Travailleurs détachés : les chiffres et la réforme (infographie)

Tout ce que vous devez savoir sur les travailleurs détachés dans l’Union européenne et comment le Parlement souhaite les protéger et stopper la concurrence déloyale.

Le sujet des travailleurs détachés est sensible de part la difficulté de trouver un bon équilibre entre la protection des travailleurs et de l'emploi tout en stimulant la concurrence entre les entreprises.


Mardi 29 mai, les députés réunis en session plénière ont approuvé de nouvelles règles sur le détachement des travailleurs afin qu'ils puissent bénéficer du principe « à travail égal, salaire égal sur le même lieu de travail ».

La réforme a pour objectif de garantir une meilleure protection des travailleurs détachés et d’offrir une égalité des chances entre les entreprises détachées et locales.

 

Qui sont les travailleurs détachés ? 

Le détachement des travailleurs est une forme spécifique de mobilité de la main d’œuvre qui est essentielle à la «libre circulation des services» (un des piliers du marché unique). Cela signifie que les entreprises peuvent fournir un service dans un autre État membre sans avoir à s’y établir. Pour ce faire, ces entreprises doivent pouvoir envoyer leurs salariés dans un autre État membre afin que ceux-ci y accomplissent les tâches requises.

 

Les travailleurs détachés sont légalement employés dans un État membre et sont envoyés dans un autre État membre par leur employeur pour y travailler de façon temporaire.  Ils ne s’intègrent pas dans le marché du travail de l’État d’accueil (l’État membre qui « reçoit ») et continuent à être couverts par la sécurité sociale de leur pays d’origine (l’État membre « expéditeur »)

 

Au-delà des raisons purement économiques, les affectations servent à couvrir les pénuries de personnel qualifié. Ces dernières sont particulièrement courantes dans certains secteurs économiques tels que la construction qui compte plus ou moins 45% du nombre total d’affectations, les services (29,4%) et l'agriculture et la pêche (1,5%).

 

Les travailleurs détachés ne doivent pas être confondus avec des travailleurs mobiles (forme la plus commune de mobilité de la main d’œuvre dans l’UE). Les travailleurs mobiles de l’Union qui s’installent définitivement ou à long terme dans un autre pays bénéficient des mêmes droits et devoirs que les travailleurs nationaux et relèvent du système de sécurité sociale du pays d’accueil, alors que les travailleurs détachés continuent à dépendre de celui du pays d’origine.

 

Liberté de services et protection des droits des travailleurs : trouver le bon équilibre

Les lois en vigueur (Directive européenne) datent de 1996 et comprennent un lot de conditions minimum (« noyau dur » du droit du travail) auxquelles les travailleurs détachés ont droit, telles qu’un taux de rémunération minimal, les durées maximales du travail, les congés payés minimaux et les conditions de mise à disposition des travailleurs.

 

Durant les 20 dernières années, la conjoncture économique et la situation du marché du travail ont beaucoup changé, ce qui demandait une révision des règles. Les différences de salaires et de coûts salariaux étaient devenus une motivation pour les travailleurs détachés.  

 

Des lacunes et quelques incertitudes juridiques ont mené à une augmentation des pratiques abusives et frauduleuses (telles que les sociétés dites « boite aux lettres » ou la sous-traitance fictive) entrainant une exploitation des travailleurs détachés.

 


Points principaux de la réforme

 

  • Les travailleurs détachés seront traités de la même manière que les travailleurs locaux (comme prévu par la loi ou par des conventions collectives) en ce qui concerne la rémunération.
  • L'employeur devra payer les frais de déplacement, d'hébergement et de séjour (au lieu de les déduire du salaire des travailleurs).
  • La période maximale de détachement a été fixée à 12 mois, avec possibilité d'extension de 6 mois. Après cela, les règles de travail du pays d'accueil seront appliquées.
  • Les agences de travail intérimaire devront offrir aux travailleurs détachés les mêmes conditions que celles appliquées aux travailleurs locaux.
  • La coopération sur la fraude sera renforcée.
  • Les nouvelles règles s'appliqueront au secteur des transports une fois que les législations spécifiques au secteur entreront en application.

Les travailleurs détachés en chiffres

 

En 2016, il y avait 2,3 millions de travailleurs détachés dans l’Union européenne. Entre 2010 et 2016, leur nombre a augmenté de 69%. Cependant, la part de travailleurs détachés dans les effectifs reste basse et ne représente que 0,4% du nombre total d’emplois dans l’Union.

 

82,3% des travailleurs détachés se sont rendus dans les pays de l’Europe des 15. L’Allemagne, la France et la Belgique sont les trois États membres qui attirent le plus de travailleurs détachés, puisqu’ils reçoivent à eux tous environ 50% de l’ensemble des travailleurs accueillis. Parallèlement, la Pologne, l’Allemagne et la Slovénie sont les trois États membres qui détachent le plus de travailleurs. En général, les travailleurs détachés sont envoyés dans des pays limitrophes.

 

En 2014, le Luxembourg (9%), la Belgique (3.6%) et l’Autriche (2.5%) étaient les pays à recevoir le plus de travailleurs détachés par rapport à l'emploi national.

 

La durée moyenne des détachements est de moins de 4 mois avec des différences significatives en fonction du pays. Les détachements ne dépassent pas les 33 jours en France, en Belgique et au Luxembourg contre plus de 230 jours en Estonie, en Hongrie et en Irlande.

 

 

N.B : Les statistiques reprises dans l’infographie ne donnent qu’une idée indicative. Les données sont basées sur le formulaire appelé A1 indiquant la situation de sécurité sociale d’un travailleur déplacé dans l’Union européenne. Il est par exemple possible qu’une seule personne ait été comptabilisée plusieurs fois (à cause de plusieurs affectations) ou pas comptée du tout (à cause d’une erreur d’enregistrement).

Prochaines étapes

Le Parlement votera sur ces nouvelles règles durant la session plénière de juin à Strasbourg. Après l'entrée en vigueur de la directive, les États membres auront deux ans pour transposer les nouvelles règles dans leur législation nationale. 

Cet article a été publié pour la première fois le 16 octobre.

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