Le Parlement européen: procédure électorale

Les modalités d’élection du Parlement européen sont régies à la fois par la législation européenne, qui fixe des dispositions communes pour l’ensemble des États membres, et par le droit national, qui varie d’un pays à l’autre. Les dispositions communes prévoient le principe de la représentation proportionnelle, les règles en matière de seuils ainsi que certaines incompatibilités avec le mandat de député au Parlement européen. De nombreuses autres dispositions importantes, par exemple le système électoral précis et le nombre de circonscriptions, sont régies par le droit national.

Base juridique

Règles communes

A. Principes

Tout en décidant que le Parlement européen serait d’abord composé de députés désignés par les parlements nationaux, la première version des traités (1.1.1) avait prévu qu’il serait ultérieurement élu au suffrage universel direct. Le Conseil a mis en œuvre cette disposition avant les premières élections directes de 1979 au moyen de l’acte du 20 septembre 1976 portant élection des représentants à l’Assemblée au suffrage universel direct (l’«acte électoral de 1976»). Ce texte a profondément modifié la position institutionnelle du Parlement européen et représente le document fondateur d’une Union plus démocratique.

En 1992, le traité de Maastricht (1.1.3) prévoit que les élections doivent suivre une procédure uniforme devant être adoptée à l’unanimité par le Conseil sur la base d’une proposition du Parlement européen. Toutefois, étant donné que le Conseil n’est parvenu à un consensus sur aucune proposition, le traité d’Amsterdam a instauré la possibilité d’adopter des «principes communs». La décision 2002/772/CE, Euratom du Conseil du 25 juin 2002 et du 23 septembre 2002 a modifié en conséquence l’acte électoral de 1976, en introduisant le principe de représentation proportionnelle ainsi qu’un certain nombre d’incompatibilités entre les mandats nationaux et le mandat européen.

Les dernières modifications apportées à l’acte électoral de 1976 ont été adoptées par la décision (UE, Euratom) 2018/994 du Conseil du 13 juillet 2018, qui contient des dispositions sur la possibilité de recourir à différentes méthodes de vote (vote électronique, par anticipation, par internet et par correspondance), les seuils, la protection des données à caractère personnel, la pénalisation du «double vote» par la législation nationale, le vote dans les pays tiers et la possibilité de faire figurer les partis politiques européens sur les bulletins de vote.

Avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne (1.1.5), le droit de vote et d’éligibilité a acquis le statut de droit fondamental (article 39 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne).

B. Application: dispositions communes en vigueur

1. Droit de vote et d’éligibilité des non-ressortissants

En vertu de l’article 22, paragraphe 2, du traité FUE, «tout citoyen de l’Union résidant dans un État membre dont il n’est pas ressortissant a le droit de vote et d’éligibilité aux élections au Parlement européen dans l’État membre où il réside». Les modalités d’exercice de ce droit ont été arrêtées par la directive 93/109/CE du Conseil, modifiée en dernier lieu par la directive 2013/1/UE du Conseil. L’article 6 du texte en vigueur énonce que «tout citoyen de l’Union qui réside dans un État membre sans en avoir la nationalité et qui, par l’effet d’une décision de justice individuelle ou d’une décision administrative, pour autant que cette dernière puisse faire l’objet d’un recours juridictionnel, est déchu du droit d’éligibilité en vertu soit du droit de l’État membre de résidence, soit du droit de son État membre d’origine, est exclu de l’exercice de ce droit dans l’État membre de résidence lors des élections au Parlement européen».

2. Système électoral

Conformément à l’acte électoral de 1976, tel que modifié, les élections européennes doivent reposer sur une représentation proportionnelle et utiliser soit le système de liste, soit le système de vote unique transférable. Les États membres peuvent également autoriser le vote sur la base d’un scrutin de liste préférentiel.

En plus du seuil minimal facultatif pour l’attribution de sièges, pouvant aller jusqu’à 5 % des suffrages valablement exprimés au niveau national, les modifications apportées récemment à l’acte électoral de 1976, adoptées par la décision (UE, Euratom) 2018/994 du Conseil, fixent un seuil minimal obligatoire compris entre 2 % et 5 % pour les circonscriptions (y compris les États membres à circonscription unique) comptant plus de 35 sièges dans les États membres où le scrutin de liste est utilisé. Les États membres devront se conformer à cette exigence pour les élections de 2024 au plus tard.

En vertu de cette décision, les États membres peuvent également prévoir le vote par anticipation, le vote par correspondance, le vote électronique et le vote par internet. Dans ce cas, ils sont tenus de garantir en particulier la fiabilité du résultat, la confidentialité du vote et la protection des données à caractère personnel.

3. Incompatibilités

En vertu de l’article 7 de l’acte électoral de 1976 (modifié par la décision 2002/772/CE, Euratom du Conseil), le mandat de député au Parlement européen est incompatible avec la qualité de membre du gouvernement d’un État membre, de membre de la Commission, de juge, d’avocat général ou de greffier de la Cour de justice, de membre de la Cour des comptes, de membre du Comité économique et social européen, de membre de comités ou d’organismes créés en vertu des traités pour gérer des fonds de l’Union ou réaliser des tâches administratives permanentes et directes, de membre du conseil d’administration, du comité de direction ou du personnel de la Banque européenne d’investissement, et de fonctionnaire ou d’agent en activité des institutions de l’Union européenne ou des organismes spécialisés qui leur sont rattachés. Le mandat est également incompatible avec les fonctions de membre du Comité européen des régions (depuis 1997), de membre du directoire de la Banque centrale européenne, de Médiateur européen et, surtout, de membre d’un parlement national (depuis 2002).

Modalités relevant de la compétence nationale

En dehors de ces règles communes, les modalités électorales sont régies par des dispositions nationales qui peuvent être très différentes d’un État membre à l’autre; le système électoral peut donc être qualifié de polymorphe.

A. Système électoral et seuils applicables

Tous les États membres doivent appliquer un système de représentation proportionnelle. En plus du seuil facultatif pour l’attribution de sièges, pouvant aller jusqu’à 5 % des suffrages au niveau national, la décision (UE, Euratom) 2018/994 du Conseil a fixé un seuil minimal obligatoire compris entre 2 % et 5 % pour les circonscriptions (y compris les États membres à circonscription unique) comptant plus de 35 sièges. Cette exigence doit être respectée pour les élections européennes de 2024 au plus tard.

Les États membres suivants prévoient actuellement des seuils: France, Belgique, Lituanie, Pologne, Slovaquie, Tchéquie, Roumanie, Croatie, Lettonie et Hongrie (5 %); Autriche, Italie et Suède (4 %), Grèce (3 %) et Chypre (1,8 %). Les autres États membres n’ont pas établi de seuil. Le gouvernement allemand a souhaité le faire, mais la Cour constitutionnelle d’Allemagne a déclaré, dans deux décisions adoptées en 2011 et en 2014, que les seuils fixés par le pays pour les élections européennes (de 5 %, puis de 3 %) étaient anticonstitutionnels.

B. Découpage en circonscriptions

Aux élections européennes, la plupart des États membres forment une circonscription unique. Seuls quatre États membres (Belgique, Irlande, Italie et Pologne) ont divisé leur territoire national en plusieurs circonscriptions régionales.

C. Droit de vote

La majorité électorale est fixée à 18 ans dans la plupart des États membres, sauf en Allemagne, en Autriche, en Belgique et à Malte (16 ans), et en Grèce (17 ans).

Le vote est obligatoire dans quatre États membres (Belgique, Bulgarie, Luxembourg et Grèce). Cette obligation s’applique tant aux ressortissants qu’aux citoyens européens non ressortissants inscrits sur les listes.

1. Vote des non-ressortissants dans le pays de résidence

En vertu de l’article 22 du traité FUE, tout citoyen de l’Union résidant dans un État membre dont il n’est pas ressortissant a le droit de voter lors des élections au Parlement européen dans l’État membre où il réside, et ce dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État. Cependant, la notion de résidence diffère encore beaucoup selon les États membres. Certains pays (comme l’Allemagne, l’Estonie, la France, la Pologne, la Roumanie et la Slovénie) exigent que l’électeur ait établi son domicile ou sa résidence habituelle sur le territoire électoral, d’autres (comme Chypre, le Danemark, la Grèce, l’Irlande, le Luxembourg, la Slovaquie et la Suède) qu’il y séjourne de manière habituelle, d’autres encore (comme la Belgique et la Tchéquie) qu’il figure au registre de la population. Pour bénéficier du droit de vote dans certains pays (par exemple à Chypre), les citoyens de l’Union doivent également justifier d’une durée minimale de résidence. Dans tous les États membres, les ressortissants d’autres pays de l’Union sont tenus de s’inscrire sur la liste électorale avant le jour du scrutin. Les dates limites d’inscription varient d’un État membre à l’autre.

2. Vote des ressortissants non-résidents dans leur pays d’origine

Presque tous les États membres prévoient la possibilité de voter depuis l’étranger lors des élections européennes. Dans certains pays, les électeurs sont tenus de s’inscrire auprès de leurs autorités électorales nationales afin de pouvoir voter depuis l’étranger par correspondance ou dans une ambassade ou un consulat. Dans d’autres, on peut voter par correspondance depuis les ambassades ou les consulats. Dans quelques États membres (par exemple, la Bulgarie et l’Italie), le droit de vote à l’étranger n’est accordé qu’aux citoyens résidant dans un autre État membre. En outre, la plupart des États membres prévoient des dispositions spéciales pour les diplomates et les militaires en poste à l’étranger.

Le fait que certains non-ressortissants aient la possibilité de voter à la fois dans leur pays de résidence et dans le pays dont ils sont ressortissants pourrait donner lieu à des abus, notamment le double vote, considéré comme un délit dans certains États membres. À cet égard, les récentes modifications apportées à l’acte électoral de 1976 par la décision (UE, Euratom) 2018/994 du Conseil imposent aux États membres de veiller à ce que le double vote aux élections européennes fasse l’objet de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives.

D. Éligibilité

Le droit d’éligibilité aux élections au Parlement européen dans un autre État membre de résidence, quel qu’il soit, découle également des principes de non-discrimination entre ressortissants et non-ressortissants, de libre circulation et de libre séjour des personnes au sein de l’Union. Tout citoyen de l’Union qui, sans être ressortissant de son État membre de résidence, réunit les conditions auxquelles la législation de ce pays subordonne le droit d’éligibilité de ses ressortissants y a le droit d’éligibilité lors des élections au Parlement européen, sauf s’il est déchu de ce droit par ailleurs (article 3 de la directive 93/109/CE du Conseil).

À part l’exigence de citoyenneté d’un État membre, qui est commune à tous les États membres, les conditions d’éligibilité varient d’un État à l’autre. Nul ne peut être candidat dans plus d’un État membre lors d’une même élection (article 4 de la directive 93/109/CE du Conseil). L’âge minimal pour se présenter aux élections est de 18 ans dans la plupart des États membres, sauf en Belgique, en Bulgarie, à Chypre, en Estonie, en Irlande, en Lettonie, en Lituanie, en Pologne, en Slovaquie et en Tchéquie (21 ans), en Roumanie (23 ans), et en Italie et en Grèce (25 ans).

E. Modalités de candidature

Dans certains États membres, seuls les partis et organisations politiques peuvent présenter des candidatures. Dans d’autres, des candidatures peuvent être présentées si elles recueillent un certain nombre de signatures ou regroupent un certain nombre d’électeurs; le versement d’une caution est parfois exigé.

La décision (UE) 2018/937 du Conseil européen du 28 juin 2018 fixant la composition du Parlement européen détermine la répartition des sièges au Parlement européen prévue à l’article 14, paragraphe 2, du traité UE, en appliquant le principe de «proportionnalité dégressive» (1.3.3).

F. Date des élections

En vertu des articles 10 et 11 de l’acte électoral de 1976, tel que modifié, les élections au Parlement européen ont lieu à une date située au cours d’une même période débutant un jeudi matin et s’achevant le dimanche immédiatement suivant; la date et les heures précises sont fixées par chaque État membre. En 1976, c’est le Conseil qui a défini à l’unanimité, après consultation du Parlement européen, la période électorale pour les premières élections, en 1979. Les élections suivantes se sont déroulées au cours de la période correspondante de la dernière année de la période quinquennale visée à l’article 5 de l’acte électoral de 1976 (1.3.1).

Pour les élections de 2014, le Conseil, par décision du 14 juin 2013, a déplacé la période des élections, prévues à l’origine en juin, pour la fixer entre le 22 et le 25 mai de façon à éviter un chevauchement avec les congés de Pentecôte, en application de l’article 11 disposant que «s’il s’avère impossible de tenir les élections (...) au cours de cette période, le Conseil, statuant à l’unanimité après consultation du Parlement européen, (...) fixe, au moins un an avant la fin de la période quinquennale visée à l’article 5, une autre période électorale qui peut se situer au plus tôt deux mois avant et au plus tard un mois après la période qui résulte des dispositions de l’alinéa précédent». Les élections ultérieures ont lieu au cours de la période correspondante de la dernière année de la période quinquennale visée à l’article 11 de l’acte électoral de 1976. Ainsi, les élections de 2019 se sont déroulées du 23 au 26 mai. Les élections européennes de 2024 se sont déroulées du 6 au 9 juin.

G. Liberté de l’électeur par rapport à l’ordre des candidats sur les listes

Dans la plupart des États membres, les électeurs ont la possibilité d’exprimer des votes préférentiels afin de changer l’ordre des noms sur la liste. Cependant, dans six États membres (Allemagne, Espagne, France, Hongrie, Portugal et Roumanie), les listes sont fermées (pas de vote préférentiel). En Irlande et à Malte, les électeurs classent les candidats par ordre de préférence (vote unique transférable).

H. Pourvoi des sièges devenus vacants en cours de législature

Dans certains États membres, les sièges devenus vacants sont attribués aux premiers candidats non élus de la même liste (éventuellement après ajustement en fonction des voix recueillies par les différents candidats). Dans d’autres, les sièges vacants sont attribués aux suppléants et, en l’absence de suppléants, l’ordre des candidats figurant sur les listes constitue le critère décisif. Dans quelques pays, les députés ont le droit de revenir au Parlement européen une fois que le motif de leur départ n’est plus d’actualité.

Rôle du Parlement européen

Depuis les années 1960, le Parlement européen s’est maintes fois prononcé sur les questions relatives au droit électoral et a présenté des propositions au titre de l’article 138 du traité CE (devenu article 223 du traité FUE). L’absence d’une véritable procédure électorale uniforme pour les élections au Parlement européen prouve combien il est difficile d’harmoniser des traditions nationales différentes. La possibilité prévue par le traité d’Amsterdam d’adopter des principes communs n’a permis de surmonter ces difficultés que dans une certaine mesure. La volonté, définie à l’article 223 du traité FUE, d’adopter une procédure uniforme, prévoyant l’approbation du Parlement européen, ne s’est pas encore concrétisée. Les efforts déployés sans relâche par le Parlement pour moderniser et «européaniser» la procédure électorale commune ont abouti en 1997 à une proposition de procédure électorale uniforme; sa substance a été incorporée dans la décision du Conseil de 2002. Le Parlement européen a adopté, le 11 novembre 2015, une résolution sur la réforme de la loi électorale de l’Union européenne. L’initiative législative de la commission des affaires constitutionnelles a proposé de modifier l’acte électoral de 1976, en vue de rendre les élections européennes plus démocratiques et d’accroître la participation du public au processus électoral. Les propositions de modifications du Parlement ont été partiellement acceptées et intégrées dans la décision (UE, Euratom) 2018/994 du Conseil du 13 juillet 2018. Toutefois, le Conseil n’est pas parvenu à un accord sur la proposition du Parlement d’établir une circonscription électorale commune et de nommer des candidats têtes de liste pour le poste de président de la Commission.

À la suite de sa résolution du 7 février 2018 sur la composition du Parlement européen, le Parlement a voté en faveur d’une réduction du nombre de ses sièges de 751 à 705 après le départ du Royaume-Uni de l’Union et d’une redistribution de certains des sièges rendus vacants par le Brexit entre les pays de l’Union qui sont légèrement sous-représentés (1.3.3). Le 13 septembre 2023, le Parlement européen a adopté une résolution donnant son approbation au projet de décision du Conseil européen portant de 705 à 720 le nombre de sièges au Parlement européen pour les élections de 2024.

Le 22 novembre 2012, le Parlement européen a adopté une résolution dans laquelle il prie instamment les partis politiques européens de désigner leur candidat au poste de président de la Commission lors des élections de 2014, afin de renforcer la légitimité politique du Parlement et de la Commission. Ces modalités ont été mises en œuvre dans la perspective des élections de 2014, qui ont vu, pour la première fois, apparaître des têtes de liste (Spitzenkandidaten). Après les élections de 2014, Jean-Claude Juncker, l’une de ces têtes de liste, a été élu président de la Commission le 22 octobre 2014 par le Parlement européen. Dans sa décision du 7 février 2018 sur la révision de l’accord-cadre sur les relations entre le Parlement européen et la Commission européenne, le Parlement s’est dit prêt à rejeter tout candidat à la présidence de la Commission qui n’aurait pas été désigné comme tête de liste d’un parti politique européen en amont des élections de 2019. Cependant, après les élections, Ursula von der Leyen, qui n’avait pas été désignée comme tête de liste, a tout de même été élue présidente de la Commission européenne. Le 22 novembre 2023, le Parlement a voté en plénière sur des projets de révision des traités, qui comprennent un nouveau mode d’élection de la Commission.

Un système de financement des partis politiques au niveau européen a été créé en 2003; il permet aussi la création de fondations politiques (1.3.3) au niveau de l’Union. Le règlement (CE) nº 2004/2003 a été abrogé et remplacé par le règlement (UE, Euratom) nº 1141/2014 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 relatif au statut et au financement des partis politiques européens et des fondations politiques européennes. Le règlement de 2014 a été modifié à la suite de la résolution du Parlement européen du 15 juin 2017 sur le financement des partis politiques et des fondations politiques au niveau européen. La résolution faisait état de failles concernant le niveau de cofinancement et la possibilité pour les députés d’être membres de plusieurs partis. Elle répondait à une volonté de veiller à ce que l’argent public soit utilisé à bon escient concernant le financement des partis politiques européens et des fondations politiques européennes. Elle a entraîné l’adoption du règlement (UE, Euratom) 2018/673 du Parlement européen et du Conseil du 3 mai 2018.

Les récents événements ont mis en lumière les risques que la communication en ligne fait peser, avec la manipulation de données à caractère personnel dans un contexte électoral, sur les processus électoraux et la démocratie. Afin de prévenir l’utilisation illicite de données à caractère personnel, de nouvelles modifications au règlement de 2014 sur le statut et le financement des partis politiques européens et des fondations politiques européennes ont été adoptées (règlement (UE, Euratom) 2019/493 du Parlement européen et du Conseil du 25 mars 2019 modifiant le règlement (UE, Euratom) nº 1141/2014 en ce qui concerne une procédure de vérification relative aux violations des règles relatives à la protection des données à caractère personnel dans le cadre des élections au Parlement européen). Les nouvelles règles adoptées par le Parlement et le Conseil visent à protéger le processus électoral des campagnes de désinformation en ligne qui font un usage abusif des données à caractère personnel des électeurs. Elles permettent d’imposer des sanctions financières aux partis politiques européens et aux fondations politiques européennes qui influencent délibérément ou tentent d’influencer le résultat des élections européennes en tirant parti de violations des règles relatives à la protection des données.

En outre, en avril 2018, à la suite de la résolution du Parlement du 15 juin 2017 sur les plateformes en ligne et le marché unique numérique, dans laquelle le Parlement invitait la Commission à vérifier la possibilité d’une intervention législative afin de limiter la publication et la diffusion de faux contenus, la Commission a publié une communication intitulée «Lutter contre la désinformation en ligne: une approche européenne» et présenté un code de bonnes pratiques à l’échelle de l’Union, qui a été signé par trois plateformes en ligne en septembre 2018. Le plan d’action contre la désinformation, adopté par la Commission en décembre 2018, invite instamment les plateformes en ligne, entre autres mesures, à mettre en œuvre avec rapidité et efficacité les engagements pris et à mettre l’accent sur certaines actions prioritaires à l’approche des élections européennes, comme la fermeture des faux comptes, le signalement des messages diffusés par des robots et la coopération avec des vérificateurs de faits et des chercheurs pour détecter les campagnes de désinformation et améliorer la visibilité des contenus vérifiés. Lors de la période précédant les élections européennes de mai 2019, la Commission a demandé aux trois plateformes signataires du code de bonnes pratiques de rendre compte, une fois par mois, des actions qu’elles ont effectuées aux fins d’améliorer le contrôle des placements publicitaires, de garantir la transparence de la publicité à caractère politique ou engagé, et de lutter contre les faux comptes et l’utilisation malveillante de robots.

Dans sa résolution du 26 novembre 2020 sur le bilan des élections européennes, le Parlement a recommandé, notamment lors de la conférence sur l’avenir de l’Europe, d’examiner les éléments suivants en vue d’améliorer le processus électoral européen:

  • de nouvelles méthodes de vote à distance aux élections européennes pour les citoyens de l’Union dans des circonstances exceptionnelles ou spécifiques;
  • des règles communes en matière d’éligibilité, de campagnes et de financement;
  • des normes harmonisées pour le droit de vote et d’éligibilité dans les États membres, y compris une réflexion sur l’abaissement à 16 ans de la majorité électorale dans tous les États membres;
  • des dispositions relatives aux périodes d’absence des députés, par exemple en cas de maternité, de congé parental ou de maladie grave.

Le Parlement a aussi demandé aux États membres de garantir que tous leurs ressortissants qui jouissent du droit de vote peuvent effectivement l’exercer, y compris les citoyens européens qui vivent hors de leur pays d’origine, les sans-abri et les détenus qui se voient octroyer ce droit conformément au droit national.

À la suite du rapport de la commission d’enquête chargée d’enquêter sur l’utilisation de Pegasus et de logiciels espions de surveillance équivalents (commission PEGA) du 15 juin 2023, le Parlement a adopté une recommandation par laquelle il demandait à la Commission de créer une taskforce spéciale, associant les commissions électorales nationales, consacrée à la protection des élections parlementaires européennes de 2024 dans toute l’Union. Toutefois, la Commission n’a pas donné suite à cette demande.

Réforme de la loi électorale européenne

Le 3 mai 2022, le Parlement a arrêté sa position sur la proposition de règlement du Conseil portant élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct. Il a ainsi lancé une nouvelle réforme de la loi électorale européenne, en cherchant à fusionner les 27 élections nationales, aux règles divergentes, en une seule élection européenne dotée de normes minimales communes. Dans le système proposé par le Parlement, chaque électeur disposerait de deux voix: une pour élire les députés de sa circonscription nationale, et une pour élire 28 députés supplémentaires au sein d’une circonscription paneuropéenne. Afin d’assurer une représentation géographique équilibrée à l’intérieur de ces listes, les États membres seraient répartis en trois groupes, en fonction de leur population. Les listes seraient constituées en prenant des candidats de chacun de ces groupes selon une règle de proportionnalité. Les listes paneuropéennes seraient présentées par des entités électorales européennes, par exemple des coalitions de partis politiques nationaux et/ou d’associations électorales nationales, ou des partis politiques européens.

Parmi les autres propositions figurent:

  • un jour de scrutin européen commun le 9 mai;
  • le droit d’éligibilité de tous les Européens âgés de 18 ans ou plus;
  • un seuil électoral obligatoire d’au moins 3,5 % pour les grandes circonscriptions représentées par au moins 60 élus;
  • l’égalité d’accès aux élections pour tous les citoyens, notamment les personnes handicapées, ainsi que la possibilité de voter par correspondance;
  • une obligation de parité grâce à des quotas ou à une règle d’alternance homme-femme sur les listes;
  • le droit pour les citoyens de voter pour le président de la Commission au moyen d’un système de candidats têtes des listes paneuropéennes (Spitzenkandidaten).

Dans ce système, une nouvelle autorité électorale européenne superviserait le processus et veillerait au respect des nouvelles règles.

Comme prévu à l’article 223 du traité FUE, l’initiative législative du Parlement doit recueillir l’approbation du Conseil, statuant à l’unanimité. Le texte retournerait alors devant le Parlement, pour que les députés puissent l’adopter, puis devrait être approuvé par tous les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives. Les négociations avec le Conseil débuteraient une fois que les États membres auraient adopté leurs positions.

Le Conseil analyse actuellement le projet d’acte législatif, dans sa formation «Affaires générales». Le 18 octobre 2022, il a tenu un premier débat d’orientation sur la proposition. Certains États membres ont exprimé des réserves quant à la proposition de circonscription paneuropéenne fondée sur des listes transnationales et à l’harmonisation du système électoral utilisé lors des élections européennes.

 

PABLO ABRIL MARTI / Mariusz Maciejewski