Proposition de résolution commune - RC-B7-0168/2013Proposition de résolution commune
RC-B7-0168/2013

PROPOSITION DE RÉSOLUTION COMMUNE sur Guantanamo: grève de la faim de plusieurs détenus

17.4.2013 - (2013/2601(RSP))

déposée conformément à l'article 122, paragraphe 5, et à l'article 110, paragraphe 4, du règlement
en remplacement des propositions de résolution déposées par les groupes:
Verts/ALE (B7‑0168/2013)
S&D (B7‑0181/2013)
ALDE (B7‑0182/2013)
GUE/NGL (B7‑0183/2013)

Véronique De Keyser, Ana Gomes, Joanna Senyszyn, María Muñiz De Urquiza, Pino Arlacchi, Libor Rouček, Liisa Jaakonsaari, Richard Howitt au nom du groupe S&D
Sophia in ‘t Veld, Marietje Schaake, Alexander Graf Lambsdorff, Ramon Tremosa i Balcells, Marielle de Sarnez, Graham Watson, Sonia Alfano, Sarah Ludford, Kristiina Ojuland, Izaskun Bilbao Barandica, Robert Rochefort, Anneli Jäätteenmäki, Alexandra Thein au nom du groupe ALDE
Barbara Lochbihler, Hélène Flautre, Rui Tavares, Raül Romeva i Rueda, Carl Schlyter, Malika Benarab-Attou, Mark Demesmaeker, Nikos Chrysogelos, Catherine Grèze, Karim Zéribi, Yves Cochet au nom du groupe Verts/ALE
Marie-Christine Vergiat au nom du groupe GUE/NGL
Bernd Posselt, Laima Liucija Andrikienė


Procédure : 2013/2601(RSP)
Cycle de vie en séance
Cycle relatif au document :  
RC-B7-0168/2013
Textes déposés :
RC-B7-0168/2013
Votes :
Textes adoptés :

Résolution du Parlement européen sur Guantanamo: grève de la faim de plusieurs détenus

(2013/2601(RSP))

Le Parlement européen,

–   vu les traités internationaux et les normes internationales tant sur les droits de l'homme que sur les libertés fondamentales, notamment l'interdiction absolue de la torture, des mauvais traitements, des disparitions forcées et des exécutions sommaires, ainsi que le droit de ne pas être emprisonné sans procès et le droit à un procès équitable,

–   vu ses résolutions antérieures sur Guantanamo et notamment celle du 11 septembre 2012 sur des allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans des pays européens: suivi du rapport de la commission TDIP du PE[1], celle du 18 avril 2012 sur le rapport annuel sur les droits de l'homme dans le monde en 2010 et la politique de l'Union en la matière, notamment les implications pour la politique stratégique de l'Union en matière de droits de l'homme[2], et celle du 9 juin 2011 sur Guantanamo: décision imminente en matière de peine de mort[3],

–   vu les décrets du Président Obama du 22 janvier 2009 ordonnant la fermeture du centre de Guantanamo d'ici au 22 janvier 2010,

–   vu la déclaration conjointe du 15 juin 2009 de l'Union européenne et de ses États membres, d'une part, et des États‑Unis d'Amérique, d'autre part, concernant la fermeture du centre de détention de Guantanamo, ainsi que les conclusions du Conseil "Justice et affaires intérieures" du 4 juin 2009 sur le mécanisme d'échange d'informations,

–   vu la déclaration du 5 avril 2013 de la Haut commissaire des Nations unies aux droits de l'homme,

–   vu la déclaration du 11 avril 2013 dans laquelle le président du Comité international de la Croix rouge (CICR), Peter Maurer, a manifesté son opposition à l'alimentation de force des prisonniers participant à une grève de la faim collective dans le camp de Guantanamo et invité instamment le Président Obama à œuvrer davantage pour trouver une réponse à la situation juridique intenable des personnes qui y sont détenues,

–   vu la lettre ouverte cosignée le 11 avril 2013 par 26 ONG internationales de défense des droits de l'homme invitant instamment le président américain à tenir la promesse qu'il avait faite en 2009 de fermer le centre de Guantanamo,

–   vu l'article 122, paragraphe 5, et l'article 110, paragraphe 4, de son règlement,

A. considérant qu'un grand nombre de détenus du centre de Guantanamo ont entamé, le 6 février 2013, une grève de la faim visant à protester contre leurs conditions de détention et la poursuite de leur emprisonnement à Guantanamo; que, selon les autorités militaires, 13 détenus sont alimentés de force et que trois ont été hospitalisés;

B.  considérant que, onze ans près l'ouverture du centre, 86 des 166 détenus ont été déclarés libérables mais demeurent emprisonnés pour une durée indéterminée et que seules six personnes ont été mises en accusation;

C. considérant qu'une demande en référé a été déposée le 26 mars 2013 auprès du tribunal du District de Columbia en arguant du fait que les gardiens de Guantanamo avaient refusé de donner de l'eau potable aux détenus ainsi que suffisamment de vêtements pour saper le mouvement de grève de la faim;

D. considérant que la déclaration conjointe UE–États-Unis du 15 juin 2009 prend acte de la ferme volonté du Président Obama d'ordonner la fermeture du centre de détention de Guantanamo d'ici au 22 janvier 2010; que le service chargé de fermer Guantanamo a toutefois été démantelé en janvier 2013 et que le Congrès bloque désormais tout effort du gouvernement Obama de fermer Guantanamo; que le gouvernement américain a déclaré toujours être déterminé à fermer Guantanamo;

E.  considérant que la Haut commissaire des Nations unies aux droits de l'homme a, le 5 avril 2013, déclaré en substance que l'emprisonnement continu à caractère indéterminé de nombreux détenus s'apparente à une détention arbitraire et qu'il constitue une violation manifeste des engagements (des États-Unis) ainsi que des lois et normes internationales qu'on est tenu de respecter, et que le centre de Guantanamo devrait être fermé;

F.  considérant que de violents affrontements accompagnés de tirs non létaux et d'utilisations d'armes improvisées ont eu lieu le 13 avril 2013, peu de temps après la visite d'une délégation du comité international de la Croix rouge, entre les gardiens du centre et des détenus après la décision de transférer certains prisonniers du camp 6 vers le camp 5 où les conditions d'isolement sont plus sévères;

G. considérant que les avocats de la défense et le CICR font valoir que la grève de la faim s'explique essentiellement par la détresse des détenus face à l'absence de toute perspective de libération, notamment après la signature par le Président Obama de la loi sur la défense nationale ("National Defence Authorization Act" – NDAA) qui contient des dispositions maintenant le centre de Guantanamo dans un futur proche;

H. considérant que la loi NDAA a virtuellement réduit à néant les chances des détenus de rentrer chez eux, dès lors qu'elle interdit leur retour dans un pays où "une menace est susceptible d'affecter de manière notable" la possibilité du gouvernement d'"exercer un contrôle" sur les personnes rapatriées;

I.   considérant que, dans le cas de cinq détenus présumés de grande importance dont l'instruction est déjà en cours, la confidentialité de la défense est totalement remise en cause, dès lors que des documents et des milliers de courriels ont disparu des ordinateurs et que des appareils d'écoute ont été maquillés en détecteurs de fumée; que, en conséquence, le procès a été reporté sine die par le juge en charge du dossier; que l'avocat principal de la défense a ordonné aux autres avocats de ne plus utiliser d'ordinateurs pour leurs travaux confidentiels frappés du secret;

J.   considérant que les États-Unis ferment la seule desserte civile de Guantanamo par avion et que, désormais, le seul vol possible est un vol militaire à bord duquel les particuliers ne peuvent embarquer que s'ils ont obtenu l'autorisation du Pentagone, restreignant par là même l'accès de la presse, des avocats et des militants des droits de l'homme;

1.  prend acte des étroites relations transatlantiques qui se fondent sur des valeurs fondamentales partagées et sur le respect des droits de l'homme essentiels, universels et non négociables tels que le droit à un procès équitable et l'interdiction de la détention arbitraire; se félicite de la coopération transatlantique nourrie dans un large éventail de questions internationales ayant trait aux droits de l'homme;

2.  s'inquiète de la santé des détenus en grève de la faim et de celle des prisonniers alimentés de force; est fortement préoccupé par l'état mental et physique des détenus dont un certain nombre a été victime d'actes de torture ou de traitements inhumains et dégradants;

3.  réitère son appel aux autorités américaines pour qu'elles ferment immédiatement le camp de détention de Guantanamo et interdisent en toutes circonstances les actes de tortures et les mauvais traitements; demande que les détenus déclarés libérables le soient, qu'ils soient transférés dans leurs pays d'origine ou dans d'autres pays pour s'y installer, et que les détenus restants soient déférés devant une juridiction civile et bénéficient d'un procès équitable;

4.  demandent aux autorités américaines de veiller à ce que les détenus fassent l'objet d'un examen et de soins médicaux indépendants, et rejoint la position du CICR qui voit dans l'alimentation de force une violation des libertés individuelles fondamentales; demande aux autorités américaines de faire en sorte que les avocats des détenus soient pleinement informés de l'évolution de l'état de santé de leurs clients et de garantir si nécessaire l'accès des experts du Conseil des droits de l'hommes des Nations unies, des ONG et de la presse;

5.  fait sienne les déclarations de la Haut commissaire des Nations unies aux droits de l'homme qui rappelle que, même si le droit international commande que les actes de terrorisme, les crimes ou les atrocités ne demeurent pas impunis, les droits de l'homme sont universels et s'appliquent à l'ensemble des individus, notamment à ceux suspectés d'avoir commis les crimes les plus graves, et que les personnes privées de liberté doivent être traitées avec humanité dans le respect de leur dignité intrinsèque;

6.  souligne que la poursuite de la détention de ces personnes, sans accusation ou procès, est contraire aux principes fondamentaux de justice; fait observer que la détention arbitraire est manifestement contraire au droit international et qu'elle remet sérieusement en cause le rôle de défenseur des droits de l'homme dont se prévalent les État‑Unis;

7.  est profondément préoccupé par le fait que la loi NDAA continue ainsi de faire obstacle à la fermeture du centre de détention ainsi qu'au procès, s'il y a lieu, des détenus devant des juridictions civiles ou à leur remise en liberté; estime que les détenus de Guantanamo qui ont été mis en accusation doivent comparaître devant une juridiction civile, dès lors que les commissions militaires ne satisfont pas notamment aux normes internationales de procès équitable;

8.  invite instamment les États‑Unis à réexaminer la fermeture de son seul vol civil desservant le centre de Guantanamo, ce qui en limiterait l'accès à la presse et aux acteurs de la société civile;

9.  rappelle que les États membres sont disposés à aider les États-Unis à fermer Guantanamo et demande à la vice‑présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité de coordonner une action conjointe des États membres visant, d'une part, à inviter instamment le président américain à agir et, d'autre part, à proposer d'accueillir sur le sol européen un nombre supplémentaire de détenus de Guantanamo, notamment la douzaine d'hommes déclarés libérables qui ne peuvent retourner dans leurs pays d'origine;

10. rappelle également que les États‑Unis sont prêts à participer aux coûts occasionnés aux États membres par l'accueil des ex‑détenus, comme indiqué dans la déclaration conjointe UE–États-Unis du 15 juin 2009, et demande au gouvernement américain de faire face à ses responsabilités en aidant financièrement les anciens détenus, non seulement dans le cadre de leur réinstallation mais aussi par la suite;

11. charge son Président de transmettre la présente résolution au Président des États-Unis d'Amérique, au Congrès et au Sénat américains, au ministère américain des affaires étrangères, au Bureau des commissions militaires, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au Secrétaire général des Nations unies, au Haut représentant des Nations unies aux droits de l'homme, au président de l'Assemblée générale des Nations unies ainsi qu'aux gouvernements des États membres des Nations unies.