RAPPORT sur la feuille de route de l'UE contre l'homophobie et les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre

7.1.2014 - (2013/2183(INI))

Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures
Rapporteure: Ulrike Lunacek


Procédure : 2013/2183(INI)
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A7-0009/2014

PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN

Sur la feuille de route de l'UE contre l'homophobie et les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre

(2013/2183(INI))

Le Parlement européen,

–   vu l'article 2 du traité sur l'Union européenne,

–   vu les articles 8 et 10 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

–   vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et en particulier son article 21,

–   vu la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

–   vu la recommandation CM/Rec(2010)5 du Comité des ministres du Conseil de l'Europe aux États membres sur des mesures visant à combattre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle ou le genre, adoptée le 31 mars 2010,

–   vu la communication de la Commission intitulée "Stratégie pour la mise en œuvre effective de la Charte des droits fondamentaux par l'Union européenne" (COM(2010)0573),

–   vu le rapport 2012 de la Commission sur l'application de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne en 2012 (COM(2013)0271) et les documents de travail qui l'accompagnent,

–   vu la proposition de la Commission relative à une directive du Conseil sur la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle (COM(2008)0426) et sa résolution du 2 avril 2009 à ce sujet[1],

–   vu les lignes directrices visant à promouvoir et garantir le respect de tous les droits fondamentaux des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées (LGBTI) adoptées par le Conseil de l'Union européenne lors de sa réunion du 24 juin 2013,

–   vu le rapport de l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne de novembre 2010 sur l'homophobie, la transphobie et la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre,

–   vu les résultats de l'enquête sur les personnes LGBT dans l'Union européenne réalisée par l'Agence des droits fondamentaux (FRA) et publiée le 17 mai 2013,

–   vu l'avis de la FRA du 1er octobre 2013 sur la situation de l'égalité dans l'Union européenne dix ans après la mise en œuvre initiale des directives relatives à l'égalité,

–   vu sa résolution du 24 mai 2012 sur la lutte contre l'homophobie en Europe[2],

–   vu sa résolution du 12 décembre 2012 sur la situation des droits fondamentaux dans l'Union européenne (2010-2011)[3],

–   vu sa résolution du 14 mars 2013 sur l'intensification de la lutte contre le racisme, la xénophobie et les crimes inspirés par la haine[4],

–   vu l'article 48 de son règlement,

–   vu le rapport de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures et l'avis de la commission des droits de la femme et de l'égalité des genres (A7‑0009/2014),

A. considérant que l'Union européenne est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités;

B.  considérant que, dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, l'Union cherche à combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle;

C. considérant qu'en juin 2013, le Conseil de l'Union européenne a adopté des lignes directrices fortes visant à promouvoir et à garantir le respect de tous les droits fondamentaux des personnes LGBTI en dehors de l'Union européenne, et devrait veiller à leur protection effective au sein de l'Union;

D. considérant que l'Union européenne coordonne déjà son action par des politiques globales dans le domaine de l'égalité et de la non-discrimination par l'intermédiaire de la "stratégie-cadre pour la non-discrimination et l'égalité des chances pour tous", dans le domaine de l'égalité des genres à travers la "stratégie pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2010-2015)", dans le domaine du handicap à travers la "stratégie européenne 2010-2020 en faveur des personnes handicapées", et en ce qui concerne les Roms à travers le "cadre de l'UE pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020";

E.  considérant que dans sa "stratégie pour la mise en œuvre effective de la charte des droits fondamentaux par l'Union européenne", la Commission a reconnu la nécessité de développer des politiques spécifiques, fondées sur les traités, concernant certains droits fondamentaux particuliers;

F.  considérant que l'enquête de 2013 relative aux personnes LGBT dans l'Union européenne réalisée par l'Agence des droits fondamentaux (FRA) a révélé qu'au cours de l'année précédant l'étude, une personne LGBT sur deux ayant participé à l'enquête s'était sentie victime de discrimination ou de harcèlement en raison de son orientation sexuelle, qu'une sur trois avait fait l'objet de discriminations dans l'accès aux biens et aux services, qu'une sur quatre avait été agressée physiquement, et qu'une sur cinq avait fait l'objet de discriminations dans le cadre professionnel;

G. considérant que la FRA a recommandé que l'Union et les États membres mettent en place des plans d'action pour promouvoir le respect des personnes LGBT et la protection de leurs droits fondamentaux;

H. considérant qu'en mai 2013, onze ministres en charge des questions d'égalité[5] ont appelé la Commission à élaborer une politique globale de l'Union en faveur de l'égalité des personnes LGBT, et que dix États membres ont déjà adopté ou sont en train d'examiner des politiques similaires aux niveaux national et régional;

I.   considérant que le Parlement européen a demandé, à dix reprises, la mise en place d'un instrument européen global en faveur de l'égalité, indépendamment de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre;

Considérations générales

1.  condamne fermement toute discrimination fondée sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre et déplore vivement que les droits fondamentaux des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées (LGBTI), ne soient pas toujours pleinement reconnus dans l'Union européenne;

2.  estime qu'une stratégie globale fait actuellement défaut à l'Union européenne pour protéger les droits fondamentaux des personnes LGBTI;

3.  reconnaît que la responsabilité de protéger les droits fondamentaux incombe conjointement à la Commission européenne et aux États membres; demande à la Commission de faire un usage le plus large possible de ses compétences, y compris en facilitant l'échange de bonnes pratiques entre les États membres; demande aux États membres de satisfaire aux obligations que leur imposent le droit de l'Union et la recommandation du Conseil de l'Europe visant à combattre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle ou le genre;

Contenu de la feuille de route

4.  appelle la Commission européenne, les États membres et les agences concernées à œuvrer conjointement à l'élaboration d'une politique pluriannuelle globale visant à la protection des droits fondamentaux des personnes LGBTI, à savoir une feuille de route, une stratégie ou un plan d'action reprenant les thèmes et objectifs énoncés ci-dessous;

A. Actions horizontales visant à mettre en œuvre la feuille de route

i)         La Commission devrait s'attacher à consolider les droits existants tout au long de ses travaux et dans tous les domaines dans lesquels elle est compétente en intégrant les questions liées aux droits fondamentaux des personnes LGBTI dans tous les travaux pertinents – par exemple lorsqu'elle élabore les futures politiques et propositions ou lorsqu'elle suit la mise en œuvre du droit de l'Union européenne;

ii)        la Commission devrait faciliter, coordonner et contrôler les échanges de bonnes pratiques entre les États membres par le biais de la méthode ouverte de coordination;

iii)        les agences concernées de l'Union européenne, y compris l'Agence des droits fondamentaux (FRA), l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes (EIGE), la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound), le Collège européen de police (CEPOL), l'Unité de coopération judiciaire de l'Union européenne (EUROJUST), le Réseau judiciaire européen (RJE) et le Bureau européen d'appui en matière d'asile (BEAA), devraient intégrer les questions relatives à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre dans leurs travaux, et continuer de prodiguer à la Commission et aux États membres des conseils fondés sur des éléments factuels relatifs aux droits fondamentaux des personnes LGBTI;

iv)       la Commission et les États membres devraient être encouragés à recueillir régulièrement des données pertinentes et comparables sur la situation des personnes LGBTI dans l'Union européenne, de concert avec les agences concernées et Eurostat, tout en respectant pleinement les règles de l'Union en matière de protection des données;

v)        de concert avec les agences concernées, la Commission et les États membres devraient encourager les activités de formation et de renforcement des capacités à destination des organismes nationaux en charge des questions d'égalité, des institutions nationales de défense des droits de l'homme et des autres organisations chargées de la promotion et de la protection des droits fondamentaux des personnes LGBTI;

vi)       de concert avec les agences concernées, la Commission et les États membres devraient s'employer à sensibiliser les citoyens aux droits des personnes LGBTI.

B. Dispositions générales en matière de non-discrimination

i)         les États membres devraient consolider le cadre juridique existant au niveau de l'Union, en travaillant à l'adoption de la proposition de directive relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle, et en clarifiant notamment son champ d'application et les coûts associés à ses dispositions;

ii)        La Commission, les États membres et les agences compétentes devraient accorder une attention particulière à l'expérience de la discrimination multiple et de la violence que connaissent les femmes lesbiennes (pour des motifs à la fois de sexe et d'orientation sexuelle), et concevoir et mettre en œuvre des politiques de non-discrimination en conséquence;

C. Non-discrimination au travail

i)         la Commission devrait mettre spécifiquement l'accent sur l'orientation sexuelle lors du suivi de la mise en œuvre de la directive 2000/78/CE portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, ainsi que sur l'identité de genre lors du suivi de la mise en œuvre de la directive 2006/54/CE relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail;

ii)        de concert avec les agences concernées, la Commission devrait formuler des lignes directrices précisant que les personnes transgenres et intersexuées sont incluses dans la notion de "sexe" au sens de la directive 2006/54/CE relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail;

iii)        les organismes en charge des questions d'égalité ainsi que les syndicats et les organisations d'employeurs devraient être encouragés à informer les personnes LGBTI de leurs droits;

D. Non-discrimination dans l'éducation

i)         la Commission devrait promouvoir l'égalité et la lutte contre les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre dans l'ensemble de ses programmes destinés à la jeunesse et à l'éducation;

ii)        la Commission devrait faciliter les échanges de bonnes pratiques entre les États membres en matière d'apprentissage formel, y compris pour ce qui concerne les supports d'enseignement et les politiques de lutte contre le harcèlement et la discrimination, par le biais de la méthode ouverte de coordination;

iii)       la Commission devrait faciliter les échanges de bonnes pratiques entre les États membres à travers l'ensemble des politiques menées par ces derniers dans les domaines de l'éducation et de la jeunesse, y compris par les services d'aide sociale et d'aide sociale à l'enfance, par le biais de la méthode ouverte de coordination;

E.  Non-discrimination en matière de santé

i)         la Commission devrait intégrer les préoccupations liées à la santé des personnes LGBTI dans les stratégies sanitaires globales concernées, y compris l'accès aux soins de santé, l'égalité en matière de santé et l'influence de l'Union au niveau mondial dans le domaine de la santé;

ii)        la Commission devrait continuer de travailler avec l'Organisation mondiale de la santé en vue de retirer les troubles de l'identité de genre de la liste des troubles mentaux et du comportement, et de veiller à la reclassification desdits troubles en troubles non pathologiques lors des négociations sur la onzième version de la Classification internationale des maladies (CIM-11);

iii)       la Commission devrait soutenir les États membres dans le cadre de la formation des professionnels de la santé;

iv)       la Commission et les États membres devraient entreprendre des recherches sur les enjeux sanitaires spécifiques aux personnes LGBTI;

v)        les États membres devraient prendre les personnes LGBTI en considération dans leurs plans et leurs politiques sanitaires au niveau national, en veillant à ce que les programmes de formation ainsi que les politiques et les enquêtes de santé intègrent les enjeux sanitaires spécifiques aux personnes LGBTI;

vi)       les États membres devraient instaurer des procédures de reconnaissance juridique du genre ou réviser celles déjà en place, en vue de respecter pleinement le droit des personnes transgenres à la dignité et à l'intégrité physique;

F.  Non-discrimination dans l'accès aux biens et services

i)         la Commission devrait mettre spécifiquement l'accent sur l'accès aux biens et services par les personnes transgenres lors du suivi de la mise en œuvre de la directive 2004/113/CE mettant en œuvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès à des biens et services et la fourniture de biens et services;

G. Mesures spécifiques en faveur des personnes transsexuelles et intersexuées

i)         la Commission devrait veiller à inclure l'identité de genre parmi les motifs de discrimination interdits dans le cadre de toute future disposition législative en matière d'égalité, y compris toute refonte législative;

ii)        la Commission devrait rationaliser les enjeux spécifiques aux personnes transgenres et intersexuées à travers l'ensemble des politiques de l'Union concernées, selon une approche analogue à celle de la stratégie pour l'égalité entre les hommes et les femmes;

iii)       les États membres devraient veiller à ce que les organismes en charge des questions d'égalité soient informés et formés quant aux droits et aux enjeux spécifiques liés aux personnes transgenres et intersexuées;

iv)       La Commission, les États membres et les agences compétentes devraient remédier au manque actuel en matière de connaissances, de recherche et de législation pertinente sur les droits humains des personnes intersexuées;

H. Citoyenneté, familles et liberté de circulation

i)         la Commission devrait formuler des lignes directrices pour veiller à ce que la directive 2004/38/CE relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres et la directive 2003/86/CE relative au droit au regroupement familial soient mises en œuvre de manière à garantir le respect de toutes les formes juridiquement reconnues de la famille dans le droit interne des États membres;

ii)        la Commission devrait s'atteler en priorité à la formulation de propositions en vue de la reconnaissance mutuelle de l'effet de l'ensemble des actes d'état civil établis à travers l'Union, y compris les partenariats enregistrés, les actes de mariage et la reconnaissance juridique du genre, afin de réduire les obstacles juridiques et administratifs discriminatoires auxquels se heurtent les citoyens et leurs familles qui exercent leur droit à la libre circulation;

iii)       la Commission et les États membres devraient évaluer si les restrictions applicables aux changements d'état civil et de documents d'identité des personnes transgenres réduisent leur capacité à jouir de leur droit à la libre circulation;

iv)       les États membres qui ont adopté une législation sur la cohabitation, le partenariat enregistré ou le mariage pour les couples de même sexe devraient reconnaître les dispositions similaires adoptées par les autres États membres;

I.   Liberté de réunion et d'expression

i)         les États membres devraient veiller à ce que les droits à la liberté d'expression et de réunion soient garantis, en particulier pour ce qui concerne les marches des fiertés et d'autres événements similaires, en s'assurant que ces derniers se déroulent dans la légalité et en garantissant la protection effective des participants;

ii)        les États membres devraient s'abstenir d'adopter et de réviser des lois dans le sens d'une restriction de la liberté d'expression concernant l'orientation sexuelle ou l'identité de genre;

iii)       la Commission et le Conseil de l'Union européenne devraient considérer que les États membres qui adoptent des lois en vue de restreindre la liberté d'expression pour ce qui est de l'orientation sexuelle ou l'identité de genre transgressent les valeurs sur lesquelles l'Union est fondée, et devraient réagir en conséquence;

J.  Discours et crimes haineux

i)         la Commission devrait procéder à un suivi et fournir une assistance aux États membres en ce qui concerne les questions spécifiques à l'orientation sexuelle, à l'identité de genre et à l'expression de genre dans le cadre de la mise en œuvre de la directive 2012/29/UE concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité, en particulier pour les crimes de haine et ceux commis pour des motifs discriminatoires susceptibles d'être liés aux caractéristiques des victimes en tant qu'individus;

ii)        la Commission devrait proposer une refonte de la décision-cadre du Conseil sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal, en y incluant d'autres formes de crimes de haine et d'incitation à la haine, y compris pour des motifs liés à l'orientation sexuelle ou à l'identité de genre;

iii)       de concert avec les agences concernées, la Commission devrait faciliter les échanges de bonnes pratiques entre les États membres dans le domaine de la formation et de l'éducation des forces de police, des services répressifs, des juges et des services d'aide aux victimes;

iv)       l'Agence des droits fondamentaux devrait aider les États membres à améliorer leur collecte de données comparables sur les crimes de haine homophobes et transphobes;

v)        les États membres devraient enregistrer les crimes de haine commis à l'encontre de personnes LGBTI et enquêter sur ces crimes, et devrait adopter une législation pénale interdisant l'incitation à la haine fondée sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre;

K. Asile

i)         de concert avec le Bureau européen d'appui en matière d'asile (BEAA) et les agences concernées, et dans le cadre de la législation et de la jurisprudence applicables au niveau de l'Union, la Commission devrait tenir compte des enjeux spécifiques liés à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre lors de la mise en œuvre et du suivi de la législation relative à l'asile, et notamment de la directive 2013/32/UE relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale et de la directive 2011/95/UE concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d'une protection internationale;

ii)        de concert avec les agences concernées, la Commission et les États membres devraient veiller à ce que les professionnels de l'asile, y compris les personnes en charge des entretiens et les interprètes, reçoivent une formation adéquate – y compris dans le cadre des formations existantes – pour gérer les enjeux spécifiques aux personnes LGBTI;

iii)       de concert avec le BEAA et le SEAE, la Commission et les États membres devraient veiller à ce que la situation juridique et sociale des personnes LGBTI dans leur pays d'origine soit systématiquement consignée et que ces informations soient mises à la disposition des personnes chargées de statuer sur les demandes d'asile, dans le cadre des informations sur le pays d'origine;

L.  Élargissement et action extérieure

i)         la Commission devrait continuer de procéder au suivi des enjeux liés à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre dans les pays en voie d'adhésion;

ii)        la Commission, le Service européen pour l'action extérieure, le représentant spécial de l'UE pour les droits de l'homme et les États membres devraient systématiquement utiliser les lignes directrices du Conseil pour protéger et promouvoir tous les droits des personnes LGBTI en tant qu'êtres humains, et maintenir l'unité de leur position dans la réponse apportée aux violations desdits droits;

iii)       la Commission et le Service européen pour l'action extérieure devraient fournir au Bureau européen d'appui en matière d'asile et aux États membres les informations obtenues auprès des délégations de l'Union sur la situation des personnes LGBTI dans les pays tiers;

5.   souligne que cette politique globale doit respecter les compétences de l'Union européenne et de ses agences ainsi que des États membres;

o

o   o

6.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil de l'Union européenne, à la Commission européenne, au Service européen pour l'action extérieure, aux gouvernements et parlements des États membres, à toutes les agences citées dans la présente résolution et au Conseil de l'Europe.

  • [1]  JO C 241 E du 8.10.2009, p. 68.
  • [2]  Textes adoptés de cette date, P7_TA(2012)0222.
  • [3]  Textes adoptés de cette date, P7_TA(2012)0500.
  • [4]  Textes adoptés de cette date, P7_TA(2013)0090.
  • [5]  Autriche, Belgique, Croatie, Danemark, Finlande, France, Italie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Suède.

EXPOSÉ DES MOTIFS

L'Union européenne est tenue de combattre toute discrimination dans la définition et la mise en œuvre de ses actions (article 10 du traité FUE). Elle s'acquitte de cette obligation au travers de politiques globales visant à lutter contre les discriminations fondées sur le sexe (stratégie pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2010-2015)), le handicap (stratégie européenne 2010-2020 en faveur des personnes handicapées), et visant les Roms (cadre de l'UE pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020).

Le Parlement européen est d'avis qu'un instrument du même type est nécessaire pour combattre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre. Depuis janvier 2011, il a formulé cette demande à dix reprises dans diverses résolutions, appelant la Commission européenne à établir une feuille de route contre l'homophobie et la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre. Le présent rapport définit un projet de canevas pour une telle politique globale.

De solides arguments juridiques, politiques et sociétaux plaident en faveur de la mise en place de cette feuille de route. Sur le plan juridique, l'Union européenne est tenue de combattre toute discrimination dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions (article 10 du traité FUE), et interdit toute discrimination quelle qu'elle soit (article 21 de la charte des droits fondamentaux). Cette obligation juridique est déjà traduite dans des politiques globales dans les domaines de l'égalité des genres, du handicap et de l'intégration des Roms; elle doit maintenant être mise en œuvre en ce qui concerne l'orientation sexuelle et l'identité de genre.

Sur le plan politique, cette idée recueille un soutien au sein du Parlement européen ainsi que dans les États membres, onze d'entre eux ayant officiellement appelé à l'établissement d'une telle feuille de route en mai 2013. La Commission européenne a répondu que des actions étaient déjà mises en œuvre pour garantir l'égalité quelle que soit l'orientation sexuelle et l'identité de genre, mais ces actions sont moins exhaustives que l'approche globale dont d'autres groupes bénéficient. Par ailleurs, les États membres sont de plus en plus nombreux à adopter des plans similaires au niveau national (Belgique, France, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni; discussions en cours en Lettonie), dans le cadre de plans nationaux plus généraux en matière d'égalité (Croatie, Portugal), ou au niveau régional (Allemagne, Belgique, Espagne).

Enfin, d'un point de vue sociétal, les données récoltées illustrent bien la nécessité d'une feuille de route. L'enquête sur les personnes LGBT publiée par l'Agence des droits fondamentaux en 2013 indique que 47% d'entre elles se sont senties victimes de discrimination ou de harcèlement au cours de l'année écoulée, les lesbiennes (57%) et les personnes LGBT les plus jeunes (57%) et les plus pauvres (52%) étant les plus susceptibles de subir des discriminations; 26% d'entre elles ont été agressées ou menacées de violence en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre (35% parmi les personnes transgenres); seules 10% d'entre elles se sont senties suffisamment en confiance pour signaler un cas de discrimination à la police, et seules 22% d'entre elles ont signalé des cas de violence ou de harcèlement; 32% font l'objet de discriminations en ce qui concerne le logement, l'éducation, ou l'accès à la santé, aux biens et aux services; et 20% sont victimes de discriminations dans le cadre professionnel (29% parmi les personnes transgenres).

AVIS de la commission des droits de la femme et de l'égalité des genres (6.12.2013)

à l'intention de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures

sur la Feuille de route de l'Union européenne contre l'homophobie et les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre
(2013/2183(INI))

Rapporteure pour avis: Minodora Cliveti

SUGGESTIONS

La commission des droits de la femme et de l'égalité des genres invite la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures, compétente au fond, à incorporer dans la proposition de résolution qu'elle adoptera les suggestions suivantes:

A. considérant que, conformément à la jurisprudence, la discrimination envers les personnes transgenres est définie dans le cadre de la législation sur l'égalité entre les sexes, mais que ces personnes sont considérées comme formant un mouvement social, et qu'en ce qui concerne les organisations de la société civile, elles relèvent du champ d'application du mouvement LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués) plutôt que du mouvement de l'égalité entre les sexes;

B.  considérant que les personnes transgenres sont confrontées à des discriminations graves fondées sur le sexe sur le marché du travail et ailleurs, alors que, dans de nombreux États membres, les organisations œuvrant dans le domaine de l'égalité entre les hommes et les femmes ou se consacrant à la lutte contre la discrimination sexuelle ou au traitement des plaintes individuelles de discrimination ne sont pas accessibles ou ne possèdent pas les informations et les compétences nécessaires pour servir leurs intérêts ou pour traiter leurs plaintes, et que les organisations impliquées dans la chaîne judiciaire ne sont pas correctement équipées et informées pour traiter les affaires de discrimination envers les personnes transgenres;

1.  est préoccupé par le fait que les droits et intérêts des personnes transgenres ne sont pas correctement défendus par les organisations de la société civile ou par les organismes chargés de l'égalité des chances entre les sexes; invite les États membres à confier expressément des missions de lutte contre la discrimination des personnes transgenres à des organisations de la société civile et à des organismes chargés de l'égalité des chances financés par les fonds publics et à veiller à ce que les organisations associées à la chaîne judiciaire soient correctement équipées et informées pour traiter les plaintes de discrimination sexuelle envers les personnes transgenres;

2.  invite la Commission et les commissions du Parlement européen à intégrer les questions relatives aux personnes transgenres dans leur travail, par exemple dans le domaine des droits civils, des soins de santé, de l'éducation et de l'emploi;

3.  souligne qu'il est nécessaire de respecter et de garantir le principe de l'égalité entre les personnes, indépendamment du sexe, de l'identité de genre et de l'expression du genre, de la race ou de l'orientation sexuelle;

4.  met l'accent sur l'invisibilité des personnes intersexuées dans la législation européenne et les législations nationales et sur le manque de connaissances et de recherche dans ce domaine; invite, à cet égard et en particulier en ce qui concerne l'identité de genre, à intensifier les efforts relatifs à la législation en matière d'égalité;

5.  invite les États membres à veiller à ce que les populations LGBTI soient protégées contre les discours haineux et les violences homophobes, et que les partenaires de même sexe jouissent du respect, de la dignité et de la protection qui prévalent pour le reste de la société; insiste sur la perception souvent négative du public à l'égard de ces personnes et sur le rôle des médias dans l'élimination de cette perception; souligne qu'il faut mener des campagnes de sensibilisation au niveau national et européen au sujet des droits des populations LGBTI;

6.  souligne que les lesbiennes souffrent souvent d'une double discrimination (parce qu'elles sont femmes et qu'elles sont lesbiennes) et que les mesures visant à soutenir l'égalité des personnes LGBTI doivent aller de pair avec des mesures visant l'égalité des femmes et des filles afin que les lesbiennes puissent obtenir l'égalité, la non-discrimination et une vie exempte de violences;

7.  insiste sur le besoin de promouvoir des politiques et des pratiques de lutte contre les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre, et de promouvoir des politiques visant à favoriser la diversité sur le lieu de travail, ainsi que des initiatives qui encouragent la pleine intégration et le respect entier des personnes LGBTI dans le milieu professionnel;

8.  souligne que les choix en matière de procréation et les services de fertilité devraient être accessibles aux personnes LGBT dans un cadre non discriminatoire;

9.  souligne que l'éducation sexuelle doit inclure des informations non discriminatoires et porter un regard favorable sur les personnes LGBTI, de manière à soutenir et à protéger efficacement les droits des jeunes LGBTI;

10. affirme qu'il est nécessaire, dans le cadre de l'éducation et de la formation des professionnels de la santé et des affaires sociales, d'insister, en concevant des cours spécifiques dans les programmes d'enseignement concernés, sur l'importance du respect de la dignité des populations LGBTI, ainsi que de leurs besoins et de leurs choix spécifiques en matière de santé;

11. invite les États membres à prendre des mesures appropriées pour garantir que les personnes transgenres en particulier bénéficient d'un accès réel à des services appropriés de changement de sexe, notamment une expertise psychologique, endocrinologique et chirurgicale dans le domaine des soins de santé des personnes transgenres, sans être soumises à des exigences déraisonnables;

12. condamne la stérilisation forcée des personnes transgenres qui existe encore dans certains États membres et appelle à mettre un terme sans délai à cette violation des droits de l'homme;

13. invite les États membres à prendre des mesures dans le but de promouvoir, dans les écoles, le respect et l'intégration des personnes LGBTI et de favoriser un enseignement objectif des questions concernant l'orientation sexuelle, l'identité de genre et l'expression du genre dans les écoles et les autres structures éducatives; exprime ses préoccupations quant au fait que les jeunes LGBTI et les personnes perçues comme LGBTI risquent davantage de faire l'objet de harcèlement; souligne la nécessité de mettre en place un environnement sûr pour tous les jeunes, quels que soient leur genre, leur race ou leur orientation sexuelle;

14. souligne qu'il est important de reconnaître les droits civils des personnes LGBTI sans discrimination fondée sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre; invite les États membres à reconnaître, conformément à la réglementation européenne, toutes les formes de mariage, de partenariat ou de parentalité conclues dans un autre pays par les personnes qui viennent résider ou travailler dans le pays concerné et prie la Commission de prendre des mesures à l'encontre des États membres qui ne respectent pas ces règles;

15. invite les États membres à réfléchir à des moyens d'adapter leur droit de la famille aux changements que connaissent actuellement les structures et les modèles familiaux, et à inclure la possibilité que les enfants aient plus de deux parents (tuteurs légaux), car cela ouvrirait la voie à une meilleure reconnaissance des familles arc-en-ciel et des familles LGBT, tout comme des familles recomposées;

16. demande aux États membres de garantir l'accès des femmes célibataires et des femmes lesbiennes aux traitements de fertilité et aux traitements de procréation médicalement assistée;

17. insiste sur le besoin de respecter en pratique le droit à la liberté d'expression en préservant la possibilité de recevoir et de diffuser des informations sur les questions relatives à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre par le biais de toutes les formes d'expression telles que la presse, les publications, les déclarations orales et écrites, les arts et les médias; souligne qu'il est nécessaire de respecter la liberté de réunion pacifique et d'association de toutes les personnes LGBTI; relève que les autorités locales et régionales devraient par conséquent faciliter les efforts des associations LGBTI pour l'organisation d'événements tels que les défilés de type "Pride" car ces manifestations sensibilisent le public aux questions relatives aux LGBTI et permettent aux personnes LGBTI de s'exprimer;

18. insiste sur le manque significatif de données et de recherche sur les problèmes rencontrés par les personnes LGBTI, l'ampleur des problèmes et les mesures prises pour les résoudre; signale que ces informations sont essentielles pour élaborer une politique adaptée et établir des priorités concernant les mesures à mener, et invite l'Union européenne et les États membres à remédier à ces problèmes et à agir en conséquence;

19. encourage les États membres à faire en sorte de recueillir et d'analyser des données quantitatives pertinentes sous la forme d'enquêtes régulières concernant la prévalence des abus et la victimisation des personnes LGBTI;

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l’adoption

5.12.2013

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

11

4

0

Membres présents au moment du vote final

Edit Bauer, Marije Cornelissen, Edite Estrela, Mikael Gustafsson, Mary Honeyball, Lívia Járóka, Astrid Lulling, Elisabeth Morin-Chartier, Raül Romeva i Rueda, Marc Tarabella, Britta Thomsen, Marina Yannakoudakis, Inês Cristina Zuber

Suppléantes présentes au moment du vote final

Izaskun Bilbao Barandica, Minodora Cliveti

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l’adoption

17.12.2013

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

40

2

6

Membres présents au moment du vote final

Jan Philipp Albrecht, Edit Bauer, Arkadiusz Tomasz Bratkowski, Philip Claeys, Carlos Coelho, Agustín Díaz de Mera García Consuegra, Ioan Enciu, Tanja Fajon, Monika Flašíková Beňová, Kinga Gál, Kinga Göncz, Sylvie Guillaume, Anna Hedh, Salvatore Iacolino, Lívia Járóka, Teresa Jiménez-Becerril Barrio, Timothy Kirkhope, Baroness Sarah Ludford, Monica Luisa Macovei, Svetoslav Hristov Malinov, Véronique Mathieu Houillon, Anthea McIntyre, Nuno Melo, Roberta Metsola, Claude Moraes, Georgios Papanikolaou, Carmen Romero López, Judith Sargentini, Birgit Sippel, Csaba Sógor, Renate Sommer, Nils Torvalds, Wim van de Camp, Axel Voss, Renate Weber, Auke Zijlstra

Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final

Cornelis de Jong, Mariya Gabriel, Ana Gomes, Wolfgang Kreissl-Dörfler, Jean Lambert, Ulrike Lunacek, Jan Mulder, Raül Romeva i Rueda, Salvador Sedó i Alabart, Marie-Christine Vergiat, Janusz Wojciechowski

Suppléant(s) (art. 187, par. 2) présent(s) au moment du vote final

Leonardo Domenici