutte contre le changement climatique, en particulier dans le delta du Mékong. Le programme indicatif pluriannuel 2021-2027 de l’Union pour le Viêt Nam aborde des questions cruciales et des domaines clés pour le pays.
L’Union et le Viêt Nam ont signé un accord de libre-échange (ALE) et un accord de protection des investissements en juin 2019. Le Parlement a donné son approbation à ces deux accords en février 2020 et l’ALE est entré en vigueur en août 2020. Celui-ci prévoit la suppression immédiate de 65 % des droits de douane sur les exportations de l’Union vers le Viêt Nam et de 71 % de ces droits sur les importations en provenance du Viêt Nam. La commission du commerce international (INTA) du Parlement européen suit la mise en œuvre de l’ALE.
Le Viêt Nam est l’un des exemples les plus aboutis de transition d’un système économique communiste défaillant à une économie de marché ouverte. Il s’agit de l’un des pays de l’ASEAN qui affichent la croissance la plus rapide. En 2022, les flux commerciaux entre le Viêt Nam et l’Union représentaient un montant total de 64,2 milliards d’euros, faisant du Viêt Nam le premier partenaire commercial de l’Union au sein de l’ASEAN pour les échanges de biens, et le 16e à l’échelle mondiale. L’Union est l’un des principaux investisseurs étrangers au Viêt Nam, surtout dans le domaine de la transformation et de la fabrication industrielles.
En octobre 2019, l’Union et le Viêt Nam ont signé un accord-cadre de participation en vue d’établir un cadre juridique pour la participation du Viêt Nam à des opérations de gestion de crise menées par l’Union européenne.
La situation globale en matière de Droits de l’homme au Viêt Nam est en pleine détérioration, puisque la répression envers les dissidents s’intensifie et que les arrestations pour motifs d’activités «antiétatiques» se font de plus en plus nombreuses. Le pays demeure un État communiste, dominé par un parti unique et ne laissant aucune liberté politique. En mai 2021, le pays a organisé des élections législatives pour élire la 15e Assemblée nationale et les conseils populaires locaux. Le parti communiste vietnamien a remporté les élections, gardant la mainmise sur les médias et le processus électoral, aucune agence indépendante ne supervisant les scrutins. Ce processus électoral, intégralement contrôlé par l’État, a éliminé 64 des 75 candidats qui se sont présentés d’eux-mêmes et a conduit à l’arrestation de deux candidats indépendants. En 2023, le Viêt Nam se classait 178e sur 180 pays dans le classement mondial de la liberté de la presse.
En janvier 2021, le Parlement a adopté une résolution concernant le Viêt Nam, dans laquelle il exigeait la libération immédiate et inconditionnelle de tous les journalistes et défenseurs des Droits de l’homme, et condamnait le recours abusif aux dispositions légales répressives limitant les droits et libertés fondamentaux. Il y invitait également le gouvernement à permettre l’activité des médias indépendants et plaidait en faveur de la mise en place d’un mécanisme indépendant de surveillance des Droits de l’homme.
En poste depuis plus de dix ans, le dirigeant du parti communiste vietnamien, Nguyễn Phú Trọng, a instauré une politique stricte de lutte contre la corruption. En juin 2022, le ministre de la santé du pays, Nguyễn Thanh Long, et le maire de Hanoi, Chu Ngọc Anh, ont été démis de leurs fonctions et arrêtés sur la base d’allégations de fraude portant sur un montant de 169 millions d’euros concernant des kits de dépistage de la COVID-19. D’autres hauts fonctionnaires ont également été arrêtés. Le Viêt Nam est à la 83e position sur 180 pays dans l’indice de perception de la corruption 2023. Ses efforts de lutte contre la corruption sont ternis par la répression persistante des voix d’opposition.
G. Thaïlande
L’Union européenne et la Thaïlande ont mené à bien les négociations en vue d’un accord de partenariat et de coopération (APC) en mars 2013, mais le processus de signature a été suspendu à la suite du coup d’État militaire de 2014. En septembre 2022, les deux parties ont finalisé le texte de l’APC, clôturant ainsi le processus de négociation. L’APC UE-Thaïlande a été signé en décembre 2022 à Bruxelles. Il renforce le dialogue et la coopération politiques dans un grand nombre de domaines stratégiques, notamment l’environnement, l’énergie, le changement climatique, les transports, les sciences et la technologie, le commerce, l’emploi, les affaires sociales, les Droits de l’homme, l’éducation, l’agriculture, la non-prolifération, les migrations, la culture ainsi que la lutte contre le terrorisme, la corruption et la criminalité organisée.
L’Union est le quatrième partenaire commercial de la Thaïlande, qui est quant à elle le 26e partenaire de l’Union. En 2022, les échanges bilatéraux de biens se sont élevés à 42,1 milliards d’euros. La Thaïlande est l’une des premières destinations d’investissements européens au sein de l’ASEAN, avec 19,8 milliards d’euros de stocks sortants. Les négociations pour un accord de libre-échange ont repris en août 2021 après leur interruption brutale en 2014, à la suite du coup d’État militaire. En mars 2023, les deux parties ont convenu de redémarrer les négociations en vue d’un accord ambitieux, moderne et équilibré, qui place le développement durable au centre de ses préoccupations. Le premier cycle de négociations a eu lieu en septembre 2023 à Bruxelles et le second en janvier 2024 à Bangkok.
Depuis 2014, l’armée réprime l’opposition en imposant la loi martiale et des violations des Droits de l’homme ont été constatées. Les élections législatives de mars 2019 ont été remportées par le parti proche de l’armée, mais des voix se sont élevées pour dénoncer des manipulations. Prayuth Chan-ocha, déjà Premier ministre de 2014 à 2019 lorsque le Conseil national pour le maintien de la paix et de l’ordre dirigeait le pays, a été nommé Premier ministre en juin 2019. Bien que la junte ait officiellement quitté le pouvoir en juillet 2019, les militaires disposent toujours d’une certaine influence sur le gouvernement. La Cour constitutionnelle thaïlandaise avait précédemment décidé de suspendre le Premier ministre Prayuth Chan-ocha, jugeant qu’il avait dépassé la durée limite de son mandat. En septembre 2022, elle a toutefois finalement décidé qu’il n’avait pas atteint la limite des huit ans de mandat.
Le roi Maha Vajiralongkorn a été couronné en mai 2019. En Thaïlande, les manifestations contre le gouvernement militaire ont également réclamé une réforme de la monarchie. En février 2020, la première vague de manifestations a été déclenchée par la décision de la Cour constitutionnelle de dissoudre le Parti du nouvel avenir, formation d’opposition populaire parmi les jeunes, qui a obtenu le troisième plus grand nombre de sièges à la Chambre des représentants à l’issue des élections de mars 2019. Le gouvernement thaïlandais a déclaré l’état d’urgence en octobre 2020, se réservant le droit d’imposer un couvre-feu et la loi martiale. En septembre 2021, il a prolongé l’état d’urgence et les poursuites contre des manifestants pour crime de lèse-majesté se sont multipliées, mettant un frein aux contestations. Cependant, le mouvement étudiant se mobilise toujours régulièrement.
La Thaïlande a organisé des élections législatives en mai 2023. Le parti réformiste «Aller de l’avant» a remporté le plus grand nombre de sièges, mais il a été écarté de la formation du gouvernement à l’issue de négociations. De nombreux députés conservateurs ont empêché Pita Limjaroenrat, dirigeant du parti «Aller de l’avant», de devenir Premier ministre lors du premier vote parlementaire de juillet 2023. Srettha Thavisin, du parti Pheu Thai, est devenu Premier ministre à la tête d’un gouvernement de coalition comprenant des partis soutenus par l’armée, qui étaient les adversaires du Pheu Thai.
En janvier 2020, à Kuala Lumpur, la Thaïlande a officiellement entamé un processus de paix avec les groupes d’insurgés dans les provinces du sud du pays, à majorité musulmane. La Malaisie est intervenue dans les négociations en qualité de médiateur. En dépit du cessez-le-feu déclaré en avril 2020, des bombardements ont tout de même eu lieu en 2021 et 2022.
En septembre 2021, le Parlement thaïlandais a donné son approbation initiale pour une loi visant à empêcher et à abolir la torture et les disparitions forcées,après avoir retardé pendant 14 ans l’introduction de cette loi qui aurait dû suivre la signature en 2007 de la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le Parlement européen a adopté bon nombre de résolutions sur les Droits de l’homme, les travailleurs migrants et le droit du travail en Thaïlande.
En juin 2023, il a adopté une résolution sur l’APC UE-Thaïlande, qui accompagnait son approbation de cet APC, signé durant le sommet UE-ASEAN de décembre 2022 à Bruxelles. Le Parlement s’y félicite de la conclusion de l’APC, accord global et moderne qui permet de mieux relever les défis actuels. Il y demande également que l’ensemble des citoyens de l’Union puissent se rendre en Thaïlande sans visa et soutient la mise en place d’un régime d’exemption de visa pour les citoyens thaïlandais se rendant dans l’Union.
H. Cambodge
Les relations de l’Union avec le Cambodge remontent à l’accord de coopération de 1997. L’Union est le premier bailleur de fonds du Cambodge, avec une enveloppe de 410 millions d’euros pour la période 2014-2020, destinée à renforcer la gouvernance et l’état de droit, ainsi qu’à aider le tribunal chargé de juger les Khmers rouges. Le programme indicatif pluriannuel 2021-2027 de l’Union en faveur du Cambodge prévoit une aide d’environ 500 millions d’euros pour aider le pays à stimuler son développement économique.
En 2022, les échanges commerciaux de biens entre l’Union et le Cambodge se sont élevés à 6,3 milliards d’euros. L’Union est le cinquième partenaire commercial du Cambodge et représente 9 % de l’ensemble des échanges du pays.
Des années de guerre civile ont fait du Cambodge l’un des États les plus pauvres d’Asie du Sud-Est. En 1993, à la suite des accords de paix de Paris (1991), le Cambodge a adopté une constitution qui a ouvert la voie à un État démocratique et multipartite libéral. Hun Sen et son Parti du peuple cambodgien (PPC), qui étaient déjà au pouvoir, ont remporté les élections législatives de juillet 2018, bien que l’opposition ait dénoncé le processus électoral comme n’ayant été ni libre ni équitable. Kem Sokha, ancien dirigeant du Parti du sauvetage national du Cambodge (PSNC), formation d’opposition, a été arrêté en septembre 2017 et Sam Rainsy, autre ancien dirigeant du PSNC, s’est exilé en 2015. Le PSNC a été dissous en novembre 2017. En mars 2021, un tribunal municipal de Phnom Penh a condamné Sam Rainsy à 25 ans de prison par contumace pour un prétendu complot visant à renverser le gouvernement du Premier ministre Hun Sen. Il a également privé Sam Rainsy du droit de vote et d’éligibilité.
En février 2020, la Commission a décidé de retirer une partie des préférences tarifaires accordées au Cambodge dans le cadre du régime commercial «Tout sauf les armes», en raison des violations graves et systématiques des principes des Droits de l’homme consacrés par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. L’économie cambodgienne dépend de l’aide internationale et des exportations textiles et est particulièrement exposée aux fluctuations des coûts de la main-d’œuvre. Le retrait des préférences tarifaires et leur remplacement par les droits de douane normaux de l’Union touchent principalement les secteurs de l’habillement et de la fabrication de chaussures, qui représentent environ un milliard d’euros, soit un cinquième des exportations annuelles du Cambodge vers l’Union.
Des élections législatives se sont tenues au Cambodge en juillet 2023. Le PPC, parti de l’autocrate Hun Sen au pouvoir depuis longtemps, a remporté 120 sièges sur 125 à l’Assemblée nationale. Le Parti de la bougie, qui incarne la seule réelle opposition, a été disqualifié pour des raisons de forme. Des menaces de sanction ont été proférées contre toute personne qui boycotterait le scrutin. Après la victoire du PPC, Hun Sen a annoncé qu’il allait démissionner et passer la main à son fils, Hun Manet, lequel est devenu Premier ministre en août 2023.
En février 2022, le gouvernement a reporté l’entrée en vigueur d’un «portail internet national», projet controversé qui reviendrait à faire passer l’intégralité du trafic internet du pays par un pare-feu, à l’image de ce qui existe en Chine. Le gouvernement a justifié le report par des retards liés à la pandémie et a nié tout lien avec de vives critiques de la part des défenseurs de la liberté d’expression.
En septembre 2017, le Parlement européen a adopté une résolution dans laquelle il exhorte le gouvernement cambodgien à mettre fin aux poursuites engagées à l’encontre de Kem Sokha pour des raisons politiques. En septembre 2018, il a de nouveau adopté une résolutiondemandant l’abandon de toutes les charges retenues contre Kem Sokha.
En mars 2021, le Parlement a adopté une résolution condamnant l’escalade des violations des Droits de l’homme au Cambodge ainsi que les actions répressives menées sous couvert de protection contre la COVID-19. Il y invite les forces de sécurité à s’abstenir de toute force inutile et excessive à l’encontre des manifestants pacifiques et à cesser toute forme de harcèlement, y compris le harcèlement judiciaire.
En mars 2022, un tribunal cambodgien a condamné 20 personnalités politiques et militants de l’opposition dans le cadre d’un procès décrit par Human Rights Watch comme une «chasse aux sorcières». Parmi les personnes condamnées figurent les dirigeants de l’opposition en exil, notamment Sam Rainsy, Eng Chai Eang et Mu Sochua. Le Parlement européen a demandé l’abandon inconditionnel des charges. En mai 2022, le Parlement a adopté une résolution sur la répression exercée sans relâche contre l’opposition politique au Cambodge.
En novembre 2023, le Parlement a adopté une résolution sur le Cambodge, concernant le cas de Kem Sokha, chef de l’opposition. Il y demande la libération immédiate et inconditionnelle de Kem Sokha et de tous les fonctionnaires et militants de l’opposition condamnés ou détenus pour des motifs politiques.
I. Singapour
L’Union européenne et Singapour coopèrent de façon très étroite dans les domaines du commerce, des sciences et de la technologie. En février 2019, l’Union et Singapour ont ratifié trois accords dits «de nouvelle génération»: l’accord de partenariat et de coopération UE-Singapour, l’accord de libre-échange UE-Singapour et l’accord de protection des investissements UE-Singapour. L’accord de libre-échange avec Singapour est entré en vigueur en novembre 2019. Ces accords visent à renforcer les liens politiques, économiques et commerciaux ainsi qu’à réduire considérablement les droits de douane. Les barrières techniques et non tarifaires au commerce des biens sont en cours d’élimination dans un grand nombre de secteurs.
En 2022, Singapour était le deuxième partenaire commercial de l’Union au sein de l’ASEAN et le deuxième partenaire commercial de l’Union pour les échanges de biens. En 2022, les échanges commerciaux de biens entre l’Union et Singapour se sont élevés à 52,4 milliards d’euros. Les exportations de l’Union vers Singapour se sont élevées à 31,7 milliards d’euros, tandis que les importations en provenance de Singapour ont atteint 20,7 milliards d’euros. À l’échelle mondiale, Singapour était le 22e partenaire commercial de l’Union en 2022. Le commerce de services entre Singapour et l’Union s’élevait à 57,5 milliards d’euros en 2022. Les stocks d’investissements directs étrangers à Singapour en provenance de l’Union ont atteint 263,3 milliards d’euros en 2022. Singapour est une destination majeure pour les investissements européens en Asie. C’est également le deuxième pays asiatique en volume d’investissements dans l’Union.
Au début du mois de décembre 2021, l’Union et Singapour ont discuté du renforcement du commerce numérique bilatéral, y compris la promotion d’un partenariat numérique global entre l’Union et Singapour et le renforcement de la coopération en matière d’intelligence artificielle et de gouvernance des données. Les négociations entre l’Union et Singapour en vue d’un accord sur le commerce électronique ont commencé en juillet 2023. Elles visent à renforcer la confiance des consommateurs, à assurer la prévisibilité et la sécurité juridiques pour les entreprises, mais aussi à supprimer et à éviter toute barrière injustifiée au commerce électronique.
Singapour a organisé des élections législatives en juillet 2020. Lee Hsien Loong, du Parti d’action populaire (PAP), a obtenu 83 sièges sur 93 au Parlement, tandis que la plus grande formation d’opposition, le Parti des travailleurs, a obtenu son meilleur résultat à ce jour en remportant 10 sièges. Le PAP, qui n’a jamais perdu d’élection, est à la tête de la cité-État depuis 1959. Le Premier ministre Lee Hsien Loong a toujours dit qu’il céderait le pouvoir avant ses 70 ans, c’est-à-dire avant 2022. En avril 2021, le vice-Premier ministre Heng Swee Keat, successeur désigné de Lee Hsien Loong, a annoncé qu’il renonçait à devenir Premier ministre. Lawrence Wong est devenu le nouveau dirigeant du PAP et, par conséquent, vice-Premier ministre. En mai 2024, il a succédé à Lee Hsien Loong au poste de Premier ministre.
En septembre 2023, Singapour a organisé sa première élection présidentielle avec plusieurs candidats depuis 12 ans. Tharman Shanmugaratnam a été élu et est devenu le neuvième chef d’État de Singapour.
En octobre 2021, le Parlement singapourien a voté la loi sur l’ingérence étrangère (contre-mesures), qui cherche à empêcher toute intrusion étrangère dans la politique intérieure du pays. Le Parlement européen, en plus de soutenir l’action de la société civile, réclame l’abolition de la peine de mort.
En janvier 2024, le premier dialogue UE-Singapour sur la stratégie «Global Gateway» a rassemblé divers acteurs pour réfléchir aux manières de faciliter les investissements verts et durables en Asie du Sud-Est.
J. Brunei
Le sultan de Brunei, Hassanal Bolkiah, règne sur l’État depuis 1967, mais le prince Billah Bolkiah assume la plus grande partie des responsabilités. Le pays n’a connu aucune libéralisation. En avril 2019, un nouveau code pénal a été promulgué pour adopter une approche fondée sur la charia. Il prévoit de nouvelles sanctions telles que la lapidation en cas de relations homosexuelles ou d’adultère, et l’amputation en cas de vol. Face au tollé international qui s’est ensuivi, le Brunei a prolongé son moratoire sur la peine de mort.
L’Union européenne s’emploie activement à renforcer ses relations avec le Brunei, mais il n’existe pas d’accord-cadre. Un accord de partenariat et de coopération UE-Brunei est en cours de négociation et couvrira une série de domaines politiques et économiques. Les échanges entre l’Union et le Brunei concernent principalement les machines, les véhicules à moteur et les produits chimiques.
Les relations entre l’Union et le Brunei passent principalement par l’ASEAN, dont le Brunei a assuré la présidence en 2021, sur le thème «Nous nous soucions, nous nous préparons et nous prospérons». En août 2021, Erywan Yusof, ministre adjoint des affaires étrangères du Brunei, a été nommé envoyé spécial de l’ASEAN au Myanmar/en Birmanie, avec pour mission d’être le médiateur entre l’ASEAN et la junte de ce pays.
Les tensions entre la Chine et les requérants d’Asie du Sud-Est dans les différends territoriaux en mer de Chine méridionale ont augmenté en 2022. Bien que le Brunei soit resté silencieux jusqu’à présent, il a fait sa toute première déclaration unilatérale sur la mer de Chine méridionale en juillet 2022, en tant que pays ayant des revendications concurrentes. Toutefois, il évite toute approche conflictuelle avec la Chine sur le différend en mer de Chine méridionale, par crainte de nuire aux liens économiques bilatéraux.
Le sultan du Brunei a annoncé un remaniement ministériel anticipé en juin 2022. Le sultan conserve le poste de Premier ministre et les portefeuilles de la défense, des affaires étrangères ainsi que des finances et de l’économie. Pour la première fois, une femme a été nommée ministre, au portefeuille de l’éducation.
La facilité pour le partenariat UE-Brunei a été lancée en février 2023. Elle a servi de cadre à un séminaire sur le changement climatique, dont le thème était «Renforcer les capacités régionales d’adaptation au changement climatique et d’atténuation de ses effets».
Le Parlement a adopté en avril 2019 une résolution dans laquelle il condamne fermement l’entrée en vigueur du code pénal fondé sur la charia. Il y réaffirme sa condamnation de la peine de mort et souligne que les dispositions du code pénal fondé sur la charia contreviennent aux obligations du Brunei en vertu du droit international relatif aux Droits de l’homme.
K. Laos
Les relations entre l’Union européenne et le Laos sont fondées sur un accord de coopération datant de 1997. Le pays devrait quitter la catégorie des pays les moins avancés d’ici à 2026. Son neuvième plan national de développement socio-économique 2021-2025 est conforme au programme de développement durable des Nations unies à l’horizon 2030. Il vise à promouvoir une croissance durable, verte et inclusive. L’Union est déterminée à aider le Laos à progresser sur la voie du développement durable et inclusif.
En octobre 2021, le pays a lancé sa première plateforme numérique nationale d’enseignement et d’apprentissage, grâce au soutien de l’Union, de l’Unicef et du Partenariat mondial pour l’éducation, afin de faciliter l’enseignement à distance pour les étudiants et les enseignants pendant la pandémie de COVID-19. Le programme indicatif pluriannuel 2021-2027 de l’Union en faveur du Laos prévoit une dotation indicative totale de 83 millions d’euros pour la première phase 2021-2024.
L’Union européenne est le quatrième partenaire commercial du Laos (après la Thaïlande, la Chine et le Viêt Nam) et représente 4,2 % de l’ensemble des échanges du pays. Les échanges commerciaux entre l’Union et le Laos se sont élevés à 533 millions d’euros en 2022. En dépit de réformes économiques, le pays reste pauvre et continue de dépendre de l’aide internationale. Faisant partie des pays les moins avancés, le Laos bénéficie du régime commercial «Tout sauf les armes» accordé par l’Union.
Le Laos est un État dominé par un parti unique. Le Parti révolutionnaire populaire lao (PRPL), au pouvoir depuis la fin de la guerre civile en 1975, dirige le pays d’une main de fer et n’autorise aucune opposition. Le Laos a organisé en février 2021 les élections législatives qui ont constitué sa neuvième Assemblée nationale. Sur les 164 sièges que compte celle-ci, 158 sont revenus au PRPL et six à des candidats indépendants. En mars 2021, lors de l’ouverture de l’Assemblée nationale, le Laos a élu son président en la personne de Thongloun Sisoulith, secrétaire général du PRPL, qui exerçait les fonctions de Premier ministre depuis avril 2016.
Le Laos approfondit ses relations avec la Chine et avec l’ASEAN afin d’attirer des investissements. Les réformes économiques ont débouché sur une croissance économique soutenue, de plus de 7 % depuis 2014. La pandémie de COVID-19 a bousculé cette stratégie en entravant fortement la croissance économique.
L’Union attache une importance particulière aux Droits de l’homme, notamment à la situation dramatique des personnes déplacées à la suite de la construction d’immenses barrages sur le Mékong. D’un prix équivalent à près d’un tiers du PIB annuel du Laos, une nouvelle ligne ferroviaire de 414 kilomètres reliant la Chine à la capitale du Laos, Vientiane, a été ouverte début décembre 2021 dans le cadre de l’initiative «une ceinture, une route» de Pékin.
Lors de diverses conférences de l’Organisation internationale du travail, à Genève, l’Union a invité le Laos à s’attaquer au problème de l’exploitation sexuelle des enfants. En juillet 2022, l’Union a fait part de ses préoccupations quant à l’absence de progrès dans la lutte contre les violations des Droits de l’homme commises de longue date au Laos. Elle a exhorté les autorités à respecter les obligations du pays en matière de Droits de l’homme au titre de la Fédération internationale des Droits de l’homme et de son organisation membre, le Mouvement lao pour les Droits de l’homme. Ces deux organisations ont publié un document d’information qui résume l’évolution des Droits de l’homme au Laos. La dernière session en date du dialogue UE-Laos sur les Droits de l’homme s’est tenue en juin 2023.
Le Parlement y a réitéré son appel au gouvernement du Laos pour qu’il mette fin au harcèlement, à l’arrestation et à la détention arbitraire de défenseurs des Droits de l’homme, de journalistes indépendants et de militants sociaux, et qu’il respecte les droits à la liberté d’expression et d’association, ainsi que ceux des minorités. Il a aussi rappelé au Laos que le pays est astreint au respect d’obligations internationales au titre des traités sur les Droits de l’homme qu’il a ratifiés.
L. Malaisie
À l’issue de négociations entamées en 2015, l’Union européenne et la Malaisie ont signé un accord de partenariat et de coopération en décembre 2022 lors du sommet UE-ASEAN à Bruxelles. Cet accord constitue un cadre global pour le renforcement de la coopération entre les deux parties, notamment dans le commerce, les investissements, la finance et l’énergie.
Les négociations sur un accord de libre-échange (ALE) UE-Malaisie ont été suspendues en avril 2012 à la demande de la Malaisie, après sept cycles de négociation. En mars 2017, les deux parties ont discuté de l’insertion de nouvelles dispositions sur lesquelles elles ont trouvé un accord de principe. Deux accords sont en cours de négociation: un ALE et un accord de partenariat volontaire en ce qui concerne l’application des réglementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux. L’économie émergente de la Malaisie ouvre des possibilités commerciales attrayantes pour l’Union. Les échanges commerciaux entre l’Union et la Malaisie sont en expansion et ont augmenté de plus de 50 % depuis 2010. L’Union est le quatrième partenaire commercial de la Malaisie, qui est le troisième partenaire commercial de l’Union au sein de l’ASEAN, après Singapour et le Viêt Nam. Les importations vers l’Union en provenance de Malaisie ont progressivement augmenté pour atteindre 35,5 milliards d’euros en 2022, tandis que les exportations depuis l’Union vers la Malaisie étaient de 14,7 milliards d’euros. L’excédent commercial global de la Malaisie avec l’Union n’a cessé d’augmenter au fil des ans pour atteindre 20,8 milliards d’euros en 2022. Les échanges bilatéraux entre l’Union et la Malaisie sont dominés par les produits industriels, qui représentent plus de 90 % des échanges. À la suite des politiques de libéralisation adoptées en Malaisie et des perspectives d’un ALE, les investissements de l’Union en Malaisie ont atteint 28,7 milliards d’euros en 2021.
En mars 2019, la Commission a annoncé que, au titre de la directive sur les sources d’énergie renouvelables, qui prévoit un objectif de 32 % de bioénergies durables, il serait progressivement mis fin à l’utilisation d’huile de palme dans les carburants destinés au transport. L’Indonésie et la Malaisie ont protesté et porté l’affaire devant l’OMC. En janvier 2021, la Malaisie, deuxième producteur mondial d’huile de palme, a suivi l’exemple de l’Indonésie en déposant une plainte auprès de l’OMC en ce qui concerne les règles de l’Union européenne sur les biocarburants. En octobre 2021, le Conseil a adopté des conclusions relatives à la liste révisée de l’Union des pays et territoires non coopératifs à des fins fiscales. Pour la première fois, la Malaisie a été ajoutée à la liste grise de l’annexe II. Bien que l’huile de palme soit considérée comme un problème majeur dans les négociations relatives à l’ALE entre l’Union et la Malaisie, elle représente en fait moins de 5 % des importations de l’Union en provenance de Malaisie. Néanmoins, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a causé une pénurie mondiale d’huile alimentaire, qui pourrait aider la Malaisie à regagner des parts sur le marché de l’huile de palme dans l’Union. La demande de l’Union en huile alimentaire provenant du reste du monde devrait augmenter en 2024, du fait des difficultés dans l’approvisionnement en huile de tournesol et de soja. En mars 2024, l’Union européenne a remporté une victoire devant l’OMC, dont une formation de jugement a rejeté le recours malaisien contre une décision de l’Union ne classant plus comme biocarburant renouvelable le biodiesel fabriqué à partir d’huile de palme.
En avril 2023, l’Union a reconduit pour cinq ans ses mesures antidumping visant les accessoires en acier inoxydable en provenance de Chine et de Taïwan et les a étendues à la Malaisie, étant donné que des entreprises malaisiennes importaient de Chine des pièces nécessaires à la fabrication d’accessoires en acier inoxydable.
En juin 2022, le gouvernement malaisien a annoncé qu’il abolirait la peine de mort systématique pour certains crimes. Cette décision va dans le bon sens et montre l’exemple à toute la région. L’Union a encouragé les autorités du pays à prendre des mesures concrètes pour transposer rapidement l’accord dans la loi. En novembre 2022, la Malaisie a organisé des élections législatives, remportées par une coalition menée par Anwar Ibrahim, dirigeant de l’opposition. La coalition comprenant le parti islamiste du pays est arrivée en deuxième position.
En janvier 2024, le sultan Ibrahim a prêté serment pour servir comme roi de Malaisie pendant cinq ans, conformément au système de monarchie tournante de la Malaisie. Le sultan Ibrahim est à la tête de l’État de Johor.
Dans ses résolutions, le Parlement européen a condamné la peine de mort, les violations des droits des personnes LGBTIQA+, la répression de l’expression du mécontentement public ainsi que le manque de possibilités d’expression pacifique, notamment de débat public.
En juin 2023, le Parlement a adopté une résolution sur l’accord de partenariat et de coopération UE-Malaisie, qui accompagnait son approbation de cet APC. Il y estime que ce dernier constitue un cadre juridique solide pour renforcer les relations politiques et économiques bilatérales et pour discuter de questions d’intérêt régional et mondial telles que la promotion de la démocratie, des Droits de l’homme et de la justice internationale, le renforcement du cadre international en faveur de la non-prolifération des armes de destruction massive, la lutte contre le terrorisme et contre la corruption.
Samuel Cantell / Jorge Soutullo