Accès du public aux documents: plus de transparence dans l'UE
La possibilité de pouvoir limiter l'accès du public aux documents des institutions de l'UE sera extrêmement réduite grâce aux amendements apportés mercredi par la commission des libertés civiles, à un projet législatif dans ce domaine. La proposition qui devrait renforcer la transparence, la responsabilité et la démocratie dans l'UE sera votée à la plénière de décembre.
Le traité de Lisbonne a instauré un nouveau cadre juridique pour l'accès aux documents; la Charte, juridiquement contraignante, le considère comme un droit fondamental. Le droit d'accès aux documents, dont dispose chaque citoyen, ne couvrira plus seulement le Parlement européen, le Conseil et la Commission, comme cela a été le cas jusqu'à présent, mais toutes les institutions, organes et organismes de l'Union.
Le règlement (CE) n° 2049/2001 modifié vise à conférer un maximum d'efficacité au droit d'accès du public aux documents et à en définir les principes généraux et les limites en se fondant sur des raisons d'intérêt public ou privé.
"La commission parlementaire a envoyé, aujourd'hui, un message fort à la Commission européenne et au Conseil indiquant que le Parlement européen n'accepterait pas de diluer les règles et qu'au contraire, il fallait plus de transparence pour les citoyens.
Il s'agit d'un droit qui permet aux citoyens de s'assurer que nous sommes responsables de nos actes: le Parlement responsable des actes qu'il pose en leur nom, la Commission pour les actes qu'elle effectue en leur nom, et même chose pour le Conseil. Comment les citoyens peuvent-ils s'en assurer si, aussi bien notre manière de travailler que "qui fait quoi et où" dans les institutions, organes et organismes de l'UE restent un secret bien gardé et accessible seulement aux initiés ? Si la plénière soutient cette approche progressive avec une large majorité, nous seront dans une position très convaincante face au Conseil" a déclaré Michael Cashman (S&D, UK), rapporteur de la commission des libertés civiles dans ce dossier.
Que faut-il entendre par "document" ?
Les députés ont adopté une définition plus large du "document" – un concept qui figure au cœur du règlement – que celle proposée par la Commission.
Tout contenu quel que soit son support (écrit sur support papier ou stocké sous forme électronique, enregistrement sonore, visuel ou audiovisuel) concernant une matière relevant de la compétence d'une institution, un organe ou organisme de l'Union, serait considéré comme document. Des données contenues dans des systèmes de stockage, de traitement et d'extraction électroniques, y compris les systèmes externes utilisés pour le travail de l'institution, constitueront également un document.
Le règlement modifié s'applique à tous les documents détenus par une entité communautaire, soulignent les députés, à savoir ceux établis ou reçus par elle et en sa possession, dans tous les domaines d'activité de l'Union européenne. Il ne s'applique à la Cour de justice de l'Union européenne, à la Banque centrale européenne et à la Banque européenne d'investissement que lorsqu'elles exercent des fonctions administratives.
Un accès plus convivial
Les députés ont également voulu assurer l'accès aux documents le plus aisé et le plus convivial possible. Le public doit pouvoir accéder aux documents, soit sous forme électronique dans le Journal officiel de l'Union européenne, soit par l’intermédiaire d’un registre officiel de l'institution ou à la suite d’une demande écrite. Les documents établis ou reçus dans le cadre d'une procédure législative doivent être directement accessibles sur Internet.
Exceptions au droit d'accès aux documents
En principe, tous les documents des institutions devraient être accessibles au public. Toutefois, certains intérêts publics et privés (notamment la sécurité publique, les droits de propriété intellectuelle, etc.) devraient être garantis par le biais d'un régime d'exceptions. Les modifications apportées à la proposition par les députés visent à clarifier et à limiter ces exceptions.
Les exceptions ne s'appliqueront pas aux documents communiqués par des représentants d'intérêts et d'autres parties intéressées en vue d'influencer l'élaboration des politiques, soulignent les députés.
De plus, les exceptions s'appliqueront pour autant cela soit justifié par le contenu du document et en tous cas pendant une période maximale de trente ans.
L'intérêt public supérieur
Ces exceptions ne s'appliqueront pas si un intérêt public supérieur justifie la divulgation du document visé. L'intérêt supérieur est réputé exister lorsque le document demandé concerne "la protection des droits fondamentaux et l'État de droit, la bonne gestion des finances publiques ou le droit de vivre dans un environnement sain, y compris les émissions dans l'environnement", indiquent les députés.
Une institution invoquant l'une de ces exceptions – droits fondamentaux, finances publiques, environnement – devrait toutefois "démontrer que le risque pour l'intérêt protégé est prévisible et n'est pas purement hypothétique, et doit définir comment l'accès au document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l'intérêt protégé" ajoutent les députés.
Documents classifiés
La commission des libertés civiles insère également une nouvelle règle sur la procédure à suivre pour l'usage de la classification – "top secret", "secret", "confidentiel", et "diffusion restreinte" et de la déclassification des documents.
Une institution peut classifier un document seulement lorsque sa divulgation pourrait porter atteinte à la protection des intérêts essentiels de l'Union européenne ou de l'un ou plusieurs de ses États membres, indiquent les députés, notamment dans les domaines de la sécurité publique, de la défense et des questions militaires.
Documents émanant des États membres
Les États membres ne devraient pas pouvoir être en mesure d'interdire l'accès aux documents qu'ils produisent, ni se référer à certaines dispositions juridiques nationales pour justifier la confidentialité. Ils devraient néanmoins être consultés dans l'évaluation de l'applicabilité de l'une des exceptions prévues par le nouveau règlement.
Transparence financière
Un autre amendement prévoit de rendre accessible aux citoyens toute l'information concernant le budget de l'UE, sa mise en œuvre et les bénéficiaires des fonds et des subventions de l'UE
Opinion minoritaire
Une opinion minoritaire sera communiquée par le groupe PPE, a annoncé Renate Sommer (PPE, DE) après le vote. Le groupe a vote contre le rapport qui a été adopté par 33 voix pour, 17 contre et 2 abstentions.
Contexte
Le dossier a un long parcours législatif. La proposition de refonte initiale du règlement (CE) n° 1049/2001 fut présentée par la Commission en 2008. En 2009, le Parlement adoptait une série d'amendements en session plénière, sans voter sur la résolution législative, et le dossier était renvoyé en commission des libertés civiles
La proposition n'a pas été retirée avec l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, malgré des modifications substantielles en matière d'accès aux documents. M. Cashman a présenté son rapport en mai 2010. État donné que d'importantes modifications eurent lieu par la suite (arrêt de la Cour européenne de justice et nouvelle proposition supplémentaire de la Commission), le rapporteur a présenté une nouvelle version du projet de rapport, mise aux voix aujourd'hui.
Rapporteur: Michael Cashman (S&D, UK)
Sous la présidence de: Kinga Gál (PPE, HU)
Résultat du vote en commission: 33 voix pour, 17 voix contre et 2 abstentions
Vote en session plénière: session de décembre