La "Comitologie" peut être définie comme étant le processus d'adoption de mesures d'exécution des actes législatifs, prévoyant que ces mesures sont adoptées par la Commission assistée par un Comité d'experts des Etats membres.
La Comitologie s'est développée lorsque le Conseil a commencé à déléguer des pouvoirs d'exécution à la Commission. Cette procédure a été introduite pour la première fois en 1962, pour l'exécution d'une série de règlements du Conseil concernant l'organisation du marché des produits agricoles et a continué d'être utilisée dans le domaine de la politique agricole commune. Ensuite, le nombre de ces comités a augmenté de façon appréciable.
L'Acte Unique Européen a ajouté un troisième tiret à l'article 145 du traité CEE, qui se lit comme suit: "le Conseil confère à la Commission, dans les actes qu'il adopte, les compétences d'exécution des règles qu'il établit. Le Conseil peut soumettre l'exercice de ces compétences à certaines modalités. Il peut également se réserver, dans des cas spécifiques, d'exercer directement des compétences d'exécution. Les modalités visées ci-dessus doivent répondre aux principes et règles que le Conseil... aura préalablement établis."
Sur la base de ce texte, le 13 juillet 1987, le Conseil adopta une décision (nommée " décision sur la Comitologie") fixant les modalités de l'exercice des compétences d'exécution conférées à la Commission. Ceci était d'ailleurs le premier acte juridique arrêté en vertu de l'Acte unique européen.
Cette décision prévoit trois procédures où la Commission est toujours assistée par un comité composé des représentants des Etats membres et présidé par le représentant de la Commission. Mais tandis que dans la première procédure le comité est purement consultatif, dans les deuxième et troisième procédures (avec deux variantes chacune), le comité a le pouvoir de renvoyer le dossier au Conseil.
Enfin, le "Modus vivendi" du 20 décembre 1994 conclu entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission, concernant la comitologie, prévoit une information complète -en théorie- du Parlement européen sur toutes les mesures relevant de la comitologie lorsque la législation de base est adoptée en codécision (art. 189 B du TCE).
Ce "modus vivendi" est d'ailleurs une des sources de l'agenda de la Conférence, dans la mesure où dans son troisième paragraphe "les trois institutions concernées constatent que le problème des mesures d'exécution des actes arrêtés selon la procédure visée à l'article susmentionné, sera examiné lors de la révision des traités prévue pour 1996, à la demande du Parlement européen, de la Commission et de plusieurs Etats membre. Le groupe de réflexion sera invité à se pencher sur ce problème."
Résolution du 17 mai 1995: dans le paragraphe nr. 32-ii de cette Résolution, il est dit que "il conviendrait de simplifier les procédures actuelles de "comitologie". La responsabilité générale des mesures d'exécution devrait être conférée à la Commission (qui pourrait se faire assister par un comité consultatif pour l'élaboration de la mesure envisagée, mais non pas des comités de type 2 et 3, lesquels seraient supprimés). Le Conseil et le Parlement devraient être informés des mesures proposées et avoir la possibilité de rejeter la décision de la Commission et de demander soit l'élaboration de nouvelles mesures d'exécution, soit la mise en oeuvre d'une procédure législative complète".
Résolution du 13 mars 1996: dans le paragraphe 21.6. de cette Résolution, il est dit que "la CIG devrait simplifier l'actuel maquis des procédures de comitologie en confiant la responsabilité générale des mesures d'exécution à la Commission (qui pourrait faire appel à un comité consultatif pour l'aider dans cette tâche, mais non comités des types 2 et 3 qui seraient supprimés). Le Conseil et le Parlement devraient être informés des mesures proposées et avoir tous deux la possibilité de rejeter la décision de la Commission et de demander la prise de nouvelles mesures d'exécution ou l'introduction d'une procédure législative complète.
Dans le document de la commission institutionnelle "sur le modus vivendi concernant les mesures d'exécution des actes" (premier document de travail de MM. Bourlanges et De Giovanni du 12 septembre 1996), les deux co-rapporteurs considèrent que:
- la solution la plus satisfaisante impliquerait le remplacement du "modus vivendi" par un système entièrement nouveau. D'abord, parce que le document actuel n'assure pas une véritable égalité de traitement entre le PE et le Conseil. Ensuite, parce que ce "modus vivendi" a toujours été conçu comme une solution provisoire. Enfin, parce qu'il n'a pas été parafaitement respecté, étant donné que les mécanismes nécessaires pour gérer le système n'on pas tous été mis en place;
- en attendant une transformation radicale du système, des améliorations peuvent être proposées: réduction de la décision de 1987 aux comités consultatifs, plus de transparence, transmission au PE de toutes les mesures d'exécution.
Dans les paragraphes nrs. 51 et ss. de ce document, la Commission considère que, "après la création par le Traité de la procédure de codécision, le Parlement européen a estimé que le Conseil ne pouvait plus, seul, déléguer ou participer aux mesures d'exécution de textes adoptés en codécision, mais que le Parlement européen devait y être associé. C'est en raison de la divergence sur ce point avec le Conseil, qu'est intervenu le seul rejet en troisième lecture à ce jour par le Parlement européen, d'une proposition de directive sur la téléphonie vocale." Afin d'éviter de nouveaux blocages -continue la Commission dans son rapport-, les institutions ont conclu, le 20 décembre 1994, un "modus vivendi" applicable jusqu'au réexamen de cette question par la Conférence de 1996.
La Commission a très rarement proposé la procédure du comité type III-b de la décision de 1987 susvisée, puisqu'elle l'estime illogique du fait qu'elle pourrait déboucher sur une absence de décision. Sous cette réserve, la Commission considère que les procédures d'exécution fonctionnent et ne représentent pas d'obstacles majeurs à l'action d'exécution. En outre, ces procédures comportent l'avantage d'impliquer fortement les administrations
nationales, à qui il revient le plus souvent de faire appliquer ces mesures sur le terrain.
En ce qui concerne notre sujet, le Conseil se limite à considérer (page 13 du Rapport) que l'application de la procédure de codécision, introduite par le Traité de Maastricht, a été compliquée aussi par " le lien qui a été établi, dans un premier temps, avec d'autres questions (notamment la comitologie et les montants estimés nécessaires), ce qui a retardé l'adoption de plusieurs textes".
a) Espagne: le document espagnol de mars 1995 "Conférence intergouvernementale de 1996. Bases pour une réflexion", rappelle que la Commission et le Parlement ont soumis des nouvelles propositions concernant la procédure de codécision, dans la mesure où il faut trouver des formules permettant au Parlement européen de participer dans la procédure des comités ou comitologie, qui d'ailleurs devrait être simplifiée.
b) Autriche: dans les "lignes directrices du gouvernement autrichien sur les thèmes probables de la CIG de 1996", publiées fin juin 1995, ce gouvernement se déclare favorable à l'extension des pouvoirs législatifs et de contrôle du Parlement européen. A cette fin (il ajoute), il faudra discuter la simplification des procédures législatives et de la comitologie.
En général, cet Etat est favorable à une réforme et à une simplification de la comitologie.
c) Pays-Bas: le IVème Mémorandum du gouvernement néerlandais sur les réformes institutionnelles de l'Union européenne, soumis au Parlement des Pays-Bas le 12 juillet 1995, concerne plusieurs questions liées aux principes de l'Union, à ses procédures législatives et aux problèmes relatifs à l'équilibre interinstitutionnel. En ce qui concerne la comitologie, le Mémorandum se limite à affirmer que le gouvernement néerlandais est sensible à une approche constructive de cette question, en confirmant que les nécessités d'efficacité et de démocratie au sein du processus décisionnel communautaire demandent un système d'organisation des comités plus simple et transparent.
Dans le Rapport du Groupe de Réfléxion du 5 décembre 1995, ce sujet figure aux points 127-8, lesquels rappellent que l'examen de cette question par la conférence est prévu dans le "Modus vivendi" insterinstitutionel du 20 décembre 1994.
Les tendances que s'y sont dessinées sont les suivantes:- les partisans de la hiérarchie des actes résolvent cette question en attribuant la pleine compétence à la Commission, soumise au contrôle du Conseil et du Parlement européen;
- les adversaires de l'attribution du pouvoir exécutif à la Commission, estimant que l'équilibre institutionnel s'en trouverait altéré, s'orientent plutôt vers des procédures simplifiées qui n'affaiblissent pas les pouvoirs d'exécution du Conseil;
- une solution intermédiaire comporterait une procédure unique, selon laquelle il appartiendrait à la Commission, après consultation des experts nationaux, d'arrêter toute mesures d'exécution sous l'autorité de contrôle du Conseil et du Parlement européen, lesquels pourraient annuler la mesure et demander l'application des procédures législatives ordinaires. Un membre au moins a signalé que l'opposition d'une minorité d'etats devrait suffire pour empêcher l'adoption d'une mesure d'exécution.
En tout état de cause, une large majorité du Groupe se déclare favorable à une simplification de la comitologie actuelle, considérée comme complexe et confuse actuellement et impossible à gérer après le prochain élargissement. La nécessité d'améliorer la qualité des règles adoptées dans le cadre de ces procédures a également été soulignée.
Quoi qu'il en soit, considère ce Rapport, la révision de la décision de 1987 relative à la comitologie ne nécessite pas de réforme du traité, de sorte que cette question devra entrer dans le cadre de l'analyse des améliorations qu'il est possible de mettre en oeuvre avant la conférence. A cet égard, un membre a suggéré d'introduire un code de procédure interne qui serait applicable à tous les comités.
Pour ce qui concerne les articles de doctrine les plus récents, Kieran Bradley dans "Comitology and the law: through a glass, darkly" (Common Market Law Review 1992, p. 693) considère que, après l'ajout du troisième tiret de l'article 145 TCE, la délégation à la Commission qui était optionnelle et pouvait être conditionnée, est devenue obligatoire et la réserve en faveur du Conseil est soumise à des conditions. L'addition de ce troisième tiret suppose donc un pas en avant important vers une nouvelle définition de la séparation des pouvoirs entre les institutions communautaires, dans le sens de concentrer le gros des pouvoirs d'exécution dans la Commission.
Koen Lenaerts, Juge du Tribunal de Première Instance communautaire, dans "Regulating the regulatory process: delegation of powers in the European Community" (European Law Review, february 1993) considère que la jurisprudence de la Cour de justice accepte la délégation des pouvoirs dans la mesure où l'"équilibre des pouvoirs" inhérent à la structure constitutionnelle de la Communauté, ne change pas. Maintenir cet équilibre est indispensable pour préserver la légitimité démocratique.
Justus Lipsius, dans "The 1996 IGC" (European Law Review nr. 3, june 1995) pense que le Traité devrait établir clairement que les procédures d'application des actes législatifs rentrent dans les pouvoirs de la Commission et ne peuvent pas être réservées au Conseil. Aussi, la décision "comitologie" du 13 juillet 1987 devrait être simplifiée, notamment en supprimant la Procédure III, et elle devrait être transformée en Protocole annexé au Traité. Le Parlement européen devrait être informé de toutes les mesures d'application adoptées sur une telle base, mais il ne devrait pas du tout être associé à la procédure d'adoption de telles mesures.
Le Mouvement Européen International a mis en place, en vue de la Conférence intergouvernementale de 1996, un Comité d'initiative présidé par le professeur Jean-Victor Louis. M. Dastoli, Secrétaire Général de ce Mouvement, a cité (5 juillet 1995) la comitologie comme une des principales questions qui restent en suspens et qui devra être éclaircie.
Claude Blumann, dans "Le Parlement européen et la comitologie: una complication pour la Conférence intergouvernementale de 1996" (Revue trimestreelle de droit européen, janvier-mars 1996), considère qu' "il importe de se rallier à une solution moniste en matière de comitologie. En d'autres termes, il n'est pas question de consacrer une solution spécifique pour les actes de base adoptés en codécision. La parenthèse du modus vivendi doit se refermer au plus vite".
Pour de plus amples renseignements concernant cette fiche, veuillez vous adresser à:
M. Jose Luis RUFAS QUINTANA, Service juridique, Luxembourg, tél.: (352) 4300 3926 - Strasbourg, tél.: (33) 388 17 4614.
Courrier électronique: @europarl.europa.eu
Parlement européen, révisé le 1 juillet 1997
URL: http://../dg7/fiches/fr/fiche21.htm