Proposition de résolution - B7-0295/2011Proposition de résolution
B7-0295/2011

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la résistance aux antibiotiques

13.4.2011

déposée à la suite de la question avec demande de réponse orale B7‑000/2011
conformément à l'article 115, paragraphe 5, du règlement

Paolo De Castro au nom de la commission de l'agriculture et du développement rural

Procédure : 2011/2680(RSP)
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B7-0295/2011

B7‑0295/2011

Résolution du Parlement européen sur la résistance aux antibiotiques

Le Parlement européen,

–   vu sa résolution du 22 mai 2008 sur une nouvelle stratégie de santé animale pour l'Union européenne (2007-2013) (P6_TA(2008)0235),

–   vu sa résolution du 5 mai 2010 sur l'évaluation et le bilan du plan d'action communautaire pour le bien-être des animaux au cours de la période 2006-2010,

–   vu la directive 2003/99/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 novembre 2003, sur la surveillance des zoonoses et des agents zoonotiques, et le règlement (CE) n° 2160/2003 du Parlement européen et du Conseil, du 17 novembre 2003, sur le contrôle des salmonelles et d'autres agents zoonotiques spécifiques présents dans la chaîne alimentaire,

–   vu l'avis conjoint sur la résistance aux antimicrobiens (RAM) centré sur les infections zoonotiques, du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (CEPCM), de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), de l'Agence européenne des médicaments (EMEA) et du Comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux (CSRSEN), journal 2009 de l'EFSA; 7(11):1372,

–   vu la question orale (O-000048/2011 – B7-000/2011) du 1er mars 2011 sur la RAM,

–   vu le rapport de l'OMC sur "les conséquences médicales de l'utilisation d'antimicrobiens dans l'alimentation animale",

–   vu la résolution du Parlement européen sur la proposition de recommandation du Conseil relative à l'utilisation prudente des agents antimicrobiens en médecine humaine (COM (2001) 333 - C5-0411/2001 - 2001/2164(COS),

–   vu l'article 115, paragraphe 5, et l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,

A. considérant que la résistance aux antimicrobiens (RAM) constitue un problème pour le secteur de l'élevage européen au niveau de la santé animale, notamment lorsque le traitement échoue; considérant que des lignes directrices ont été établies dans plusieurs États membres pour une utilisation appropriée des antimicrobiens, ce qui a entraîné une diminution du recours à des antimicrobiens,

B.  considérant que le secteur de l'élevage (produits laitiers, viandes de bœuf, de porc et de volaille, œufs, laits de brebis et de chèvre et production de viande) joue un rôle de premier plan dans l'économie de l'agriculture européenne,

C. considérant que l'objectif premier des agriculteurs est de préserver la santé et la productivité de leur élevage par de bonnes pratiques agricoles (hygiène, alimentation adéquate, élevage approprié, gestion responsable de la santé animale),

D. considérant que, malgré les mesures prises par les agriculteurs, il peut arriver que les animaux tombent malades et nécessitent un traitement,

E.  considérant que les antimicrobiens, s'ils sont utilisés correctement, constituent un instrument utile pour aider les agriculteurs à préserver la santé et la productivité de leur élevage et pour assurer le bien-être des animaux,

F.  considérant que, à l'avenir, le secteur de l'élevage européen doit pouvoir compter sur la sûreté et l'efficacité des traitements antimicrobiens,

G. considérant que l'administration d'antimicrobiens aux animaux ainsi qu'à l'homme doit tenir compte de la menace potentielle que représente la résistance aux antimicrobiens (RAM),

H. considérant qu'un nombre important d'antimicrobiens sont prescrits pour être utilisés sur des animaux, que la RAM touche aussi bien l'homme que les animaux, qu'elle peut être transmise de l'homme à l'animal et inversement et qu'il s'agit d'une question transversale qui demande une approche coordonnée à l'échelon de l'Union,

I.   considérant que la résistance aux antimicrobiens chez l'homme est souvent provoquée par un dosage d'antibiotiques inapproprié, par des traitements inadéquats et par une exposition constante de pathogènes à des agents antimicrobiens dans les hôpitaux,

J.   considérant que la transmission de bactéries pathogènes porteuses de gènes de RAM représente une menace particulière pour des personnes telles que les agriculteurs et les travailleurs agricoles, qui sont quotidiennement en contact avec des animaux,

K. considérant que, dans une densité élevée, les animaux ont plus de risques de contracter une maladie; considérant qu'une utilisation inappropriée d'antimicrobiens sur des animaux peut être considérée comme un facteur de risque pour l'apparition de la résistance, ce qui aurait des conséquences pour la santé publique et la santé animale,

L.  considérant que toute la lumière n'a pas encore été faite sur le rôle précis des animaux, de l'alimentation d'origine animale et de la bactérie résistante concernés par l'élevage d'animaux, dans la transmission à l'homme de la RAM, ni sur les risques potentiels qui en résultent,

M. considérant que l'utilisation d'antimicrobiens au niveau sous-thérapeutique pour des périodes prolongées augmente généralement le risque que la RAM se développe et/ou s'intensifie et se transmette, contrairement aux traitements thérapeutiques,

N. considérant que l'utilisation d'antimicrobiens au niveau sous-thérapeutique est interdite dans l'Union européenne,

O. considérant qu'une utilisation réduite d'antimicrobiens entraînerait, à long terme, une diminution des coûts pour les agriculteurs et pour la société dans son ensemble, à condition que l'efficacité des antimicrobiens demeure inchangée,

P.  considérant qu'une utilisation excessive et inappropriée de biocides peut aussi contribuer à la RAM,

Q. considérant que la décontamination chimique des carcasses d'animaux abattus, qui est illégale en Europe, peut également contribuer à la RAM,

R.  considérant que l'alimentation peut apparaître de plus en plus comme un vecteur de transmission de la RAM,

S.  considérant que les animaux qui ne sont pas producteurs de denrées alimentaires peuvent également servir d'hôtes et faciliter la transmission de la RAM, ce qui rappelle l'usage hors notice de médicaments antimicrobiens destinés à un usage médical chez l'homme,

T.  considérant qu'il ne semble pas envisageable pour un élevage moderne de ne pas utiliser d'antimicrobiens pour traiter les maladies, et qu'une bonne santé animale et une utilisation rationnelle et responsable d'antimicrobiens contribueraient à prévenir la transmission de la RAM,

U. considérant que, chez les animaux, la résistance aux antimicrobiens diffère d'une espèce à l'autre et d'un type d'élevage à l'autre,

V. considérant que le Parlement européen, dans sa résolution du 5 mai 2010 sur l'évaluation et le bilan du plan d'action communautaire pour le bien-être animal au cours de la période 2006-2010, a souligné le lien entre la santé animale et la santé publique et invité instamment la Commission et les États membres à faire face, de manière responsable, au problème croissant de la RAM chez les animaux,

W. considérant notamment que le Parlement a demandé à la Commission de recueillir et d'analyser des données sur l'utilisation de médicaments pour les animaux, y compris les antimicrobiens, pour veiller à ce que ces produits soient utilisés efficacement,

Collecte commune de données

1.  salue les efforts déployés par la Commission et par ses agences en ce qui concerne la collecte commune de données dans ce domaine, et notamment l'initiative prise en 2009 afin de créer l'organe européen de surveillance de la consommation d'antimicrobiens en médecine vétérinaire (ESVAC); déplore que les États n'aient pas tous adhéré au réseau ESVAC et appelle d'autres pays à faire de même; demande à la Commission d'allouer suffisamment de ressources financières au réseau ESVAC afin qu'il puisse mener à bien son travail; demande à la Commission de définir, sans délai, un cadre juridique ad hoc pour permettre aux États membres d'effectuer une collecte de données efficace;

2.  demande à la Commission de veiller à ce que les données soient collectées sur une base harmonisée et comparable, y compris dans le cadre d'activités menées dans des pays tiers tels que les États-Unis;

3.  reconnaît que ce serait une première étape importante de procéder à une collecte et à une analyse approfondie des données comparables relatives à la vente de médicaments vétérinaires, ainsi qu'à l'utilisation qui en est faite sur les animaux; souligne la nécessité de savoir en détail quand, comment et sur quels animaux les antimicrobiens sont en fait utilisés aujourd'hui, sans engendrer de charges financières ou administratives supplémentaires pour les agriculteurs ou autres éleveurs;

4.  souligne que les données ne doivent pas seulement être collectées, mais également analysées correctement et les conclusions mises en pratique, et que les mesures nécessaires doivent être prises tant au niveau de l'Union européenne qu'au niveau des États membres, tout en prenant en considération les différences entre les espèces animales et les types d'élevage;

5.  reconnaît que ces données doivent être replacées dans leur contexte en raison des différences qui existent au niveau des pratiques et de l'intensité de l'agriculture d'un État membre à l'autre;

Recherche

6.  demande que soient effectuées davantage de recherches sur les nouveaux antimicrobiens ainsi que sur des alternatives telles que la vaccination, la biosécurité et l'élevage pour la résistance; plaide également en faveur de stratégies scientifiquement fondées afin d'éviter et de contrôler les maladies infectieuses chez les animaux; souligne, à cet égard, l'importance des programmes-cadres de recherche de l'Union; souligne, dans ce contexte, qu'il importe de mettre au point des systèmes adéquats pour l'élevage des animaux, qui permettent de réduire la nécessité de prescrire les antibiotiques;

7.  demande que les ressources propres aux médecines humaine et vétérinaire utilisées dans le cadre de la recherche soient mieux coordonnées par la création d'un réseau d'instituts de recherche déjà existants;

8.  demande à ce que soient effectuées des recherches sur le rôle des animaux, de l'alimentation d'origine animale, des systèmes de production durables, au niveau de critères tels que la robustesse des races, la longévité des animaux, une meilleure gestion des troupeaux, une prévention des maladies accrue, l'exercice et l'accès à un espace en plein air, ainsi que des densités de stockage moindres et d'autres conditions permettant aux animaux de satisfaire leurs besoins biologiques, ainsi que sur le rôle de la bactérie résistante observée dans l'élevage d'animaux dans la transmission à l'homme de la RAM, ainsi que sur les risques potentiels en résultant;

Suivi et surveillance

9.  demande à l'ensemble des États membres d'effectuer une surveillance et un suivi systématiques de la RAM à la fois chez les animaux producteurs de denrées alimentaires et chez les animaux de compagnie, sans engendrer de charges financières ou administratives supplémentaires pour les agriculteurs, les autres éleveurs ou les vétérinaires; souligne la nécessité de rendre facilement accessibles, depuis un seul point d'accès, les données harmonisées, y compris les informations sur les facteurs de risque; souligne le besoin de disposer de rapports annuels rédigés par les États membres et contenant des données comparables à l'échelle européenne;

10. demande qu'à l'avenir les budgets alloués à l'Office alimentaire et vétérinaire (OAV) et à l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) reflètent le besoin croissant d'effectuer des inspections et des analyses plus approfondies dans ce domaine;

11. demande à l'ensemble des parties prenantes de reconnaître leur responsabilité dans la prévention du développement et de la transmission de la RAM, en fonction de leur propre domaine d'activité tel que la médecine vétérinaire et l'élevage d'animaux;

12. suggère que soit effectué, sur la base de conseils scientifiques, un suivi harmonisé de la RAM par des bactéries indicatrices telles que l'E.coli et l'E.enterococci;

Maintien de l'efficacité des antimicrobiens

13. souligne que l'objectif ultime est que les antimicrobiens demeurent un outil efficace pour combattre la maladie, tant chez les animaux que chez l'homme, tout en limitant au strict nécessaire le recours à des antimicrobiens;

14. demande une utilisation prudente et responsable des antimicrobiens sur les animaux, ainsi qu'un renforcement de l'information, pour les vétérinaires et les agriculteurs, visant à réduire le développement de la RAM; plaide en faveur d'un échange des bonnes pratiques, telles que l'adoption de lignes directrices pour une utilisation appropriée des antimicrobiens, afin de contribuer significativement à la lutte contre le développement de la RAM;

15. demande que soient définies des bonnes pratiques pour l'élevage d'animaux en vue de diminuer les risques d'apparition de RAM; souligne que ces pratiques doivent s'appliquer en particulier aux jeunes animaux qui sont amenés en groupes en provenance de différents éleveurs, ce qui augmente le risque d'apparition de maladies contagieuses;

16. demande aux États membres et à l'Office alimentaire et vétérinaire d'assurer un meilleur suivi de la mise en œuvre de l'interdiction de 2006 sur l'utilisation d'antimicrobiens en tant qu'anabolisants;

17. demande à la Commission d'œuvrer en faveur d'une interdiction à l'échelon international sur l'utilisation d'antimicrobiens en tant qu'anabolisants dans l'alimentation animale et d'accorder une importance accrue à cette question dans ses négociations bilatérales avec des pays tiers tels que les États-Unis;

18. demande à la Commission d'évaluer et de suivre la mise en œuvre et l'application, par les États membres, de la législation européenne en matière d'antimicrobiens;

19. demande à la Commission d'élaborer un vaste plan d'action pluriannuel de lutte contre la RAM dans le cadre de la stratégie de l'Union en matière de santé animale; estime qu'un tel plan d'action devrait inclure tous les animaux relevant de la stratégie de l'Union sur le bien-être des animaux, y compris les animaux de compagnie, et mettre l'accent sur le lien logique entre la santé animale et l'utilisation d'antimicrobiens, ainsi que sur le lien entre la santé animale et la santé humaine;

20. est d'avis que ce plan d'action doit comporter une révision en détail des différentes utilisations prophylactiques des antimicrobiens pour mettre fin à la controverse et définir les notions de prophylaxie régulière et de prophylaxie acceptable;

21. demande à la Commission européenne, dans la mesure où les protéines animales transformées issues d'animaux non-ruminants comportent des avantages en termes de santé et d'alimentation, ce qui peut apporter une contribution non négligeable aux régimes équilibrés d'animaux monogastriques, y compris les poissons d'élevage, et contribuer parallèlement à réduire l'utilisation d'antimicrobiens, de remplacer les restrictions actuelles par des conditions susceptibles d'assurer un niveau de sécurité alimentaire maximal;

22. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.